Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/1336/2021

ATAS/742/2021 du 06.07.2021 ( CHOMAG ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1336/2021 ATAS/742/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 6 juillet 2021

9ème Chambre

 

En la cause

A______ SA, sise à GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L’EMPLOI, sis Service juridique, rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

A.      La société A______ SA (ci-après : la société) est active dans le placement de personnel fixe et temporaire pour les entreprises dans le secteur du bâtiment, du secteur tertiaire et du secteur de l’industrie. Madame B______ en est la directrice avec signature individuelle (cf. registre du commerce).

B.       a. Par décisions des 18 mars et 11 juin 2020, l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE) ne s’est pas opposé au paiement de l’indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail (ci-après : RHT) pour toute l’entreprise au taux de 100 % du 19 mars 2020 au 19 septembre 2020.

b. Le 20 août 2020, la société a transmis à l’OCE un nouveau formulaire de préavis de RHT annonçant une perte de travail de 50 % pour huit employés, du 1er septembre 2020 au 30 novembre 2020.

Par décision du 24 août 2020, confirmée sur opposition le 7 octobre 2020, l’OCE s’est opposé au paiement de l’indemnité en cas de RHT au motif qu’une perte de travail n’était pas avérée. Le recours formé le 4 novembre 2020 contre cette décision par-devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS) a été admis par arrêt du 13 avril 2021 (ATAS/363/2021). La chambre de céans a notamment relevé que l’existence d’une perte de travail pouvait être admise sur la base des pièces produites par la société et que celle-ci avait satisfait à son obligation de diminuer le dommage en poursuivant des mesures graduelles de reprise du travail (consid. 8).

C.       a. Par courriel du 25 janvier 2021, la société, soit pour elle sa directrice Madame B______, a transmis à l’OCE un formulaire de préavis de RHT annonçant une perte de travail de 50 % pour toute l’entreprise (cinq employés concernés) dès le 1er décembre 2020.

b. Par préavis portant la date de réception du timbre postal du 26 janvier 2021 à 15h37, la société a transmis un nouveau formulaire de préavis, annonçant une perte de travail de 50 % pour toute l’entreprise (cinq employés concernés) à compter du 26 janvier 2021.

c. Par courriel du 26 janvier 2021, à 16h35, la société a transmis un nouveau formulaire de préavis, remplaçant celui du 25 janvier 2021, et annonçant une perte de travail de 50 % pour toute l’entreprise (cinq employés concernés) pour la période du 1er décembre 2020 au 28 février 2021.

d. Par décision du 27 janvier 2021, l’OCE a accepté la demande pour la période du 4 février 2021 au 28 février 2021.

e. Par décision du 24 février 2021, annulant et remplaçant la décision du 27 janvier 2021, l’OCE a refusé la demande de prestations, au motif que la perte de travail n’était pas avérée, étant précisé que le formulaire n’avait pas été transmis dix jours avant le début de la période d’indemnisation souhaitée.

f. Le 10 mars 2021, la société a fait opposition à la décision précitée, en invoquant une perte de 3'243 heures de travail pour le mois de février 2021 en comparaison avec février 2020.

À l’appui de son opposition, la société a produit deux décomptes des heures travaillées. Il en ressort que pour le mois de février 2021, les heures travaillées s’élevaient à 15'762.84, correspondant à un montant de CHF 733'278.45, alors que pour le mois de février 2020, les heures s’élevaient à 18'996.89, correspondant à un montant de CHF 973'928.10. La société a également produit une attestation de la société, signée le 1er mars 2021 par Madame C______, Monsieur D______ et Madame E______, selon laquelle il était très difficile de développer des nouvelles affaires. Les entreprises étaient souvent en RHT, ce qui ne permettait pas à la société de décrocher des nouveaux rendez-vous. Était annexée à l’attestation une liste des entreprises prospectées par la société, qui comptait plus de 80 entreprises dans les secteurs de l’échafaudage, des façades, parcs et jardins, garages, parquets, stores et industrie.

g. Par décision sur opposition du 26 mars 2021, l’OCE a confirmé sa décision du 24 février 2021.

