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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1366/2009

ATAS/754/2012 du 31.05.2012 ( AI ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1366/2009 ATAS/754/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 31 mai 2012

8ème Chambre

 

En la cause

Monsieur L__________, domicilié à Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître LORENZI Valérie

 

recourant

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITE DU CANTON DE GENEVE, sis rue de Lyon 97, Genève

intimé

 


EN FAIT

Monsieur L__________ (ci-après : l’assuré ou le recourant), né en 1979, d’origine portugaise, célibataire, est père de deux enfants nés en 1996 et en 2001. L’intéressé a vécu dans son pays d’origine jusqu’à l’âge de neuf ans, après quoi il est venu en Suisse avec sa mère.

L’assuré a fréquenté l’école primaire, le cycle d’orientation de Budé, puis les ateliers de préapprentissage de la Société genevoise pour l’intégration professionnelle d’adolescents et d’adultes (ci-après : SGIPA) durant une année. Sans formation professionnelle, il a travaillé sporadiquement au bénéfice de contrats temporaires octroyés par le chômage, en dernier lieu comme couvreur.

L’assuré a commencé à consommer du cannabis dès l’âge de douze ans, avant de consommer d’autres produits stupéfiants et de sombrer dans la polytoxicomanie. De novembre 1998 à octobre 2007, il a effectué quatorze séjours en hôpital psychiatrique.

Le 28 octobre 2003, l’assuré a déposé une demande de prestations auprès de l’Office cantonal de l’assurance-invalidité (ci-après : Office AI), en raison de troubles psychosociaux et d’addiction, visant à l’octroi d’une réorientation professionnelle, d’un reclassement dans une nouvelle profession ou d’une rente.

Dans un rapport à l’attention de l’Office AI daté du 2 janvier 2004, le Dr A_________, médecin généraliste de la Fondation PHENIX, a posé les diagnostics de dépendance à l’alcool, dépendance aux opiacés substituée par la méthadone, dépendance à la cocaïne, dépendance au cannabis, trouble de la personnalité émotionnellement labile de type borderline et hépatite C chronique. Le patient était en arrêt de travail à 100% depuis mai 2000. Le médecin a indiqué que le patient avait consommé du cannabis dès l’âge de douze ans et dès quatorze ans, il s’était alcoolisé de façon massive fréquemment. A partir de dix-huit ans, il avait consommé de l’héroïne, de la cocaïne et de l’ecstasy. Il avait été hospitalisé à onze reprises en milieu psychiatrique pour toxicomanie et abus d’alcool, la dernière hospitalisation pour sevrage d’alcool remontant à septembre 2003. Le Dr A_________ a signalé que durant l’année, le patient avait fait plusieurs crises d’épilepsie sur facteurs déclenchant. Le patient présentait un manque d’énergie, une perte de mémoire avec des confusions fréquentes, une incapacité de concentration, des vomissements et des malaises fréquents le matin, une anxiété permanente et il se sentait déprimé. Le pronostic après douze ans d’abus souvent massif d’alcool et de différentes drogues était très mauvais et la capacité de gain était à l’évidence nulle, ceci de manière probablement définitive. Selon ce médecin, de nombreuses hospitalisations pour crise d’alcoolisation, épilepsie ou autre décompensation psychique étaient à prévoir.

Dans le questionnaire complémentaire pour les troubles psychiques, le Dr A_________ a relevé que le patient présentait un trouble de la personnalité depuis 1991 et que des particularités comportementales de nature sociale, culturelle ou familiale influençaient grandement l’affection actuelle. Les troubles psychiques de l’assuré étaient réactionnels à des évènements de vie adverses. L’incapacité de travail était due à des affections physiques ou mentales uniquement.

Répondant au questionnaire en cas de toxicomanie, le Dr A_________ a indiqué que la toxicomanie était la conséquence d’un trouble du développement, qui existait depuis l’âge de douze ans, en raison d’un père polytoxicomane. La toxicomanie avait causé un dommage mental important sous forme de lésions cérébrales, d’une altération de la personnalité d’origine organique et avait entraîné des hospitalisations de longue durée.

Le Dr B_________, médecin généraliste, a établi un rapport à l’attention de l’Office AI en date du 19 avril 2005. Il a retenu comme diagnostics ayant des répercussions sur la capacité de travail un état dépressif, une hépatite alcoolique à répétition, une dépendance à l’alcool, une dépendance aux opiacés substituée par méthadone, une tendance au cannabis et aux opiacés, une hépatite C chronique, un trouble de la personnalité et de l’obésité. L’incapacité de travail était de 100% depuis le 1er mai 2000. Ce médecin a expliqué que le patient présentait des idées suicidaires, un trouble du comportement, une absence d’énergie et des douleurs de l’épaule gauche. Il a mentionné une très bonne collaboration dans la mesure de l’état de santé actuel. Les plaintes concernaient l’hépatite à répétition, avec un risque d’évolution vers une cirrhose. La capacité de gain restait nulle, le patient n’arrivait presque pas à gérer son quotidien. Le Dr B_________ a joint en annexe à son rapport les résultats d’une échographie de l’abdomen supérieur pratiquée en date du 19 juillet 2004; le diagnostic de stéatose, voire de stéatofibrose, a été évoqué. Selon le Dr B_________, l’activité exercée auparavant n’était pas exigible, il n’y avait pas de possibilité d’améliorer la capacité de travail au poste occupé et l’on ne pouvait exiger de l’assuré qu’il exerce une autre activité.

L’Office AI a requis et obtenu de la Clinique de Belle-Idée les rapports d’hospitalisation relatifs aux séjours de l’assuré.

a) Dans le rapport établi le 20 novembre 1998 à la suite de la première hospitalisation, le Dr C_________, chef de clinique, a posé le diagnostic principal selon la CIM-10 de troubles mentaux et troubles du comportement liés à l’utilisation de cocaïne, et comme autres diagnostics des troubles mentaux et troubles du comportement liés à l’utilisation de cannabis, utilisation continue. Sous la rubrique facteurs de stress, il était indiqué un problème familial, avec des circonstances durables, et stress moyen. A l’anamnèse, le patient décrivait depuis un mois des hallucinations auditives et visuelles, ainsi que des idées délirantes de persécution. Le médecin mentionnait que le patient, toxicomane actif, avait un passé carcéral important. Au status psychiatrique à l’admission, le patient présentait des hallucinations auditives et visuelles avec des attitudes d’écoute, des idées délirantes de persécution, un sentiment d’être manipulé. Il avait perdu 45 kilos en huit mois et se méfiait des aliments. Ses idées bizarres s’étaient aggravées depuis un mois, dès le moment où il avait débuté des consommations de cocaïne. Dans le passé, il avait eu plusieurs épisodes comparables. Malgré ses difficultés, le patient avait continué son travail de couvreur et assumé son rôle dans sa famille. Après l’arrêt des toxiques, la symptomatologie psychotique avait rapidement régressé, le patient n’avait pas présenté de syndrome de sevrage. A la sortie persistait un sentiment de persécution modéré. Un traitement neuroleptique avait été proposé, que le patient avait refusé.

b) La deuxième hospitalisation a eu lieu en entrée non volontaire du 2 juin 1999 au 14 juin 1999, suite à des crises clastiques, pour risques suicidaires et hétéro-agressivité. A l’entrée dans l’unité, le patient était alité et présentait un hématome de l’hémiface droite. Un traitement de Seresta avait été introduit, remplacé par la suite par du Tranxilium.

c) L’intéressé a été hospitalisé une troisième fois en entrée non volontaire, du 16 juin au 21 juin 1999, suite à une intoxication volontaire.

d) Lors de la quatrième hospitalisation, en date du 15 août 1999, les médecins ont indiqué sous la rubrique "diagnostic principal" des troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de drogues multiples ainsi que des troubles liés à l’utilisation d’autres substances psycho-actives, syndromes de dépendance. En outre, un diagnostic provisoire de personnalité émotionnellement labile de type borderline, a été retenu.

e) Dès la sixième hospitalisation, toujours en entrée non volontaire, du 3 septembre au 13 septembre 1999, le diagnostic de trouble de la personnalité émotionnellement labile de type borderline a été définitivement posé.

f) La dernière hospitalisation datait du 21 octobre 2006, en entrée non volontaire, pour un risque auto et hétéro-agressif majeur, dans le contexte d’une consommation d’alcool. Le diagnostic principal retenu par la Dresse D_________, cheffe de clinique, était celui de troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation d’alcool. Comme autres diagnostics, elle a mentionné des troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de dérivés de cannabis, un syndrome de dépendance, utilisation continue, une personnalité émotionnellement labile, type borderline F60.31 et des troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation d’opiacés, syndrome de dépendance, actuellement sous substitution et sous surveillance médicale.

Dans une note du 17 janvier 2007, une collaboratrice du Service médical régional Suisse romande (ci-après : SMR) a relevé que les rapports médicaux ainsi que les nombreuses lettres de sortie des hospitalisations avaient été soumises au Dr E_________, psychiatre FMH au SMR. Selon ce médecin, la toxicomanie était primaire, il n’y avait pas de pathologie psychiatrique à la source de la toxicomanie, ni de prise en charge pédopsychiatrique. Il a conclu qu’il n’y avait pas de pathologie psychiatrique incapacitante et que le sevrage aux toxiques divers pouvait être exigé. Sur le plan somatique, les tests hépatiques en novembre 2006 étaient nettement en amélioration par rapport à 2004.

