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Décisions | Chambre des prud'hommes

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C/11689/2015

CAPH/100/2017 du 18.07.2017 sur JTPH/425/2016 ( OS ) , CONFIRME

Descripteurs : HARCÈLEMENT SEXUEL(DROIT DU TRAVAIL) ; HARCÈLEMENT PSYCHOLOGIQUE
Normes : CO.328
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

C/11689/2015-5 CAPH/100/2017

ARRÊT

DE LA COUR DE JUSTICE

Chambre des prud'hommes

DU 18 juillet 2017

 

Entre

A______, domiciliée ______ (GE), appelante d'un jugement rendu par le Tribunal des prud'hommes le 17 novembre 2016 (JTPH/425/2016), comparant par Me Gilbert DESCHAMPS, avocat, rue de Candolle 18, 1205 Genève, en l'étude duquel elle fait élection de domicile,

d'une part,

et

B______, domicilié avenue Eugène Lance 29, 1212 Grand-Lancy, intimé, comparant par la FER-SAJEC, Service d'assistance juridique, rue de St-Jean 98, case postale 5278, 1211 Genève 11, dans les bureaux de laquelle il fait élection de domicile,

d'autre part.


 

EN FAIT

A.           Par jugement JTPH/425/2016 rendu le 17 novembre 2016, reçu le lendemain par A______, le Tribunal des prud'hommes (ci-après : le Tribunal), statuant par voie de procédure simplifiée, a déclaré recevable la demande formée le 28 octobre 2015 par A______ contre B______ (ch. 1 du dispositif) et irrecevables les plaidoiries écrites de ce dernier du 15 juin 2016 (ch. 2), débouté A______ de toutes ses conclusions (ch. 3), dit que la procédure était gratuite (ch. 4) et débouté les parties de toutes autres conclusions (ch. 5).

B.            a. Par acte déposé le 3 janvier 2017 au greffe de la Chambre des prud'hommes de la Cour de justice (ci-après : la Chambre des prud'hommes), A______ forme appel de ce jugement, dont elle sollicite l'annulation des ch. 3 et 5 du dispositif.

Elle conclut à la condamnation de B______ à lui payer les sommes de 38'490 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 30 septembre 2013 (date moyenne) à titre d'indemnité au sens de l'art. 5 al. 3 et 4 LEg, de 25'000 fr. plus intérêts à 5% l'an dès le 30 septembre 2013 (date moyenne) à titre de tort moral et de
2'370 fr. 60 plus intérêts à 5% l'an dès le 10 décembre 2014 (date moyenne) à titre de dommages-intérêts.

Subsidiairement, elle conclut au renvoi de la cause en première instance pour nouvelle décision.

b. Par réponse expédiée le 6 février 2017 au greffe de la Chambre des prud'hommes, B______, qui s'en rapporte à justice au sujet de la recevabilité de l'appel, conclut à la confirmation du jugement entrepris.

c. Par réplique du 27 février 2017 et duplique du 20 mars 2017, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

A______ a déposé des pièces nouvelles (nos 18 à 24).

d. Les parties ont été informées le 29 mars 2017 de ce que la cause était gardée à juger.

C. a. B______, médecin généraliste, exerce dans son cabinet situé ______ à ______ (GE).

A la même adresse, il exploite la société C______, fondée en 2008, active dans le conseil en management et coaching, dont son épouse D______ était associée gérante jusqu'à son décès, en 2011.

Il exploite, également à cette adresse, l'entreprise individuelle "E______" inscrite au Registre du commerce en 2011 et active dans la formation d'adultes.

b. A______, née en 1984, est d'origine somalienne.

c. Le 28 août 2009, "A______" a été engagée par les époux B______ et D______ et l'entreprise "E______" comme assistante administrative à plein temps dès le 1er septembre 2009 pour un salaire annuel brut de 55'200 fr., soit douze mensualités de 4'600 fr.

d. La relation entre A______ et D______ était excellente (tém. F______), qualifiée par A______ de "presque d'amitié" selon ce qu'elle avait dit à G______ (tém. G______).

e. A la suite du décès de son épouse, B______ a repris l'activité de formation d'adultes en sus de l'exploitation de son cabinet médical. Il s'est beaucoup reposé sur A______, "qui faisait tout" (tém. F______).

D. a. Par contrat du 31 janvier 2012, signé entre le "Dr B______", "E______", d'une part, et d'autre part, cette dernière a été promue "Office manager" dès le 1er février 2012 et sa rémunération annuelle brute a été portée à 72'000 fr., soit douze mensualités de 6'000 fr.

L'activité de A______, selon son certificat de travail intermédiaire du 2 septembre 2014, a consisté à s'occuper de l'institut (préparer les formations, réviser les documents de cours, assurer le suivi administratif, organisationnel, logistique et leur planification; maintenir la relation avec les formateurs aux plans personnel, administratif, organisationnel et financier; gérer les processus de certification de l'institut; gérer la clientèle [rendez-vous personnalisés, vente des formations, conseils, orientations, suivi financier, gestion de la base de données]; établir les annonces des postes vacants [tri des candidatures, entretiens avec les candidats], former et encadrer les nouveaux collaborateurs, ainsi qu'à assurer la tâche du secrétariat du cabinet médical, la réception et l'accueil des patients).

Selon l'art. 11 du contrat de travail, la rubrique "OBLIGATIONS" précisait notamment :

- qu'il était particulièrement important que l'employée observe exactement l'horaire de travail convenu;

- que l'employée devait s'abstenir d'utiliser son adresse e-mail professionnelle pour de la correspondance privée et d'utiliser le matériel de l'entreprise pour des activités non professionnelles. De ce fait, elle autorisait expressément l'employeur à prendre connaissance du contenu de ses messages et des informations stockées sur des supports de données lui appartenant et

- qu'en cas de nécessité, l'employée pouvait être appelée à effectuer, pour autant que ses capacités le lui permettent et que les règles de la bonne foi soient respectées, un travail autre que celui pour lequel elle avait été engagée.

