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Décisions | Chambre de surveillance en matière de poursuite et faillites

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A/3700/2020

DCSO/264/2021 du 24.06.2021 ( PLAINT ) , PARTIELMNT ADMIS

Descripteurs : frais de poursuite; facturation
Normes : lp.68; oelp.9; oelp.24; oelp.5
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3700/2020-CS DCSO/264/21

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance
des Offices des poursuites et faillites

DU JEUDI 24 JUIN 2021

 

Plainte 17 LP (A/3700/2020-CS) formée en date du 16 novembre 2020 par la A______.

 

* * * * *

 

Décision communiquée par courrier A à l'Office concerné et par plis recommandés du greffier du à :

-       A______

Rue ______

Case postale ______

______ [GE].

- Office cantonal des poursuites.

 

 


EN FAIT

A. Le 31 octobre 2020, l'Office cantonal des poursuites (ci-après : l'Office) a adressé à la A______ (ci-après : la A______), qui l'a reçue le 6 novembre 2020, une facture n° 1______ d'un montant total de 12'017 fr. 87 correspondant aux émoluments et frais encourus dans de nombreuses poursuites diligentées par cette dernière.

B. a. Par acte adressé le 16 novembre 2020 à la Chambre de surveillance, la A______ a formé une plainte au sens de l'art. 17 LP contre cette facture, concluant à son annulation et à ce qu'il soit ordonné à l'Office d'en établir une nouvelle tenant compte de ses critiques.

A l'appui de sa plainte, elle a soulevé les griefs suivants :

Les débours facturés en relation avec l'expédition par pli recommandé devaient être facturés au coût effectif de 5 fr. 10, conformément à la jurisprudence de la CSO, et non pas à 5 fr. 30.

Par ailleurs, s'agissant du débiteur B______, l'Office avait établi neuf procès-verbaux de non-lieu de saisie (ci-après : PVN) de quatre pages chacun, en y regroupant, dans une série, les poursuites requises par tous les créanciers. Or, ce procédé était contestable dès lors que la communication d'un PVN ne faisait pas courir de délai de participation. L'Office avait facturé à la A______ 191 fr. 70 (9 x [16 fr. + 5 fr. 30]), au lieu de 37 fr. 10 pour un seul PVN de quatre pages à 32 fr. (4 x 8 fr.) plus 5 fr. 10 de frais du pli recommandé.

Il en avait été de même pour le débiteur C______ SARL.

Concernant le débiteur D______, l'Office avait adressé à la A______ neuf procès-verbaux de saisie, série n° 2______, soit un exemplaire par poursuite, ce qui n'était pas nécessaire, un seul procès-verbal de saisie étant suffisant. De plus, le procès-verbal de saisie ne devait pas excéder quatre pages.

b. Pour l'Office, dans la mesure où la A______ avait reçu en date des 14 et
26 octobre 2020 les neuf PVN dans la série n° 3______ et les neuf procès-verbaux de saisie dans la série 2______, la plainte déposée le
16 novembre 2020 était tardive.

Concernant la facturation des plis recommandés, l'Office a indiqué qu'il avait reconsidéré sa décision et réduit leur coût à 5 fr. 10 par envoi, soit le coût effectif. Il avait envoyé à la plaignante une note de crédit de 17 fr. 20. L'Office a signalé à cet égard qu'à compter du 1er janvier 2021, il ne bénéficierait plus du rabais commercial qui lui avait été accordé.

Concernant l'envoi de neuf PVN dans la série n° 2______, l'Office a admis que dans chaque procès-verbal établi par poursuite, il avait mentionné toutes les poursuites participantes, de sorte que le document faisait quatre pages au lieu de deux. Toutefois, l'Office n'avait facturé que le prix d'un PVN de
deux pages (9 x 16 fr. = 144 fr.), de sorte que la plaignante ne subissait aucun préjudice à ce titre.

Enfin, la facturation des neuf procès-verbaux de saisie dans la série
n° 2______, au prix de 64 fr. par procès-verbal (8 pages à 8 fr.), était correcte.

c. La A______ et l'Office ont persisté dans leurs conclusions par écritures des 14 et 23 décembre 2020, respectivement des 15 janvier et 27 janvier 2021. La cause a ensuite été gardée à juger.

EN DROIT

1. 1.1 La Chambre de surveillance est compétente pour statuer sur les plaintes formées en application de la LP (art. 13 LP; art. 125 et 126 al. 2 let. c LOJ; art. 6 al. 1 et 3 et 7 al. 1 LaLP) contre des mesures prises par l'Office qui ne peuvent être attaquées par la voie judiciaire (art. 17 al. 1 LP).