Par décision du 12 avril 2007, l’Office AI a rejeté la demande de prestations de l’assuré, au motif que les dépendances comme l’alcoolisme, la pharmacodépendance et la toxicomanie ne constituaient pas en soi une invalidité au sens de la loi et que l’incapacité de gain était due avant tout à la toxicodépendance, de sorte qu’il n’y avait pas une invalidité au sens de la loi. Concernant les séjours en milieu psychiatrique, après étude des rapports de sortie, le SMR a considéré qu’il n’y avait pas de pathologie psychiatrique qui serait à l’origine de sa dépendance.

Le 7 mai 2007, l’assuré a interjeté recours. Il a exposé être suivi régulièrement pour les questions de dépendance dont il était prisonnier depuis de nombreuses années. Cependant, les éléments qui l’amenaient à user de toxiques étaient plus complexes et trouvaient leur origine dans les troubles psychiques qui perturbaient son existence et sa vie en société depuis sa plus tendre enfance. Il faisait valoir que dès son jeune âge, il avait souffert de dyslexie et d’hyperactivité, ce qui lui avait valu de suivre une scolarité spécialisée. Par la suite, lorsqu’il s’était retrouvé en préformation à la SGIPA, il avait suivi une thérapie de groupe durant près d’une année. A seize ans, il était devenu père d’un petit garçon. Il avait vécu avec la mère de son fils pendant quelque temps, puis ils s’étaient séparés. Depuis lors, sa vie n’avait été qu’une succession de difficultés. Il a rappelé qu’il avait été suivi successivement par la Consultation de la Navigation, par la Fondation PHENIX et à cette époque encore par le Dr B_________. Il a relevé que lorsqu’il avait formulé sa demande AI, les médecins l’avaient appuyé dans cette démarche, faisant état d’une personnalité labile, de type borderline. Son médecin, spécialiste en toxicodépendances, envisageait une fois encore de mettre en place un suivi psychiatrique pour tenter de traiter les causes de sa dépendance aux produits. Il était convaincu que les troubles qu’il présentait de longue date étaient issus d’une pathologie psychiatrique et a demandé de reconsidérer la décision de l’Office AI et de juger qu’il relevait d’une prise en charge de l’assurance. Il s’est déclaré par ailleurs prêt à se soumettre à une expertise psychiatrique.

Dans sa réponse du 19 juin 2007, l’Office AI a conclu au rejet du recours, relevant que sur la base du diagnostic posé par les médecins des Hôpitaux Universitaires de Genève (ci-après : HUG), à savoir les troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de drogues multiples, le SMR avait considéré qu’il n’y avait pas de pathologie psychiatrique invalidante.

Par arrêt du 24 octobre 2007, le Tribunal des assurances sociales (aujourd’hui : Chambre des assurances sociales de la Cour de justice) a admis le recours de l’assuré et a renvoyé la cause à l’intimé pour instruction complémentaire dans le sens des considérants et nouvelle décision.

En substance, il a considéré que l’avis du Dr E_________ du SMR – absent du dossier – allait à l’encontre des conclusions des autres médecins, spécialistes en psychiatrie et toxicodépendances, qui tous mentionnaient l’existence de troubles mentaux, qu’il n’était pas exclu que la toxicomanie du recourant résulte d’une affection physique ou psychique au vu des allégués du recourant concernant les difficultés qu’il aurait présentées durant l’adolescence, qu’il convenait dès lors de procéder à une instruction complémentaire, notamment auprès des médecins de la clinique de Belle-Idée, afin de poser un diagnostic précis sur la nature des troubles somatiques et psychiques dont souffrait le recourant, de dire, en particulier, si la toxicomanie avait provoqué une maladie qui entraînait une atteinte à la santé physique ou mentale, nuisant à la capacité de gain, ou si elle résultait elle-même d’une atteinte à la santé physique ou mentale qui avait valeur de maladie, de déterminer la capacité de travail du recourant et les activités exigibles de sa part, et, enfin, si nécessaire, d’ordonner une expertise auprès d’un médecin spécialisé en toxicodépendances et addictions.

Invitée par l’Office AI à remplir un nouveau rapport médical, le Département de psychiatrie / Service d’addictologie a indiqué, dans un courrier du 26 août 2008, qu’il n’était pas en mesure de compléter le rapport médical pour le motif que le patient n’avait été vu que deux fois (23 juin et 7 juillet 2008) à la consultation des Acacias, qu’il avait été vu par des psychologues de l’unité mobile sise à la consultation Rue Verte, sans qu’il n’y ait eu un suivi médical.

De son côté, le Dr B_________ n’a pas répondu à l’Office AI, de sorte que ce dernier a considéré que son mandat avait été révoqué. Le SMR a dès lors suggéré la mise en œuvre d’une expertise par un Centre d’Observation Médicale de l’Assurance Invalidité (ci-après : COMAI).

a) Les 29 et 30 octobre 2008, le recourant a fait l’objet d’une expertise par le Centre d’Expertise Médicale CEMED SA (ci-après : CEMED) à Nyon.

b) Dans un rapport du 6 janvier 2009, après avoir rappelé les rapports médicaux et documents administratifs et juridiques qu’ils avaient examinés, ainsi que les données subjectives (y compris l’anamnèse et les plaintes) et objectives du recourant, les Dr F_________, spécialiste FMH en médecin interne, et G_________, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie, n’ont rien diagnostiqué avec répercussion sur la capacité de travail. En revanche, ils ont posé les diagnostics, sans répercussion sur la capacité de travail, de hépatite C chronique dès 2002, hépatopathie chronique d’origine mixte (stéatose), suspicion d’hypogonadisme hypogonadotrophique, obésité (BMI 32.8 kg/m2), status après plusieurs crises d’épilepsie dans le cadre de sevrages, status après plusieurs épisodes d’hépatites alcooliques, troubles mentaux et troubles du comportement liés à l’utilisation d’opiacés, syndrome de dépendance, utilisation continue (F11.25) depuis l’âge de 12 ans, troubles mentaux et troubles du comportement liés à l’utilisation substances psycho-actives multiples (cannabis et alcool), syndrome de dépendance, utilisation épisodique (F19.26) depuis l’âge de 12 ans, troubles mentaux et troubles du comportement liés à l’utilisation de benzodiazépines, syndrome de dépendance, utilisation continue (F13.25) depuis environ 10 ans, troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de substances psycho-actives multiples (cocaïne, ecstasy, champignons hallucinogènes et amphétamines), syndrome de dépendance, actuellement abstinent (F19.20) depuis l’âge de 12 ans.

Dans la discussion du cas, les experts ont indiqué, au sujet de l’histoire médicale du recourant, que ce dernier était un assuré de 29 ans, d’origine portugaise, établi en Suisse dès 1990, sans formation professionnelle. Il était célibataire, père de deux enfants de deux mères différentes. Il avait été principalement actif dans le bâtiment comme couvreur, travaillant de manière temporaire Il était probablement analphabète, présentant des difficultés importantes de lecture et de compréhension de textes simples. Il leur avait annoncé avoir travaillé pour la dernière fois en 2001.

L’assuré présentait une polytoxicomanie sévère depuis l’adolescence, d’abord sous forme de cannabis, puis d’ecstasy et enfin d’opiacés dès l’âge de 12 ans. Depuis 10 ans, il était régulièrement hospitalisé en milieu psychiatrique. Par ailleurs, il aurait été hospitalisé à 3 ou 4 reprises en milieu somatique à la suite d’hépatite alcoolique, le détail de ces hospitalisations n’étant pas connu des experts, avec la précision que, selon le médecin traitant contacté par téléphone, la dernière avait eu lieu en novembre 2007. Il avait présenté alors un subictère. Les investigations n’avaient pas montré de cirrhose, et ce malgré une consommation alcoolique importante (jusqu’à 10 litres de bière par jour), ainsi qu’une hépatite C chronique connue depuis 2002. Il avait été conclu à une stéatose hépatique. Le recourant avait présenté à la même époque une importante rétention d’eau restée d’origine indéterminée et traitée avec succès par Lasix. Une cardiopathie alcoolique avait été semble-t-il exclue. Alors qu’il s’est décrit comme une sorte de colosse du temps où il travaillait sur les chantiers, capable de transporter des tonnes par jour (il pesait alors 117 kg), il a indiqué avoir perdu environ 40 kg jusqu’en 2004, vraisemblablement dans le cadre de l’importante toxicomanie à la cocaïne et consécutivement à une dénutrition. Depuis qu’il avait été placé sous méthadone, il annonçait une prise de poids progressive, une fatigabilité exagérée, des nausées, des vomissements fréquents (pratiquement chaque fois qu’il avalait sa méthadone, ce qui l’obligerait à ravaler son vomi). Le recourant a annoncé aux experts n’avoir plus touché de drogues depuis 7 ou 8 mois, tout en ayant admis poursuivre une consommation importante de haschisch. De même, il aurait diminué de manière drastique la consommation d’alcool avec cependant des rechutes brèves mais itératives, interrompue en raison d’une mauvaise tolérance avec des épisodes de céphalées, de vomissements et de diarrhées.