D.      a. Le 16 février 2021, la société a transmis un nouveau formulaire de préavis, annonçant une perte de travail de 50 % pour toute l’entreprise (cinq employés concernés) dès le 1er mars 2021.

b. Par décision du 16 février 2021, l’OCE a accepté la demande pour la période du 1er mars 2021 au 31 mai 2021.

c. Par décision du 25 février 2021, annulant et remplaçant la décision du 16 février 2021, l’OCE a refusé la demande de prestations, au motif que la perte de travail n’était pas avérée.

d. Le 10 mars 2021, la société a fait opposition à la décision précitée, en reprenant la motivation contenue dans son opposition du même jour contre la décision du 24 février 2021.

e. Par décision sur opposition du 29 mars 2021, l’OCE a confirmé sa décision du 25 février 2021.

E.       a. Le 19 avril 2021, la société a saisi la CJCAS d’un recours à l’encontre de la décision sur opposition du 26 mars 2021, reprenant en substance la motivation de son opposition. Elle a précisé qu’elle avait essayé de prospecter de nouveaux marchés, mais sans succès en raison de la pandémie.

b. Le 17 mai 2021, l’OCE a déclaré que, compte tenu de l’arrêt de la chambre de céans du 27 avril 2021 (ATAS/363/2021), il était disposé à admettre l’indemnité en cas de RHT du 19 mars 2021 au 18 septembre 2021.

c. Le 23 juin 2021, la société a déclaré accepter la proposition de l’OCE en tant qu’il était disposé à octroyer des indemnités en cas de RHT du « 11 mars 2021 au 19 septembre 2021 ».

EN DROIT

1.        Conformément à l’art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l’organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté en temps utile, le recours est recevable (art. 60 LPGA).

3.        Il y a préalablement lieu de définir l’objet du litige.

4.        a. Dans la procédure juridictionnelle administrative, ne peuvent être examinés et jugés, en principe, que les rapports juridiques à propos desquels l’autorité administrative compétente s’est prononcée préalablement d’une manière qui la lie, sous la forme d’une décision. Dans cette mesure, la décision détermine l’objet de la contestation qui peut être déféré en justice par voie de recours. En revanche, dans la mesure où aucune décision n’a été rendue, la contestation n’a pas d’objet, et un jugement sur le fond ne peut pas être prononcé (ATF 131 V 164 consid. 2.1 ; ATF 125 V 414 consid. 1a ; ATF 119 Ib 36 consid. 1b et les références citées).

L’objet du litige dans la procédure administrative subséquente est le rapport juridique qui - dans le cadre de l’objet de la contestation déterminé par la décision - constitue, d’après les conclusions du recours, l’objet de la décision effectivement attaquée. D’après cette définition, l’objet de la contestation et l’objet du litige sont identiques lorsque la décision administrative est attaquée dans son ensemble. En revanche, lorsque le recours ne porte que sur une partie des rapports juridiques déterminés par la décision, les rapports juridiques non contestés sont certes compris dans l’objet de la contestation, mais non pas dans l’objet du litige (ATF 125 V 414 consid. 1b et 2 et les références citées).

Les questions qui - bien qu’elles soient visées par la décision administrative, et fassent ainsi partie de l’objet de la contestation - ne sont plus litigieuses, d’après les conclusions du recours, et qui ne sont donc pas comprises dans l’objet du litige, ne sont examinées par le juge que s’il existe un rapport de connexité étroit entre les points non contestés et l’objet du litige (ATF 122 V 244 consid. 2a ; ATF 117 V 295 consid. 2a ; voir aussi ATF 122 V 36 consid. 2a). Par ailleurs, l’autorité de recours n’examine les questions formant l’objet du litige, mais qui ne sont pas contestées, que s’il existe des motifs suffisants de le faire au regard des allégations des parties ou d’indices ressortant du dossier (ATF 125 V 417 consid. 2c).