En sus de son activité professionnelle, A______ a entrepris en 2013-2014 une formation en PNL (Programmation Neuro-Linguistique) à l'institut, durant le week-end, démarche qui avait été appréciée au sein de l'entreprise car elle témoignait de son engagement et de sa motivation à l'égard de celle-ci et lui permettait de mieux promouvoir cette formation auprès de la clientèle (tém. G______).

b. La relation professionnelle entre A______ et B______ a commencé à se dégrader en septembre 2012 (tém. Dr H______).

c. Durant les rapports contractuels, A______ a été fréquemment en incapacité de travail totale ou partielle pour cause de maladie (4 arrêts de travail en 2009, 3 arrêts en 2010 [env. 17 jours], 5 arrêts en 2011 [env. 16 jours], 8 arrêts en 2012 [env. 67 jours, y.c. incapacité partielle], 9 arrêts en 2013 [env. 52 jours] et 6 arrêts en 2014 [env. 21 jours], tém. Dr H______).

d. Les personnes suivantes ont travaillé au sein de E______ en même temps que A______ :

d.a. F______, qui connaissait B______ depuis 11 ou 12 ans, y a été directrice adjointe, déjà au temps de D______. Elle a occupé un poste de direction au sein de l'institut, puis a démissionné de celui-ci pour un poste de formatrice, à titre indépendant. Elle a cessé d'y travailler en automne 2015.

F______ a déclaré que A______ s'était plainte de B______ auprès d'elle, reprochant à ce dernier sa façon de communiquer parfois désobligeante et irrespectueuse; elle lui reprochait également son incompétence et ses mensonges (tém. F______). Il était toutefois difficile à F______ d'en parler avec A______ car elle avait "vécu les mêmes choses qu'elle" [A______] (tém. F______).

d.b. I______ (ci-après : I______) a été engagée du 1er octobre 2011 jusqu'au début de l'année 2014, comme assistante administrative pour la formation et secrétaire médicale pour le cabinet. Elle a été remplacée durant son congé maternité, puis, à son retour, a été licenciée car elle n'a pas supporté que A______ devienne sa supérieure hiérarchique (tém. I______).

Selon I______, A______ n'était "pas du tout du genre à se laisser faire".

I______ a confirmé que A______ s'était plainte auprès d'elle de B______, en lien avec un manque de reconnaissance de son travail.

d.c. G______, engagée en juillet 2013 pour remplacer I______, a travaillé comme secrétaire, puis comme office manager selon J______, avant de reprendre le poste de cette dernière de chargée de communication (tém. G______). G______ a été licenciée en juin 2014 et a contesté son délai de congé. Il ressort des échanges de courriels entre A______ et G______ qu'elles utilisaient des formulations familières ("Hello choupette, Hello ma belle, Chère jolie fille").

G______ et A______ ont gardé des liens après leurs départs respectifs de l'institut. Elles ont évoqué ensemble l'audition de G______, jusqu'à la première audience du Tribunal, sans toutefois la préparer. G______ a déclaré n'avoir pas lu la demande déposée en justice. Elle a relu le journal qu'elle tenait à cette époque, qualifiée de difficile et à la suite de laquelle elle avait dû suivre une thérapie. Le comportement de B______ avait engendré des émotions chez elle et l'avait fait douter de ses propres capacités. Elle s'était sentie disqualifiée au niveau personnel, mal à l'aise. Il lui avait été difficile de "gérer le comportement d'un chef comme B______" et avait été exposée à la souffrance de A______, ce qui avait laissé des traces.

G______ a déclaré qu'il y avait eu une phase de séduction sur sa personne de la part de B______, au début de son activité professionnelle, pour s'assurer de sa motivation à son égard. Les choses avaient ensuite changé car il n'avait pas la même attitude vis-à-vis d'elle que de A______, qui occupait un poste clé (tém. G______).

Selon G______, il n'y avait pas de critiques relatives à la performance ou à l'attitude professionnelle de A______, mais beaucoup de recadrage et de contrôle de B______ sur sa collègue (tém. G______).

d.d. G______ a été engagée en 2014 ou 2015, pendant un an et a été en charge de la communication.

d.e. K______ y a été employée à 70% d'octobre 2014 à août 2015. Elle a repris l'activité de A______ après le départ de celle-ci.

A______ a dû former K______ durant la période où elle avait été libérée de l'obligation de travailler, ce qui a induit une mésentente entre elles, accrue par le fait que A______ lui reprochait sa lenteur dans l'assimilation des nouvelles tâches.

E. a. F______ a déclaré avoir constaté que B______ était "hyper insultant avec tout le monde allant jusqu'à prétendre que les choses n'avaient pas été faites alors qu'il avait la preuve sous les yeux du contraire" (tém. F______). K______ a déclaré aussi s'être plainte à A______ de l'attitude de B______ qui l'avait accusée de commettre une erreur alors que c'est lui qui l'avait faite (tém. K______). G______ a également relaté que A______ devait comptabiliser les paiements tandis que B______ ne lui avait pas donné les éléments bancaires nécessaires (tém. G______).

B______ avait parfois une attitude enfantine, piquant une grosse colère puis boudant, après quoi il amenait des fleurs ou des chocolats à A______, mais rien à F______. A______ n'en voulait pas et les mettait à autre place (tém. F______). K______ a confirmé que B______ apportait des fleurs et du chocolat pour le bureau et la salle d'attente, qu'il posait sur le bureau de A______, sans savoir si c'était pour elle personnellement. Elle a précisé que ce bureau, dans lequel elle travaillait avec A______, servait d'accueil (tém. K______).

b. Les séances hebdomadaires réunissaient B______, A______, K______, parfois F______ (tém. K______) et G______.

F______ a déclaré avoir raconté, lors d'une réunion à l'institut, qu'elle s'était retrouvée avec un groupe de formateurs suisses alémaniques en séance dans un sauna. B______ avait continué la discussion en blaguant, selon F______, G______ précisant qu'il avait indiqué que "l'idée de tenir une séance dans un sauna nu lui plaisait". A______ s'était sentie mal à l'aise, "ce qui s'était vu". Elle l'avait mal pris en raison des tensions qui existaient déjà et du fait "des regards" dont une "prénommée L______" s'était également plainte avant A______ (tém. F______ et G______).

A______ n'a pratiquement jamais fait de propositions en séance car B______ lui coupait la parole (tém. G______), ce qui n'est pas l'avis de G______, selon lequel le comportement de B______ pendant les séances était respectueux, organisé et il laissait la parole à chacun. Il n'avait eu de comportement critiquable à aucun moment et une attitude irréprochable à l'égard de chacune. G______ savait qu'il existait une mauvaise ambiance entre B______ et A______, car celle-ci n'était jamais satisfaite et ne se sentait pas valorisée. A______ avait dit à G______ avoir l'impression de devoir tout faire dans l'entreprise sans que son travail soit valorisé, opinion que cette dernière ne partageait pas car A______ faisait son travail, soit gérer le bureau. G______ avait le sentiment que B______ appréciait A______ à sa juste valeur (tém. G______).

c. F______ a souvent entendu B______ reprocher à A______ son indisponibilité lorsqu'elle était en arrêt maladie (cf. ci-dessus, D.c.) ou qu'elle n'était pas "à Tombouctou" (Mali) lorsqu'elle prétendait ne pas avoir accès à un téléphone. Elle a confirmé avoir entendu B______ faire des remarques de type "Tombouctou" ou "Bab El Oued" (Algérie). Il avait dit à F______ qu'elle était atteinte d'Alzheimer ou d'une maladie mentale, ce qu'elle avait consigné dans un dossier. G______ a aussi déclaré avoir régulièrement entendu de la part de B______ des opinions sur les capacités d'organisation en Somalie, en lien avec la saleté, les odeurs, ou dire "il y a des procédures ici on n'est pas à Tombouctou".

