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Décisions | Chambre pénale de recours

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PM/1037/2021

ACPR/454/2022 du 27.06.2022 sur JTPM/328/2022 ( TPM ) , IRRECEVABLE

Recours TF déposé le 29.08.2022, rendu le 23.05.2023, REJETE, 6B_1004/2022
Descripteurs : CONFISCATION(DROIT PÉNAL);COMPÉTENCE;ALLOCATION AU LÉSÉ;DÉCISION ÉTRANGÈRE;DÉCISION JUDICIAIRE ULTÉRIEURE INDÉPENDANTE;QUALITÉ POUR AGIR ET RECOURIR;DOMMAGE INDIRECT;DOMMAGES-INTÉRÊTS;AUTORITÉ ÉTRANGÈRE
Normes : CPP.363; LaCP.3; LaCP.36; CP.73; CPP.382; EIMP.74.leta
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

PM/1037/2021 ACPR/454/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre pénale de recours

Arrêt du lundi 27 juin 2022

Entre

 

A______, domicilié ______, Afrique du Sud, comparant par Me Robert FIECHTER, avocat, Des Gouttes & Associés, avenue de Champel 4, 1206 Genève,

recourant,

 

contre l’ordonnance rendue le 11 mai 2022 par le Tribunal d'application des peines et des mesures,

 

et

 

LE TRIBUNAL D'APPLICATION DES PEINES ET DES MESURES, rue des Chaudronniers 9, 1204 Genève - case postale 3715 - 1211 Genève 3,

LE MINISTÈRE PUBLIC de la République et canton de Genève, route de Chancy 6b, 1213 Petit-Lancy - case postale 3565 - 1211 Genève 3,

intimés.

 


EN FAIT :

A.           Par acte expédié le 23 mai 2022, A______ recourt contre l’ordonnance rendue par le Tribunal d'application des peines et des mesures (ci-après, TAPEM) le 11 précédent, notifié le 13 mai 2022, par laquelle sa demande d’allocation au lésé a été rejetée.

Il conclut principalement, en bref, à la « restitution » d’USD 7,6 millions et de CHF 1'700.-, sous réserve d’amplification.

Préalablement, il demande que la procédure de recours soit suspendue jusqu’à ce qu’il ait accès au dossier de la procédure pénale P/1______/2011 « par le biais de la CP/68/2021 » et qu’il ait obtenu une décision sur sa requête en exequatur déposée le 18 mai 2022 auprès du Tribunal civil de Genève.

B. Les faits pertinents pour l'issue du litige sont les suivants :

a.             Le 28 octobre 2011, la procédure pénale P/1______/2011 a été ouverte contre inconnu pour blanchiment d'argent (art. 305bis CP), après transmission par le Bureau de communication en matière de blanchiment d’argent MROS d’une communication de soupçon en lien avec un compte au nom de B______ Ltd ouvert à Genève en 2009, dont C______ était l'ayant droit économique.

L'activité du prénommé, à travers sa société D______, créée en Inde, laissait soupçonner un schéma d’escroquerie pyramidale (type « Ponzi »). C______ et D______ faisaient l'objet d'enquêtes dans plusieurs pays, notamment en Afrique du Sud.

b.             Le 31 mai 2012, après avoir procédé à des saisies bancaires, le Ministère public a adressé une commission rogatoire aux autorités sud-africaines, exposant que quelque USD 36 millions et EUR 370'000.- avaient transité sur le compte de B______ Ltd, dont plus de USD 7'270'000.- provenaient de l'Afrique du Sud. En particulier, plus de USD 4 millions provenaient de [la société] E______, dont l'ayant droit économique serait F______.

c.              En réponse, l’autorité sud-africaine compétente a répondu, le 5 août 2013, que F______, notamment, était poursuivie devant un tribunal de G______ [Afrique du Sud] pour infraction à la législation bancaire sud-africaine (« Banks Act »).

d.             Le 17 octobre 2016, le Ministère public a ordonné le classement de la poursuite et la confiscation des fonds saisis.

e.              Le 15 janvier 2018, les valeurs confisquées ont fait l’objet d’un partage entre la Confédération et le canton de Genève, en application de la loi fédérale sur le partage des valeurs patrimoniales confisquées (LVPC ; RS 312.4).