Dès l’âge de 20 ans, un diagnostic de trouble de la personnalité borderline a été suspecté, puis retenu dans les différentes hospitalisations psychiatriques et par son psychiatre traitant actuel d’après le dossier médical. Les éléments cliniques décrits par l’assuré confirmaient ce diagnostic. A l’hôpital de jour, il n’avait pas été objectivé de troubles cognitifs.

Les experts ont encore mentionné une suspicion d’apnées du sommeil selon les dires de l’assuré, qui auraient été observées par des soignants durant un séjour hospitalier.

Les experts ont également indiqué sur le plan somatique que l’assuré présentait une hépatopathie chronique d’origine toxique et virale sur hépatique C chronique de génotype défavorable. Les dernières investigations datant de mars 2008 n’avaient pas permis d’identifier une décompensation ascitique et n’avaient pas mis en évidence de signe d’hypertension portale, ni d’insuffisance hépatocellulaire. Selon les résultats transmis par le médecin traitant, la situation hépatique évoluait favorablement. Les tests hépatiques restaient largement perturbés avec des GGT entre 200 et 400 U/l et des AST et ALT régulièrement au double de la norme. II n’y avait en l’état pas d’ictère. Selon le médecin traitant, l’état psychique contre-indiquait d’envisager un traitement de l’hépatite C chronique.

Le recourant se plaignait d’une fatigue intense, d’une baisse d’énergie et d’une intolérance aux efforts. Du point de vue somatique, les causes de cette fatigue paraissent multiples chez cet assuré obèse profondément déconditionné, sous haut dose de méthadone (220 mg/j) et consommateur habituel de haschich. L’examen clinique montrait en outre une diminution de la pilosité, une voix au timbre féminin ainsi qu’une gynécomastie, le tout étant suggestif d’une insuffisance gonadotrope. II était fait état d’une diminution de la testostérone plasmatique, laquelle pouvait d’ailleurs expliquer les troubles érectiles présentés. Cette diminution de la testostérone pouvait être le fait de la consommation d’opiacés. Il avait également été décrit sous méthadone. Il semblait que les opiacés réduisaient la sécrétion de gonadotrophines au niveau hypothalamique conduisant à un hypogonadisme hypogonadotrophique. Cela étant, les études menées auprès de patients traités par méthadone avaient montré des résultats contradictoires (seulement 10% des patients substitués en méthadone auraient des taux de testostérone abaissée selon Brown Et AI - 2005). Pour d’autres auteurs, un remplacement d’androgènes pouvait être indiqué chez ces patients à taux de testostérone bas et se plaignant de manque d’énergie, de faiblesses musculaires, de dysfonctions sexuelles ainsi que de hauts risques d’ostéoporose. Compte tenu du contexte, il n’a pas paru possible aux experts de soutenir l’idée que la fatigue présentée par l’assuré aurait été le fait d’un déficit en androgènes. II présentait en effet beaucoup d’autres pistes à explorer. Quant à la notion de prise de poids et de rétention d’eau liées au traitement de méthadone, effet secondaire parfois cité, elle devait être mise en perspective de la mauvaise alimentation, de la sédentarité et de l’alcoolisme. Enfin, et de manière un peu surprenante, l’examen clinique effectué au CEMED ne mettait pas en évidence d’altérations au status neurologique.

Sur le plan psychique, les experts ont indiqué que l’assuré présentait avant tout une polytoxicomanie primaire au premier plan (opiacés, cannabis, benzodiazépines et alcool). Il était substitué par la méthadone qui pouvait expliquer le ralentissement psychomoteur, l’abattement général et les troubles de la concentration et de la mémoire. Elle pouvait aussi expliquer la somnolence diurne. Ces effets secondaires étaient renforcés par le traitement de Seresta, benzodiazépine.

Selon les experts, il était difficile d’avoir une appréciation précise des symptômes dépressifs dont une bonne partie (fatigue, abattement, ralentissement, troubles de la concentration et de la mémoire) pouvait être imputée au traitement médicamenteux. Une évaluation psychiatrique pourrait être effectuée dans une phase d’abstinence de toute substance au vu des multiples pistes pouvant expliquer ces symptômes. Le sentiment de tristesse ne permettait à lui seul de retenir un diagnostic d’épisode dépressif.

Les plaintes d’évitement de la foule, du sentiment qu’on le juge ou d’être méfiant ne permettaient pas à eux seuls de retenir un diagnostic de trouble phobique. D’une part, l’assuré pouvait sortir seul et assister à des groupes dans le cadre de ses activités à l’Hôpital de jour et d’autre part, la tendance à l’interprétation pouvait être reliée à la consommation de cannabis.

Les éléments anamnestiques déclarés par le patient et dans les rapports de sortie des différentes hospitalisations en milieu psychiatrique évoquaient un diagnostic de trouble de la personnalité émotionnellement labile de type borderline. L’anamnèse était évocatrice d’un tel diagnostic mais il fallait savoir que la prise de toxiques pouvait aussi entraîner une labilité de l’humeur, une impulsivité, et des difficultés relationnelles. Objectivement, l’évaluation psychiatrique ne mettait pas en évidence de signe en faveur d’un tel trouble de la personnalité. Etant donné que la consommation de toxiques était primaire, il était difficile de justifier un tel diagnostic indépendamment de la polytoxicomanie.

Un syndrome d’apnée du sommeil pouvait aussi expliquer la fatigue, l’abattement et la somnolence.

En guise de synthèse et de conclusion, les experts ont retenu que, sur le plan somatique, l’hépatopathie chronique d’origine mixte, toxique et virale était actuellement compensée, si bien qu’il n’était pas retenu de limitation fonctionnelle. Par ailleurs, s’il existait un hypogonadisme suggéré par une certaine féminisation, une gynécomastie et des troubles érectiles, ceux-ci n’avaient cependant pas de répercussion significative dans une activité physique appropriée. Si une reprise d’activités professionnelles n’était pas possible, elle découlait essentiellement de la consommation de substances psycho-actives, de l’alcool et du syndrome de déconditionnement lui-même réversible par la mise en place de mesures de réentrainement à l’effort. Dans ces conditions, il n’était pas reconnu, du point de vue somatique, de limitation significative. Sur le plan psychique, l’assuré présentait donc une polytoxicomanie primaire au premier plan (opiacés, cannabis, benzodiazépines et alcool). La consommation d’opiacés et de benzodiazépines était continue et celle de cannabis et d’alcool était épisodique d’après les déclarations de l’assuré. Il ne consommerait plus d’autres drogues (dans le passé amphétamines, cocaïne, champignons hallucinogènes). Un sevrage aux opiacés, cannabis et benzodiazépines permettrait d’amender les symptômes de fatigue, abattement, troubles de la concentration et de la mémoire. Un diagnostic d’épisode dépressif ne pouvait être retenu. II n’y avait pas d’argument en faveur d’un trouble anxieux. Les experts ne retenaient pas le diagnostic de trouble de la personnalité en raison d’un manque d’arguments cliniques. Enfin, les informations données par le Dr H_________, la prise continue des toxiques actuelles et l’évaluation objective des experts ne suffisaient pas pour suspecter des troubles cognitifs. Sur un plan médico-théorique, il n’y avait pas de limitation fonctionnelle, car ces symptômes pouvaient être améliorés par le sevrage et la bonne participation aux groupes de médiation montrait la présence de capacités d’adaptation. La capacité de travail exigible était donc complète.

Le 9 février 2009, l’Office AI a adressé un projet de refus de la demande de prestations, dans lequel il indiquait qu’il ressortait du rapport d’examen (du CEMED) du 6 janvier 2009 et de l’étude du dossier par le SMR, que l’incapacité de gain du recourant était due avant tout à sa toxicodépendance et qu’il n’y avait pas d’invalidité au sens de la loi.

Par courrier du 5 mars 2009, le recourant s’est opposé au projet de décision de refus de prestations, en indiquant que, depuis sa plus tendre enfance, il avait rencontré de graves difficultés psychosociales, il avait grandi dans un milieu familial perturbé, avait subi divers traumatismes qui l’avaient particulièrement éprouvé. A l’école, il avait rencontré de nombreux problèmes et avait été classé dans la catégorie d’enfant violent, présentant des problèmes de comportement. Il avait dû suivre un enseignement spécialisé et consulter le Service médico-pédagogique (ci-après : SMP). Sa scolarité s’était mal déroulée et ses apprentissages de base restaient lacunaires en dépit de son passage à la SGIPA. Au cours de son adolescence, il avait été confronté à divers produits toxiques, avait commencé à consommer ces derniers pour tenter de calmer les profondes angoisses qui l’étreignaient et essayer de faire face à la vie quotidienne. Sans cela, il se montrait agressif et présentait des comportements antisociaux. Dans l’incapacité de ce fait de s’insérer scolairement et professionnellement, il s’était de plus en plus trouvé prisonnier de ces dérivatifs. Il avait commencé vers l’âge de 20 ans à présenter des troubles psychiques importants qui lui avaient valu plusieurs séjours en hôpital psychiatrique. Les médecins alors s’avouaient dans l’impossibilité de lui administrer un traitement qui aurait pu permettre d’empêcher les manifestations de ces troubles. A divers reprises, il avait été qualifié de «borderline» et comme personne présentant d’importants troubles psychiques. Toutefois, le personnel soignant se trouvait par ailleurs dans l’impossibilité de lui offrir des alternatives thérapeutiques lui permettant d’échapper aux consommations auxquelles il avait recours pour simplement survivre, être moins agité et moins en souffrance. Cette situation l’avait empêché non seulement d’entreprendre une formation mais également de conduire par la suite des projets de réinsertion. De plus, son état de santé somatique, affecté par diverses pathologies telles que l’hépatite C, la maladie de Scheuermann et d’autres symptômes encore, le handicapaient également lourdement pour pouvoir travailler. C’est pourquoi, depuis de nombreuses années, il était dans l’incapacité totale de développer la moindre activité professionnelle.