b. En l’occurrence, la décision sur opposition contestée confirme la décision du 24 février 2021, annulant et remplaçant la décision du 27 janvier 2021, laquelle portait sur la demande d’indemnités en cas de RHT formée par la recourante le 25 janvier 2021. Or cette demande, formée initialement pour des indemnités en cas de RHT à compter du 1er décembre 2020, a été modifiée par courriel de la recourante du lendemain sollicitant des indemnités en cas de RHT pour la période du 1er décembre 2020 au 28 février 2021. Ce courriel était lui-même précédé, le même jour, par un formulaire de demande d’indemnités en cas de RHT pour la période à compter du 26 janvier 2021. Compte tenu des différentes demandes d’indemnités en cas de RHT ayant précédé la décision initiale du 27 janvier 2021 et de la situation peu claire de la recourante due au recours pendant devant la CJCAS durant cette période, il y a lieu de retenir que la décision du 27 janvier 2021 portait sur une demande d’indemnités en cas de RHT dès le 1er décembre 2020.

Le litige, déterminé par la décision sur opposition du 26 mars 2021, porte en conséquence sur le droit aux indemnités en cas de RHT à compter du 1er décembre 2020. L’intimé l’a du reste implicitement admis, puisqu’il s’est déclaré disposé à reconnaître à la recourante le droit aux indemnités en cas de RHT du 19 mars 2021 au 18 septembre 2021.

5.        a. Afin de surmonter des difficultés économiques passagères, un employeur peut introduire, avec l’accord de ses employés, une RHT, voire une suspension temporaire de l’activité de son entreprise (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l’assurance-chômage, 2014, ch. 1 relatif aux remarques préliminaires concernant les art. 31ss). En effet, selon l’art. 31 al. 1 let. b et d LACI, les travailleurs dont la durée normale du travail est réduite ou l’activité suspendue ont droit à l’indemnité en cas de RHT lorsque la perte de travail doit être prise en considération et la réduction de l’horaire de travail est vraisemblablement temporaire, et si l’on peut admettre qu’elle permettra de maintenir les emplois en question. Une perte de chiffre d’affaires ne suffit pas à entraîner une indemnisation. Encore faut-il que cette perte se traduise par une diminution des heures travaillées (cf. RUBIN, op. cit., n. 4 ad art. 32 LACI). L’indemnité s’élève à 80 % de la perte de gain prise en considération (art. 34 al. 1 LACI). L’indemnité en cas de RHT doit être avancée par l’employeur (art. 37 let. a LACI) et sera, par la suite, remboursée par la caisse de chômage à l’issue d’une procédure spécifique (art. 36 et 39 LACI), étant précisé qu’un délai d’attente de deux à trois jours doit être supporté par l’employeur (art. 32 al. 2 LACI et 50 al. 2 de l’ordonnance sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 31 août 1983 [ordonnance sur l’assurance-chômage, OACI - RS 837.02], étant précisé que l’art. 50 al. 2 OACI a été supprimé temporairement en raison de la pandémie de Coronavirus).

b. Le but de l’indemnité en cas de RHT consiste, d’une part, à garantir aux personnes assurées une compensation appropriée pour les pertes de salaire dues à des réductions de temps de travail et à éviter le chômage complet, à savoir des licenciements et résiliations de contrats de travail. D’autre part, l’indemnité en cas de RHT vise au maintien de places de travail dans l’intérêt tant des travailleurs que des employeurs, en offrant la possibilité de conserver un appareil de production intact au-delà de la période de réduction de l’horaire de travail (ATF 121 V 371 consid. 3a).

Une perte de travail est prise en considération lorsqu’elle est due, entre autres conditions, à des facteurs économiques et qu’elle est inévitable (art. 32 al. 1 let. a LACI). Ces conditions sont cumulatives (ATF 121 V 371 consid. 2a). Le recul de la demande des biens ou des services normalement proposés par l’entreprise concernée est caractéristique pour apprécier l’existence d’un facteur économique (DTA 1985 p. 109 c. 3a). L’art. 32 al. 3 phr. 1 prévoit en outre que pour les cas de rigueur, le Conseil fédéral règle la prise en considération de pertes de travail consécutives à des mesures prises par les autorités, à des pertes de clientèle dues aux conditions météorologiques où à d’autres circonstances non imputables à l’employeur. L’art. 51 OACI concrétise l’art. 32 al. 3 LACI en énumérant, à son al. 2, de façon non exhaustive (cf. ATF 128 V 305 consid. 4), différentes situations (notamment des mesures d’autorités) permettant de prendre en considération une perte de travail (interdiction d’importer ou d’exporter des matières premières ou des marchandises (let. a) ; contingentement des matières premières ou des produits d’exploitation, y compris les combustibles (let. b) ; restrictions de transport ou fermeture des voies d’accès (let. c) ; interruptions de longue durée ou restrictions notables de l’approvisionnement en énergie (let. d) ; dégâts causés par les forces de la nature (let. e). L’art. 51 al. 4 OACI précise encore que la perte de travail causée par un dommage n’est pas prise en considération tant qu’elle est couverte par une assurance privée.

