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Décisions | Chambre pénale de recours

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P/664/2022

ACPR/589/2022 du 24.08.2022 sur ONMMP/2166/2022 ( MP ) , REJETE

Descripteurs : PLAINTE PÉNALE;DÉLAI;EMPÊCHEMENT(EN GÉNÉRAL)
Normes : CPP.310.al1.letb; CP.217; CP.31; CPP.94

république et

canton de Genève

POUVOIR JUDICIAIRE

P/664/2022 ACPR/589/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du mercredi 24 août 2022

 

Entre

 

A______, domiciliée ______, comparant en personne,

recourante,

 

contre l'ordonnance de non-entrée en matière rendue le 23 juin 2022 par le Ministère public,

 

et

 

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6B, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565, 1211 Genève 3,

intimé.


Vu :

-          la plainte pénale déposée par-devant le Ministère public 11 janvier 2022 par A______ contre B______ pour violation d'une obligation d'entretien (art. 217 CP);

-          l'ordonnance de non-entrée en matière rendue par le Ministère public le 23 juin 2022, communiquée par pli simple;

-          le recours expédié le 5 juillet 2022 par A______ contre cette décision;

-          les sûretés en 900.- versées par elle;

-          le courrier de la précitée du 8 août 2022.

Attendu que :

-          dans sa plainte, A______ reproche au mis en cause de ne pas s'être acquitté des pensions dues pour les mois de juin, juillet et août 2020 en faveur de leurs trois enfants, conformément au jugement de divorce du 29 juin 2028;

-          dans son ordonnance querellée, le Ministère public constate que la plainte du 11 janvier 2022 était tardive, faute d'avoir été déposée dans les trois mois suivant la dernière omission coupable. Il existait donc un empêchement de procéder (art. 310 al. 1 let. b CPP);

-          dans son recours, A______ déclare "maintenir" sa plainte pénale, le mis en cause n'ayant pas payé les trois mois de pension. Ce dernier, bien qu'étant à l'Hospice général, avait voyagé à Pâques au Portugal et prévoyait de faire de même cet été. Elle l'avait dénoncé pour escroquerie au préjudice de cette institution. Sa situation personnelle difficile expliquait que sa plainte était "un peu tardive". Elle joignait à cet égard une attestation du 30 juin 2022 de la Dre C______, psychiatre, qui la suivait régulièrement depuis le 6 octobre 2020, à teneur de laquelle elle avait, "en fin d'année 2020 et pendant une période en 2021, en raison de ses troubles psychiques, [eu] des difficultés à gérer ses affaires administratives". Sa patiente était en outre en incapacité de travail du 7 décembre 2021 au 7 février 2022 et "ne connaissait pas bien ses droits pour faire recours contre une décision du tribunal";

-          dans son pli du 8 août 2022, la recourante demande que le mis en cause soit condamné à lui rembourser différents frais de poursuite et émoluments de justice qu'elle avait dû engager, y compris les sûretés en CHF 900.- versées pour la procédure de recours.

Considérant en droit que :

-          le recours est recevable pour avoir été déposé selon la forme et dans le délai prescrits – la décision attaquée ayant été communiquée par simple pli – (art. 385 al. 1 et 396 al. 1 CPP), concerner une ordonnance sujette à recours auprès de la Chambre de céans (art. 393 al. 1 let. a CPP) et émaner de la plaignante qui, partie à la procédure (art. 104 al. 1 let. b CPP), a qualité pour agir, ayant un intérêt juridiquement protégé à la modification ou à l'annulation de la décision querellée (art. 382 al. 1 CPP);

-          l'art. 217 al. 1 CP punit, sur plainte, celui qui n'aura pas fourni les aliments ou les subsides qu'il doit en vertu du droit de la famille, quoi qu'il en eût les moyens ou pût les avoir;

-          aux termes de l'art. 31 CP, le droit de porter plainte se prescrit par trois mois. Le délai court du jour où l'ayant droit a connu l'auteur de l'infraction;

-          l'observation du délai de plainte fixé à l'art. 31 CP est une condition d'exercice de l'action publique. L'absence de cette condition constitue un obstacle permanent et définitif à la poursuite de l'auteur (Y. JEANNERET / A. KUHN / C. PERRIER DEPEURSINGE (éds), Commentaire romand : Code de procédure pénale suisse, Bâle 2019, n. 11 et 12 ad art. 310);