Par la décision attaquée du 16 mars 2009, l’Office AI a rejeté la demande de prestations AI du recourant, en considérant que l’incapacité de gain de ce dernier était due avant tout à sa toxicodépendance et qu’il n’existait pas d’invalidité au sens de la loi.

Par lettre à la juridiction de céans du 14 avril 2009, postée le 16, le Dr D. J. H_________, médecin interne au Département de psychiatrie / Hôpital de jour Les Crêts des HUG, a déclaré contester officiellement la décision de refus de prestations de l’Office AI, en concluant à une nouvelle expertise psychiatrique associant un examen neuropsychologique complet.

Il a indiqué que le recourant présentait dans l’enfance des troubles du développement psychologique, spécifiquement, troubles émotionnel (F93) puis trouble des conduites type oppositionnel avec provocation (F91.3) et trouble du fonctionnement social de l’enfance (F94.9) avec conséquences inévitables sur les acquisitions scolaires (F81.3) ayant nécessité une prise en charge par le SMP - un élément dont l’expert semblait nier l’existence -, ainsi qu’au sein des ateliers SGIPA. Par ailleurs la polytoxicomanie de la mère du recourant au long de sa grossesse laissait considérer que ces troubles de la santé mentale étaient en rapport avec des atteintes prénatales. En sus de ses diagnostics addictologiques (F11.22 [troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation d’opiacés, syndrome de dépendance, suit actuellement un régime de maintenance ou de substitution, sous surveillance médicale]), (F10.21 [troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation d’alcool, syndrome de dépendance, actuellement abstinent, mais dans un environnement protégé]), le recourant présentait des troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de drogues multiples et troubles liés à l’utilisation d’autres substances psycho-actives, trouble résiduel ou psychotique de survenue tardive, trouble de la personnalité ou du comportement (F19.71) et des troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de drogues multiples et troubles liés à l’utilisation d’autres substances psycho-actives, trouble résiduel ou psychotique de survenue tardive, autre déficit cognitif persistant (F19.74), associés à un trouble de l’humeur récurrent type (F33.1) ainsi que des troubles anxieux type (F40.1), (F41.1), atteintes à la santé mentale tant provoquées par les années d’addictions que favorisées par les problématiques de l’enfance et nuisant à la capacité de gain.

Le Dr H_________ a estimé que les motifs ayant amené le recourant à solliciter des prestations AI persistaient et entravaient durablement toutes ses tentatives de réinsertion. En particulier, ses troubles psychiatriques tant antérieurs que subséquents à sa toxicomanie expliquaient son incapacité de gain sinon permanente, à tout le moins durable. Il reprochait à l’expert de l’intimé de s’être concentré sur la problématique addictologique, en négligeant la conduite d’un examen neuropsychologique.

Le Dr H_________ a joint un rapport, non signé, de M_________, psychologue au Département de psychiatrie / Service d’addictologie des HUG du 15 avril 2009. Dans ce rapport, il était indiqué que le recourant avait fait l’objet d’un bref pointage neuropsychologique sous abstinence d’alcool depuis 3 mois. La psychologue indiquait qu’un test de mémoire épisodique verbale avait révélé que l’apprentissage et la recognition d’une liste de 15 mots étaient sévèrement déficitaires, qu’un test de fluence verbale avait situé le patient dans les normes inférieures tant en condition littérale qu’en condition catégorielle mais que les performances étaient nettement déficitaires tant à un test de flexibilité mentale qu’à une épreuve impliquant l’inhibition d’une réponse automatique. Elle avait conclu que les troubles mnésiques et exécutifs sévères dont souffrait le recourant pourraient être davantage investigués lors d’un bilan neuropsychologique complet.

Par lettre du 16 avril 2009, l’assuré a recouru contre la décision de l’Office AI du 16 mars 2009, en concluant à une nouvelle expertise psychiatrique associant un examen neuropsychologique complet. Il a essentiellement reproduit la teneur du courrier du Dr H_________ du 14 avril 2009.

Dans un avis du 26 mai 2009, le Dr I_________ du SMR a considéré que le rapport de M_________ omettait de préciser que, si le recourant était effectivement abstinent d’alcool, il était en revanche substitué à de très forte doses de méthadone et prenait des benzodiazépines qui, selon les experts, pouvaient expliquer le ralentissement psychomoteur et les troubles de la concentration et de la mémoire. Il s’est finalement référé à l’expertise du CEMED pour retenir que la polytoxicomanie du recourant était primaire, sans comorbidité psychiatrique objectivée, et que c’était bien cette polytoxicomanie qui était responsable de l’incapacité de travail du recourant.

Dans sa réponse du 28 mai 2009, l’Office AI a conclu au rejet du recours, en se référant aux conclusions du rapport d’expertise du 6 janvier 2009 et de l’avis du SMR du 26 janvier 2009, ainsi qu’à l’avis du SMR du 26 mai 2009. Il s’est également opposé à une nouvelle expertise, estimant que le dossier contenait suffisamment d’indications médicales fiables.

Par lettre à la juridiction de céans du 18 juin 2009, Madame O_________, assistante sociale de l’HOSPICE GENERAL, a indiqué que lorsqu’il était en 6ème primaire, le recourant avait déjà été remarqué par l’infirmière scolaire et avait été suivi par un médecin et un psychologue, qu’au terme de sa scolarité au cycle d’orientation, il avait fait la connaissance d’un thérapeute et conseiller social de la SGIPA par l’intermédiaire duquel une thérapie familiale avait été mise en place durant une année et que cette dernière avait été interrompue en raison du fait que le recourant était devenu père. Elle a ajouté que le recourant avait échoué à tous les examens d’entrée en apprentissage.

Par courrier du 6 juillet 2009, la juridiction de céans a transmis aux experts du CEMED le courrier du Dr H_________ du 14 avril 2009, y compris le rapport de M_________ du 15 avril 2009, et la lettre de Madame O_________ du 18 juin 2009, en leur demandant de se déterminer à leur sujet.

Par courrier du 20 juillet 2009, Madame O_________ a transmis à la juridiction de céans des documents du Service médico-pédagogique (ci-après : SMP) relatifs au suivi du recourant durant son adolescence. Il en ressort qu’en 1991, un trouble de la personnalité de type passif-agressif (problématique borderline) avait été diagnostiqué.

Par courrier du 27 juillet 2009, la juridiction de céans a transmis aux experts du CEMED (ch. 15 supra) les documents du SMP.

Par courrier du 15 septembre 2009, le Dr G_________ du CEMED a relevé que les éléments symptomatiques objectifs relevés dans les documents du SMP transmis permettaient d’évoquer un diagnostic de trouble mixte des conduites et des émotions (agressivité, jalousie, difficultés avec l’autorité, régression, troubles alimentaires, cauchemars, affects dépressifs, relations conflictuelles avec le beau-père, crises retenues de frustration, tendances à inventer des histoires à la limite de la fabulation) avec un impact scolaire (intelligence apparemment modeste, français syntaxiquement pauvre, au profil enfantin). Ce trouble avait probablement débuté avant le début de la consommation de toxiques qui se situait à l’âge de 12 ans par une consommation de cannabis. A la lumière de ces nouveaux éléments, la polytoxicomanie devait être considérée comme secondaire aux troubles des conduites.

Il a ajouté que l’évolution de ce trouble des conduites vers un trouble de la personnalité émotionnellement labile était possible. Un diagnostic de trouble de la personnalité ne pouvait être posé avant l’âge de 16-17 ans selon la CIM-10. Or, la prise de toxiques s’aggravait progressivement par l’augmentation de la dose quotidienne de cannabis, puis le recours à des drogues dites «dures» (ecstasy, héroïne, cocaïne) et d’alcool. D’après les lettres de sortie de la clinique psychiatrique de Belle-Idée à Genève, la polytoxicomanie était déjà importante durant l’adolescence. Certains symptômes du trouble de la personnalité émotionnellement labile (labilité de l’humeur, impulsivité, manque de contrôle devant les états de colère) étaient également observés durant les consommations de toxiques et durant les phases de sevrage. L’expert a estimé qu’il était difficile de faire une distinction claire sur l’origine de ces symptômes en raison de l’importance de la polytoxicomanie au premier plan durant les hospitalisations psychiatriques. C’est la raison pour laquelle l’expert précité n’a pas retenu un diagnostic définitif de trouble de la personnalité émotionnellement labile. Il en allait de même pour le diagnostic de trouble anxieux et de trouble de l’humeur qui restait possible, mais dont l’évaluation était difficile en raison de la polytoxicomanie

Dans un avis du SMR du 29 septembre 2009, le Dr I_________ a retenu que, même si l’expert admettait que la consommation de drogues était secondaire, c’était bien cette dernière qui était responsable de l’incapacité de travail de l’assuré qui ne présentait par ailleurs pas de trouble psychiatrique évident, que ce n’était qu’après sevrage qu’il y aurait éventuellement lieu de refaire un bilan psychiatrique mais qu’en l’état, c’était bien la polytoxicomanie qui empêchait l’assuré de travailler.