c. Les pertes de travail au sens de l’art. 51 OACI ne peuvent toutefois être prises en considération que si l’employeur ne peut les éviter par des mesures appropriées et économiquement supportables ou s’il ne peut faire répondre un tiers du dommage (cf. art. 51 al. 1 OACI ; Rubin, op. cit, n. 15 et 18 ad art. 32 LACI et les références citées). Cette condition est l’expression de l’obligation de diminuer le dommage voulant que l’employeur prenne toutes les mesures raisonnables pour éviter la perte de travail. La caisse niera le droit à l’indemnité uniquement si des raisons concrètes et suffisantes démontrent que la perte de travail aurait pu être évitée et s’il existe des mesures que l’employeur a omis de prendre (ATF 111 V 379 consid. 2a ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 218/02 du 22 novembre 2002 consid. 2 ; Bulletin LACI RHT du Secrétariat d’État à l’économie [SECO], état au 1er janvier 2021, C3 et C4).

La seule présence d’un motif de prise en considération de la perte de travail au sens des art. 31 et 32 LACI n’est pas suffisante pour conduire à une indemnisation. Lorsque la perte de travail est due à l’un des motifs de l’art. 33 LACI, l’indemnisation est exclue. Ainsi, lorsqu’en plus des mesures prises par les autorités ou des circonstances indépendantes de la volonté de l’employeur au sens de l’art. 51 al. 1 OACI, l’une des conditions de l’art. 33 LACI est réalisée, par exemple en présence d’un risque normal d’exploitation, l’indemnisation est exclue (RUBIN, op. cit., n. 18 ad art. 32 LACI et n. 4 ad art. 33 LACI et les références citées, notamment ATF 138 V 333 consid. 3.2 et ATF 128 V 305 consid. 4a).

Selon la jurisprudence, doivent être considérés comme des risques normaux d’exploitation au sens de l’art. 33 al. 1 let. a LACI les pertes de travail habituelles, c’est-à-dire celles qui, d’après l’expérience de la vie, surviennent périodiquement et qui, par conséquent, peuvent faire l’objet de calculs prévisionnels. Les pertes de travail susceptibles de toucher chaque employeur sont des circonstances inhérentes aux risques d’exploitation généralement assumés par une entreprise. Ce n’est que lorsqu’elles présentent un caractère exceptionnel ou extraordinaire qu’elles ouvrent droit à une indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail. La question du risque d’exploitation ne saurait par ailleurs être tranchée de manière identique pour tous les genres d’entreprises, ce risque devant au contraire être apprécié dans chaque cas particulier, compte tenu de toutes les circonstances liées à l’activité spécifique de l’exploitation en cause (ATF 119 V 498 consid. 1 ; cf. aussi RUBIN, op. cit, n. 10 ad art. 33 LACI et les références citées).

Les pertes de travail liées aux risques économiques ordinaires, tels que le risque commercial, le risque de baisse de compétitivité par rapport à la concurrence, ou le risque de ne pas se voir attribuer un marché public, ne sont pas indemnisables. Dans le domaine de la construction, des délais d’exécution reportés à la demande du maître de l’ouvrage et des annulations de travaux en raison de l’insolvabilité de ce dernier ou à cause d’une procédure d’opposition ne représentent pas des circonstances exceptionnelles. De telles circonstances constituent dès lors des risques normaux d’exploitation. Pour une entreprise qui traite essentiellement avec un seul client important, la perte de ce client ou la perspective certaine d’une réduction des mandats constitue également une circonstance inhérente aux risques normaux d’exploitation (cf. RUBIN, op. cit., n. 13 et 16 ad art. 33 LACI et les références citées, notamment DTA 1998 consid. 1 p. 292).