-          la violation d'une obligation d'entretien constitue un délit continu. Le délai de prescription, et par analogie celui de la plainte pénale, ne commence à courir que le jour où les agissements coupables ont cessé. Si la violation de l'obligation d'entretien continue durant la procédure pénale, le dépôt d'une nouvelle plainte est nécessaire (M. DUPUIS/ L. MOREILLON/ C. PIGUET/ S. BERGER/ M. MAZOU/ V. RODIGARI (éds), Code pénal - Petit commentaire, 2e éd., Bâle 2017, n. 33 et 35 ad art. 217);

-          en l'occurrence, dans sa plainte, la recourante expose que le mis en cause ne lui a pas versé les contributions dues pour les mois de juin à août 2020;

-          en arrêtant la période pénale à août 2020, la recourante a donc considéré que l'exigibilité de la dernière créance remontait à cette date;

-          partant, il lui incombait de déposer plainte dans le délai de trois mois à compter de ce mois-là, sous peine de forclusion;

-          sa plainte, déposée le 11 janvier 2022, apparaît par conséquent tardive;

-          le délai institué par l'art. 31 CP est un délai de péremption (arrêt du Tribunal fédéral 6B_482/2008 du 26 août 2008 consid. 3.2 avec référence à l'ATF 97 IV 238 consid. 2), qui ne peut être ni suspendu, ni interrompu, ni prolongé;

-          le droit de porter plainte doit cependant être restitué lorsque l'ayant droit a été empêché d'observer le délai de trois mois sans qu'une faute ne lui soit imputable, ce que prévoit d'ailleurs l'art. 94 CPP (L. MOREILLON / A. MACALUSO / N. QUELOZ / N. DONGOIS (éds), Commentaire romand, Code pénal I, art. 1-110 CP, 2ème éd., Bâle 2021, n. 25 ad art. 31);

-          une restitution de délai ne peut intervenir que lorsqu'un événement, par exemple une maladie ou un accident, met la partie objectivement ou subjectivement dans l'impossibilité d'agir par elle-même ou de charger une tierce personne d'agir en son nom dans le délai (arrêts du Tribunal fédéral 6B_360/2013 du 3 octobre 2013 consid. 3.1; 6B_158/2012 du 27 juillet 2012 consid. 3.2 et les références citées). En d'autres termes, il faut comprendre, par empêchement non fautif, toute circonstance qui aurait empêché une partie consciencieuse d'agir dans le délai fixé (ACPR/196/2014 du 8 avril 2014);

-          en l'espèce, les difficultés de la recourante à gérer ses affaires administratives en raison de son état psychique ne sont survenues qu'"en fin d'année 2020", à teneur de l'attestation médicale produite. En outre, rien n'indique qu'elle n'aurait pas pu, le cas échéant, charger un tiers d'agir en son nom pour sauvegarder ses droits, étant précisé que le dépôt d'une plainte pénale – qui ne constitue pas l'exercice d'un "recours" qui eut nécessité, le cas échéant, qu'elle soit préalablement informée de ses droits – peut aussi s'effectuer oralement, par exemple en se rendant à un poste de police (art. 304 al. 1 CPP). La recourante ne prétend pas ne pas en avoir eu la faculté, entre fin août et fin novembre 2020;

-          aucune restitution de délai ne saurait dès lors entrer en ligne de compte;

-          la décision querellée, justifiée sous l'angle de l'art. 310 al. 1 let. b CPP, sera par conséquent confirmée, ce que la Chambre de céans pouvait constater d'emblée sans procéder à un échange d'écritures ou à des débats (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP);

-          la recourante, qui succombe, supportera les frais envers l'État (art. 428 al. 1 CPP), qui seront fixés en totalité à CHF 500.- (art. 3 cum art. 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP ; E 4 10.03).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA COUR :


Rejette le recours

Condamne A______ aux frais de la procédure de recours, qui seront arrêtés à CHF 500.-.

Dit que ce montant sera prélevé sur les sûretés versées et le solde, en CHF 400.-, restitué à la recourante.

Notifie le présent arrêt ce jour, en copie, à A______ et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Alix FRANCOTTE CONUS, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

P/664/2022

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

415.00

-

CHF

Total

CHF

500.00