K______ a déclaré que A______ lui avait raconté qu'une fois, alors qu'elle faisait de la facturation, B______ lui avait dit qu'elle ne comptait pas des "noix de coco ou des bananes", ce qu'elle avait très mal pris. Elle n'avait pas entendu une remarque de ce type (tém. K______).

d. F______ avait trouvé une fois A______ en pleurs car B______ voulait l'obliger à manger avec lui à l'institut à midi (tém. F______ et G______). Il lui faisait la tête et ne lui parlait plus parce qu'elle ne mangeait plus sur place à midi alors que du temps de D______ "nous mangions toutes ensemble à midi". A______ ne voulait plus, car B______ continuait la discussion professionnelle, de sorte qu'elle avait l'impression de ne plus avoir de pause. Elle se sentait harcelée et mise sous pression (tém. F______).

G______ a déclaré que B______ reprochait à A______ de fumer et de boire du coca. Il critiquait chaque geste qu'elle faisait, comme il critiquait tout le monde. C'était un climat constant. En raison des responsabilités de A______, elle était davantage exposée à ces critiques, y compris lorsqu'elle n'y était pour rien.

e. B______ vaccinait lui-même son personnel contre la grippe (tém. G______). A______ avait relaté à G______ que B______ lui avait demandé d'enlever son t-shirt à cette fin et qu'il lui avait fait part "d'une opinion sur son soutien-gorge" (tém. G______).

f. B______ appelait systématiquement le bureau pour vérifier si les assistantes répondaient dès la première minute le matin, ce que F______ a confirmé avoir constaté à de nombreuses reprises. Il téléphonait aussi à 12h28 (tém. G______). Il était très pointilleux sur les heures d'arrivée et les contrôlait (tém. K______). Il avait demandé à G______ de motiver A______, qui avait parfois quelques minutes de retard, qu'elle annonçait toujours, ou qui était parfois absente, ce qui était un manque de motivation selon B______ (tém. G______).

F______ avait acquis la conviction qu'il recevait une copie de tous les mails professionnels qu'elle envoyait et contrôlait ceux qui lui étaient adressés. Il lui avait demandé son accord pour recevoir une copie de ces derniers courriels, mais elle avait refusé (tém. F______ et G______).

F______ n'avait pas constaté de contrôle des tiroirs ou espaces privatifs du bureau, mais B______ avait ouvert du courrier qui lui était destiné, par erreur selon elle. G______ a affirmé que B______ fouillait dans les tiroirs du bureau et qu'il avait, à une reprise, et "soi-disant par erreur", ouvert un courrier adressé à A______. Elle a précisé n'avoir pas assisté à l'ouverture de cette lettre, mais elle avait découvert le lendemain, en présence de A______, que ledit courrier avait été ouvert.

B______ reprochait à A______ de faire des téléphones privés, qu'elle lui remboursait (tém. G______).

K______ a déclaré que B______ ne lui avait jamais demandé de surveiller A______ (tém. K______).

g. Il faisait froid dans les locaux, y compris durant les formations, car B______ coupait le chauffage pour faire des économies (tém. F______ et G______).

Selon B______, les locaux étaient surchauffés (25° à 26°). Il a néanmoins admis, en sa qualité de médecin, que A______ avait fréquemment présenté des symptômes de refroidissement.

h. B______ a reconnu qu'il attendait de A______ que les salles d'attente et d'examen du cabinet médical soient rangées, que le lavabo et que les "wc" soient propres.

L'institut employait une femme de ménage et A______ ne faisait pas le ménage (tém. F______). G______ a toutefois précisé que la femme de ménage ne venait qu'une fois par semaine et que les toilettes, partagées avec les patients, devaient parfois être nettoyées. A______, qui se plaignait à B______ de devoir faire des tâches de nettoyage au cabinet, s'était vu répondre par ce dernier qu'elle devait être contente "d'être là en Suisse" (tém. G______).

F______ a confirmé que A______ "faisait tout", y compris pour le cabinet médical de B______, comme récolter les échantillons d'urine, ce que ce dernier a relativisé en indiquant qu'elle devait tremper des sticks dans des flacons d'urine. Selon A______, c'est après le décès de D______ que B______ lui avait demandé de récolter les urines ou de passer l'aspirateur et de vider les poubelles.

i. B______ et A______ se vouvoyaient, ce qui résulte de leurs échanges par la messagerie SMS et de leurs correspondances, bien que I______ ait déclaré qu'ils se tutoyaient. Il tutoyait en revanche F______ (tém. F______) et G______ (tém. G______).

j. B______ et A______, au contraire de F______, ne se faisaient pas la bise en arrivant à l'institut, car A______ était sur la défensive et avait dit gentiment à B______ qu'il fallait rester professionnel (tém. F______). F______ la comprenait car il était capable de grosses colères à un moment et de vouloir faire la bise à un autre moment.

Selon G______, il arrivait à B______ de réclamer une bise pour dire bonjour, étant quelqu'un qui touche volontiers les bras ou autre (tém. G______).

Pour l'anniversaire de B______, A______ lui a envoyé un message SMS le en 2013 pour lui souhaiter "Joyeux anniversaire patron. j ai ps [j'ai pas] eu le temps pr [pour] un joli cdo [cadeau] mais une belle bise sera offerte en attendant dm [demain] matin. Joie bonheur succes (sic) vous sont souhaites (sic). A______", auquel il avait répondu se réjouir "pour la belle bise".

k. F______ a déclaré que A______ lui avait relaté une remarque de B______ sur sa jupe ou un autre vêtement et que, dans son souvenir, il s'agissait d'une remarque désobligeante d'un homme à une femme (tém. F______).

Selon K______, la relation entre B______ et A______ était professionnelle et ils étaient polis l'un envers l'autre. Elle n'avait jamais constaté de comportements tendancieux de l'employeur, mais A______ lui avait rapporté de telles attitudes. F______ et K______ n'avaient rien constaté en matière de toucher ou d'attitudes corporelles ou de fessée (tém. F______ et K______).