A qualité pour former une plainte toute personne lésée ou exposée à l'être dans ses intérêts juridiquement protégés, ou tout au moins touchée dans ses intérêts de fait, par une décision ou une mesure de l'office (ATF 138 III 628 consid. 4; 138 III 219 consid. 2.3; 129 III 595 consid. 3; 120 III 42 consid. 3).

La plainte doit être déposée, sous forme écrite et motivée (art. 9 al. 1 et 2 LaLP; art. 65 al. 1 et 2 LPA, applicable par renvoi de l'art. 9 al. 4 LaLP), dans les
dix jours de celui où le plaignant a eu connaissance de la mesure (art. 17 al. 2 LP).

1.2 En l'occurrence, la plainte, écrite et motivée, est dirigée par une personne lésée dans ses intérêts juridiquement protégés contre des mesures de l'Office - soit des décisions arrêtant les frais facturés au créancier - susceptibles d'être contestées par cette voie (art. 2 OELP; ATF 103 III 44 consid. 1).

La plaignante allègue, sans être contredite, avoir reçu la facture querellée le
6 novembre 2020, de sorte que la plainte expédiée le 16 novembre 2020 a été déposée en temps utile. Elle est ainsi recevable. C'est d'ailleurs bien à réception de la facture que le délai pour former plainte contre les émoluments et débours comptabilisés a commencé à courir.

2. 2.1 Aux termes de l'art. 17 al. 4 LP, en cas de plainte, l'Office peut, jusqu'à l'envoi de sa réponse, procéder à un nouvel examen de la décision attaquée. S'il prend une nouvelle mesure, il la notifie sans délai aux parties et en donne connaissance à l'autorité de surveillance.

2.2 En l'espèce, l'Office a réduit de 20 cts le montant mis à la charge de la plaignante au titre de débours pour l'envoi de plis recommandés listés dans la facture. Il a ensuite communiqué une note de crédit à la plaignante, de 17 fr. 20, laquelle rectifie le montant de la facture. Sur ce point, la plainte est ainsi devenue sans objet, la décision de l'Office faisait droit aux conclusions de la plaignante à cet égard.

3. 3.1.1 Aux termes de l'art. 34 LP, les communications des offices se font par écrit; elles sont effectuées par lettre recommandée ou par remise directe contre reçu, à moins que la loi n'en dispose autrement.

La communication doit être distinguée de la notification, au sens des articles 64 ss LP, qui ne concerne que le commandement de payer et la commination de faillite (Erard, CR LP, 1ère édition, n° 1 ad art. 34 LP). Toutes les autres décisions sont communiquées.

La communication par lettre recommandée est régie par la législation postale.

3.1.2 Selon l'art. 68 LP, les frais de poursuite sont à la charge du débiteur mais le créancier poursuivant doit en faire l'avance. L'Office peut - mais n'en a pas l'obligation - différer toute obligation dont les frais n'ont pas été avancés. Le créancier peut prélever les frais sur les premiers versements du débiteur.

Il résulte de cette disposition que, par rapport à l'Office, c'est le créancier poursuivant qui est responsable du paiement, au titre d'avance, des frais de poursuite, et non le débiteur (ATF 39 I 508; cf. notamment DCSO/597/2017 du
9 novembre 2017). Selon le résultat de la poursuite, cette avance pourra s'avérer provisoire (lorsque les frais peuvent être prélevés sur les paiements du débiteur ou le produit de la réalisation) ou définitive (lorsque la poursuite ne va pas à son terme ou que le produit de réalisation ne permet pas de couvrir les frais de poursuite).

L'avance des frais de poursuite est due par le créancier même si, dans un premier temps, l'Office renonce à différer l'opération requise jusqu'au versement de l'avance des frais par le créancier poursuivant. Dans une telle hypothèse, et à moins que les frais ne puissent être remboursés par prélèvement sur les paiements effectués par le débiteur ou le produit de la réalisation, l'Office devra en réclamer le paiement au créancier poursuivant, au besoin par une poursuite (ATF 62 III 14).

3.1.3 Les frais de poursuite, au sens de l'art. 68 LP, comprennent les frais, débours, émoluments et indemnités fixés au cours de la procédure d'exécution forcée par les autorités de poursuite, les tribunaux et les autres organes de l'exécution forcée en vertu de l'Ordonnance sur les émoluments perçus en application de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite (RS 281.35; ci-après : OELP; ATF 119 III 63 cons. 4a).