f.              Le 17 octobre 2019, A______, agissant en son propre nom, en tant que liquidateur ou agent de recouvrement (« Repayment Administrator ») mandaté depuis le 12 mars 2012 par un organe officiel sud-africain rattaché à la Banque centrale de la République d'Afrique du Sud, a adressé à l'Office fédéral de la justice (OFJ) une demande d'entraide (à laquelle le « National Director of Public Prosecutions » d’Afrique du Sud donnera son nihil obstat, le 21 suivant) tendant au paiement à lui-même des avoirs confisqués en Suisse, ainsi qu'à l'accès au dossier de l’affaire D______, y compris à la documentation bancaire du compte de B______ Ltd ou en lien avec C______.

g.             Le 18 juin 2020, A______, sur requête de l’OFJ, a transmis des pièces supplémentaires, à savoir les documents suivants, chacun dépourvu d’en-tête : une liste de « cas » enregistrés auprès des services de police sud-africains [recte : de membres de commissariats de police désignés comme « suspects » d’avoir reçu des dépôts d’argent en contravention à la loi nationale sur les banques] ; une liste d’« investisseurs » spoliés, au 18 juin 2020 [constituée de noms et d’adresses, sans mention chiffrée d’investissement ou de dommage] ; une liste de « victimes » potentielles, retrouvée lors d'une perquisition exécutée à une date inconnue [liste constituée de noms et d’adresses, sans mention chiffrée d’investissement ni de dommage, mais avec des rangs tels qu’ambassadeur, président, platine, diamant ] ; ainsi qu'un tableau nominatif chiffré, non signé et non daté, qui récapitulerait des « inspections » menées par un inspecteur indéterminé, sur demande de la Banque centrale d’Afrique du Sud.

h.             Le 3 février 2021, l’OFJ a informé A______ que la commission rogatoire internationale était déléguée au Ministère public de Genève pour ce qui touchait à la documentation ; pour le surplus, la remise de fonds déjà confisqués en Suisse n'était pas possible par la voie de l'entraide, mais une procédure postérieure au jugement demeurait possible.

i.a. Le 30 septembre 2021, A______ a saisi le TAPEM d'une requête en restitution des valeurs confisquées, subsidiairement en allocation au lésé. Il s’est à nouveau légitimé comme liquidateur ou agent de recouvrement mandaté par un organe officiel sud-africain rattaché à la Banque centrale de la République d'Afrique du Sud, qu’il assimile (ch. 21) à l’Autorité suisse de surveillance des marchés financiers (FINMA).

À l’appui de sa requête, il expliquait qu’environ 600'000 Sud-africains avaient été spoliés par F______, C______ et d’autres, lesquels avaient collecté dans le cadre de l'affaire D______ des dépôts de « membres du public » sans disposer de licence bancaire. Les auteurs de cette « fraude internationale » avaient eu recours à des sociétés, ainsi qu’à des tiers pour encaisser l’équivalent de CHF 165.- par « victime ». Une partie des dépôts collectés illégalement par F______ et les autres contrevenants au Banks Act – correspondant aux dépôts effectués par environ 29'000 Sud-africains – avait été transférée en Suisse sur le compte de B______ Ltd.

Sur la base, notamment, des annexes à la commission rogatoire décernée le 31 mai 2012 par le Ministère public, les transferts sur ce compte en provenance d'Afrique du Sud, par le débit de comptes utilisés par les participants à la « fraude » D______, avaient été identifiés et totalisaient USD 7'651'577.05 et CHF 1'702.-, qu’il convenait de restituer, respectivement d’allouer.

F______, ainsi que deux sociétés liées à elle, E______ et H______ (Pty) Ltd, faisaient l'objet d'une procédure pénale en Afrique du Sud, conduite par la « National Prosecuting Authority » pour violation du Banks Act.

Il n’existait pas à ce jour de décision entrée en force en lien avec lesdites poursuites pénales. Seules, deux décisions civiles avaient été rendues en 2012, confirmant que le liquidateur était habilité à saisir les avoirs de F______ et de ses sociétés. Quant à C______, une procédure pénale était en cours contre lui, dans le cadre de laquelle il devrait être extradé en Afrique du Sud.

i.b.A______ a produit un document daté du 28 septembre 2021 (pièce n° 11), rendu sur sa requête ex parte et intitulé projet d’ordonnance (« Draft Order », étant précisé que le premier mot est biffé), émanant apparemment de la « High Court of South Africa », signé par le greffier (« Registrar ») et intitulé « Application for declaratory relief confirming duties as Repayment Administrator ».

