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Décisions | Chambre de surveillance

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C/21676/2019

DAS/178/2020 du 19.10.2020 sur DTAE/3582/2020 ( PAE ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs

republique et

canton de geneve

POUVOIR JUDICIAIRE

C/21676/2019-CS DAS/178/2020

DECISION

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre de surveillance

DU LUNDI 19 OCTOBRE 2020

Recours (C/21676/2019-CS) formés le 31 juillet 2020 par Monsieur A______, domicilié c/o Madame B______, ______, comparant par Me C______, avocat, en l'Etude duquel il élit domicile, d'une part, et le 10 août 2020 par Madame B______, domiciliée ______, comparant par Me Cyrielle FRIEDRICH, avocate, en l'Etude de laquelle elle élit domicile.

* * * * *

Décision communiquée par plis recommandés du greffier
du 29 octobre 2020 à :

- Monsieur A______
c/o Me C______, avocat
______, ______.

- MadameB______
c/o Me Cyrielle FRIEDRICH, avocate
Rue de la Fontaine 7, 1204 Genève.

- MadameD______
Monsieur E______
SERVICE DE PROTECTION DE L'ADULTE
Case postale 5011, 1211 Genève 11.

- TRIBUNAL DE PROTECTION DE L'ADULTE
ET DE L'ENFANT
.

 


EN FAIT

A. Par ordonnance DTAE/3582/2020 rendue le 16 juin 2020, le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant (ci-après : le Tribunal de protection) a institué une curatelle de représentation et de gestion en faveur de A______, né le ______ 2001 (ch. 1 du dispositif), désigné D______ et E______, collaborateurs auprès du Service de protection de l'adulte (ci-après : SPAd) comme curateurs en disant qu'ils pouvaient se substituer l'un à l'autre dans l'exercice de leur mandat chacun avec les pleins pouvoirs de représentation (ch. 2), leur a confié la représentation de la personne concernée dans ses rapports avec les tiers, en particulier en matière d'affaires administratives et juridiques, la gestion de ses revenus et biens et l'administration de ses affaires courantes (ch. 3), les a autorisés à prendre connaissance de la correspondance de la personne concernée dans les limites du mandat (ch. 4) et laissé les frais judiciaires à la charge de l'Etat de Genève (ch. 5).

Le Tribunal de protection a considéré que A______ souffrait de troubles l'empêchant de fréquenter une structure de formation de manière régulière et qu'il n'était pas en mesure d'assurer seul la gestion et l'administration de sa vie. Une curatelle de gestion et de représentation lui apporterait l'aide dont il avait besoin. Sa mère était endettée et son grand frère habitait en France, de sorte qu'il convenait de désigner deux collaborateurs du SPAd.

L'ordonnance a été communiquée à A______ le 9 juillet 2020 et à son curateur de représentation d'office le 7 juillet 2020.

B. a) Par acte déposé le 31 juillet 2020, A______ recourt contre cette décision, concluant à l'annulation du chiffre 2 de son dispositif et à la désignation de son oncle F______ comme curateur.

Il ne remet pas en cause la mesure instituée en sa faveur, mais souhaite que son oncle soit nommé comme curateur et conteste en conséquence la désignation des collaborateurs du SPAd en cette qualité.

b) B______, mère de A______, fait également recours contre cette ordonnance par acte expédié le 10 août 2020. Elle conclut à l'annulation des chiffres 2 à 4 de son dispositif, à la désignation de son frère F______ comme curateur de son fils, et à l'adaptation des chiffres 3 et 4 du dispositif en ce sens qu'un seul curateur sera chargé des tâches confiées et autorisé à prendre connaissance de la correspondance de son fils.

c) Invité à prendre position, le Tribunal de protection n'a pas souhaité reconsidérer sa décision. Il a en revanche fait état de ce que la décision avait été prise en raison d'une suspicion de manque d'indépendance de F______ pour exercer ce mandat.

d) Dans ses observations du 14 septembre 2020, A______ a acquiescé aux conclusions du recours formé par sa mère.

Il a contesté le motif tiré de la suspicion de manque d'indépendance de F______ dont le Tribunal de protection faisait état dans sa prise de position dans le cadre de la procédure de recours. En effet, cet élément ne figurait pas dans la décision entreprise, qui apparaissait dès lors avoir été prononcée pour un motif autre que celui indiqué dans sa motivation. Ladite suspicion n'était toutefois étayée d'aucune manière, le seul lien de parenté le liant à son oncle ne permettant pas de suspecter un tel manque d'indépendance.

e) B______ s'est également opposée à cette nouvelle motivation présentée par le Tribunal de protection dans sa prise de position, en relevant qu'elle n'était fondée sur aucun élément au dossier et que si une telle suspicion existait, les premiers juges auraient alors dû mener des investigations pour l'infirmer ou la confirmer.

C. La décision querellée s'inscrit dans le contexte suivant :

a) A______ est né le ______ 2001 de l'union entre B______ et G______. Ses parents ont divorcé en mai 2008.