3.1.4 Les émoluments sont calculés en fonction de la durée de l'opération, ou du nombre de pages ou encore selon le montant de la créance (cf. art. 4 à 6 OELP). Certains actes font l'objet d'une tarification spéciale, à l'instar du commandement de payer, dont l'émolument est fixé en fonction du montant de la créance (art. 16 OELP).

Lorsque l'émolument est calculé d'après le nombre de pages d'un document, toute fraction de page compte pour une page (art. 5 al. 1 OELP). Les pages qui ne contiennent que des textes types, tels que des textes de loi et des explications, ne sont pas prises en compte (art. 5 al. 2 OELP). Ce second alinéa a été adopté en raison des prévisions portant sur un emploi généralisé des moyens informatiques dans le cadre de la procédure d'exécution forcée. Ainsi, les pages reprises directement et sans traitement des modèles électroniques, indépendantes du cas concret de la poursuite considérée, ne peuvent être prises en considération lors de la facturation en raison de l'absence de charge de travail pour l'office (Adam, Commentaire LP - OELP, n° 3 ad art. 5 OELP).

Un émolument général de 8 fr. par page (pour des documents jusqu'à 20 pages) est prévu à l'art. 9 al. 1 let. a OELP. Il est prélevé peu importe que les pièces soient rédigées sur des feuilles blanches, consistent en formulaires ou soient créées au moyen de photocopies (Adam, Commentaire LP - OELP, n° 1 ad art. 9 OELP).

Selon l'art. 24 OELP, l'émolument pour la copie du procès-verbal de saisie (art. 112 LP) ou du complément de saisie (art. 113 LP) est fixé selon l'art. 9 al. 1 OELP.

3.2 La plaignante reproche à l'Office - dans le cadre des poursuites dirigées contre B______ et C______ SARL - d'avoir établi des PVN qui mentionnent (en pages 2 et 3) toutes les poursuites participantes, regroupées en série. Ce procédé serait contraire à la jurisprudence de la Chambre de céans et conduirait à l'établissement de PVN de quatre pages, au lieu de PVN de deux pages.

Quand bien même la critique de la plaignante est fondée, dès lors que la création d'une série au sens de l'art. 110 LP n'est pas envisageable en cas de non-lieu de saisie (cf. DCSO/106/2020 consid. 3.3.1), force est de constater que l'Office a établi un PVN pour chaque poursuite ayant abouti à un non-lieu de saisie, ce qui est correct. La conclusion de la plaignante tendant à ce qu'un seul PVN par série lui soit facturé, en contradiction avec le grief soulevé selon lequel il n'y a pas de série en cas de non-lieu de saisie, doit donc être rejetée.

Pour ce qui est de la facturation de chaque PVN, l'Office n'a prélevé en l'espèce qu'un émolument de 16 fr., soit le coût d'un document de deux pages. Il n'a ainsi pas facturé à la plaignante les deux pages supplémentaires qui mentionnent toutes les poursuites participantes.

Partant, le mode de facturation de l'Office ne lèse pas les intérêts de la plaignante, de sorte que sur ce point la plainte est infondée.

3.3.1 La plaignante conteste la facturation de neuf procès-verbaux de saisie dans la série n° 2______, concernant des poursuites dirigées contre D______. Elle fait valoir que l'Office n'aurait dû lui notifier et donc facturer qu'un seul procès-verbal de saisie pour la série considérée.

Or, c'est à raison que l'Office a établi un exemplaire du procès-verbal de saisie pour chacune des poursuites participantes, qu'il a communiqué aux créanciers
(cf. BSK SchKG, n° 14 ad art. 112 LP). En effet, conformément au formulaire prescrit par le service de Haute surveillance en matière LP (cf. art. 1 OForm), la première page du procès-verbal de saisie mentionne (en haut à droite) la poursuite pour laquelle le document est établi, les autres poursuites de la série étant indiquées dans les pages suivantes. L'existence d'un procès-verbal de saisie propre à chaque poursuite est du reste nécessaire, dans la mesure où ce document peut, lorsque les biens saisissables sont insuffisants d'après l'estimation, tenir lieu d'acte de défaut de biens provisoire - dans la poursuite considérée - et conférer ainsi au créancier le droit notamment de requérir un séquestre (cf. art. 115 al. 2 LP).