Par courrier du 5 octobre 2009, l’Office AI a persisté à conclure au rejet du recours, en se référant à l’avis du SMR précité.

Par courrier du 21 septembre 2010, le Tribunal des assurances sociales (aujourd’hui : la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice) a informé les parties de son intention de mettre en œuvre une expertise bidisciplinaire (psychiatrique et neuropsychologique) et leur a communiqué les questions qu’il avait l’intention de poser à l’expert, tout en leur impartissant un délai pour compléter celles-ci.

L’Office AI s’est déterminé sur les questions à poser et a proposé des noms d’experts. En revanche, le recourant n’a pas fait usage de ce droit.

a) Le 26 avril 2011 la Chambre de céans a ordonné une expertise bidisciplinaire et l’a confiée au Dr J_________, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie (pour la partie psychiatrique) et Madame K_________, spécialiste FSP en neuropsychologie (pour la partie neuropsychologique).

b) Dans un rapport du 19 août 2011, après avoir exposé l’anamnèse psychosociale, les antécédents personnels et familiaux, les pièces médicales importantes, les plaintes de l’assuré, les observations effectuées par le psychiatre et le neuropsychologue, l’examen neuropsychologique, l’entretien avec le médecin traitant (Dr B_________), l’examen de laboratoire, les experts ont diagnostiqué, sur le plan psychiatrique, une personnalité émotionnellement labile, type borderline (F60.31), existant depuis le début de l’adolescence sur la base d’un trouble du développement dès l’enfance, des troubles mentaux et troubles du comportement liés à l’utilisation de substances psycho-actives multiples, actuellement abstinent pour tous les produits excepté une substitution à la méthadone et le cannabis (F19.22), et, sur le plan neuropsychologique, des troubles attentionnels avec ralentissement sévère, dysfonction exécutive avec difficultés d’inhibition et de programmation, et troubles de consolidation mnésique chez un assuré à l’efficience cognitive (WAIS-IV) se situant dans la moyenne inférieure. Les experts ont estimé qu’il n’y avait pas lieu de retenir spécifiquement des diagnostics du registre anxieux (par exemple phobie sociale) dans la mesure où le trouble de la personnalité émotionnellement labile incluait par lui-même des états anxieux divers et que l’intensité des états anxieux ne justifiait pas un diagnostic à part dans ce cas.

Par rapport à l’examen neuropsychologique, les experts ont indiqué qu’il avait été effectué chez un assuré collaborant dans les limites de ses possibilités, fortement ralenti et fatigable, familier, agité (bouge sur la chaise, tics), ayant du mal à se concentrer, se plaignant de douleurs visuelles et de nausées pendant les tests, nosognosique de ses difficultés cognitives. Il avait mis en évidence un ralentissement marqué et des difficultés majeures pour mobiliser son attention, une dysfonction exécutive avec des difficultés d’inhibition et de programmation, une mauvaise consolidation mnésique à une semaine (performances normales inférieures après 45 minutes), une efficience cognitive dans la moyenne inférieure, avec des stratégies de raisonnement parfois originales et inhabituelles et la préservation globale des fonctions instrumentales. Anamnestiquement, les experts ont relevé que les difficultés attentionnelles étaient présentes depuis l’enfance, associées à des troubles des conduites, et qu’elles avaient eu des répercussions sur la scolarité. Dans l’examen, les experts n’avaient cependant pas relevé de trouble majeur des acquisitions scolaires (dyslexie-dysorthographie, dyscalculie), tout au plus des compétences faibles en orthographe, sans pouvoir évoquer de dysorthographie développementale. En regard du dernier examen neuropsychologique effectué le 14 avril 09 aux HUG, les performances mnésiques s’étaient améliorées. Il semblait que les fonctions exécutives, déjà sévèrement déficitaires, étaient globalement stables. Il était possible que l’assuré présentait un TDAH [trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité] depuis l’enfance, mais l’anamnèse complexe (prise de cortisone, troubles psychologiques, mère toxicomane durant la grossesse, trouble des conduites) rendait la pose du diagnostic difficile.

Dans la discussion du cas, les experts ont indiqué que, fondamentalement, la question de la toxicomanie primaire ou secondaire n’était probablement plus pertinente pour le médecin vu la complexité de l’étiologie des affections addictives. Les notions de comorbidité et d’interaction compromettaient la pertinence de considérations linéaires. S’agissant du caractère primaire ou secondaire de la toxicomanie de l’assuré, les experts ont indiqué qu’il s’agissait dans ce cas d’une situation bien documentée qui paraissait relativement évidente sur le plan médical. Il s’agissait d’un fils de parents eux-mêmes toxicomanes, ce qui posait la question de l’identification possible du sujet avec ce type d’images parentales. L’assuré aurait ensuite subi l’influence de produits alors qu’il était encore dans le ventre de sa mère et aurait subi un premier sevrage à la naissance. Enfin, les éléments du dossier et l’anamnèse confirmaient clairement que l’expertisé présentait des troubles du développement importants dans la période qui suivait son arrivée en Suisse, au point qu’un traitement psychiatrique spécialisé avait été instauré. Le comportement de l’expertisé était déjà décrit à l’époque comme étant lié à un trouble de la personnalité passive-agressive et à une problématique borderline (dernière page du dossier SMP). Le comportement ultérieur qui favorisait les passages à l’acte au détriment de la réflexion et de l’intériorisation, la gestion défaillante des pulsions, la sensibilité au rejet et la problématique de dépendance, le manque de confiance en soi et l’image insuffisante de soi découlant d’une faille narcissique, confirmaient une problématique borderline qui devait être diagnostiquée comme personnalité émotionnellement labile, type borderline (F60.31 selon la CIM-10). La prise de risque, les actes auto et hétéro-agressifs, les relations interpersonnelles intenses et instables, la consommation de produits divers, faisaient partie intégrante de ce tableau clinique. Ainsi, le recourant présentait le tableau classique d’un trouble de la personnalité borderline et il était difficilement compréhensible que l’un des symptômes de ce trouble, la consommation de produits, soit séparé du trouble et identifiée prioritairement comme cause de la perte des aptitudes professionnelles. L’expert G_________ du CEMED décrivait dans son rapport les aspects essentiels pour arriver au diagnostic de trouble de la personnalité émotionnellement labile type borderline (enfance chaotique parmi deux parents toxicomanes, carences affectives et structurelles sévères, abandons, difficultés d’intégration, puis de nombreux passages à l’acte, prises de risque, nombreuses hospitalisations, actes auto-agressifs, etc.). Ce diagnostic figurait par ailleurs à de nombreuses reprises dans les rapports de sortie de Belle-Idée et le comportement au long cours de type borderline apparaissait à travers ces rapports. Les raisons d’infirmer ce diagnostic échappent certainement à des considérations médicales et psychologiques. Le trouble de la personnalité dont souffrait l’expertisé était particulièrement sévère et impliquait à lui seul une incapacité de travail au long cours, de par l’instabilité et la mauvaise gestion pulsionnelle qu’il impliquait dans sa vie. Au trouble de la personnalité s’ajoutait une limitation notable des fonctions cognitives, qui ne pourrait être qu’en partie améliorée par un sevrage de la méthadone. Un tel sevrage serait toutefois contreproductif car il déstabiliserait indubitablement l’équilibre psychique bancal actuel.

A la question de savoir si, en cas de toxicomanie diagnostiquée, les troubles éventuellement constatés étaient la cause ou la conséquence de cette toxicomanie, les experts ont répondu que le trouble de la personnalité était un facteur causal dans la toxicomanie. La toxicomanie était une comorbidité très fréquente dans les troubles de la personnalité de type borderline. L’importance actuelle des troubles, en particulier le ralentissement et les difficultés de consolidation mnésiques étaient clairement secondaires à la polytoxicomanie.

