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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4331/2008

ATAS/747/2009 du 18.06.2009 ( AI ) , REJETE

Recours TF déposé le 27.08.2009, rendu le 13.04.2010, REJETE, 9C_682/2009
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4331/2008 ATAS/747/2009

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 3

du 18 juin 2009

 

En la cause

Madame K__________, domiciliée c/o Monsieur L__________, à GENEVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Marlyse CORDONIER

recourante

contre

OFFICE CANTONAL DE L'ASSURANCE-INVALIDITE, sis rue de Lyon 97, GENEVE

intimé

 


EN FAIT

Madame K__________ (ci-après : l'assurée ou la recourante), née en 1958, ressortissante algérienne, est domiciliée en Suisse depuis décembre 2002.

Le 29 mars 2004, elle est tombée dans un bus des TRANPORTS PUBLICS GENEVOIS, lorsque celui-ci a freiné brusquement.

Dans un rapport établi le 28 juillet 2004, le Dr A__________, rhumatologue FMH, a indiqué que, lors de la chute, la patiente avait ressenti un malaise, sans perte de connaissance. Elle présentait des contusions prédominant dans les régions para-dorsale et la crête iliaque droites; de fortes douleurs assez diffuses étaient rapidement apparues; la situation s'était progressivement détériorée avec l'apparition de douleurs rachidiennes paradoxales et paralombaires droites, irradiant fortement et de façon diffuse dans la fesse et le membre inférieur droits ; la patiente se plaignait également de fortes douleurs paracervicales droites irradiant dans l'épaule droite, de céphalées bilatérales, de troubles du sommeil, d’une diminution de la vision, de vertiges et d’inappétence. Le médecin a précisé que l’intéressée bénéficiait d'un suivi psychologique. Il a estimé que l'ensemble des symptômes douloureux associé aux multiples autres plaintes était à replacer principalement dans le cadre d'un syndrome de stress post-traumatique dont les répercussions semblaient devenir majeures.

Dans un rapport du 2 décembre 2004, la Dresse B__________, généraliste FMH, a exposé qu’une évaluation psychologique très détaillée avait permis de mettre en évidence un état de stress post-traumatique s’accompagnant d’un état dépressif majeur avec idées suicidaires et d’un trouble anxieux avec phobie et trouble panique. Outre le contexte psychiatrique, le médecin concluait à un état migraineux et à un syndrome douloureux chronique majoré par les troubles thymiques.

Le 24 novembre 2005, l’assurée a déposé une demande de rente auprès de l’Office cantonal de l’assurance-invalidité (OCAI) en invoquant une atteinte cérébrale et cervicale, une altération de la vue, une atteinte à la hanche droite et un syndrome de stress post-traumatique.

Dans un rapport du 24 janvier 2006, le Dr C__________, chirurgien-orthopédiste FMH, a diagnostiqué une entorse cervicale, une fracture tassement de la vertèbre D1, un syndrome de stress post-traumatique - tous apparus le 29 mars 2004, date de l’accident - ainsi qu'un glaucome. Il a précisé que la patiente était inscrite à des études d'auxiliaire de la santé et n'avait jamais pu commencer l'école. À la suite de son accident, elle avait été hospitalisée immédiatement aux Hôpitaux universitaires de Genève (ci-après : HUG) puis apparemment en psychiatrie, mais il n'avait pas pu obtenir de compte-rendu de ce séjour. La patiente avait bénéficié d'un suivi de longue durée par un psychiatre et une psychologue. Elle se plaignait de douleurs diffuses du rachis prédominant au niveau cervical et dorsal haut, d'une hypoesthésie et de paresthésies mal systématisées du membre supérieur gauche, d’insomnies, d’idées de ruine, de désastre personnel et familial, d'inutilité et de mort. Les divers examens radiologiques révélaient une discopathie étagée relativement importante C5-C6 et C7 de type dégénératif et un tassement de D1 sans compression neurale fonctionnelle. Il n'y avait aucune indication opératoire. En l'état, le Dr C__________ a estimé qu’aucune activité professionnelle n’était envisageable, essentiellement en raison du problème psychiatrique. Il a en outre signalé un glaucome sévère, avec menace de décompensation à court ou moyen terme, ainsi que des vertiges.

Dans un rapport du 29 janvier 2006 - modifié le 9 janvier 2007 -, le Dr D__________, psychiatre et psychothérapeute FMH, a diagnostiqué un état de stress post-traumatique (F43.1) et un syndrome douloureux somatoforme persistant (F45.4) existant depuis le 29 mars 2004. Il a expliqué suivre la patiente depuis le 15 décembre 2005, pour des douleurs à la nuque et une fatigue très importante, précisant qu’il n’y avait en revanche pas de plaintes psychiques. Le médecin a conclu à une totale incapacité de travail, précisant qu’il n’y avait aucune influence due à des particularités comportementales de nature sociale, culturelle ou familiale et que les troubles psychiques étaient réactionnels à des événements de vie adverse.

Dans un rapport du 6 mars 2006, le Dr E__________, oto-rhino-laryngologue et chirurgien cervico-facial FMH, a indiqué que la patiente avait souffert par le passé d’un brusque déficit vestibulaire dont il lui restait encore des séquelles. Il a ajouté qu’il n’était pas évident de savoir quelle était la participation de l’atteinte vestibulaire séquellaire à l’entretien des plaintes.

D’un questionnaire rempli en date du 20 mars 2006 par l’assurée et servant à déterminer son statut, il ressort que, si elle avait été en bonne santé, elle aurait exercé l’activité d'aide-soignante à plein temps afin d'avoir une vie sociale active et épanouie dans un métier qui lui tenait à coeur. L’assurée a cependant admis n’avoir jamais travaillé à plein temps.

Dans un rapport du 12 avril 2006, la Dresse F__________, psychiatre et psychothérapeute FMH, a diagnostiqué un état de stress post-traumatique et un syndrome douloureux chronique présents depuis le 29 mars 2004. Elle a également mentionné, en précisant qu’elle était sans répercussion sur la capacité de travail, une autre modification durable de la personnalité (F 62.0) existant au moins depuis le 26 mai 2004. Le médecin a conclu à une totale incapacité de travail depuis le 29 mars 2004.