6.        a. En raison de la propagation de la COVID-19, le Conseil fédéral a, le 28 février 2020, qualifié la situation prévalant en Suisse de « situation particulière » au sens de l’art. 6 al. 2 let. b de la loi fédérale sur la lutte contre les maladies transmissibles de l’homme (loi sur les épidémies ; LEP - RS 818.101). Sur cette base, le Conseil fédéral a arrêté l’ordonnance sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus du 28 février 2020 (RO 2020 573) puis l’ordonnance 2 sur les mesures destinées à lutter contre le coronavirus du 13 mars 2020 (Ordonnance 2 COVID-19 ; RO 2020 773) qui interdisait les manifestations publiques ou privées accueillant simultanément cent personnes (art. 6 al. 1) et qui limitait l’accueil dans les restaurants, les bars, les discothèques et les boîtes de nuit à cinquante personnes (art. 6 al. 2). Après avoir qualifié la situation en Suisse de « situation extraordinaire » au sens de l’art. 7 LEP, le Conseil fédéral a procédé à des modifications de cette ordonnance, notamment en interdisant toutes les manifestations publiques ou privées et en ordonnant la fermeture des magasins, des marchés, des restaurants, des bars, des discothèques, des boîtes de nuit et des salons érotiques (art. 6 al. 1 et 2). Cette modification est entrée en vigueur le 17 mars 2020 (RO 2020 783).

b. S’agissant du domaine particulier de l’indemnité en cas de RHT, le Conseil fédéral a adopté, le 20 mars 2020, l’ordonnance sur les mesures dans le domaine de l’assurance-chômage en lien avec le Coronavirus (Ordonnance COVID-19 assurance-chômage ; RS 837.033), avec une entrée en vigueur rétroactive au 1er mars 2020 (art. 9 al. 1), qui prévoit qu’en dérogation aux art. 32 al. 2 et 37 let. b LACI, aucun délai d’attente n’est déduit de la perte de travail à prendre en considération (art. 3). Cette disposition a effet jusqu’au 31 mars 2021 (art. 9 al. 6).

Aucune modification n’a toutefois été apportée aux critères relatifs à la perte de travail à prendre en considération (art. 31 al. 1 let. b et 32 al. 1 et 3 LACI).

Le 20 janvier 2021, le SECO a édicté la directive 2021/01 sur l’actualisation « des règles spéciales dues à la pandémie », laquelle remplace la directive 2020/15 du 30 octobre 2020. Il ressort en particulier du ch. 2.5 que l’activité doit reprendre dès que cela est possible. Cette condition est l’expression de l’obligation de diminuer le dommage. Toutefois, le droit à l’indemnité en cas de RHT peut être maintenu, notamment lorsque l’entreprise ne peut mettre au travail qu’une partie de ses employés pour des motifs économiques. La perte à prendre en considération est imputable aux conséquences économiques de la pandémie. Le droit à l’indemnité en cas de RHT existe donc, si les autres conditions du droit à l’indemnité sont réalisées.

7.        a. Dans la décision entreprise, datant du 26 mars 2021, l’intimé s’est opposé au paiement de l’indemnité en cas de RHT, au motif que la perte de travail n’était avérée.

Le 13 avril 2021, soit après la décision entreprise, la chambre de céans a rendu un arrêt opposant les mêmes parties et portant sur le droit de la recourante à des indemnités en cas de RHT dès le 1er septembre 2020 (ATAS/363/2021). Dans cet arrêt, la CJCAS a retenu que l’existence d’une perte de travail devait être admise sur la base d’une comparaison des heures travaillées par le personnel placé en mission entre 2019 et 2020 (consid. 8a). La recourante avait par ailleurs satisfait à son obligation de diminuer le dommage en cherchant à prospecter des nouveaux marchés, notamment dans les domaines médical et du nettoyage, étant précisé qu’il y avait beaucoup de concurrence et les agences plus spécialisées étaient généralement plus performantes (consid. 8d). Les conditions posées par la loi pour accorder des indemnités en cas de RHT étaient ainsi réunies, de sorte que la recourante avait droit à l’indemnité en cas de RHT, pour une durée de six mois, à partir du 1er septembre 2020 (consid. 9).