Ce premier grief est ainsi mal fondé.

3.3.2 La plaignante, qui ne critique pas le montant de 8 fr. par page facturé par l'Office (art. 24 OELP cum art. 9 al. 1 OELP), soutient en outre que le procès-verbal de saisie dont la facturation est contestée n'aurait pas dû excéder quatre pages, au lieu de huit, à savoir la première page avec les indications générales, une page pour la liste des créanciers participants, une page pour l'exécution et une page pour le minimum vital.

Or, dans la mesure où le procès-verbal de saisie doit présenter toutes les poursuites participant à la saisie, c'est à bon droit que l'Office a fait figurer ces informations sur autant de pages que nécessaires, conformément à l'Instruction n° 3 du Service de Haute surveillance LP (commandement de payer 2016 et autres formulaires; chiffre 30), qui fait expressément référence à "une ou plusieurs pages présentant sous forme de tableau toutes les poursuites participant à la saisie".

Enfin, ni la taille des caractères d'imprimerie employés, ni la présentation générale du document ne prêtent le flanc à la critique, exception faite pour la date et la signature du collaborateur de l'Office au pied du calcul du minimum vital, qui figure seule sur une page séparée, ce qui n'était pas nécessaire. La Chambre de céans a en effet déjà observé que les documents pour lesquels des émoluments sont prélevés doivent être conçus, aussi du point de vue graphique (police, espaces, etc.), pour éviter la perception d'émoluments plus élevés que nécessaire. Aussi, dans le cas d'espèce, ce sont sept pages par procès-verbal de saisie qui peuvent être facturés au lieu de huit pages, soit une différence de 72 fr.

Dans cette mesure très limitée, la plainte sera admise et l'Office invité à rectifier la facture litigieuse.

4. En résumé, la plainte est devenue sans objet en cours de procédure en tant qu'elle porte sur les frais postaux relatifs aux envois par pli recommandé. Elle est très partiellement admise en tant qu'elle porte sur la facturation des procès-verbaux de saisie dans la série n° 2______, en ce sens que la facture attaquée doit être réduite de 72 fr. (facturation des neuf procès-verbaux de saisie à 56 fr, chacun
[7 pages à 8 fr.] au lieu de 64 fr. [8 pages à 8 fr.] soit 504 fr. au lieu de 576 fr.). La plainte est rejetée pour le surplus.

5. La procédure de plainte est gratuite et il ne peut être alloué de dépens (art. 20 a LP ; art. 61 al. 2 let. a et art. 62 al. 2 OELP).

 

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevable la plainte formée le 16 novembre 2020 par la A______ contre la facture n° 1______ établie le 31 octobre 2020 par l'Office cantonal des poursuites.

Au fond :

Constate qu'elle est devenue sans objet en tant qu'elle porte sur les frais postaux relatifs aux envois par pli recommandé.

L'admet très partiellement en tant qu'elle porte sur la facturation des procès-verbaux de saisie dans la série n° 2______.

Invite en conséquence l'Office cantonal des poursuites à modifier la facture dans le sens du consid. 3.3.2 de la présente décision.

Rejette la plainte pour le surplus.

Siégeant :

Madame Verena PEDRAZZINI RIZZI, présidente; Madame Natalie OPPATJA et Monsieur Mathieu HOWALD, juges assesseurs; Madame Véronique AMAUDRY-PISCETTA, greffière.

 

La présidente :

Verena PEDRAZZINI RIZZI

 

La greffière :

Véronique AMAUDRY-PISCETTA

 

 

 

 

Voie de recours :

 

Le recours en matière civile au sens de l'art. 72 al. 2 let. a de la loi sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110) est ouvert contre les décisions prises par la Chambre de surveillance des Offices des poursuites et des faillites, unique autorité cantonale de surveillance en matière de poursuite pour dettes et faillite (art. 126 LOJ). Il doit être déposé devant le Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, dans les dix jours qui suivent la notification de l'expédition complète de la présente décision (art. 100 al. 1 et 2 let. a LTF) ou dans les cinq jours en matière de poursuite pour effets de change (art. 100 al. 3 let. a LTF). L'art. 119 al. 1 LTF prévoit que si une partie forme un recours ordinaire et un recours constitutionnel, elle doit déposer les deux recours dans un seul mémoire. Le recours doit être rédigé dans une langue officielle, indiquer les conclusions, en quoi l'acte attaqué viole le droit et les moyens de preuve, et être signé (art. 42 LTF).

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.