S’agissant de la capacité de travail de l’assuré dans l’activité précédemment exercée et dans une activité adaptée, les experts ont indiqué que le trouble de la personnalité entraînait dans ce cas une incapacité de travail depuis dix ans au moins. L’expertisé n’avait pu travailler dans sa vie que sur de courtes périodes chez le même employeur et il n’avait pas su construire une situation sociale ou professionnelle. Il aurait eu besoin d’un encadrement bienveillant et structurant au moins dès son adolescence, mais il était fort probable que du fait de son organisation de personnalité et de ses antécédents il aurait lutté, inconsciemment, contre un tel cadre. Le tableau neuropsychologique actuel était clairement incompatible avec une activité professionnelle. Même si les capacités de raisonnement étaient globalement préservées, le ralentissement et les troubles attentionnels étaient tels qu’ils entravaient à la fois l’exercice d’une activité professionnelle et d’une reconversion professionnelle. Les troubles neuropsychologiques avaient déjà été objectivés le 14 avril 2009 aux HUG. En se référant à l’anamnèse et aux difficultés scolaires déjà présentes dans l’enfance, les troubles étaient probablement présents depuis toujours, mais s’étaient aggravés progressivement avec la polytoxicomanie. Les experts ont précisé ne pas avoir de moyen de dater le début de l’atteinte ni de quantifier l’aggravation en pourcent. Il se pouvait qu’un sevrage de la méthadone puisse améliorer en partie le tableau, mais un tel sevrage décompenserait indiscutablement l’équilibre psychique bancal actuellement atteint. Aucune activité adaptée aux limitations fonctionnelles de l’assuré en économie libre ne paraissait possible pour les experts, les troubles cognitifs étant beaucoup trop importants. La faille narcissique et la mauvaise gestion pulsionnelle rendaient également impossible une intégration professionnelle.

En ce qui concerne les limitations fonctionnelles du recourant, les experts ont indiqué que l’expertisé présentait une faille narcissique majeure, un sentiment d’identité vacillant et une gestion défaillante des pulsions. Il ne supportait pas les critiques, les contraintes, les confrontations à autrui. Il fuyait les gens, se repliait sur lui. Il manquait d’endurance, perdait vite espoir. Sur le plan des fonctions cognitives, il présentait une baisse des performances déjà faibles à la base, situation qui était définie par l’examen neuropsychologique. Sous l’angle neuropsychologique, il fallait éviter toute tâche à effectuer sous contrainte temporelle en raison du fort ralentissement et pour limiter les erreurs. Celles-ci seraient moindres s’il n’y avait pas de contrainte temporelle, sans pouvoir les exclure complètement. Il fallait éviter toute tâche demandant de la concentration soutenue, éviter de devoir passer rapidement d’une tâche à l’autre ou de faire deux choses à la fois. En s’adressant à l’expertisé, il fallait veiller à capter son attention en le regardant dans les yeux et éventuellement en le touchant (suivant l’environnement sonore), lui donner une consigne à la fois et s’assurer qu’il l’avait comprise; ne donner la consigne suivante qu’une fois la première effectuée. Il fallait éviter les stimuli visuels complexes (feuilles avec beaucoup de chiffres/lettres), ou les présenter par petits morceaux. L’assuré était capable d’apprendre de nouvelles informations, mais sa consolidation mnésique étant faible, il fallait lui permettre de garder avec lui un aide-mémoire pour les tâches à effectuer et un agenda pour s’organiser. Il fallait éviter les activités demandant une bonne programmation motrice (séquence complexes par exemple), ou donner du temps supplémentaire pour s’exercer.

Les experts ont encore estimé que la capacité de travail ne pouvait pas être améliorée par des mesures médicales; la stabilisation actuelle représentait probablement le maximum de ce qu’il était possible d’obtenir actuellement à travers le traitement médical. Quant aux chances de succès d’une réadaptation professionnelle, elles étaient nulles actuellement.

Dans des observations du 11 octobre 2011, l’Office AI a persisté à conclure au rejet du recours, en se référant à un avis du SMR du 11 octobre 2011.

Dans cet avis, un médecin du SMR – dont l’identité n’était pas révélée (seul le nom de code «______________» étant mentionné) pas plus que la spécialisation – a indiqué que l’expert considérait qu’il était inutile de déterminer s’il s’agissait d’une toxicomanie primaire, alors que c’était l’essence même de l’expertise psychiatrique lors de toxicomanie. Vouloir remettre en cause la jurisprudence fédérale en l’absence de séquelles sévères, durables, irréversibles et totalement incapacitantes, n’était pas du ressort du médecin ou du médecin-expert. C’était nier l’esprit de la vente volonté du législateur et de l’esprit des juges fédéraux. Le médecin précité a rappelé que l’examen neuropsychologique avait été fait alors que l’assuré était sous méthadone et consommait toujours du cannabis. De plus, l’expert n’avait pas procédé à une anamnèse fouillée dans la prise de toxiques (début, circonstances, fréquence, quantités …) qui aurait, selon le médecin du SMR, permis de se prononcer sur la présence ou non d’une toxicomanie primaire ou secondaire. L’expert ne donnait pas d’explication à son appréciation différente de celle de l’expert du CEMED, sous prétexte que les médecins traitants avaient retenu le diagnostic de trouble de la personnalité émotionnellement labile type borderline. Il n’y avait pas de sens critique entre les résultats obtenus et un assuré qui avait pris des toxiques. L’expert retenait que l’assuré avait présenté les troubles du comportement consécutifs à son arrivée en Suisse. Pour lui, les deux diagnostics retenus avaient effet de maladie, mais il ne tenait pas compte de la jurisprudence fédérale pour déterminer si ces atteintes à la santé avaient une répercussion sur la capacité de travail. Les limitations fonctionnelles sous l’angle psychiatrique étaient du ressort de la psychanalyse, quant aux limitations fonctionnelles neuropsychologiques, elles étaient totalement ou partiellement liées à la prise de toxiques, même sous contrôle médical. Le médecin précité aurait aimé avoir l’avis des experts pour déterminer si de telles limitations fonctionnelles persisteraient après abstinence complète des deux substances. Quant aux conclusions de la capacité de travail nulle dans toutes activités lucratives, elles ne reposaient que sur les éléments non pertinents relevés ci-dessus. Le médecin du SMR aurait aimé voir l’évolution de l’état de santé de l’assuré après trois à six mois d’abstinence complète. Cette expertise ne tentait pas d’y répondre et donc ne pouvait être retenue comme convaincante sur le plan médical ni probante sur le plan médico-juridique. Par conséquent, le médecin du SMR ne pouvait pas modifier son avis figurant dans les précédents avis des 1er octobre 2009 et 26 janvier 2009.

Dans un courrier du 29 décembre 2011, l’avocate – récemment nommée d’office – du recourant a informé la Chambre de céans que ce dernier, prévenu d’homicide, avait été arrêté par la police le 8 novembre 2011 et mis en détention en prison. Bien que n’ayant pu obtenir la détermination de son mandant sur l’avis du SMR du 11 octobre 2011, l’avocate a indiqué que tous les troubles importants de la personnalité retenus étaient manifestement consécutifs à un usage abusif de drogues dures durant de nombreuses années et constituaient les séquelles d’une sérieuse toxicomanie. Compte tenu du passé extrêmement destructeur de l’assuré, des traits de caractère de type paranoïaque que présentait ce dernier, de son hépatite C qui était incurable et de sa consommation quotidienne de méthadone et de cannabis depuis huit ans, le recourant, du point de vue de son profil personnel, intellectuel et professionnel, n’était en toute objectivité pas apte pas travailler et à s’insérer dans la société, étant souligné qu’il n’avait plus jamais travaillé au cours des 16 dernières années et que la réinsertion semblait totalement compromise dans son cas. Elle a contesté l’exactitude de l’affirmation du SMR sur laquelle l’expert n’aurait procédé à aucune anamnèse et qu’il n’aurait pas approfondi son examen en lien avec certaines exigences jurisprudentielles. Elle a également contesté que le SMR ait pu rendre un avis plus objectif et pertinent que l’expert, en tant que spécialiste. Elle a considéré que, contrairement au SMR, le dossier comptait nombre d’éléments probants en faveur de l’existence d’une invalidité totalement incapacitante de l’assuré. Elle n’a dès lors pas compris les raisons pour lesquelles le SMR et l’Office AI pouvaient de bonne foi persister dans leurs conclusions visant au rejet du recours de l’assuré. Elle a estimé qu’une seule dernière question pouvait éventuellement se poser, soit celle de déterminer le degré d’invalidité de l’assuré dans l’hypothèse d’une capacité de travail partielle. Enfin, dans la mesure où, dans le cadre de la procédure pénale ayant amené à l’interpellation du recourant, une nouvelle expertise psychiatrique allait être ordonnée, l’avocate du recourant a sollicité la suspension de la présente procédure en application de l’art. 14 al. 1 LPA. En définitive, l’avocate du recourant a conclu au déboutement intégral de l’Office AI et du SMR, avec suite de dépens.

 

EN DROIT

a) Conformément à l’art. 56 V al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 22 novembre 1941 en vigueur jusqu’au 31 décembre 2010 (aLOJ; RS E 2 05), le Tribunal cantonal des assurances sociales connaissait, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA; RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI; RS 831.20).

Depuis le 1er janvier 2011, cette compétence est revenue à la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice, laquelle reprend la procédure pendante devant le Tribunal cantonal des assurances sociales (art. 143 al. 6 de la LOJ du 26 septembre 2010).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

b) Interjeté dans les forme et délai prescrits par la loi, le recours est recevable (art. 56 et 60 LPGA).

a) Le litige porte sur la question de savoir si le recourant présente une atteinte à la santé lui ouvrant droit à des prestations de l’assurance-invalidité.

b) La LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2003, entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine des assurances sociales. Sur le plan matériel, le point de savoir quel droit s’applique doit être tranché à la lumière du principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 130 V 230 consid. 1.1; 335 consid. 1.2; ATF 129 V 4 consid. 1.2; ATF 127 V 467 consid. 1, 126 V 136 consid. 4b et les références).