G______ a déclaré avoir assisté à un épisode au cours duquel B______ avait fait un geste de la main simulant la fessée en disant à A______ : la prochaine fois, vous mériterez une fessée. Cette dernière avait dit à sa collègue que c'était arrivé à une autre reprise (tém. G______).

A______ avait demandé à G______ de vérifier si B______ regardait son décolleté et ses fesses, ce qu'elle a confirmé avoir effectivement constaté, précisant avoir elle-même senti le regard de B______ sur ses propres fesses (tém. G______).

A______ avait dit à K______ qu'elle n'appréciait pas lorsque B______ venait dans sa sphère privée, en se mettant derrière elle pour lui montrer quelque chose. K______ a effectivement constaté qu'il adoptait cette attitude, mais seulement après que A______ lui en eût parlé (tém. K______).

Selon G______, B______ faisait fréquemment des commentaires sur les tenues, le parfum ou le maquillage de A______. A______ avait dit à K______ qu'elle arrêtait de faire des efforts en matière d'habillement, car il la complimentait ou la regardait avec plus d'insistance si elle était bien habillée (tém. K______).

K______ a confirmé que A______ lui disait fréquemment qu'elle n'était plus à l'aise au travail et y venait "à reculons" à cause de la relation qu'elle avait avec B______.

l. Le 9 mai 2014, A______ a adressé un message SMS à B______ pour l'informer de ce qu'elle vivait une situation très difficile avec son ami, que la dispute de la veille avait viré à la violence physique, qu'elle se sentait mal et qu'elle prenait congé ce jour-là en le remerciant de sa compréhension.

G______, qui avait entendu une conversation entre B______ et A______ dans la cuisine de l'institut, a relaté qu'il avait proposé à A______ de la loger chez lui. Elle ne savait pas si c'était chez lui ou dans l'une de ses autres maisons, précisant avoir déjà hébergé une formatrice pendant quelques jours dans une maison dans les montagnes bernoises, où il y était aussi. Selon G______, B______ n'avait pas de frontière claire entre les rapports professionnels et privés. Selon A______, cette proposition de B______ n'était pas en lien avec la dispute sus évoquée.

m. A______ a peur des chiens, ce qui est établi (tém. M______).

B______ avait acquis un chien de race ______ et a reconnu que A______ en avait peur. Lorsqu'il a pris un second chien de cette race, il a confirmé qu'elle en avait eu peur au début. A______ a déclaré avoir une phobie des chiens, qu'ils soient gentils ou non. B______ lui demandait de temps en temps de s'occuper de ses chiens (les nourrir et les remettre dans leur parc; tém. K______). Le Dr M______, médecin psychiatre de A______, a qualifié la demande de B______ de "déplacée", au regard de la peur des chiens et du rapport hiérarchique.

n. N______, qui avait entrepris une formation d'hypnose en 2014, est devenue directrice adjointe de E______ depuis le 1er avril 2015, puis la compagne de B______.

F. a. Le 20 août 2014, B______, agissant tant en qualité de responsable de son cabinet que pour E______ a évalué les prestations de A______. Les aptitudes techniques de l'employée étaient bonnes, sauf la maîtrise de l'anglais, qui était insuffisante. Ses compétences étaient bonnes, avec une expression orale excellente. Toutefois, sa capacité de synthèse et d'analyse étaient "en voie d'acquisition". Son dynamisme était bon, étant précisé que l'"apport d'idées et l'implication" étaient en voie d'acquisition. Sa rigueur était bonne, mais elle était perfectible dans sa capacité à transmettre des informations et à remonter les problèmes. Sa gestion budgétaire était excellente. Au niveau du relationnel interne, sa disponibilité et sa compréhension des enjeux globaux étaient bonnes, mais plusieurs points étaient en voie d'acquisition (apport global à l'ambiance et réceptivité aux sollicitations). Le relationnel externe était à mi-chemin entre bon et excellent, sauf la qualité de la représentation, qui était en voie d'acquisition. Son attitude était bonne, avec certains points en voie d'acquisition (honnêteté intellectuelle et rigueur, ponctualité et disponibilité). Sa réaction constructive aux critiques était notée insuffisante. S'agissant de la gestion et de l'organisation du cabinet médical, sa maîtrise du poste était estimée à mi-chemin entre bonne à excellente. Enfin, sa gestion et organisation de l'Institut E______ était bonne, seul le marketing était en voie d'acquisition.

B______ a accédé partiellement à l'augmentation de salaire sollicitée par A______, lui accordant la somme de 600 fr. par mois au lieu de celle de 1'200 fr. qu'elle avait réclamée.

F______ a qualifié cette évaluation d'injuste. Elle savait que A______ avait l'intention de demander une augmentation. Elle avait aidé A______ à réagir à la suite de cette évaluation (cf. let. F.c. ci-après) en la conseillant sur les termes à utiliser dans son courriel à B______ et en l'aidant à se calmer émotionnellement. Elle avait ressenti la déception de A______ d'avoir tant donné et de ne pas avoir été reconnue (tém. F______).

b. Le 2 septembre 2014, B______ a délivré un certificat de travail intermédiaire à A______, élogieux en tous points :

"(…). Autonome et professionnelle, A______ s'est adaptée entièrement aux exigences multiples de mon entreprise, effectuant son travail avec soin et intérêt. Elle s'est acquittée des tâches qui lui ont été confiées à ma pleine et entière satisfaction.

A______ est une collaboratrice, très appréciée tant par les intervenants que par les clients, très consciencieuse, engagée, orientée résultats et très performante.

Sa persévérance et son engagement personnel lui ont permis d'atteindre et parfois de dépasser les objectifs fixés à ma plus grande satisfaction. Elle a toujours répondu de manière très satisfaisante aux multiples exigences qui lui étaient posées, même en cas de forte charge de travail. Rapide et fiable, elle savait parfaitement motiver les collaborateurs. Son travail a toujours été impeccable et d'une qualité irréprochable. Je tiens aussi à souligner que A______ a contribué de façon déterminante à la croissance de mon entreprise grâce à son aisance relationnelle avec les clients et les partenaires institutionnels.

J'ai toujours été extrêmement satisfait de ses excellentes performances".

c. Par courriel du 8 septembre 2014, A______ a fait part à B______ de son désaccord avec son évaluation qui la disqualifiait. Elle lui a reproché de ne pas avoir été informée des objectifs à atteindre ni des critères d'appréciation ni d'avoir reçu des explications sur les raisons pour lesquelles ses prestations étaient seulement bonnes et non pas "excellentes". Elle estimait que cette évaluation était en complète inadéquation avec le message qu'il avait fait passer avant celle-ci. Elle a ajouté qu'elle appréciait travailler avec lui et qu'elle se dépassait pour satisfaire les besoins de l'entreprise. Or, il ne lui avait donné que le choix de quitter l'entreprise ou d'accepter 10% d'augmentation. Elle s'était attendue à une reconnaissance plus importante de sa part et lui a fait part de sa totale démotivation.

