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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1541/2016

ATAS/683/2016 du 29.08.2016 ( AI ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/1541/2016 ATAS/683/2016

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 29 août 2016

6ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée aux AVANCHETS, représentée par PROCAP Service juridique

 

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après : l'assurée), née le _____ 1966, mariée et mère de deux enfants majeurs, est titulaire de certificats fédéraux de capacité d’esthéticienne, d’employée de commerce et d'un diplôme de coach-conseil de l’Institut de Relooking International (France). Elle a travaillé entre 1983 et 1990 puis de 1999 à 2004 pour diverses banques genevoises.

Dès 1992 puis en 2005-2006, elle a exercé une activité d'esthéticienne et de conseillère en image indépendante. En 2007-2008, elle a travaillé comme secrétaire-comptable puis en 2008-2009 comme assistante administrative et esthéticienne-formatrice à l’école B______. De septembre 2011 jusqu’en août 2012, elle a travaillé comme gérante salariée de l'institut de beauté C______.

2.        Du 20 janvier 2014 au 29 janvier 2016, l’assurée a été inscrite au registre du commerce comme titulaire des entreprises individuelles «  D_____ » et «  E______ ».

3.        Le 16 octobre 2014, elle a déposé une demande de prestations auprès de l’Office de l’assurance-invalidité du canton de Genève (ci-après : l’OAI), en y invoquant une atteinte lombaire (L5 sacralisée congénitale).

4.        Le 7 novembre 2014, l’assurée a transmis à l’OAI diverses pièces, notamment :

-          un certificat de travail établi par Mme E_____, confirmant qu'elle a travaillé comme gérante de l'institut de beauté C______ de septembre 2011 à août 2012 ;

-          une fiche de salaire de C______ d'août 2012, faisant état d'un salaire mensuel brut de CHF 4'800.- ;

-          les comptes de résultat 2013 et 2014 de C______, mentionnant des bénéfices respectifs de CHF 8'986.- pour trois mois d’activité en 2013, et de CHF 32'962.- pour l’année 2014.

5.        Dans un rapport transmis à l’OAI le 18 novembre 2014, la Dresse F_____, médecin généraliste, a retenu le diagnostic incapacitant de lombalgies basses. Elle a relaté que l’assurée présentait une raideur lombaire, des douleurs à la palpation et une compression des apophyses lombaires L4-L5. Cette dernière souffrait de limitations fonctionnelles relatives au port de charges, aux mouvements de flexion antérieurs du tronc, et aux bras de levier en traction lombaire, qui l’empêchaient d’exercer des soins esthétiques complets. Une incapacité de travail de 50% était attestée dès le 1er septembre 2014.

6.        Le 26 mars 2015, l'assurée a déclaré par téléphone à l’OAI qu’entre 2010 et 2012, elle avait été au chômage tout en percevant des gains intermédiaires auprès de l'Institut C______, qu’en septembre 2012, elle s’était mise à son compte, et qu’elle se réorientait désormais vers le conseil en image ; elle donnait des cours à 50% depuis le mois de septembre 2014.

7.        La BÂLOISE, assurance perte de gain, a diligenté une expertise auprès du Dr G_____ spécialiste FMH en rhumatologie et médecine interne générale.

Dans son rapport du 25 juin 2015, il a retenu les diagnostics de lombalgies chroniques avec discopathies étagées prédominant en L4-L5, de lupus érythémateux avec antécédents d’atteinte cutanée et articulaire, sans traitement ni signe clinique. Il a également fait état d’un diagnostic anamnésique d'état dépressif.

L’assurée avait travaillé dernièrement dans un institut qu’elle avait fondé, à 80-90% comme esthéticienne et à 10-20% comme coach en image. Un lupus érythémateux lui avait été diagnostiqué à l’âge de 26 ans, pour lequel elle ne prenait plus de médicaments depuis plusieurs années. Elle était aussi sous traitement depuis au moins trois ans chez un psychiatre. Par ailleurs, elle avait souffert de lombalgies basses depuis son adolescence, exacerbées depuis deux ans et qui s’étaient encore notablement aggravées durant l’été 2014, ce qui avait donné lieu à divers arrêts de travail (50% dès septembre 2014, 100% du 19 janvier au 10 février 2015, puis à 90% dès le 13 avril 2015, toujours en cours). Actuellement, l’assurée se consacrait 4 heures par semaine à des cours de coaching en image, qui n’impliquaient ni activité debout ni positions en porte-à-faux de la colonne lombaire.