En l’espèce, les faits déterminants se sont réalisés en partie avant et après l’entrée en vigueur de, la LPGA. Aussi, le droit à une rente de l’assurance-invalidité doit-il être examiné au regard de l’ancien droit pour la période jusqu’au 31 décembre 2002 et en fonction de la nouvelle réglementation légale après cette date (ATF 130 V 433 consid. 1 et les références). Par ailleurs, les modifications légales contenues dans la LPGA constituent, en règle générale, une version formalisée dans la loi, de la jurisprudence relative aux notions correspondantes avant l’entrée en vigueur de la LPGA; il n’en découle aucune modification du point de vue de leur contenu, de sorte que la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée (ATF 130 V 345 consid. 3).

c) Selon l’art. 4 al. 1 LAI, en sa teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2002, l’invalidité est la diminution de la capacité de gain, présumée permanente ou de longue durée, qui résulte d’une atteinte à la santé physique ou mentale provenant d’une infirmité congénitale, d’une maladie ou d’un accident. L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (MEYER-BLASER, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung, Zurich 1997, p. 8).

Selon la jurisprudence, la notion d’invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l’incapacité fonctionnelle qu’il importe d’évaluer (ATF 110 V 275 consid. 4a, 105 V 207 consid. 2). Lorsqu’en raison de l’inactivité de l’assuré, les données économiques font défaut, il y a lieu de se fonder sur les données d’ordre médical, dans la mesure où elles permettent d’évaluer la capacité de travail de l’intéressé dans des activités raisonnablement exigibles (ATF 115 V 133 consid. 2; 105 V 158 consid.1).

L’invalidité est réputée survenue dès qu’elle est, par sa nature et sa gravité, propre à ouvrir droit aux prestations entrant en considération (art. 4 al. 2 LAI). Ce moment doit être déterminé objectivement, d’après l’état de santé ; des facteurs externes fortuits n’ont pas d’importance. Il ne dépend en particulier ni de la date à laquelle une demande a été présentée, ni de celle à partir de laquelle une prestation a été requise, et ne coïncide pas non plus nécessairement avec le moment où l’assuré apprend, pour la première fois, que l’atteinte à sa santé peut ouvrir droit à des prestations d’assurance.

S’agissant du droit à une rente, la survenance de l’invalidité se situe au moment où celui-ci prend naissance, conformément à l’art. 29 al. 1 LAI, soit dès que l’assuré présente une incapacité de gain durable de 40 pour cent au moins ou dès qu’il a présenté, en moyenne, une incapacité de travail de 40 pour cent au moins pendant une année sans interruption notable mais au plus tôt le 1er jour du mois qui suit le dix-huitième anniversaire de l’assuré (art. 29 al. 2 LAI; ATF 126 V 9 consid. 2b et les références; ATF n. p. I 780/02 du 1er mai 2003, consid. 4.3.1).

En vertu de l’art. 28 al. 1 LAI (dans sa version antérieure au 1er janvier 2004), l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 66,6% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins; dans les cas pénibles, l’assuré peut, d’après l’art. 28 al. 1bis LAI, prétendre à une demi-rente s’il est invalide à 40% au moins. Dès le 1er janvier 2004, date de l’entrée en vigueur de la 4ème révision AI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s’il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux sont raisonnablement exigibles de la part de l’assuré (ATF 125 V 261 consid. 4, 115 V 134 consid. 2, 114 V 314 consid. 3c, 105 V 158 consid. 1).

d) A ce dernier égard, en ce qui concerne la valeur probante d’un rapport médical, ce qui est déterminant c’est que les points litigieux aient fait l’objet d’une étude circonstanciée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu’il prenne également en considération les plaintes exprimées par la personne examinée, qu’il ait été établi en pleine connaissance de l’anamnèse, que la description du contexte médical et l’appréciation de la situation médicale soient claires et enfin que les conclusions de l’expert soient dûment motivées. Au demeurant, l’élément déterminant pour la valeur probante n’est ni l’origine du moyen de preuve ni sa désignation comme rapport ou comme expertise, mais bel et bien son contenu (ATF 125 V 352 consid. 3a, 122 V 160 consid. 1c et les références).

e) Selon la jurisprudence, la toxicomanie ne constitue pas, en soi, une invalidité au sens de la loi. En revanche, elle joue un rôle dans l’assurance-invalidité lorsqu’elle a provoqué une maladie ou un accident qui entraîne une atteinte à la santé physique ou mentale, nuisant à la capacité de gain, ou si elle résulte elle-même d’une atteinte à la santé physique ou mentale qui a valeur de maladie (ATF 124 V 265, consid 3c; ATF n. p. I 645/03 du 22 décembre 2004, consid. 4.3; ATF n. p. 9C_395/2007 du 15 avril 2008, consid. 2.2).

La situation de fait doit faire l’objet d’une appréciation globale incluant aussi bien les causes que les conséquences de la dépendance, ce qui implique de tenir compte d’une éventuelle interaction entre dépendance et comorbidité psychiatrique. Pour que soit admise une invalidité du chef d’un comportement addictif, il est nécessaire que la comorbidité psychiatrique à l’origine de cette dépendance présente un degré de gravité et d’acuité suffisant pour justifier, en soi, une diminution de la capacité de travail et de gain, qu’elle soit de nature à entraîner l’émergence d’une telle dépendance et qu’elle contribue pour le moins dans des proportions considérables à cette dépendance. Si la comorbidité ne constitue qu’une cause secondaire à la dépendance, celle-ci ne saurait être admise comme étant la conséquence d’une atteinte à la santé psychique. S’il existe au contraire un lien de causalité entre l’atteinte maladive à la santé psychique et la dépendance, la mesure de ce qui est exigible doit alors être déterminé en tenant compte de l’ensemble des limitations liées à la maladie psychique et à la dépendance (ATF n. p. I 169/06 du 8 août 2006, consid. 2.2 et les arrêts cités; ATF n. p. 9C_395/2007 du 15 avril 2008, consid. 2.2).

f) En l’espèce, la Chambre de céans a ordonné une expertise afin d’obtenir l’avis de spécialistes sur l’état de santé du recourant et sa capacité de travail exigible. Après avoir exposé une anamnèse détaillée, reposant tant sur les déclarations de l’expertisé que sur les éléments figurant dans le dossier confié, comprenant les aspects psychosociaux, personnels, familiaux et professionnels et les pièces déterminantes (surtout médicales) du dossier, ainsi que les examens cliniques complets effectués, sur les plans psychiatrique et neuropsychologique, contenant une description précise des plaintes de l’assuré, l’entretien avec le médecin traitant (Dr B_________) et l’examen de laboratoire, les experts judiciaires ont diagnostiqué, sur le plan psychiatrique, une personnalité émotionnellement labile, type borderline (F60.31), existant depuis le début de l’adolescence sur la base d’un trouble du développement dès l’enfance, des troubles mentaux et troubles du comportement liés à l’utilisation de substances psycho-actives multiples, actuellement abstinent pour tous les produits excepté une substitution à la méthadone et le cannabis (F19.22), et, sur le plan neuropsychologique, des troubles attentionnels avec ralentissement sévère, dysfonction exécutive avec difficultés d’inhibition et de programmation, et troubles de consolidation mnésique chez un assuré à l’efficience cognitive (WAIS-IV) se situant dans la moyenne inférieure. Ils ont exposé de manière motivée et convaincante les éléments du tableau clinique leur permettant de retenir que l’assuré avait présenté un trouble de la personnalité passive-agressive et une problématique borderline dès son arrivée en Suisse, soit un comportement qui favorisait les passages à l’acte au détriment de la réflexion et de l’intériorisation, la gestion défaillante des pulsions, la sensibilité au rejet et la problématique de dépendance, le manque de confiance en soi et l’image insuffisante de soi découlant d’une faille narcissique, la prise de risque, les actes auto- et hétéro-gressifs, les relations interpersonnelles intenses et instables, et la consommation de produits divers. Ce diagnostic est par ailleurs corroboré par divers autres médecins ayant examiné le recourant, en particulier lors d’hospitalisations de ce dernier en août 1999 (partie en fait, ch. 7d) et en septembre 1999 (partie en fait, ch. 7e), ainsi que par le Dr A_________ en janvier 2004 (partie en fait, ch. 5) et le Dr B_________ en avril 2005 (partie en fait, ch. 6). Quant au Dr G_________, s’il n’avait pas évoqué ce diagnostic dans son rapport du 6 janvier 2009, il est revenu sur son appréciation à la lumière d’éléments nouveaux, en retenant que l’assuré souffrait d’un trouble des conduites ayant débuté avant sa consommation de cannabis, pouvant évoluer vers un trouble de la personnalité labile.