G. a. Le 16 décembre 2014, les parties ont eu un entretien, puis elles ont échangé des courriels :

- A______, se référant à cet entretien, a écrit à B______ qu'il continuait à disqualifier son travail et son implication dans l'entreprise, à la démotiver et en plus à lui faire subir une discrimination salariale et qu'elle ne pouvait plus assumer toute la charge de travail à elle-seule. Elle a réitéré sa demande, comme formulée le matin, d'être licenciée et de lui remettre la lettre y relative le même jour "d'ici 18h";

- B______ lui a répondu que dans cette situation, c'était plutôt à l'employée de donner sa lettre de congé et lui a demandé un temps de réflexion, annonçant sa réponse pour le surlendemain;

- A______ a répliqué qu'elle était à bout et épuisée car la situation était intenable et qu'elle attendait que la situation soit résolue le surlendemain.

Dans un courriel subséquent, elle a ajouté que, depuis l'évaluation où il avait disqualifié son travail, dénigré son implication, son travail, son moral était complétement à zéro "et depuis donc vous me harcelez moralement". Elle avait clairement l'impression d'être poussée à la démission.

A______ a précisé dans ses écritures que sa démarche procédait aussi du souci d'éviter d'être pénalisée par l'assurance-chômage en cas de démission.

Par lettre du 18 décembre 2014, B______ a confirmé le licenciement de A______ pour le 28 février 2015, précisant que celui-ci lui avait été signifié oralement le mardi 16 février 2014 lors de leur entretien. "Par esprit d'apaisement", il l'a libérée de l'obligation de travailler du 18 décembre 2014 au 28 février 2015.

b. Du 13 février au 30 septembre 2015, A______ a été en incapacité totale de travail, selon les arrêts de travail délivrés par le Dr M______, médecin psychiatre, et justifiés à l'assurance perte de gain "pour trouble de l'adaptation, réaction mixte anxieuse et dépressive (…), difficultés liées à l'emploi et harcèlement professionnel par son employeur (…)". Il a prescrit à A______ la prise d'un anxiolytique et d'un somnifère.

H. a. La Dresse H______, médecin généraliste, a suivi A______ depuis 2003; celle-ci était en bonne santé jusqu'en 2012.

Lorsque les problèmes professionnels sont apparus, la doctoresse lui a conseillé de changer d'emploi, sans savoir que son permis B et sa naturalisation en cours rendaient ce changement moins aisé. Elle avait l'impression que A______ était dans un état de surmenage et d'épuisement. A presque chaque consultation, elle se plaignait de ses conditions de travail, voire d'une surcharge de travail. Elle pleurait facilement, y compris en consultation. Mais elle consultait pour des gastro-entérites ou des états grippaux, de sorte qu'il était difficile de séparer le somatique du psychologique. A plusieurs reprises, A______ a demandé à la Dresse H______ de faxer son certificat médical à son employeur, car elle était très anxieuse de les produire à temps. Selon le médecin, il n'y avait que le souci professionnel, qui était omniprésent. Les douleurs étaient consécutives à un état de panique et au stress. Son état pouvait vraisemblablement être mis en lien avec le stress qu'elle vivait sur son lieu de travail. A______ lui avait confié envisager de quitter son travail "à son grand regret" pour fin 2014 ou début 2015.

En février 2015, A______ montrait des signes d'un gros burn out et elle l'avait adressée au Dr M______, médecin psychiatre. A______ avait perdu ses repères moraux, ne savait plus très bien ce qu'on lui reprochait ou si ce qu'elle faisait était bien ou non, juste ou faux.

La Dresse H______, qui n'avait pas eu connaissance des tensions entre A______ et son partenaire, a précisé que le stress au sein d'un couple était celui de deux personnes à égalité, tandis qu'au travail, A______ était en situation d'infériorité et avait peur pour son permis.

La Dresse H______ a dressé un certificat médical du 1er juin 2015, dans lequel elle a attesté que A______ avait présenté divers symptômes depuis l'automne 2012, tels que peur ou terreur à l'idée d'aller à son travail, impression d'être constamment sur le qui-vive; angoisses aigües avec manifestations physiques (fièvres répétitives, gastro-entérites fréquentes, diarrhées, nausées, vomissements, vertiges, palpitations, maux de tête); cauchemars, insomnies rebelles et réactionnelles; sentiment d'humiliation au travail : tâches ménagères imposées, propos sexuellement connotés ("je vais vous donner des fessées"), propos racistes ("vous n'êtes pas à Tombouctou"), tristesse et pleurs fréquents, impression de devoir constamment se justifier avec un profond sentiment de dévalorisation, désarroi identitaire portant sur la perte de l'estime de soi; perte inhabituelle des repères moraux; troubles de la concentration, grande fatigue et perte de poids. Le médecin a relaté le sentiment général de peur et d'angoisse croissant lié au harcèlement moral et sexuel éprouvé par A______.

b. Le Dr M______, médecin psychiatre, a rencontré A______ le 13 février 2015. Il a déclaré que ses symptômes étaient de nature anxieuse et dépressive. Elle lui avait parlé spontanément d'un sentiment d'humiliation et de honte. La principale source de stress de A______ était en lien avec ce qu'elle avait vécu au travail. Il avait eu connaissance de la relation entre A______ et son compagnon depuis 7 ans, mais non pas de la violence qu'elle avait évoquée dans son message SMS à son employeur. Ses problèmes psychiatriques avaient commencé après le décès de D______. Selon le médecin, A______ avait une personnalité assez forte, car elle avait immigré seule à Genève, à l'adolescence, pour y retrouver un oncle, avait vécu en foyer, sous tutelle, réussi sa scolarité, puis travaillé. Elle ne pouvait pas se permettre de quitter son travail en raison de son permis B et du lien de loyauté qui la liait à D______. Elle avait besoin d'argent pour vivre et aider sa mère en Somalie. Enfin, les victimes d'un harcèlement n'en avaient pas de suite conscience, car elles doutaient de la limite entre ce qui était acceptable ou non et à cause du sentiment d'humiliation et de domination qui rendait difficile de sortir de l'emprise. Il y avait parfois un moment de latence entre la prise de conscience et le courage de partir. A______ lui avait dit le 2 mai 2016 que B______ avait essayé de prendre contact avec elle à trois reprises via le réseau LINKEDIN, ce qui l'avait beaucoup troublée et conduit à bloquer l'accès de B______ à son profil.