À l’examen, l’assurée, qui ne paraissait pas déprimée, présentait une surcharge pondérale et une discrète limitation des inclinaisons latérales avec quelques douleurs au niveau des para-cervicales et des apophyses épineuses, sans autre anomalie. Au niveau de la colonne dorso-lombaire, il y avait une légère limitation de la mobilité, et la mobilisation lombaire en flexion provoquait des lombalgies. Un bilan radiologique de septembre 2014 montrait une anomalie transitionnelle avec une vertèbre L5 sacralisée, une discopathie importante L4-L5 et une arthrose des articulaires postérieures marquée, prédominant de L3 à L5. Le Dr H_____ retenait par ailleurs des anomalies sur le plan sagittal, notamment une carence de 20° de lordose lombaire. Ce médecin avait proposé une intervention chirurgicale, que l’assurée avait refusée et l’expert, pour sa part, restait prudent sur sa nécessité. Il semblait y avoir une certaine discordance entre l’intensité des lombalgies et les lésions radiologiques, qui paraissaient peu sévères. Il préconisait une IRM supplémentaire et un bilan sanguin pour s’assurer qu’il n’y ait pas d’autres lésions disco-vertébrales.

Au vu du tableau clinique et radiologique, il estimait la capacité de travail à 0% dans l’activité d’esthéticienne, qui impliquait le maintien de la position debout en semi-flexion antérieure, mais à 50% « dès maintenant » dans l’activité exercée d’enseignement et de coaching en image. On pouvait espérer à terme une augmentation à 100% moyennant une physiothérapie plus active, avec un grand risque toutefois que persistent des plaintes douloureuses sans substrat « très objectif ». Le pronostic était mauvais, vu la discordance entre les plaintes et les lésions radiologiques.

8.        Le 22 septembre 2015, la Dresse I_____ du Service médical régional AI (ci-après : le SMR), a émis l’avis que l’état de santé n’était pas stabilisé mais qu’en toute hypothèse, on pouvait retenir, dès le 1er septembre 2014, une capacité de travail de 0% dans l’activité d’esthéticienne mais de 50% dans une activité adaptée sans port de charges supérieures à cinq kilogrammes, mouvements répétitifs de la colonne lombaire, positions en porte-à-faux ou en en semi-flexion antérieure.

9.        Le 28 septembre 2015, la Dresse F_____ a confirmé une capacité de travail nulle comme esthéticienne mais de 50% dans une activité adaptée d’enseignement et de conseils ; l’état de santé était stable depuis fin août 2014. Elle a sollicité une aide financière pour une reconversion professionnelle.

10.    Dans un rapport transmis à l’OAI le 28 octobre 2015, le Dr J_____, médecin adjoint au département de psychiatrie des Hôpitaux universitaires de Genève, a fait état d'un trouble dépressifs récurrent et d'une addiction comportementale, sans répercussions sur la capacité de travail.

11.    Le 30 octobre 2015, le Dr K_____, médecin adjoint du Service de rhumatologie des Hôpitaux universitaires de Genève, a rendu un rapport d’évaluation multidisciplinaire du dos, confirmant lui aussi une capacité de travail de 50% dans une activité adaptée permettant l’alternance des positions, sans positions en porte-à-faux ni port répété de charges. Une ergothérapie et la poursuite du suivi psychiatrique étaient préconisées.

12.    Depuis le 10 novembre 2015, l’assurée est inscrite au registre du commerce comme associée gérante de l_____ SàRL, société ayant pour but « la formation et le conseil en relooking, le coaching en image, l'achat et la vente de produits cosmétiques et d'autres produits liés à l'activité (…) ».

13.    Le 21 janvier 2015, la Dresse M_____, médecin au SMR, a indiqué que c'était depuis le mois de juin 2015 que l'assurée était capable d'exercer une activité à 50%, conformément à l'expertise du Dr G_____.

14.    Dans son calcul du 8 février 2016, l'OAI a fixé le degré d’invalidité en 2014 à 37,1% sur la base, d’une part, d’un revenu sans invalidité de CHF 58'542.- correspondant au dernier salaire perçu par l’assurée en 2012 auprès de C______, indexé jusqu’en 2014, et d’autre part, d’un revenu d’invalide indexé de CHF 36'830.- fondé sur l'Enquête suisse sur la structure des salaires 2012 (tableau TA1_tirage_skill_level, ligne 85 [enseignement], niveau de compétence 3), compte tenu d'un taux d'activité exigible de 50% et d’un abattement de 10%.