La Dresse F__________ a expliqué avoir suivi l’assurée du 4 octobre 2004 au 2 mai 2005. De l’anamnèse, il ressort que cette dernière a quatre (recte : trois) enfants d'un précédent mariage, dont deux à sa charge, qu’elle est remariée depuis 2004 à un ressortissant espagnol au bénéfice d'un permis d'établissement, qu’elle n’a pas de formation professionnelle et commençait son intégration au moment de l'accident. La patiente, décrite comme polyplaintive, semblait ne pas répondre au traitement médicamenteux antalgique et avait une tendance à l'abus médicamenteux de sédatifs. Le médecin a réservé son pronostic en raison du fait qu’il lui semblait que la personnalité de la patiente évoluait vers une modification permanente sous l'influence du syndrome douloureux chronique. Il a par ailleurs émis l’avis que des particularités comportementales influençaient grandement l'affection, tout comme les troubles psychiques réactionnels à l'accident du 29 mars 2004.

La Dresse F__________ a joint à son rapport celui établi le 1er août 2004 par Madame M_________, psychologue et psychothérapeute FSP, laquelle a noté un grave état dépressif réactionnel à l’accident, un trouble anxieux, des phobies, un trouble panique ainsi que des douleurs physiques importantes apparues depuis l'accident de même qu'une perte d'acuité visuelle et une hypersensibilité à la lumière, expliquant que ces symptômes étaient systématiquement observés chez les patients souffrant de traumatismes crâniens consécutifs à des accidents, qu’ils étaient difficilement objectivés sur le plan neurologique mais pouvaient être attestés par un ophtalmologue.

Dans un rapport du 26 mars 2007, le Dr G_________, médecin-adjoint du service de neurochirurgie des HUG, a relevé qu’immédiatement après l’accident, la patiente avait été hospitalisée directement et exclusivement par le service de psychiatrie. Elle avait été vue à trois reprises en trois jours par l’équipe de psychiatrie pour « douleurs sur contusions » sans qu’aucun trait pathologique thymique n’ait été noté. Selon lui, la parésie du membre supérieur gauche était grandement influencée par un phénomène algique ou même supra-tensoriel. Au vu de la très grosse atteinte subjective cervicale et du membre inférieur gauche, sans traits dépressifs bien visibles mais avec un dossier radiologique montrant au plus des discopathies étagées et peut-être un status post-tassement discret D1, le médecin a préconisé d’éviter toute intervention.

Dans un rapport du 17 juillet 2007, le Dr H________, ophtalmologue FMH, a indiqué avoir pratiqué, les 16 et 23 janvier 2007, une iridotomie en raison notamment d’un risque de glaucome. Il a noté une lente dégradation de l’acuité visuelle due à un fort astigmatisme hypermétrope et à une presbytie.

Dans un rapport daté du 24 août 2007, le Dr E__________ a exposé que l’assurée avait chuté dans sa salle de bain, suite à un brusque vertige, le 3 mars 2007. Il y avait eu impact au niveau de la tête, à gauche. L’assurée s’était rendue aux urgences où l’on avait constaté une importante perforation de la membrane tympanique gauche, confirmée par un examen du Dr E__________ le 19 mars 2007. L’audiogramme révélait une surdité mixte sévère, avant tout de perception et une hypoacousie de perception de degré moyen à gauche.

Le 14 novembre 2007, l’OCAI a pu obtenir l’avis de sortie de l’unité d’urgences psychiatriques des HUG du 31 mars 2004 faisant état d’un diagnostic de troubles anxieux (F41.9).

Le dossier de l’assurée a été soumis au Dr I_______, spécialiste en médecine interne FMH et médecin auprès du Service médical de l’assurance-invalidité (ci-après : SMR). Ce dernier, dans un avis du 5 février 2008, a estimé que les modifications dégénératives de la colonne cervicale avaient été décompensées par l’entorse cervicale. Il a ajouté que la persistance, durant deux ans, de douleurs intenses, associée à l’absence de corrélations radio-cliniques et électrophysiologiques permettait de poser le diagnostic de syndrome douloureux somatoforme persistant. Il s’est en revanche montré réservé - vu l’absence d’expérience de vécu d’une situation de mort imminente ou de violence extrême - sur l’existence d’un état de stress post-traumatique. Au vu de ces incertitudes et dans le contexte d’un traitement qui ne semblait pas avoir été adéquat (abus d’antalgiques, traitement antidépresseur de trop courte durée en cas de stress post-traumatique et de syndrome douloureux somatoforme), le Dr I_______ a préconisé une expertise psychiatrique et rhumatologique auprès de la Clinique romande de réadaptation à Sion.

Dans un rapport daté du 9 mai 2008, la Dresse J______, rhumatologue FMH, a diagnostiqué un status après traumatisme cervical du 31 mars 2004 suivi d’algies persistantes cervico-brachiales à prédominance gauche, vertiges rotatoires intermittents avec instabilité sur base de déficit vestibulaire périphérique et un status post-chute à domicile en mars 2007 suivie d’une vaste perforation tympanique gauche. Il a été précisé que l’état de santé de la patiente s’aggravait et que le glaucome à l’œil droit avait été traité. La patiente se plaignait depuis une année environ d’une faiblesse du membre inférieur gauche avec électricité et fourmillements jusqu’au talon, accompagnés de blocages lors du lever ou de la marche. De l’anamnèse, il ressortait que la patiente sortait deux fois 15 minutes par jour, toujours accompagnée en raison de sa peur de tomber et de ses vertiges, et portait une minerve de façon continue; les médicaments avaient pour effet de l’endormir et entrainaient des troubles de la concentration, une chute de cheveux et des troubles gastro-intestinaux ; l’assurée ne pouvait plus conduire, ni manger et dépendait de son entourage pour les activités quotidiennes ; elle se plaignait de ce que sa vue avait beaucoup baissé.

Suivant les recommandations du Dr I_______, l’assurée a été adressée à la Clinique romande de réadaptation, où elle a séjourné du 23 au 26 juin 2008. Le Dr O______, chirurgien-orthopédiste FMH, a rendu en date du 4 juillet 2008 un rapport de synthèse sur la base du dossier médical et radiologique, de l’anamnèse, de son examen clinique, de l’expertise du Dr P______, rhumatologue FMH, de l’expertise de la Dresse Q______, psychiatrique et psychothérapeute FMH, et du rapport des ateliers professionnels.