Sa mère a deux autres fils, H______, né en 1998, et I______, né en 2014.

Son père a également deux autres enfants, J______ et K______, nés en 2010 et 2012.

b) Durant sa minorité, A______ a fait l'objet de mesures de protection. En 2015, un placement en foyer, une curatelle d'assistance éducative et une thérapie individuelle ont été ordonnés.

c) Devenu majeur en ______ 2019, A______ vit avec sa mère et ses demi-frères H______ et I______.

d) Il bénéficie d'une rente de l'assurance-invalidité depuis le 1er octobre 2019.

Dans le cadre de l'instruction menée par l'assurance-invalidité, un bilan d'orientation professionnelle a été établi par N______, qui ont conclu qu'une intégration professionnelle, même dans un milieu protégé, n'était en l'état pas envisageable.

D. a) Le 12 septembre 2019, le Service de protection des mineurs, chargé de la curatelle d'assistance éducative, a signalé la situation de A______ au Tribunal de protection en relevant son besoin d'aide en matière de gestion administrative et financière.

b) C______, avocat, a été désigné en qualité de curateur de représentation d'office de A______ dans la présente procédure de protection.

Dans son rapport établi le 17 janvier 2020, il a recommandé d'instaurer une curatelle de représentation et de gestion.

c) Lors de l'audience tenue le 28 février 2020, le Tribunal de protection a entendu A______, son curateur de représentation et sa mère B______.

A______ s'est opposé à la curatelle, en indiquant que sa mère s'était toujours bien occupée de lui.

B______ a indiqué avoir toujours géré les affaires de son fils et n'avoir besoin d'aucune aide administrative d'un tiers. Elle bénéficiait d'une rente-invalidité et avait des dettes de l'ordre de 50'000 fr. Elle a précisé que son fils aîné H______, qui suivait une formation de comptable, pourrait également assumer le mandat de curatelle.

Le curateur de représentation a indiqué que A______ entretenait de bonnes relations avec sa famille et qu'il acceptait que sa mère soit nommée curatrice. Les démarches administratives étaient en revanche complexes depuis qu'il était devenu majeur, notamment à l'égard de l'assurance-invalidité.

d) Dans ses observations déposées le 30 avril 2020, le curateur d'office a proposé au Tribunal de protection de confier le mandat de curatelle à F______, oncle de A______ et demi-frère de la mère de celui-ci.

F______, né le ______ 1984 à Genève, de nationalités suisse et française, domicilié ______, [code postal] L______ (France), entretenait de bonnes relations avec sa soeur et son neveu, qu'il voyait régulièrement. ______ de formation, il travaillait en cette qualité à Genève auprès de M______ SA, disposait d'une certification de formateur d'apprenti et était commissaire d'apprentissage pour les apprentis ______ et formateurs à Genève. Il ne faisait l'objet d'aucune poursuite ni acte de défaut de biens à Genève.

Le curateur de représentation a relevé que ce dernier acceptait d'assumer le mandat de curateur, et que A______ et sa mère étaient d'accord que ce mandat lui soit confié.

EN DROIT

1. 1.1 Les décisions de l'autorité de protection de l'adulte peuvent faire l'objet, dans les trente jours, d'un recours écrit et motivé, devant le juge compétent, à savoir la Chambre de surveillance de la Cour de justice (art. 450 al. 1 et al. 3 et 450b CC; art. 126 al. 3 LOJ; art. 53 al. 1 et 2 LaCC). Les parties à la procédure et les proches de la personne concernée ont qualité pour recourir (art. 450 al. 2 ch. 1 et 2 CC).

Formés par la personne concernée et par la mère de cette dernière, dans les délai (art. 142 al. 1 et 3 CPC) et forme prescrits par la loi, les recours sont recevables.

1.2 Les deux recours seront, par économie de procédure, traités dans la même décision.

1.3 La Chambre de surveillance examine la cause librement, en fait, en droit et sous l'angle de l'opportunité (art. 450a CC).

2. Les recourants ne remettent pas en cause la mesure de protection instaurée en faveur de A______. Ils reprochent en revanche au Tribunal de protection d'avoir refusé de confier le mandat de curatelle à F______ en raison de son domicile en France.

2.1 L'autorité de protection nomme curateur une personne physique qui possède les aptitudes et les connaissances nécessaires à l'accomplissement des tâches qui lui sont confiées, qui dispose du temps nécessaire et qui les exécute en personne (art. 400 al. 1 CC).

Lorsque la personne concernée propose une personne comme curateur, l'autorité de protection de l'adulte accède à son souhait pour autant que la personne proposée remplisse les conditions requises et accepte la curatelle (art. 401 al. 1 CC). L'autorité de protection de l'adulte prend autant que possible en considération les souhaits des membres de la famille ou d'autres proches (art. 401 al. 2 CC).

La nationalité étrangère ou le domicile à l'étranger ne font en principe pas obstacle à une désignation en qualité de curateur. Le fait d'être domicilié à l'étranger constitue un des éléments à prendre en compte pour déterminer l'aptitude à exercer le mandat considéré; il faut donc examiner dans chaque cas particulier si une personne domiciliée à l'étranger est ou non en mesure d'assumer la fonction (Häfeli, in CommFam Protection de l'adulte, 2013, n. 2 ad art. 400 CC).