Selon lui, ce document le mandaterait pour agir au nom de toutes les personnes auprès desquelles les contrevenants présumés au Banks Act, tels que répertoriés dans les annexes audit document, ont obtenu illégalement de l'argent, dans toute procédure relative au remboursement de cet argent et pour gérer et contrôler le remboursement des valeurs obtenues illégalement. Il était également habilité à recouvrer et prendre possession de tous les actifs des contrevenants susmentionnés. Par ailleurs, le document rappelait que ces derniers avaient été dûment invités à rembourser toutes les sommes qu’ils avaient obtenues illégalement et avaient eu l’opportunité d'être entendues.

Sa mission était de gérer et de contrôler le remboursement de fonds obtenus en contravention aux dispositions du Banks Act. Il incombait notamment au « Repayment Administrator » de mener toute enquête nécessaire sur les affaires de la personne faisant l'objet de la directive que l'administrateur du remboursement jugerait nécessaire pour déterminer le montant de l'argent obtenu illégalement, l'identité de toutes les personnes de qui cet argent a été obtenu, l'endroit où cet argent ou les actifs en lesquels cet argent avait été converti étaient conservés ou localisés, ainsi que de prendre toute mesure raisonnable pouvant servir à accélérer et à assurer le remboursement de l'argent conformément aux exigences et dans le délai spécifié "une directive".

j. Par ordonnance du 20 décembre 2021, le Ministère public a déclaré partiellement admissible la demande d'entraide du 17 octobre 2019 (procédure CP/68/2021), en tant qu'elle concerne la documentation et l'accès au dossier, et a autorisé A______ à consulter la procédure P/1______/2011, moyennant l’engagement de ne pas utiliser les faits relevant du domaine secret avant la clôture formelle de l'entraide.

k. Par observations du 27 janvier 2022, le Ministère public a conclu à l'irrecevabilité de la requête de A______ au TAPEM.

l. Après avoir consulté les pièces annexées aux observations du Ministère public, A______, soit pour lui son conseil, s’est plaint de n’avoir pas été en mesure d'exercer correctement son droit d'être entendu. Il a requis la suspension de la cause jusqu'à la clôture de la procédure d'entraide, jusqu'à l'exequatur en Suisse – qu’il allait entreprendre – de la décision du 28 septembre 2021, ainsi que jusqu'à l'obtention d'un accès complet à la procédure P/1______/2011 et à la transmission des informations requises à la République d'Afrique du Sud. Subsidiairement, il demandait un délai supplémentaire pour compléter sa requête après la clôture de l'entraide.

m. Le Ministère public s'est opposé à la suspension et a maintenu ses conclusions.

n. Le 27 avril 2022, A______ a affirmé défendre, au bénéfice de dispositions légales sud-africaines qui trouvaient leur pendant en Suisse dans les textes régissant la FINMA, tant les intérêts privés des lésés que « les intérêts directs des autorités sud-africaines » [mise en évidence typographique par lui-même], soit le maintien de la stabilité financière et la protection des administrés contre les abus.

C. Dans la décision querellée, le TAPEM fonde sa compétence sur les art. 363 CPP, 3 let. x et y LaCP et 36 LaCP. A______ ne pouvait pas se prévaloir de la qualité de partie au sens de l’art. 104 al. 2 CPP, disposition qui ne s’appliquait qu’aux autorités suisses ; il n’était pas non plus directement lésé (ni l’entité qui l’avait nommé). Savoir s’il représentait ex lege les lésés directs n’avait pas à être résolu, car le nombre de ceux-ci n’était pas connu, mais seulement estimé ; et l’on ignorait combien précisément avaient versé ceux dont il donnait les noms. La trace documentaire (« paper trail ») de leurs apports jusqu’en Suisse n’était pas « évidente ». La décision du 28 septembre 2021, qui n’avait pas été rendue au terme d’une procédure contradictoire, mais ex parte, n’était pas une décision condamnatoire rendue en faveur de A______.