De ce rapport, il ressort que l’assurée se plaint de cervicalgies constantes irradiant dans le membre supérieur gauche, de lombalgies constantes s’accompagnant de blocages et d’une irradiation douloureuse dans le membre inférieur gauche, vertiges, de troubles de l’équilibre et d’une perturbation de la vision. Son activité quotidienne consiste essentiellement en repos. Elle n’effectue aucune activité ménagère, les courses et les travaux ménagers étant accomplis par sa sœur ou sa fille. Elle n’a plus aucun loisir.

Le Dr O______ a fait état de très nombreux signes de non-organicité parasitant l’examen clinique et le rendant très difficilement interprétable : malgré un examen du membre supérieur droit absolument normal, toutes les fonctions articulaires et musculo-tendineuses étant présentes, l’assurée tenait son bras pendant le long du corps et ne l’utilisait que peu ou pas ; l’examen clinique du rachis était pratiquement impossible en raison de multiples hypertonies d’opposition ; l’examen du membre inférieur droit était aussi absolument normal, car toutes les fonctions articulaires et musculo-tendineuses étaient présentes.

Les diagnostics suivants ont été retenus : cervicalgies sur discopathies C5-C6 et C6-C7 et lombalgies sur discopathies L4-L5. Un syndrome douloureux somatoforme persistant (F45.4) chez une personnalité à traits histrioniques et dépendants a également été mentionné, tout en précisant qu’il était sans répercussion sur la capacité de travail.

Il a été précisé que l’examen prévu par le Dr P______ n’avait pas pu avoir lieu en raison d’une intoxication médicamenteuse de l’assurée qui avait décliné toute proposition d’évaluation en ateliers professionnels et s’était trouvée dans un état stuporeux avant de finir par s’endormir dans un état quasi comateux non réveillable.

Sur le plan psychiatrique, il a été jugé que le syndrome douloureux ne constituait pas un motif significatif d’incapacité de travail de longue durée alors que, sur le plan somatique, les discopathies entrainaient quelques limitations, consistant à devoir éviter les positions statiques prolongées, les travaux lourds et le port de charges supérieures à cinq kilos. Toutes pathologies confondues, les médecins ont estimé que, dans une activité adaptée respectant ces limitations, une capacité de travail entière était exigible.

Le Dr O______ a considéré sans objet la question relative à l’influence des troubles sur l’activité exercée jusqu’alors, au motif que l’assurée n’avait pas exercé d’activité professionnelle.

Dans son rapport du 1er juillet 2008, la Dresse Q______ a indiqué que l’assurée n’avait plus ni vie sociale ni contact à l’extérieur en dehors de sa famille, de sa belle-famille et des soignants. Selon l’assurée, les douleurs étaient momentanément soulagées par le traitement médicamenteux qu’elle avait parfois tendance à prendre de façon abusive quand les douleurs étaient trop fortes, ce qui s’était produit à deux reprises et avait entraîné une courte hospitalisation (en août 2007, puis le 24 juin 2008, au cours de l’expertise). Elle se plaignait d’une baisse de moral, de troubles du sommeil occasionnés par les douleurs, de fatigabilité, d’une perte d’élan vital et d’un manque de motivation. L’assurée expliquait passer une grande partie de la journée au lit ou dans un fauteuil, à regarder la télévision ou lire des journaux ; elle faisait quelques pas, accompagnée par un de ses proches ; elle ne prenait plus les transports publics par peur d’un nouvel accident ou d’une nouvelle chute. La Dresse Q______ a constaté un mal-être avec perte de plaisir et d’intérêt, un sentiment de vide intérieur avec manque de confiance en soi, une anticipation des échecs et une autolimitation des activités sans idées suicidaires ou de ruine, ni symptômes d’un état dépressif.

Le 23 juillet 2008, l’OCAI a adressé à l’assuré un projet de décision dont il ressortait qu’il avait l’intention de lui refuser l’octroi d’une rente au motif qu’elle ne présentait pas de pathologie invalidante somatique ou psychiatrique et qu’en l’absence de comorbidité psychiatrique, le diagnostic de syndrome somatoforme douloureux persistant de degré modéré et stabilisé ne pouvait pas être considéré comme invalidant.

Le 15 septembre 2008, l’assurée a formulé des observations à l’encontre de cette décision. Elle a allégué que l’expertise minimisait ses troubles somatiques dès lors que les diverses IRM pratiquées, notamment celle du 18 juillet 2005, mettaient en évidence, d’une part, une discopathie sévère C6-C7 avec hernie discale C5-C6 et C6-C7 appuyant sur le fourreau dural ainsi que sur l’émergence des racines correspondantes, d’autre part, un aspect cunéiforme de la vertèbre D1 évoquant un ancien tassement. Elle a fait remarquer que le Dr C__________ avait évalué sa capacité de travail entre 40 et 50% en raison de son seul état physique. En outre, l’assurée a reproché à l’expertise d’avoir négligé ses vertiges rotatoires, ses problèmes psychiques et l’abus de médicaments, lequel exprimait une extrême souffrance dont elle estimait qu’elle devrait être prise en compte.

Par décision du 23 octobre 2008, l’OCAI a confirmé sa position. Il a considéré que les arguments de l’assurée avaient été pris en compte lors de l’expertise pluridisciplinaire, mais que les limitations fonctionnelles relatives aux discopathies ne limitaient pas la capacité de travail dans une activité adaptée respectant lesdites limitations.

Par écriture du 28 novembre 2008, l’assurée a interjeté recours auprès du Tribunal de céans en concluant, préalablement, à la mise en œuvre d’une expertise pluridisciplinaire et, principalement, à l’octroi d’une rente entière d’invalidité dès le 28 novembre 2005.

La recourante conteste la valeur probante de l’expertise de la Clinique romande de réadaptation pour les mêmes motifs que précédemment. De plus, elle reproche aux experts de ne pas avoir pris en compte sa surdité de degré moyen à gauche et la diminution de son champ visuel. Elle allègue que l’expertise ne permet pas de statuer sur le caractère invalidant de son trouble somatoforme douloureux tout en relevant qu’en mentionnant un processus d’invalidation en cours, la Dresse Q______ semblait retenir une circonstance en faveur d’un pronostic défavorable. La recourante soutient qu’au vu de la complexité de sa situation médicale, une expertise multidisciplinaire est nécessaire afin de déterminer si elle dispose des ressources psychiques lui permettant de surmonter son état.