Le médecin a évoqué le stress relationnel que A______ avait vécu avec son père, puis son oncle, ce qui l'avait peut-être rendue plus sensible dans ses rapports avec les hommes. Elle subissait un stress dans le cadre de sa vie avec son partenaire, mais n'avait jamais évoqué de violences avec lui. Il a confirmé que ce conflit-là pouvait être abordé d'égal à égal. Elle lui a confié subir de "petites" attaques sur son origine africaine, des propos à connotation sexuelle, des demandes déplacées telles que le nettoyage du bureau qui n'était pas dans son cahier des charges et non demandé auparavant, une demande de clarification de son cahier des charges, et de la pression financière avant ses vacances. Elle obtenait son salaire avant de partir en Somalie avec D______, mais il était difficile pour elle de le percevoir de B______ et elle en avait ressenti de l'humiliation. Il était manifeste que A______ vivait un stress au sein de son couple, mais la situation qu'elle rencontrait sur son lieu de travail était prévalante et plus importante.

Le Dr M______ a dressé un certificat médical le 19 mai 2015, confirmant que les difficultés de A______ avaient débuté à la suite de la reprise de la direction de l'entreprise par B______. Elle reprochait à B______ son incompétence dans la gestion d'équipe et des disqualifications sur sa personne et son travail de manière constante, de proférer des propos à caractère raciste et sexuels comme quand il relevait ses origines africaines et qu'elle méritait une fessée de lui. Ses tentatives de dénoncer le harcèlement s'étaient soldées à chaque fois par une fin de non-recevoir. Elle avait demandé à plusieurs reprises un cahier des charges depuis 2012 qu'il ne lui avait jamais transmis. Elle avait souvent mentionné être compatissance face aux difficultés qu'il devait affronter et vouloir l'épauler par ses compétences et non l'évincer, mais il ne le comprenait pas ainsi. Elle disait avoir ressenti les contrecoups de ce harcèlement dès 2012, avec une perte de confiance en elle, une culpabilisation sur la qualité et productivité de son activité. Elle se rendait au travail avec une "boule au ventre" et avait fait son maximum pour s'y rendre jusqu'à l'annonce de son licenciement. Auparavant, elle s'était sentie poussée à la démission par une recrudescence du harcèlement de la part de B______.

I. a. Par requête de conciliation expédiée le 8 juin 2015 au greffe du Tribunal, A______ a assigné B______ en paiement des sommes susindiquées (cf. ci-dessus, B.a.).

L'audience de conciliation du 28 juillet 2015 s'est soldée par la remise à A______ de l'autorisation de procéder.

b. Le 7 septembre 2015, B______ a déposé une plainte pénale (P/16894/2015) à l'encontre de A______ pour diffamation et calomnie, qui a fait l'objet d'une ordonnance de non-entrée en matière rendue le 9 septembre 2015 par le Ministère public. Ce dernier a considéré que A______ ne cherchait ni à nuire à B______ ni à attenter à son honneur, mais à décrire l'ensemble des faits dignes d'intérêt selon elle pour expliquer son sentiment d'injustice.

c. Par demande simplifiée expédiée le 27 octobre 2015 au greffe du Tribunal, A______ a assigné B______ en paiement.

B______ a conclu au déboutement de A______.

d. A______ a confirmé ses conclusions à l'audience débats du 25 février 2016, tandis que le B______ a déposé ses conclusions tardivement.

J. Dans la décision querellée, le Tribunal, doutant de l'impartialité du témoignage de G______, a considéré que A______ se plaignait de façon récurrente d'un manque de reconnaissance de la part de son employeur, ce qui n'était pas constitutif d'une atteinte à sa personnalité. Elle n'avait pas démontré que son état de santé était imputable à la violation d'obligations professionnelles de l'employeur. Le premier juge n'a ainsi pas acquis la conviction que les souffrances psychologiques de l'employée étaient consécutives à des atteintes à sa personnalité ou à du harcèlement de l'employeur, bien que le management de celui-ci n'ait pas été exempt de tout reproche.

EN DROIT

1. 1.1 L'appel est recevable contre les décisions finales et les décisions incidentes de première instance (art. 308 al. 1 let. a CPC). Dans les affaires patrimoniales, l'appel est recevable si la valeur litigieuse au dernier état des conclusions est de 10'000 fr. au moins (art. 308 al. 2 CPC), étant précisé qu'il s’agit des conclusions de première instance (Jeandin, in CPC, Code de procédure civile commenté, Bohnet/Haldy/Jeandin/Schweizer/Tappy [éd.], 2011, n. 13 ad art. 308 CPC).

L'appel, écrit et motivé, est introduit auprès de l'instance d'appel dans les 30 jours à compter de la notification de la décision motivée (art. 311 al. 1 CPC).

1.2. En l'espèce, l'appel répond aux conditions de recevabilité, tant en ce qui concerne la forme que le délai (art. 130, 131, 142 al. 1, 145 al. 1 let. b CPC). Partant, il est recevable.

2. L'appel peut être formé pour violation du droit et constatation inexacte des faits. La Cour connaît de la cause avec plein pouvoir d'examen (art. 310 CPC).

La procédure simplifiée s'applique aux affaires patrimoniales dont la valeur litigieuse ne dépasse pas 30'000 fr. (art. 243 al. 1 CPC) et, indépendamment de la valeur litigieuse, aux litiges relevant de la LEg (art. 243 al. 2 let. a CPC).

Abstraction faite des conclusions de l'appelante relevant de la LEg, la valeur litigieuse de ses autres prétentions est inférieure à 30'000 fr., de sorte que la procédure simplifiée est applicable au présent litige (art. 243 al. 1 CPC). La cause est soumise aux maximes inquisitoire (art. 247 al. 2 let. b ch. 2 CPC) et de disposition (art. 58 al. 1 CPC).

3. 3.1 Selon l'art. 317 al. 1 CPC, les faits et les moyens de preuve nouveaux ne sont pris en considération en appel que s'ils sont invoqués ou produits sans retard (let. a) et s'ils ne pouvaient pas être invoqués ou produits devant la première instance bien que la partie qui s'en prévaut ait fait preuve de diligence (let. b).

3.2 En l'espèce, les pièces nouvellement produites par l'appelante (nos 18 à 24) sont irrecevables, car elle n'explique pas les raisons pour lesquelles elle ne les a pas soumises au premier juge. Elles sont, au demeurant, sans pertinence pour l'issue du litige.

4. L'appelante reproche au Tribunal de ne pas avoir retenu de nombreux faits et conclut au complètement de l'état de fait.

4.1 Les faits de la cause concernent ceux qui sont pertinents (cf. art. 150 al. 1 CPC relatif à l'objet de la preuve). Les parties doivent collaborer à l'établissement des faits pertinents pour le sort de la cause (arrêt du Tribunal fédéral 4A_701/2012 du 19 avril 2013 consid. 1.2).