D. a. Dans son recours, A______ reprend, en substance, les faits et arguments de sa requête et de sa correspondance avec le TAPEM.

b. À réception, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT :

1.             Le TAPEM a statué en appliquant, sans les distinguer, les let. x et let. y de l’art. 3 LaCP.

Ces dispositions règlent la procédure de restitution au lésé ou de remise au tiers (let. x), ainsi que d’allocation au lésé (let. y), de valeurs patrimoniales confisquées dans le cadre d’une procédure pénale, lorsque ces mesures n'ont pas été ordonnées dans le jugement, l'ordonnance pénale ou l'ordonnance de confiscation (art. 70 al. 4, 2e phrase, et 73 al. 3 CP).

En l’espèce, une confiscation ayant été ordonnée avec le classement rendu le 17 octobre 2016 (cf. art. 320 al. 2, 2e phrase, CPP) – et étant entrée en force–, seul l’art. 73 al. 1 let. b CP permet, à titre subsidiaire, l’allocation au lésé (ATF
145 IV 237 consid. 3.3 p. 244).

Le TAPEM a, ainsi, rendu une décision judiciaire ultérieure indépendante, au sens de l'art. 363 CPP, sujette à recours, au sens de l'art. 393 al. 1 let. b CPP (ACPR/315/2021 du 12 mai 2021 consid. 1.1.3.).

2.             Les conclusions préalables du recours n’ont pas d’objet, au vu des considérations qui suivent.

3.             Le recourant prétend agir ex lege au nom des lésés sud-africains.

3.1.       Aux termes de l'art. 104 al. 1 CPP, ont qualité de partie le prévenu (let. a), la partie plaignante (let. b) et le ministère public, lors des débats ou dans la procédure de recours (let. c). D'après l'art. 105 al. 1 let. f CPP, participent également à la procédure les tiers touchés par des actes de procédures. L'art. 105 al. 2 CPP précise, en outre, que lorsque des participants à la procédure visés à l'alinéa premier de cette même disposition sont directement touchés dans leurs droits, la qualité de partie leur est reconnue dans la mesure nécessaire à la sauvegarde de leurs intérêts. Selon l’art. 382 al. 1 CPP, toute partie qui a un intérêt juridiquement protégé à l’annulation ou à la modification d’une décision a qualité pour recourir. L'intérêt doit être actuel et pratique.

Il existe un intérêt juridiquement protégé lorsque le recourant est touché directement et immédiatement dans ses droits propres, ce qui n'est pas le cas lorsqu'il est touché par un simple effet réflexe. L'intérêt juridiquement protégé se distingue de l'intérêt digne de protection, qui n'est pas nécessairement un intérêt juridique, mais peut être un intérêt de fait. Un simple intérêt de fait ne suffit pas à conférer la qualité pour recourir. Le recourant doit ainsi établir que la décision attaquée viole une règle de droit qui a pour but de protéger ses intérêts et qu'il peut, en conséquence, en déduire un droit subjectif. La violation d'un intérêt relevant d'un autre sujet de droit est insuffisante pour créer la qualité pour recourir (ATF 145 IV 161 consid. 3.1).

La notion de partie – énoncée à l'art. 382 CPP – doit notamment être comprise au sens de l'art. 105 CPP (ATF 145 IV 161 consid. 3.1; 139 IV 78 consid. 3.1). Pour que le participant à la procédure se voit reconnaître la qualité de partie en application de l'art. 105 al. 2 CPP, il faut que l'atteinte à ses droits soit directe, immédiate et personnelle, une atteinte de fait ou indirecte étant insuffisante (ATF 145 IV 161 consid. 3.1).

Une partie qui n'est pas concrètement lésée par la décision ne possède pas la qualité pour recourir, et son recours est irrecevable (ATF 144 IV 81 consid. 2.3.1 = SJ 2018 I 421; arrêt du Tribunal fédéral 6B_818/2018 du 4 octobre 2018 consid. 2.1).