A l’appui de son recours, la recourante a produit divers rapports médicaux prenant position sur l’expertise pluridisciplinaire de juin 2008 :

- Un avis de sortie du Département des urgences médico-chirurgicales des HUG relatif au séjour de l’assurée du 29 au 31 mars 2004 retient un diagnostic de contusion des lombes et du bassin. L’accident est décrit comme un impact sur la hanche droite consécutif à une chute à la suite de deux freinages successifs, sans traumatisme crânien, ni perte de connaissance. Au deuxième jour d’observation, compte tenu de l’absence d’argument pour une lésion somatique importante, une consultation psychiatrique a été demandée.

- Le Dr C__________ a émis l’avis que l’expertise avait été réalisée dans les règles de l’art mais a regretté que certains paragraphes donnent l’impression d’une mauvaise collaboration et d’un surdosage volontaire de médicaments. Sur le plan somatique, les restrictions mentionnées lui paraissaient pertinentes et bien fondées. Il a admis qu’il n’entrait pas dans ses compétences de se prononcer sur le plan psychiatrique mais a tout de même émis l’avis que la dépendance aux médicaments n’avait pas été suffisamment prise en compte, dès lors que la patiente présentait une addiction aux neuromodulateurs, antalgiques morphinique et benzodiazépines et qu’au vu de son état d’accoutumance et de dépendance, elle lui paraissait incapable d’exercer la moindre activité professionnelle. Le Dr C__________ a proposé une cure de sevrage bien qu’il était peu probable que cette mesure rencontrât l’adhésion de l’assurée (cf. rapport du 11 novembre 2008).

- La Dresse J______ a estimé que l’origine de la symptomatologie était vraisemblablement mixte, à savoir en partie organique (troubles dégénératifs avec discopathie et hernie discale cervicale - neuropathie canalaire carpienne mise en évidence par l’EMG du 18 novembre 2008) mais également en rapport avec la gravité subjective de l’événement traumatique initial. Elle a observé que la réalité de ce traumatisme et la souffrance morale ne ressortaient pas des conclusions de l’expertise (cf. rapport du 24 novembre 2008).

- Le Dr H________ a émis l’opinion qu’en raison de ses troubles visuels (perte campimétrique concentrique bilatérale), de son état général et des cervicalgies présentes, l’assurée était incapable de travailler (cf. rapport du 24 novembre 2008).

- Le Dr D__________ a confirmé que la patiente présentait un syndrome douloureux somatoforme persistant et qu’elle avait développé par la suite un épisode dépressif qui était désormais d’intensité moyenne avec syndrome somatique ainsi qu’une dépendance aux benzodiazépines (cf. rapport du 25 novembre 2008).

L’intimé a soumis ces rapports au SMR. Dans un avis médical du 30 janvier 2009, le Dr R______, généraliste FMH, a relevé que la dépendance aux benzodiazépines ne justifiait pas une incapacité de travail aux yeux de l’assurance-invalidité. S’agissant de l’atteinte attentionnelle observée par l’ophtalmologue, il a relevé que ce dernier ne précisait pas si, lors sa mise en évidence, l’assurée était sous benzodiazépines (ces dernières diminuaient effectivement l’attention). En définitive, le Dr R______ a émis l’avis que ces rapports n’apportaient pas beaucoup d’éléments nouveaux si ce n’était la confirmation de l’abus de benzodiazépines et de la nécessité d’un sevrage afin de récupérer une capacité de travail.

Dans sa réponse du 4 février 2009, l’intimé a conclu au rejet du recours. Il soutient que la recourante n’apporte aucun élément probant susceptible de remettre en cause l’expertise dont il considère qu’elle remplit toutes les conditions jurisprudentielles permettant de lui reconnaître une pleine valeur probante.

Le 6 février 2009, le Tribunal de céans a transmis à la recourante une copie de cette écriture et lui a accordé un délai pour venir consulter les pièces du dossier. A l’issue de ce délai, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

Conformément à l'art. 56V al. 1 let. a ch. 2 de la loi genevoise sur l'organisation judiciaire (LOJ), le Tribunal cantonal des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’article 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI). Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

La LPGA est entrée en vigueur le 1er janvier 2003 entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de l'assurance-invalidité. Elle est applicable en l'espèce, dès lors que les faits juridiquement déterminants se sont déroulés postérieurement à son entrée en vigueur (cf. ATF 130 V 446 ss consid. 1, 129 V 4 consid. 1.2). Les modifications légales contenues dans la LPGA constituent, en règle générale, une version formalisée dans la loi, de la jurisprudence relative aux notions correspondantes avant l'entrée en vigueur de la LPGA; il n'en découle aucune modification du point de vue de leur contenu, de sorte que la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée (ATF 130 V 345 consid. 3). Les modifications de la LAI du 6 octobre 2006 (5ème révision de la LAI), entrées en vigueur le 1er janvier 2008, sont régies par le même principe et ne sont donc pas applicables.

Selon l’art. 60 al. 1 LPGA, le délai de recours est de trente jours. Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours formé le 28 novembre 2008 contre la décision du 23 octobre 2008, reçue le 29 octobre 2008, est recevable, en vertu des art. 56 ss LPGA.

Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente entière de l'assurance-invalidité, plus particulièrement sur le caractère invalidant des atteintes à sa santé.

Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l'art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur un marché du travail équilibré dans son domaine d'activité, si cette diminution résulte d'une atteinte à sa santé physique, mentale ou psychique et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles. Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28 al. 2 LAI).

En vertu de l’art. 28 al. 1 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70 % au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60 % au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50 % au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40 % au moins.