S’agissant du caractère primaire ou secondaire de la polytoxicomanie du recourant, les experts ont commencé par souligner que ce dernier présentait le tableau classique d’un trouble de la personnalité borderline et qu’il était difficilement compréhensible que l’un des symptômes de ce trouble, la consommation de produits, soit séparé du trouble et identifié prioritairement comme cause de la perte des aptitudes professionnelles. A la question de savoir si, en cas de toxicomanie diagnostiquée, les troubles éventuellement constatés étaient la cause ou la conséquence de cette toxicomanie, les experts ont précisément répondu que le trouble de la personnalité était un facteur causal dans la toxicomanie, que celle-ci était une comorbidité très fréquente dans les troubles de la personnalité de type borderline, et que les importants troubles, en particulier le ralentissement et les difficultés de consolidation mnésiques, étaient clairement secondaires à la polytoxicomanie. Cet avis est corroboré par celui du Dr G_________ du 15 septembre 2009, où il a relevé que les éléments symptomatiques objectifs relevés dans les documents du SMP transmis permettaient d’évoquer un diagnostic de trouble mixte des conduites et des émotions (agressivité, jalousie, difficultés avec l’autorité, régression, troubles alimentaires, cauchemars, affects dépressifs, relations conflictuelles avec le beau-père, crises retenues de frustration, tendances à inventer des histoires à la limite de la fabulation) avec un impact scolaire (intelligence apparemment modeste, français syntaxiquement pauvre, au profil enfantin), que ce trouble avait probablement débuté avant le début de la consommation de toxiques qui se situait à l’âge de 12 ans par une consommation de cannabis et qu’à la lumière de ces nouveaux éléments, la polytoxicomanie devait être considérée comme secondaire aux troubles des conduites. Ainsi, la Chambre de céans retient que la toxicomanie du recourant résulte elle-même d’une atteinte à la santé mentale (trouble de la personnalité borderline) qui a valeur de maladie.

S’agissant de la capacité de travail exigible du recourant, les experts ont indiqué que le trouble de la personnalité dont souffrait l’expertisé était particulièrement sévère et impliquait à lui seul une incapacité de travail au long cours, de par l’instabilité et la mauvaise gestion pulsionnelle qu’il impliquait dans sa vie. Au trouble de la personnalité s’ajoutait une limitation notable des fonctions cognitives. Ils ont estimé que dans toute activité, le trouble de la personnalité entraînait une incapacité de travail depuis dix ans au moins, soit depuis 2001, en rappelant que le recourant n’avait pu travailler que sur de courtes périodes chez le même employeur, qu’il n’avait pas su construire une situation sociale ou professionnelle, qu’il aurait eu besoin d’un encadrement bienveillant et structurant au moins dès son adolescence, sachant toutefois que, du fait de son organisation de personnalité et de ses antécédents il aurait probablement lutté, inconsciemment, contre un tel cadre. Actuellement, le tableau neuropsychologique était clairement incompatible avec une activité professionnelle; même si les capacités de raisonnement étaient globalement préservées, le ralentissement et les troubles attentionnels étaient tels qu’ils entravaient à la fois l’exercice d’une activité professionnelle et d’une reconversion professionnelle. Probablement présents depuis toujours, les troubles neuropsychologiques s’étaient aggravés progressivement avec la polytoxicomanie. Les experts ont précisé ne pas avoir de moyen de dater le début de l’atteinte ni de quantifier l’aggravation en pourcent. Il se pouvait qu’un sevrage de la méthadone puisse améliorer en partie le tableau, mais un tel sevrage décompenserait indiscutablement l’équilibre psychique bancal actuellement atteint. Les experts ont estimé qu’aucune activité adaptée aux limitations fonctionnelles de l’assuré en économie libre ne paraissait, les troubles cognitifs étant beaucoup trop importants, d’autant que la faille narcissique et la mauvaise gestion pulsionnelle rendaient également impossible une intégration professionnelle.

Sur le vu de ce qui précède, la Chambres de céans estime que les conclusions du rapport d’expertise judiciaire du 19 août 2011 sont claires, dûment motivées et convaincantes au regard de l’ensemble du dossier médical, et qu’elles ne sont pas infirmées par des opinions divergentes exprimées par d’autres spécialistes.

En effet, outre qu’il émane d’un médecin non identifié et, pour ce seul motif, ne saurait revêtir une quelconque valeur probante, le rapport du SMR du 11 octobre 2011 n’apporte aucun élément médical nouveau, ni ne critique le rapport d’expertise de manière convaincante. En particulier, c’est à tort que le SMR s’en prend aux experts au sujet de l’opportunité de se déterminer sur le caractère primaire ou secondaire de la toxicomanie de l’assuré, puisque ceux-ci se sont clairement déterminés sur cet aspect, en retenant que le trouble de la personnalité dont souffrait l’expertisé était primaire à la toxicomanie. De la même manière, il est erroné de prétendre que les experts ne se seraient pas déterminés au sujet de l’appréciation différente du Dr G_________ au sujet des troubles de la personnalité. En effet, les experts ont exposé en détail les signes du tableau clinique leur permettant de retenir le diagnostic de trouble de la personnalité borderline, en ajoutant que, compte tenu de ces éléments, les raisons d’infirmer le diagnostic précité échappaient certainement à des considérations médicales et psychologiques. La critique du SMR au sujet des limitations fonctionnelles de l’assuré et de l’effet d’une période d’abstinence sur celles-ci ne résiste pas à l’examen non plus, sachant que les experts ont décrit ces limitations de manière détaillée dans leur rapport, tout en précisant que le trouble de la personnalité dont souffrait l’expertisé était particulièrement sévère et impliquait à lui seul une incapacité de travail au long cours et qu’à ce trouble de la personnalité s’ajoutait une limitation notable des fonctions cognitives, ne pouvant être qu’en partie améliorée par un sevrage de la méthadone, lequel toutefois déstabiliserait indubitablement l’équilibre psychique bancal actuel et, partant, serait contreproductif. Autrement dit, les allégations de l’intimé – qui se réfère à l’avis du SMR – ne sont pas de nature à mettre sérieusement en doute la pertinence des conclusions des experts judiciaires.

En d’autres termes, le rapport d’expertise judiciaire du 19 août 2011 remplit tous les réquisits jurisprudentiels pour qu’une pleine valeur probante lui soit conférée.

La Chambre de céans peut ainsi tenir pour établi, au degré de la vraisemblance prépondérante, que l’assuré présente une atteinte à la santé psychique susceptible d’entraîner une invalidité totale depuis 2001 au moins. C’est ainsi à tort que l’Office AI a refusé la demande de prestations de l’assuré du 28 octobre 2003.

En raison de la demande tardive, déposée le 28 octobre 2003, le droit à une rente entière d’invalidité doit être reconnu à compter du 1er octobre 2002 (art. 48 al. 2 aLAI).

A teneur de l’art. 21 al. 5 LPGA, si l’assuré subit une mesure ou une peine privative de liberté, le paiement des prestations pour perte de gain peut être partiellement ou totalement suspendu à l’exception des prestations destinées à l’entretien des proches visées à l’al. 3.

Dans un arrêt du 28 juin 2006, le Tribunal fédéral des assurances a jugé que l'entrée en vigueur de l'art. 21 al. 5 LPGA n'avait pas modifié la jurisprudence développée antérieurement (ATF 116 V 323). Il a exposé qu'une mesure de détention préventive d'une certaine durée justifiait la suspension du droit à la rente de la même manière que toute autre forme de privation de liberté ordonnée par une autorité pénale (ATF 133 V 1, consid. 4 ss). L'interprétation téléologique de la disposition légale ainsi que l'égalité de traitement justifiaient que l'on s'écarte du texte clair de l'article 21 al. 5 LPGA. En effet, cette disposition visait à traiter de la même manière la personne valide de celle invalide incarcérée, dès lors que la détention les prive toutes deux de la réalisation d'un revenu. L'élément décisif résidait ainsi dans l'impossibilité pour la personne détenue d'exercer une activité lucrative, de sorte que le droit à la rencontre devait être suspendu. Toutefois, par analogie à l'art. 88a al. 1 2ème phrase et al. 2 1ère phrase RAI, seule la détention préventive d'une durée supérieure à trois mois fondait la suspension du droit à la rente (ATF I 641/06 du 3 août 2007, consid. 3.2).

En l’espèce, selon le courrier de l’avocate du recourant du 29 décembre 2011, la détention préventive de l'assurée a débuté le 8 novembre 2011 et l'on ignore si et, le cas échéant, quand elle a pris fin. Il appartiendra dès lors à l'Office AI d’instruire cette question afin, le cas échéant, de suspendre le paiement de la rente d’invalidité due au recourant.

Au vu de l’issue du litige, l’intimé versera à la recourante, représentée par une avocate en fin de procédure, une indemnité à titre de dépens de 500 fr. et s’acquittera, en outre, des frais de justice fixés à 1’000 fr. (art. 69 al. 1bis LAI).

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

L’admet et annule la décision de l’intimé du 16 mars 2009.

Dit que le recourant a droit à une rente d’invalidité entière, fondée sur un taux de 100 %, à compter du 1er octobre 2002.

Renvoie la cause à l’intimé pour calcul des prestations dues et examen de l'éventuelle suspension du paiement des prestations au sens de l'art. 21 al.5 LPGA.

Condamne l’intimé à verser au recourant la somme de 500 fr. à titre de participation à ses dépens.

Met un émolument de 1’000 fr. à la charge de l’intimé.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

Marie-Catherine SECHAUD

 

Le président suppléant

 

 

Patrick UDRY

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le