4.2 En l'espèce, l'état de fait se limite aux faits pertinents pour trancher le litige, de sorte qu'il n'y a pas lieu de le compléter comme le voudrait l'appelante, par des éléments non pertinents.

Le grief est infondé.

5. L'appelante reproche au Tribunal de ne pas avoir considéré qu'elle avait été victime de harcèlement psychologique et sexuel.

5.1 Selon l'art. 328 CO, l’employeur protège et respecte, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur; il manifeste les égards voulus pour sa santé et veille au maintien de la moralité. En particulier, il veille à ce que les travailleurs ne soient pas harcelés sexuellement et qu’ils ne soient pas, le cas échéant, désavantagés en raison de tels actes (al. 1). Il prend, pour protéger la vie, la santé et l’intégrité personnelle du travailleur, les mesures commandées par l’expérience, applicables en l’état de la technique, et adaptées aux conditions de l’exploitation ou du ménage, dans la mesure où les rapports de travail et la nature du travail permettent équitablement de l’exiger de lui (al. 2).

5.1.1 Le mobbing, qui contrevient à l'obligation de l'employeur de protéger et respecter, dans les rapports de travail, la personnalité du travailleur (art. 328 al. 1 CO), se définit comme un enchaînement de propos et/ou d'agissements hostiles, répétés fréquemment pendant une période assez longue, par lesquels un ou plusieurs individus cherchent à isoler, à marginaliser, voire à exclure une personne sur son lieu de travail (arrêt du Tribunal fédéral 4A_439/2016 du
5 décembre 2016 consid. 5.2).

Il n'y a pas harcèlement psychologique du seul fait qu'un conflit existe dans les relations professionnelles, qu'il règne une mauvaise ambiance de travail, ou encore du fait qu'un supérieur hiérarchique n'a pas satisfait pleinement et toujours aux devoirs qui lui incombent à l'égard de ses collaborateurs (arrêt du Tribunal fédéral 4A_439/2016 du 5 décembre 2016 consid. 5.2 et les références citées). Il arrive que le travailleur se sente victime d'un harcèlement alors qu'en réalité, il s'adapte difficilement à une modification de son environnement ou accepte mal une déception provoquée par une décision légitime (Aubert, Commentaire romand, n. 7 ad art. 328 CO). Sans volonté de mise à l'écart systématique, il n'y a pas de mobbing (Aubert, ibidem).

Le harcèlement est généralement difficile à prouver, si bien qu'il faut savoir admettre son existence sur la base d'un faisceau d'indices convergents (arrêt du Tribunal fédéral 4A_439/2016 du 5 décembre 2016 consid. 5.2 et les références citées). Selon Wyler/Heinzer, les indices admis comprennent les témoignages indirects, en particulier ceux des personnes auxquelles la victime s'est confiée ou de son médecin, lesquels peuvent être suffisants pour un harcèlement (Droit du travail, 3ème éd., 2014, p. 876). Toutefois, selon Aubert, les attestations médicales établies sur les seuls dires du salarié doivent être prises avec circonspection car elles ne reflètent pas tous les aspects objectifs d'une situation (op. cit., n. 8 ad art. 328 CO).

L'expérience de la vie montre que des changements de supérieurs hiérarchiques impliquent généralement des modifications dans les exigences à l'égard des subordonnés (arrêt du Tribunal fédéral 4A_680/2012 du 7 mars 2013 consid. 5.4.1).

Le mobbing peut n'être qu'imaginaire, voire même être allégué abusivement pour tenter de se protéger contre des remarques et mesures justifiées (arrêt du Tribunal fédéral 4A_439/2016 du 5 décembre 2016 consid. 5.2 et les références citées).

L'employeur qui n'empêche pas que son employé subisse un mobbing contrevient à l'art. 328 CO (ATF 125 III 70 consid. 2a; arrêt du Tribunal fédéral 4A_439/2016 du 5 décembre 2016 consid. 5.2).

Par ailleurs, des pressions, exercées sur le personnel, non pas dans l'intention arrêtée de nuire comme dans l'hypothèse du mobbing, mais en raison d'un système très contraignant d'acquisition de la clientèle par le démarchage, au détriment de la personnalité des employés, constituent une violation de l'art. 328 CO (arrêt du Tribunal fédéral 4C.24/2005 du 17 octobre 2005 consid. 7.2).

5.1.2 Le harcèlement sexuel est un cas particulier d’atteinte à la personnalité au sens de l’article 328 CO. Il est une forme grave de discrimination fondée sur le sexe dans les rapports de travail, qui est contraire à l'interdiction de discriminer ancrée à l'art. 3 LEg (arrêt du Tribunal fédéral 4A_473/2013 du 2 décembre 2013 consid. 3.1 et les références citées).

L'art. 4 LEg définit le harcèlement sexuel comme un "comportement importun de caractère sexuel ou tout autre comportement fondé sur l'appartenance sexuelle, qui porte atteinte à la dignité de la personne sur son lieu de travail, en particulier le fait de proférer des menaces, de promettre des avantages, d'imposer des contraintes ou d'exercer des pressions de toute nature sur une personne en vue d'obtenir d'elle des faveurs de nature sexuelle".

Les remarques sexistes et les commentaires grossiers ou embarrassants entrent dans la définition du harcèlement sexuel. Bien que l'art. 4 LEg ne se réfère qu'à des cas d'abus d'autorité, la définition englobe tous les comportements importuns de caractère sexuel, soit également ceux qui contribuent à rendre le climat de travail hostile, par exemple des plaisanteries déplacées (ATF 126 III 395 consid. 7b/bb; arrêt du Tribunal fédéral 2A.404/2006 du 9 février 2007 consid. 6.1).