Parmi les atteintes à la santé psychique, qui peuvent, comme les atteintes physiques, provoquer une invalidité au sens de l'art. 4 al. 1 LAI en liaison avec l'art. 8 LPGA, on doit mentionner - à part les maladies mentales proprement dites - les anomalies psychiques qui équivalent à des maladies. On ne considère pas comme des conséquences d'un état psychique maladif, donc pas comme des affections à prendre en charge par l'assurance-invalidité, les diminutions de la capacité de gain que l'assuré pourrait empêcher en faisant preuve de bonne volonté; la mesure de ce qui est exigible doit être déterminée aussi objectivement que possible. Il faut donc établir si et dans quelle mesure un assuré peut, malgré son infirmité mentale, exercer une activité que le marché du travail lui offre, compte tenu de ses aptitudes. Le point déterminant est ici de savoir quelle activité peut raisonnablement être exigée dans son cas. Pour admettre l'existence d'une incapacité de gain causée par une atteinte à la santé mentale, il n'est donc pas décisif que l'assuré exerce une activité lucrative insuffisante; il faut bien plutôt se demander s'il y a lieu d'admettre que la mise à profit de sa capacité de travail ne peut, pratiquement, plus être raisonnablement exigée de lui, ou qu'elle serait même insupportable pour la société (ATF 102 V 165; VSI 2001 p. 224 consid. 2b et les références; cf. aussi ATF 127 V 298 consid. 4c in fine).

Il existe une présomption que les troubles somatoformes douloureux ou leurs effets peuvent être surmontés par un effort de volonté raisonnablement exigible (ATF 131 V 50). Une expertise psychiatrique est, en principe, nécessaire quand il s'agit de se prononcer sur l'incapacité de travail que les troubles somatoformes douloureux sont susceptibles d'entraîner (ATF 130 V 353 consid. 2.2.2 et 399 consid. 5.3.2). Le caractère non exigible de la réintégration dans le processus de travail peut résulter de facteurs déterminés qui, par leur intensité et leur constance, rendent la personne incapable de fournir cet effort de volonté. Dans un tel cas, en effet, l'assuré ne dispose pas des ressources nécessaires pour vaincre ses douleurs. La question de savoir si ces circonstances exceptionnelles sont réunies doit être tranchée de cas en cas à la lumière de différents critères. Au premier plan figure la présence d'une comorbidité psychiatrique importante par sa gravité, son acuité et sa durée. Peut constituer une telle comorbidité un état dépressif majeur (ATF 130 V 352 consid. 3.3.1 in fine; voir aussi ATFA non publié I 805/04 du 20 avril 2006, consid. 5.2.1 et les références). D'autres critères peuvent être déterminants. Ce sera le cas des affections corporelles chroniques, d'un processus maladif s'étendant sur plusieurs années sans rémission durable (symptomatologie inchangée ou progressive), d'une perte d'intégration sociale dans toutes les manifestations de la vie, d'un état psychique cristallisé, sans évolution possible au plan thérapeutique, résultant d'un processus défectueux de résolution du conflit, mais apportant un soulagement du point de vue psychique (profit primaire tiré de la maladie, fuite dans la maladie), de l'échec de traitements ambulatoires ou stationnaires conformes aux règles de l'art (même avec différents types de traitement), cela en dépit de l'attitude coopérative de la personne assurée (ATF 130 V 352). Plus ces critères se manifestent et imprègnent les constatations médicales, moins on admettra l'exigibilité d'un effort de volonté (ATFA non publié I 1093/06 du 3 décembre 2007, consid. 3.2).

Si les limitations liées à l'exercice d'une activité résultent d'une exagération des symptômes ou d'une constellation semblable, on conclura, en règle ordinaire, à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit à des prestations d'assurance. Au nombre des situations envisagées figurent la discordance entre les douleurs décrites et le comportement observé, l'allégation d'intenses douleurs dont les caractéristiques demeurent vagues, l'absence de demande de soins, les grandes divergences entre les informations fournies par le patient et celles ressortant de l'anamnèse, le fait que des plaintes très démonstratives laissent insensible l'expert, ainsi que l'allégation de lourds handicaps malgré un environnement psychosocial intact (ATF 131 V 49).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux. Ainsi, lorsque, au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb et cc).

L'expert médical appelé à se prononcer sur le caractère invalidant de troubles psychiques doit poser un diagnostic relevant d'une classification reconnue et se déterminer sur le degré de gravité de l'affection. Dans l'éventualité où des troubles psychiques ayant valeur de maladie sont finalement admis, il y a alors lieu d'évaluer le caractère exigible de la reprise d'une activité lucrative par l'assuré, au besoin moyennant un traitement thérapeutique. A cet effet, il faut examiner quelle est l'activité que l'on peut raisonnablement exiger de lui. Pour admettre l'existence d'une incapacité de gain causée par une atteinte à la santé mentale, il n'est donc pas décisif que l'assuré exerce une activité lucrative insuffisante; il faut bien plutôt se demander s'il y a lieu d'admettre que la mise à profit de sa capacité de travail ne peut, pratiquement, plus être raisonnablement exigée de lui, ou qu'elle serait même insupportable pour la société (ATF 102 V 165; VSI 2001 p. 224 consid. 2b et les références; cf. aussi ATF 127 V 298 consid. 4c in fine). Ces principes sont valables, selon la jurisprudence, pour les psychopathies, les altérations du développement psychique (psychische Fehlentwicklungen), l'alcoolisme, la pharmacomanie, la toxicomanie et pour les névroses (RCC 1992 p. 182 consid. 2a et les références).

La recourante conteste la valeur probante de l’expertise pluridisciplinaire au motif qu’elle minimise ses atteintes vertébrales et ne tient pas compte des vertiges rotatoires, de sa surdité et de sa diminution du champ visuel. Pour sa part, l’intimé soutient que sa décision repose sur un rapport d’expertise multidisciplinaire complet et que la co-morbidité de la recourante n’est pas suffisante pour admettre le caractère invalidant de son trouble somatoforme douloureux.