Au titre des qualités personnelles et des qualifications professionnelles requises, il faut que le curateur intervienne comme un gestionnaire qualifié, ce qui suppose qu'il fasse preuve de compétences professionnelles, méthodologiques, relationnelles, en plus de ses qualités personnelles (Häfeli, op. cit., n. 10 ad art. 400 CC).

S'ils possèdent les qualifications voulues, les parents ou d'autres proches, comme les enfants ou les frères et soeurs de la personne concernée, peuvent être choisis en qualité de curateur; toutefois, des considérations d'ordre psychologique ou sociologique qui ne prêtent généralement pas à conséquence peuvent poser des problèmes lorsqu'il s'agit de confier à un membre de la parenté l'exercice d'un mandat de protection pour un adulte (Häfeli, op. cit., n. 3 ad art. 401 CC).

2.2 En l'espèce, le Tribunal de protection a considéré que le mandat de curatelle ne pouvait pas être confié à F______ en raison de son domicile à l'étranger, étant relevé qu'une confusion a été opérée entre le frère et l'oncle de l'intéressé. Il ressort des principes susrappelés que le domicile à l'étranger n'est pas, par principe, un obstacle à l'exercice d'une curatelle en Suisse et qu'il constitue au contraire un élément parmi d'autres à prendre en considération pour déterminer si la personne est apte à exécuter le mandat. Les premiers juges ne pouvaient ainsi refuser de désigner la personne proposée par les recourants pour ce seul motif, sans examiner les autres circonstances pour déterminer si l'oncle du recourant, et non son frère, était en mesure d'assumer cette fonction.

F______, domicilié à L______ en France, est ______ de formation et travaille en cette qualité à Genève. Disposant d'une certification de formateur, il est commissaire d'apprentissage pour les apprentis et formateurs à Genève. Il entretient par ailleurs de bonnes relations avec sa soeur et son neveu et est disposé à assumer la curatelle instaurée en faveur de ce dernier. Ces éléments conduisent à retenir qu'il dispose des aptitudes et qualités nécessaires pour représenter le recourant dans ses rapports avec les tiers, en particulier dans ses affaires administratives et juridiques, gérer ses biens et revenus et administrer ses affaires courantes. Son domicile en France, à L______ situé à quelques kilomètres de Genève, n'apparaît en particulier pas constituer un obstacle pour l'exécution d'un tel mandat, puisqu'il travaille à Genève, est appelé à avoir des contacts avec les services administratifs genevois en sa qualité de commissaire d'apprentissage et voit régulièrement son neveu à Genève.

Dans sa détermination adressée à la Chambre de surveillance dans le cadre de la procédure de recours, le Tribunal de protection a précisé avoir pris sa décision en raison d'une suspicion de manque d'indépendance de l'oncle du concerné. Il n'a toutefois fait aucune mention de cet élément dans la décision entreprise. Cela étant, aucun élément au dossier ne permet de douter de l'indépendance de l'oncle du recourant pour exercer le mandat de curatelle.

Les griefs soulevés par les recourants étant fondés, il y a lieu d'annuler le chiffre 2 du dispositif de l'ordonnance, et de désigner F______ aux fonctions de curateur. Les chiffres 3 et 4 dudit dispositif, décrivant les tâches confiées aux curateurs désignés et autorisant ces derniers à prendre connaissance de la correspondance du recourant, seront adaptés en conséquence, un seul curateur étant désormais chargé desdites tâches et autorisé à prendre connaissance de la correspondance de son protégé.

3. Les frais judiciaires de recours seront laissés à la charge de l'Etat de Genève, vu l'issue du litige. L'avance de frais versée par B______ lui sera restituée.

Il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre de surveillance :

A la forme :

Déclare recevables les recours formés les 31 juillet 2020 par A______ et le 10 août 2020 par B______ contre l'ordonnance DTAE/3582/2020 rendue le 16 juin 2020 par le Tribunal de protection de l'adulte et de l'enfant dans la cause C/21676/2019.

Au fond :

Annule le chiffre 2 du dispositif de cette ordonnance et désigne F______ aux fonctions de curateur de A______.

Modifie les chiffres 3 et 4 du dispositif de cette ordonnance, en ce sens qu'un seul curateur est chargé des tâches décrites et autorisé à prendre connaissance de la correspondance de la personne concernée.

Laisse les frais judiciaires de recours à la charge de l'Etat de Genève et ordonne la restitution à B______ de l'avance de frais qu'elle a versée.

Dit qu'il n'y a pas lieu à l'allocation de dépens.

Siégeant :

Monsieur Cédric-Laurent MICHEL, président; Mesdames Paola CAMPOMAGNANI et Ursula ZEHETBAUER GHAVAMI, juges; Madame Carmen FRAGA, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), la présente décision peut être portée dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral - 1000 Lausanne 14.