L'art. 6 LEg est une règle spéciale par rapport au principe général de l'art. 8 CC, lequel prescrit à celui qui allègue un fait pour en déduire un avantage d'en apporter la preuve. L'art. 6 LEg instaure un assouplissement du fardeau de la preuve d'une discrimination à raison du sexe, en ce sens qu'il suffit à la partie demanderesse de rendre vraisemblable l'existence d'une telle discrimination par l'apport d'indices objectifs pour engendrer un renversement du fardeau de la preuve. Autrement dit, si la vraisemblance de la discrimination est démontrée, il appartient à l'employeur d'apporter la preuve stricte qu'elle n'existe pas (ATF 131 II 393 consid. 7.1; 130 III 145 consid. 4.2 p. 161 s. et 5.2 p. 164 s. et les références). Mais le harcèlement sexuel n’est pas compris dans les situations qui bénéficient de l’allègement du fardeau de la preuve, de sorte que le travailleur doit prouver cette atteinte conformément à l’article 8 CC. Le législateur a en effet volontairement exclu le harcèlement sexuel de l’allègement du fardeau de la preuve considérant qu’il ne fallait pas créer une exception à la règle générale au motif que cette situation est précisément exceptionnelle tant du point de vue de l’employeur que de l’employé (arrêt du Tribunal fédéral 4A_473/2013 du
2 décembre 2013 consid. 3.1 et 3.2 ; Lempen, Le harcèlement sexuel sur le lieu de travail et la responsabilité civile de l’employeur, 2006, p. 169). Toutefois, vu la difficulté de prouver ce type d'atteinte à la personnalité, il est possible de l'admettre sur la base d'un faisceau d'indices convergents (arrêt du Tribunal fédéral 4A_214.2006 du 19 décembre 2006, consid. 2.2 ; Cour d'appel des prud'hommes de Genève du 25 février 2008, C/8030/2006 – 3, consid. 2.3), à l'instar de ce qui vaut en matière de harcèlement psychologique (arrêt du Tribunal fédéral 1C_418/2008 du 27 mai 2009, consid. 2.2).

5.2 En l'espèce, il ressort des faits exposés ci-dessus que l'appelante entretenait avec l'épouse de l'intimé – qui s'occupait de la gestion de l'institut -, dans les premières années de la relation contractuelle, des liens dépassant le cadre strictement professionnel, d'ailleurs qualifiés d'amitié par des témoins. Au décès de celle-ci en juillet 2011, la situation professionnelle de l'appelante s'est sensiblement modifiée, en ce sens que celle-ci s'est vue confier de nombreuses nouvelles tâches par l'intimé au point d'assumer de fait la gestion quotidienne de l'institut. Si ce nouveau statut a été reconnu dans un premier temps par sa promotion au statut d'Office manager et une augmentation de salaire substantielle, par la suite l'appelante a rencontré des difficultés dans ses relations avec l'intimé, dont l'attitude et la personnalité étaient très différentes de celle de son épouse.

En effet, il résulte des différents témoignages que l'intimé était imprévisible, parfois colérique, très contrôlant, facilement critique - parfois manifestement à tort –, et peu enclin à la remise en question. Ses remarques relatives à l'origine somalienne de l'appelante étaient parfaitement déplacées. L'intimé peinait à adopter une attitude constante et professionnelle à l'égard de ses employées féminines, se montrant à certaines occasions par trop familier – bise, rapprochement corporel, commentaires sur l'habillement, plaisanteries douteuses, etc. –, à d'autres très gentil – fleurs, chocolat, aide – et à d'autres encore excessivement autoritaire, exigeant par exemple l'accomplissement de tâches exorbitantes – promener le chien, nettoyage des toilettes, etc. De par sa position hiérarchique, l'appelante était largement exposée à ces changements d'attitudes et exigences variées. Il est établi qu'elle en a largement souffert, les ressentant comme une absence de reconnaissance de ses compétences et engagements.

La pression à laquelle elle était soumise, du fait de sa loyauté pour l'épouse défunte, et compte tenu de sa situation personnelle (permis B, aide fournie à sa mère en Somalie), qui l'empêchait de donner son congé, ont contribué à rendre la situation encore plus difficile. A cela s'ajoutait le stress relationnel vécu avec son père et son oncle qui l'avait peut-être rendue plus sensible avec les hommes. Enfin, la relation avec son partenaire était également empreinte de stress et de nature à la fragiliser davantage. Cette fragilité n'est d'ailleurs pas incompatible avec une personnalité solide et forte, compte tenu de la complexité de la situation.

Cela étant, l'appelante a parlé de ses problèmes conjugaux à l'intimé, lequel lui a alors proposé son aide, et lui a envoyé un message affectueux pour son anniversaire, démontrant qu'elle lui faisait aussi confiance, ce qu'a d'ailleurs confirmé le Dr M______. De plus, à plusieurs reprises durant la procédure, elle a fait part de son plaisir à travailler dans l'entreprise de l'intimé.

L'évaluation mitigée faite en août 2014 a fait éclater le différend entre les parties. Elle a été très mal vécue par l'appelante, renforçant encore son sentiment de non reconnaissance. L'intimé a pourtant peu de temps après établi un certificat de travail très élogieux et consenti une partie de l'augmentation sollicitée.

Au vu de ces différents éléments, la Cour, avec le Tribunal, retient que la relation entre les parties s'inscrivait dans un contexte difficile de deuil et de modification de l'organisation de l'entreprise, qu'elle était très complexe et qu'elle s'est peu à peu dégradée. L'attitude critiquable de l'intimé était avant tout due à sa personnalité, et d'autres personnes que l'appelante ont eu à la subir. Il n'est pas établi que celui-ci avait des visées sexuelles sur l'appelante ou l'intention de l'humilier, de la rabaisser ou d'exercer sur elle des pressions pour la contraindre à quitter son poste. Au contraire, il apparaît que malgré ses critiques, il avait besoin des services et du dévouement de l'appelante, qu'il appréciait.

En conclusion, c'est à bon droit que le Tribunal a considéré que le harcèlement psychologique ou sexuel de l'appelante par l'intimé n'était pas suffisamment démontré.

Le jugement entrepris sera dès lors confirmé.

6. Il n'y a pas lieu à la perception de frais judiciaires (art. 19 al. 3 let. c LACC) ni à l'allocation de dépens (art. 22 al. 2 LACC).

* * * * *


PAR CES MOTIFS,
La Chambre des prud'hommes, groupe 5 :

A la forme :

Déclare recevable l'appel formé le 3 janvier 2017 par A______ contre le jugement JTPH/425/2016 rendu par le Tribunal des prud'hommes le 17 novembre 2016 dans la cause C/11689/2015 - 5.

Au fond :

Confirme ce jugement.

Déboute les parties de toutes autres conclusions.

Sur les frais :

Dit qu'il n'est pas perçu de frais ni alloué de dépens.

Siégeant :

Madame Pauline ERARD, présidente; Monsieur Daniel FORT, juge employeur, Madame Claudine DEMAISON, juge salariée; Madame Véronique BULUNDWE-LEVY, greffière.

 

 

 

 

 

 

 

 

Indication des voies de recours et valeur litigieuse :

 

Conformément aux art. 72 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification avec expédition complète (art. 100 al. 1 LTF) par-devant le Tribunal fédéral par la voie du recours en matière civile.

 

Le recours doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14.

 

Valeur litigieuse des conclusions pécuniaires au sens de la LTF supérieure ou égale à 15'000.- fr.