En l’espèce, les experts, dans leur rapport du 4 juillet 2008, ont diagnostiqué des cervicalgies sur discopathies C5-C6 et C6-C7 ainsi que des lombalgies sur discopathies L4-L5. Ils ont également mentionné, tout en lui niant un caractère invalidant, un syndrome douloureux somatoforme persistant chez une personnalité à traits histrioniques et dépendants. Les experts ont admis que la recourante devait éviter les positions statiques prolongées, les travaux lourds et le port de charges supérieures à cinq kilos. Ils ont cependant conclu à une capacité de travail entière dans une activité adaptée, c'est-à-dire respectant ces limitations. Les experts ont relevé une discordance majeure entre les plaintes - très importantes - de la patiente et la pauvreté des trouvailles radiologiques - celles-ci se sont en effet limitées à des discopathies cervicales et lombaires sans souffrance radiculaire, n’expliquant pas l’importance du syndrome douloureux, en particulier les irradiations dans les membres supérieur et inférieur gauches. S’agissant de la colonne cervicale, le Dr O______ a souligné que, sur demande, l’assurée n’effectuait pas le moindre mouvement alors que, dans la conversation, elle exécutait quelques mouvements de flexion latérale et de rotation. Quant à la Dresse Q______, elle a relevé que les souvenirs de l’accident étaient encore présents à la demande mais non envahissants et que la peur de prendre le bus et le fait d’avoir quelques souvenirs de l’accident étaient insuffisants pour retenir le diagnostic de stress post-traumatique, d’autant plus qu’il n’y avait ni phénomènes de reviviscence de l’événement traumatique ni réactions d’hypervigilance. La psychiatre a observé certains éléments dépressifs avec absence de prise d’initiative, passivité, baisse de motivation, retrait social, perte d’intérêt et de plaisir, et une présentation des symptômes empreinte de dramatisation et d’hyperexpressivité émotionnelle, qu’elle a rattachée à des traits de personnalité de type histrionique. Toutefois, elle a estimé que l’intensité de la psychopathologie était modérée et paraissait stabilisée après une longue période de psychothérapie et de traitement psychotrope. La psychiatre a relevé le maintien d’une intégration correcte au niveau familial, malgré un processus d’invalidation avec adoption d’un comportement d’invalide et une catastrophisation de la situation.

Les experts ont établi une anamnèse, pris en considération les plaintes de la recourante, procédé à l’examen de celle-ci et pris en compte les divers rapports du dossier médical ainsi que les examens radiologiques. Ils ont particulièrement pris soin de justifier leurs diagnostics ainsi que d’expliquer de façon dûment motivée, pourquoi ils ne retiennent pas un état de stress post-traumatique et considèrent que la recourante est pleinement capable de travailler dans une activité adaptée, malgré les cervicalgies et lombalgies sur discopathies. Par conséquent, leur rapport d’expertise remplit toutes les conditions requises par la jurisprudence pour lui reconnaître une entière valeur probante.

La recourante allègue que le rapport d’expertise est lacunaire et minimise ses troubles vertébraux. Néanmoins, dans son rapport du 11 novembre 2008, le Dr C__________ a indiqué que les restrictions retenues par les experts paraissaient pertinentes et bien fondées. Quant au Dr G_________, il a souligné, dans un rapport daté du 26 mars 2007 et se basant sur les divers examens radiologiques, que le dossier radiologique ne montrait que des discopathies étagées avec un possible status post-tassement discret D1 ; il a constaté une très grosse atteinte subjective cervicale et du membre inférieur gauche et estimé que les troubles vertébraux n’étaient pas suffisamment importants pour justifier un geste opératoire.

Dès lors, force est de constater qu’il y a convergence entre les divers avis médicaux et que, contrairement à ce que prétend la recourante, les experts n’ont pas minimisé ses troubles vertébraux mais ont pris leurs conclusions sur la seule base d’éléments objectifs.

S’agissant des vertiges rotatoires dont se plaint l’assurée, le Dr E__________, dans son rapport du 6 mars 2006, a souligné que l’examen avait été rendu difficile par le fait que les manœuvres cinétiques n’avaient pas pu être réalisées correctement en raison du fait que la patiente portait une minerve. Il a ajouté qu’il n’était pas évident de savoir quelle était la participation de l’atteinte vestibulaire séquellaire à l’entretien des plaintes. Il n’a fait état d’aucune incapacité de travail en lien avec lesdits vertiges. Dans son rapport du 24 août 2007, qui met en évidence une surdité moyenne à gauche, il n’a pas davantage mentionné d’incapacité de travail. Au demeurant, on ne voit pas en quoi une surdité moyenne de l’oreille gauche serait invalidante puisque de tels troubles auditifs peuvent être compensés par le port d’un appareil acoustique et ne sont donc pas incapacitants.

Il en va de même pour les problèmes de vue. En effet, selon rapport du Dr H________ du 17 juillet 2007, la recourante présente une lente dégradation de l’acuité visuelle due à un fort astigmatisme hypermétrope et à une presbytie. Lors du dernier examen du 29 juin 2007, la vision binoculaire de loin avec correction était de 0,6-0,7 et une compensation de la presbytie avait été prescrite pour la lecture. Aussi, il ressort de ce rapport et de celui du Dr RAPP du 16 février 2006 que ces troubles peuvent être corrigés par des lunettes et n’entraînent donc pas d’incapacité de travail. Certes, le rapport du 24 novembre 2008 du Dr RAPP conclut à une incapacité de travail entière en raison des divers troubles visuels, de l’état général et des cervicalgies mais il convient de relever que le médecin ne fait aucune distinction entre les troubles visuels et les cervicalgies. Il ne mentionne pas non plus, d’ailleurs, le syndrome douloureux somatoforme pourtant diagnostiqué unanimement par les divers psychiatres Dès lors, ce rapport est incomplet et excède le domaine de compétence de son auteur en tant qu’il apprécie l’exigibilité relative à des troubles autres que visuels. Au demeurant, ce rapport ne convainc pas dans la mesure où le médecin conclut que toute activité avec un effort attentionnel (par exemple sur ordinateur) doit être exclue sans expliquer pour quelles raisons il considère soudain les troubles visuels de sa patiente comme incapacitants et, surtout pourquoi ils le seraient également dans d’autres activités, ne nécessitant pas de travail à l’écran. En définitive, ce rapport n’est pas suffisamment motivé pour remplir les conditions jurisprudentielles permettant de lui reconnaître une pleine valeur probante.