3.2.       On entend par lésé au sens de l'art. 73 CP toute personne privée, physique ou morale, qui a subi un préjudice du fait d'une infraction pénale. Sous cet angle, la qualité de lésé se conçoit de façon plus large que dans le cadre des art. 30 CP et 115 CPP. Elle vise non seulement le lésé défini en tant que titulaire du bien juridique atteint par l'infraction, mais aussi, plus généralement, tout tiers titulaire, sur le plan civil, d'une créance en réparation du préjudice subi (ATF 145 IV 237 consid. 5.1 p. 246). La qualité de lésé au sens de l'art. 73 CP revient avant tout au lésé direct qui dispose d'une créance en dommages-intérêts fondée sur l'art. 41 CO. Dans le cas d'une allocation envisagée en lien avec une mesure de confiscation de valeurs patrimoniales (art. 73 al. 1 let. b CP cum art. 70 CP), l'allocation est aussi concevable, au-delà de la lettre de l'art. 73 CP, en faveur du lésé par ricochet (« Reflexgeschädigter ») qui a lui-même supporté le dommage du lésé direct. La jurisprudence souligne en effet que la confiscation n'a pas pour but d'enrichir l'État aux dépens, non seulement du lésé direct, mais aussi du lésé indirect (ATF
145 IV 237 consid. 5.1.1 p. 246). L’assurance ayant indemnisé le lésé peut donc prétendre à son tour à l’allocation prévue par l’art. 73 al. 1 let. b CP, lorsque l’infraction ayant donné lieu à la confiscation est dirigée contre des intérêts individuels (ATF 145 IV 237 consid. 5.1.2 p. 248).

3.3.       À la lumière de ces principes, il saute aux yeux que le recourant, qui revendique expressément agir au nom et pour le compte d’une autorité administrative bancaire d’Afrique du Sud, voire de la banque centrale de cet État, qu’il assimile à l’équivalent de la FINMA en Suisse, n’est pas – et n'a jamais été – lésé directement par les infractions qui ont conduit les autorités pénales suisses à engager la procédure P/1______/2011 et à saisir, puis à confisquer, dans ce cadre les fonds dont il demande l’allocation.

Le recourant ne prétend pas davantage que lui ou l’autorité dont il tire son mandat auraient, à la manière d’une assurance de dommages, indemnisé les lésés (directs) en Afrique du Sud. Au contraire, il se propose de recevoir, lui, les fonds confisqués en Suisse pour les répartir ensuite au profit de ceux-ci. Il concède d’ailleurs agir pour la défense des « intérêts directs des autorités sud-africaines ».

En outre, il n’établit pas de subrogation légale en sa faveur (ou en faveur de l’organe étatique étranger qui l’a mandaté).

Sa tâche a pour fondement des violations répétées à la législation bancaire d’Afrique du Sud. Il n’y est question nulle part d’infractions au préjudice d’intérêts individuels ou d’indemnisation des victimes, pas même au titre de lésés d’actes de blanchiment d’argent ; ni même que celles-ci lui auraient cédé leurs droits en vue de recouvrement. Il n’y est nulle part question, non plus, que les autorités sud-africaines auraient été directement atteintes dans leur patrimoine par les actes qui ont donné lieu à l’ouverture de poursuites pénales en Suisse. La pyramide de Ponzi, telle qu’elle est alléguée, n’a pas touché la Banque centrale d’Afrique du Sud, ni n’avait ce but.

La décision du 28 septembre 2021 avec ses annexes, dont le recourant fait grand cas, ne dispose pas que la loi sud-africaine (le Banks Act) instituait une subrogation légale des droits des lésés directs en faveur du « Repayment Administrator ». L’art. 84 du Banks Act habilite celui-ci à prendre des mesures qui peuvent servir à accélérer et assurer le remboursement de l’argent obtenu par celui qui s’est livré sans droit à l’exercice d’une activité bancaire (let. b). En tant que cette disposition et l’activité attendue du recourant viseraient à éviter que le crime ne paie, force serait de constater que la confiscation pénale prononcée en Suisse a atteint cet objectif.

Le parallèle que le recourant voudrait tirer entre ses attributions de liquidateur et celles de la FINMA tombe à faux. La FINMA possède des compétences propres de confiscation dans le cadre de la surveillance administrative qu’elle exerce (cf. art. 35 LFINMA ; RS 956.1) ; elle a d’autant moins vocation à intervenir au pénal pour récupérer des sommes déjà confisquées par le juge que, précisément, la décision de celui-ci prime si une infraction pénale est simultanément réalisée (art. 35 al. 5 LFINMA), comme par exemple l’exercice d’une activité bancaire sans autorisation, reconnaissance, agrément ou enregistrement, au sens de l’art. 44 LFINMA (BSK FINMAG - BÖSCH, 3e éd. 2019, n. 31 ad art. 35). Or, tel est exactement le cas, à suivre le recourant, de l’accusation formulée en Afrique du Sud contre les deux ayants droit économiques identifiés en Suisse dans le cadre de la procédure P/1______/2011.