Compte tenu de cet arrêt, l’intimé a déclaré être disposé à revenir sur sa décision du 26 mars 2021 et à admettre le droit aux indemnités en cas de RHT pour la période du 19 mars 2021 au 18 septembre 2021. La recourante accepte pour sa part cette proposition en tant qu’elle porte sur la période du 11 mars 2021 au 19 septembre 2021.

En l’occurrence, ainsi que l’admet l’intimé, la situation de la recourante n’a pas fondamentalement changé depuis celle qui a fait l’objet de l’arrêt de la chambre de céans du 13 avril 2021. Il résulte en effet de la comparaison des heures travaillées pour les mois de février 2020 et février 2021 que la recourante subit toujours des difficultés économiques qui se traduisent par une perte de travail par rapport à l’année précédente. Les conditions pour la reconnaissance d’un cas de rigueur au sens des art. 32 al. 3 LACI et 51 OACI sont par ailleurs réalisées, étant précisé que la pandémie du Coronavirus constitue une circonstance exceptionnelle dépassant le cadre du risque normal d’exploitation à la charge de l’employeur. Enfin, il y a lieu de considérer, sur la base des pièces produites par la recourante, que l’intéressée a pris toutes les mesures raisonnables pour éviter la perte de travail. Aujourd’hui, comme avant, la recourante cherche à prospecter de nouveaux marchés, et cela malgré les difficultés liées à la crise sanitaire à développer de nouvelles affaires. Les conditions posées par la loi pour lui accorder des indemnités en cas de RHT sont ainsi réunies, ce que l’intimé admet du reste expressément, puisqu’il s’est déclaré disposé à octroyer à la recourante des indemnités pour la période du 19 mars 2021 au 18 septembre 2021.

b. Reste à déterminer la date à partir de laquelle les indemnités peuvent être octroyées, étant précisé que le formulaire de préavis a été transmis le 25 janvier 2021 pour des indemnités en cas de RHT à compter du 1er décembre 2020.

En l’occurrence, dans la mesure où l’arrêt de la CJCAS du 13 avril 2021 a admis le principe du droit de la recourante aux indemnités en cas de RHT pour la période du 1er septembre 2020 au 28 février 2021, il convient de lui reconnaître ce droit à compter du 1er mars 2021. En vertu de l’art. 17b al. 1 de la loi fédérale sur les bases légales des ordonnances du Conseil fédéral visant à surmonter l’épidémie de COVID-19 du 25 septembre 2020 (loi COVID-19 – RS 818.102), la période couverte par le préavis dure jusqu’au 31 août 2021.

8.        En conséquence, le recours sera admis, la décision litigieuse annulée et il sera dit que la recourante a droit à l’indemnité en cas de RHT, pour une durée de six mois, à partir du 1er mars 2021, sous réserve de l’examen par la caisse de chômage des conditions conformément à l’art. 39 LACI.

Bien qu’obtenant partiellement gain de cause, la recourante, qui n’est pas représentée en justice et qui n’a pas allégué avoir déployé des efforts dépassant la mesure de ce que tout un chacun consacre à la gestion courante de ses affaires, n’a pas droit à des dépens.

Pour le surplus, en l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA en lien avec l’art. 1 al. 1 LACI).

* * * * * *


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Annule la décision du 26 mars 2021.

4.        Dit que la recourante a droit à une indemnité en cas de réduction de l’horaire de travail, pour une durée de six mois, à partir du 1er mars 2021, sous réserve de l’examen par la caisse de chômage des conditions conformément à l’art. 39 LACI.

5.        Dit qu’il n’est pas alloué de dépens.

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie NIERMARÉCHAL

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d’État à l’économie par le greffe le