Par ailleurs, s’agissant de l’addiction de la recourante aux médicaments, dont le Dr C__________ reproche aux experts de ne pas avoir suffisamment tenu compte, il convient de relever que le Dr P______ a précisé que, selon la sœur de la recourante, il n’était pas rare que cette dernière abusât de médicaments, et que la Dresse Q______ a également noté que la recourante avait parfois tendance à prendre le traitement médicamenteux de façon abusive quand les douleurs étaient trop fortes. Cependant, selon la jurisprudence constante concernant les dépendances comme l'alcoolisme, la pharmacodépendance et la toxicomanie, une telle dépendance ne constitue pas en soi une invalidité au sens de la loi. Elle ne joue un rôle dans l'assurance-invalidité que lorsqu'elle a provoqué une maladie ou un accident qui entraîne une atteinte à la santé physique ou mentale, nuisant à la capacité de gain, ou si elle résulte elle-même d'une atteinte à la santé physique ou mentale qui a valeur de maladie (ATF 124 V 268 consid. 3c; VSI 1996 p. 317, 320 et 323). La situation de fait doit faire l'objet d'une appréciation globale incluant aussi bien les causes que les conséquences de la dépendance, ce qui implique de tenir compte d'une éventuelle interaction entre dépendance et comorbidité psychiatrique. Pour que soit admise une invalidité du chef d'un comportement addictif, il est nécessaire que la comorbidité psychiatrique à l'origine de cette dépendance présente un degré de gravité et d'acuité suffisant pour justifier, en soi, une diminution de la capacité de travail et de gain, qu'elle soit de nature à entraîner l'émergence d'une telle dépendance et qu'elle contribue pour le moins dans des proportions considérables à cette dépendance. Si la comorbidité ne constitue qu'une cause secondaire à la dépendance, celle-ci ne saurait être admise comme étant la conséquence d'une atteinte à la santé psychique. S'il existe au contraire un lien de causalité entre l'atteinte maladive à la santé psychique et la dépendance, la mesure de ce qui est exigible doit alors être déterminé en tenant compte de l'ensemble des limitations liées à la maladie psychique et à la dépendance (sur l'ensemble de la question, cf. arrêt I 169/06 du 8 août 2006, consid. 2.2 et les arrêts cités).

En l’espèce, la recourante ne présente aucune comorbidité psychique entraînant une incapacité de travail - ainsi qu’on le verra plus loin pour le syndrome douloureux somatoforme persistant - de sorte que son comportement addictif ne peut être considéré comme invalidant. C’est par conséquent à juste titre que les experts n’ont pas tenu compte de cette addiction dans leurs conclusions.

Quant aux observations faites par la Dresse J______ dans son rapport du 24 novembre 2008, elles concernent la gravité subjective de l’événement traumatique, plus spécialement les troubles psychiques de la recourante. La Dresse J______, dont il convient de relever qu’elle est rhumatologue, a ainsi abordé un domaine ne ressortant pas de sa compétence, de sorte que son avis ne saurait suffire à remettre en question les conclusions de l’expert psychiatre (ATFA non publié I 741/04 du 13 février 2006, consid. 3.4).

En définitive, les conclusions de ces divers médecins relatent surtout la manière dont la patiente assume et ressent elle-même ses facultés de travail, sans y porter un regard critique (ATFA non publiés I 366/05 du 12 juillet 2005 et I 808/04 du 14 septembre 2005, consid. 4.2). Dès lors, leur considérations sont empreintes de leur point de vue de médecin traitant. Or, il y a lieu d'établir la mesure de ce qui est raisonnablement exigible d'un assuré le plus objectivement possible. En effet, compte tenu des difficultés, en matière de preuve, à établir l'existence de douleurs, les simples plaintes subjectives de l'assuré ne suffisent pas pour justifier une invalidité (entière ou partielle; ATFA non publié du 30 novembre 2004, I 600/03, consid. 3.2). Au vu de la divergence consacrée par la jurisprudence entre un mandat thérapeutique et un mandat d'expertise (ATF 124 I 170 consid. 4; ATFA non publié I 113/06 du 7 mars 2007, consid. 4.4 et les arrêts cités), on ne saurait remettre en cause les conclusions d'une expertise ordonnée par l'administration ou le juge et procéder à de nouvelles investigations du seul fait qu'un ou plusieurs médecins traitants ont une opinion contraire. Il n'en va différemment que si ces médecins traitants font état d'éléments objectivement vérifiables ayant été ignorés dans le cadre de l'expertise psychiatrique et qui sont suffisamment pertinents pour remettre en cause les conclusions de l'expertise (ATF non publié 9C_480/2008 du 27 janvier 2009, consid. 4). Or, il ressort de ce qui précède que les experts n’ont pas omis de prendre en considération certains éléments objectifs. Par conséquent, les critiques des divers médecins de la recourante tendent davantage à substituer leur propre appréciation à celle des experts qu'à établir l'existence d'une carence évidente dans l'évaluation de sorte qu’elles ne sont pas susceptibles de faire douter de la valeur probante du rapport d’expertise.

La recourante requiert, à titre subsidiaire, des mesures supplémentaires d'instruction, à savoir la mise en œuvre d'une expertise médicale pluridisciplinaire.

Selon la jurisprudence, le juge peut renoncer à un complément d'instruction, sans violer le droit d'être entendu de l'assuré découlant de l'art. 29 al. 2 Cst., s'il est convaincu, en se fondant sur une appréciation consciencieuse des preuves fournies, par les investigations auxquelles il doit procéder d'office, que certains faits présentent un degré de vraisemblance prépondérante et que d'autres mesures probatoires ne pourraient plus modifier cette appréciation (appréciation anticipée des preuves; ATF 122 II 469 consid. 4a, 122 III 223 consid. 3c, 120 Ib 229 consid. 2b, 119 V 344 consid. 3c; ATFA non publié du 17 mars 2003, U 154/02, consid. 6.1 et les références citées).

Étant donné que les pièces versées au dossier permettent de statuer en pleine connaissance de cause sur le présent litige, la mise en œuvre d'une expertise supplémentaire s'avère superflue par appréciation anticipée des preuves. En conséquence, il n'y a pas lieu de donner suite à la demande d'instruction complémentaire.

Il reste à déterminer si le syndrome douloureux somatoforme persistant entraîne une invalidité.

Dans le cadre de la libre appréciation dont ils disposent (VSI 2001 p. 108 consid. 3a), l'administration et le juge ne sauraient ni ignorer les constatations de fait des médecins, ni faire leur les estimations et conclusions médicales relatives à la capacité (résiduelle) de travail, sans procéder à un examen préalable de leur pertinence du point de vue du droit des assurances sociales. Cela s'impose en particulier lorsque l'expert atteste une limitation de la capacité de travail fondée uniquement sur le diagnostic de troubles somatoformes douloureux. Dans un tel cas, il appartient aux autorités administratives et judiciaires d'examiner avec tout le soin nécessaire si l'estimation médicale de l'incapacité de travail prend en considération également des éléments étrangers à l'invalidité (en particulier des facteurs psychosociaux et socioculturels) qui ne sont pas pertinents du point de vue des assurances sociales (ATF 127 V 299 consid. 5a; VSI 2000 p. 149 consid. 3), ou si la limitation (partielle ou totale) de la capacité de travail est justifiée par les critères juridiques déterminants établis par la jurisprudence (cf. ATF 130 V 352 consid. 2.2.5).