Il y a d’autant moins lieu de conférer au recourant la qualité pour agir en application par analogie de l’art. 104 al. 2 CPP, comme il le prône, que la voie procédurale à suivre, pour une autorité – pénale – étrangère, est celle de l’art. 74a al. 1 EIMP (RS 351.1), laquelle prévoit en toutes lettres la restitution du produit de l’infraction à l’ayant droit. Que le partage intervenu en 2018 par application de la LVPC l’empêche apparemment désormais d’agir par cette voie n’est pas une raison suffisante pour étendre à son cas la qualité pour agir en matière de procédures postérieures au jugement, au sens de l’art. 363 CPP ; pour ce qui le concerne, ces procédures ne sont pas subsidiaires ou alternatives aux règles de l’entraide pénale internationale.

À cet égard, n’est pas recevable son objection selon laquelle la République d’Afrique du Sud n’aurait pas su que des valeurs patrimoniales avaient été saisies, puis confisquées en Suisse. Les autorités étrangères concernées ne peuvent pas sérieusement prétendre avoir ignoré l’existence de la procédure pénale helvétique et la saisie concomitante d’avoirs présumés d’origine criminelle : en mai 2012, le Ministère public leur décernait une commission rogatoire internationale qui détaillait les faits susceptibles de constituer le blanchiment en Suisse de fonds collectés illégalement en Afrique du Sud. Or, le recourant expose avoir été nommé liquidateur en mars 2012 déjà et avoir aidé à répondre en août 2013, en cette qualité, à la mission d’entraide.

4.             Faute de qualité du « Repayment Administrator » pour recourir contre l’ordonnance du TAPEM du 11 mai 2022, le recours s'avère irrecevable et pouvait, comme tel, être traité d'emblée sans échange d'écritures ni débats (art. 390 al. 2 et 5 a contrario CPP).

5.             Le recourant, qui succombe, supportera les frais envers l'État, qui seront fixés en totalité à CHF 1'500.- (art. 428 al. 1 CPP et 13 al. 1 du Règlement fixant le tarif des frais en matière pénale, RTFMP; E 4 10.03).

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA COUR :

 

Déclare le recours irrecevable.

Condamne A______ aux frais de l’instance, arrêtés à CHF 1'500.-.

Notifie la présente décision ce jour, en copie, au recourant (soit, pour lui, son conseil), au Tribunal d’application des peines et mesures et au Ministère public.

Siégeant :

Madame Corinne CHAPPUIS BUGNON, présidente; Monsieur Christian COQUOZ et Madame Daniela CHIABUDINI, juges; Monsieur Xavier VALDES, greffier.

 

Le greffier :

Xavier VALDES

 

La présidente :

Corinne CHAPPUIS BUGNON

 

 

 

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le Tribunal fédéral connaît, comme juridiction ordinaire de recours, des recours en matière pénale au sens de l'art. 78 de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); la qualité et les autres conditions pour interjeter recours sont déterminées par les art. 78 à 81 et 90 ss LTF. Le recours doit être formé dans les trente jours qui suivent la notification de l'expédition complète de l'arrêt attaqué.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14. Les mémoires doivent être remis au plus tard le dernier jour du délai, soit au Tribunal fédéral soit, à l'attention de ce dernier, à La Poste Suisse ou à une représentation diplomatique ou consulaire suisse (art. 48 al. 1 LTF).

 

 

 

PM/1037/2021

ÉTAT DE FRAIS

 

 

 

 


COUR DE JUSTICE

 

 

 

Selon le règlement du 22 décembre 2010 fixant le tarif des frais en matière pénale (E 4 10.03).

 

Débours (art. 2)

 

 

- frais postaux

CHF

10.00

Émoluments généraux (art. 4)

 

 

- délivrance de copies (let. a)

CHF

- délivrance de copies (let. b)

CHF

- état de frais (let. h)

CHF

75.00

Émoluments de la Chambre pénale de recours (art. 13)

 

 

- décision sur recours (let. c)

CHF

1'415.00

-

CHF

Total

CHF

1'500.00