Tout d'abord, il convient d’examiner s’il existe une comorbidité psychiatrique d'une acuité et d'une durée importantes au sens de la jurisprudence. Selon les experts, la recourante présente certains éléments dépressifs, toutefois de degré modéré, ce qui les a conduits à ne pas retenir une co-morbidité psychiatrique. Pour sa part, le Dr D__________, dans son rapport du 25 novembre 2008, diagnostique un épisode dépressif d’intensité moyenne avec syndrome somatique et dépendance aux benzodiazépines. Aussi, il est constant que les deux psychiatres ont constaté des éléments dépressifs modérés. Or, les états dépressifs constituent des manifestations (réactives) d'accompagnement des troubles somatoformes douloureux de sorte qu'ils ne sauraient faire l'objet d'un diagnostic séparé (ATF 130 V 358 consid. 3.3.1 in fine) et, partant, la Dresse Q______ n’a pas retenu un tel diagnostic à juste titre. Au demeurant, un épisode dépressif moyen ne suffit pas à établir l'existence d'une co-morbidité psychiatrique. En effet, selon la doctrine médicale (cf. notamment DILLING/MOBOUR/SCHMIDT (éd.), Internationale Klassifikation psychischer Störungen, ICD-10 Kapitel V [F], 4ème éd., p. 191) sur laquelle se fonde le TFA, les états dépressifs constituent des manifestations (réactives) d'accompagnement des troubles somatoformes douloureux, de sorte qu'ils ne sauraient faire l'objet d'un diagnostic séparé (ATF 130 V 358 consid. 3.3.1 in fine) sauf à présenter les caractères de sévérité susceptibles de les distinguer sans conteste d'un tel trouble (ATFA non publié I 527/06 du 29 juin 2007, consid. 6). Il n’y a pas davantage lieu de revenir sur la question de la dépendance aux benzodiazépines qui ne peut pas être retenue comme co-morbidité puisqu’elle n’est pas invalidante.

Il reste à examiner la présence éventuelle d'autres critères dont le cumul permet d'apprécier le caractère invalidant du syndrome douloureux somatoforme persistant. Le critère des affections corporelles chroniques peut être tenu pour établi puisque la recourante souffre depuis plusieurs années de douleurs diffuses cervicales et lombaires sur discopathies C5-C6, C6-C7 et L4-L5 avec irradiations dans les membres inférieur et supérieur gauches. En revanche, elle ne subit pas une perte d'intégration sociale dans toutes les manifestations de la vie. En effet, selon la description que la recourante a donnée de ses journées aux experts, elle passe une grande partie de ces dernières au lit ou dans un fauteuil, regarde la télévision ou lit des magazines et fait quelques marches par moments dans la journée, accompagnée par un des ses proches, enfin n’a plus de loisirs alors que ses déplacements sont limités. Cette situation correspond à un retrait social marqué ce qui ne suffit pas pour retenir ce critère, dans la mesure où elle a gardé des contacts très étroits avec les membres de sa famille, sort se promener en leur compagnie et a maintenu, selon l’expert psychiatre, une intégration correcte au niveau familial. Il n'y a pas davantage lieu de conclure à l'existence d'un état psychique cristallisé sans évolution possible au plan thérapeutique ou à l'échec de traitements ambulatoires ou stationnaires conformes aux règles de l'art puisque, selon le rapport d’expertise psychiatrique (p. 3), la recourante aurait refusé de continuer le traitement antidépresseur. Etant donné que l’assurée a interrompu le traitement proposé, elle n’a pas épuisé toutes les possibilités thérapeutiques permettant une amélioration de son état de santé. Par conséquent, il n’est pas possible de conclure à un échec des traitements. En outre, elle bénéficie d’une médication anxiolytique et d’un suivi psychiatrique bimensuel (ATFA non publié I 524/04 du 28 juin 2005, consid. 4.3.1). De plus, selon les divers rapports médicaux psychiatriques successifs, ses troubles dépressifs se sont amendés puisque l’épisode dépressif est maintenant d’intensité moyenne.

Outre l'absence de la plupart des critères déterminants permettant d’admettre le caractère invalidant du syndrome douloureux somatoforme persistant, la recourante présente, selon le rapport d’expertise, un phénomène d'amplification des symptômes et une tendance à des auto-limitations chez une patiente très démonstrative qui permettent de conclure, en règle ordinaire, à l'absence d'une atteinte à la santé ouvrant le droit à des prestations d'assurance (ATF 131 V 49 consid. 1.2 p. 50 ; ATF non publié 9C_45/2007du 25 septembre 2007, consid. 5.2.2).

En définitive, d'un point de vue juridique, il n'y a pas de raisons suffisantes pour retenir que le syndrome douloureux somatoforme persistant se manifestait, au moment de la décision sur opposition litigieuse, avec une sévérité telle que, d'un point de vue objectif, la mise en valeur complète de la capacité de travail de l'assurée ne pouvait plus être raisonnablement exigée de sa part. Quand bien même l’expert psychiatre a estimé que la recourante semblait dans un processus d’invalidation en cours depuis son accident avec adoption d’un comportement d’invalide et une catastrophisation de sa situation, elle n’a pas pour autant conclu que la recourante avait épuisé toutes ses ressources adaptatives et présentait une incapacité de travail. Par conséquent, les experts ont conclu, à juste titre, que le syndrome douloureux somatoforme persistant n’a pas de caractère invalidant.

Mal fondé, le recours sera rejeté. Bien que depuis le 1er juillet 2006, la procédure n'est plus gratuite (art. 69 al. 1bis LAI) et que la recourant succombe, il y a toutefois lieu de renoncer au paiement d'un émolument dès lors qu’elle est au bénéfice de l’assistance judiciaire, conformément à l’art. 12 al. 1 du règlement sur les frais, émolument et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986.


PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

Le rejette

Renonce à mettre un émolument à la charge de la recourante.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Yaël BENZ

 

La présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

Le secrétaire-juriste :

 

Philippe LE GRAND ROY

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le