15.    Le 8 février 2016, le Service de réadaptation de l’AI a indiqué que l’assurée avait un statut d’indépendante, qu’elle avait travaillé comme esthéticienne depuis plusieurs années, tantôt comme salariée, tantôt comme indépendante, et qu’en novembre 2015, elle avait créé l_____, une société active dans la formation. Cette nouvelle activité était adaptée à son état de santé, car elle n’impliquait plus de soins esthétiques proprement dits. De plus, l’assurée, qui avait déjà exercé des activités similaires par le passé, disposait déjà de toutes les compétences idoines, que ce soit sous l’angle de la formation ou de la gestion.

16.    Le 16 février 2016, l’OAI a transmis à l’assurée un projet de décision, aux termes duquel il entendait lui refuser toute prestation.

En effet, son degré d’invalidité s’élevait à 37 % [58’542 – 36’830) / 58’542], taux insuffisant pour ouvrir droit à une rente d’invalidité. Par ailleurs, des mesures d’ordre professionnel n’étaient pas susceptibles de réduire son dommage.

17.    L’assurée, représentée par un conseil, s’y est opposée le 17 mars 2016.

Elle a contesté le revenu d’invalide retenu, en arguant que le salaire statistique de l’enseignement sur lequel se fondait l’office ne recouvrait pas le coaching en image ni le relooking, mais des activités exigeant une formation supérieure. Dans son cas, il y avait lieu de se référer à la branche particulière « autres services personnels » des ESS 2012 - qui englobait l’activité d’esthéticienne - en tenant compte d'un niveau de qualification 2. Dès lors, son revenu d’invalide pouvait être estimé à CHF 23'058.- et son degré d’invalidité à 61%, ce qui lui ouvrait droit à un trois quart de rente d’invalidité.

À titre subsidiaire, elle a sollicité que son droit à un reclassement soit réexaminé.

18.    Dans une note du 21 avril 2016, le responsable du Service de réadaptation de l’AI s’est déterminé sur les arguments invoqués dans l’opposition.

L’assurée, qui avait déjà travaillé comme formatrice et animé des cours d’expert O_____, disposait de toutes les compétences nécessaires pour mettre en valeur sa capacité résiduelle de travail dans une activité de gestion et de formation. De plus, l’activité d’enseignement exercée pour la société qu’elle avait fondée, était adaptée.

S’agissant du revenu d’invalide, le salaire statistique retenu se rapportait au secteur « enseignements divers » de la nomenclature générale des activités économiques [NOGA 2008]. Contrairement à ce qu’affirmait l’assurée, le recours à cette statistique ne dépendait pas de l’obtention d’un diplôme supérieur. Au vu des compétences et qualifications variées de l’assurée, il maintenait son calcul du degré d’invalidité et ses explications de février 2016.

19.    Par décision formelle du 12 avril 2016, reçue par l’assurée le 14 avril, l’OAI a nié son droit à toute prestation.

Faisant siennes les conclusions du SMR, il a retenu une capacité de travail nulle dans l’activité habituelle d’esthéticienne dès le 1er septembre 2014 mais de 50% dans toute activité adaptée aux limitations dès le 1er juin 2015.

Il a confirmé un degré d’invalidité à 37 % [58’542 – 36’830) / 58’542], taux insuffisant pour ouvrir droit à une rente d’invalidité. Des mesures d’ordre professionnel ne se justifiaient pas davantage, car l’assurée avait déjà repris une activité pour laquelle elle disposait des compétences nécessaires, tans sous l’angle de la formation que de la gestion.

S’agissant des arguments invoqués par l’assurée à l’appui de son opposition, ils ne modifiaient pas l’appréciation de son service de réadaptation.

20.    Par acte du 13 mai 2016, l’assurée a interjeté recours contre cette décision, en concluant, sous suite de frais et dépens, à son annulation et à l’octroi d’au moins un trois quart de rente d’invalidité dès le 1er septembre 2015, subsidiairement à la mise en œuvre d’un reclassement.

C’était à tort que l’OAI avait estimé son revenu d’invalide sur la base du niveau de qualification 3 plutôt que 2 des ESS 2012. En outre, ses qualifications académiques ne lui permettaient pas d’enseigner dans le secteur public ou privé, de sorte qu’il n’y avait pas lieu de se référer à la branche « enseignement » des statistiques salariales. Cette branche recouvrait en effet des activités exigeant une formation supérieure, à savoir un certificat FSEA voire un brevet fédéral de formateur d’adultes, ce qui n’était pas son cas puisqu’elle disposait seulement d’un CFC d’esthéticienne et d’un diplôme de coach en image.

Le revenu d’invalide de CHF 81'844.-retenu par l’intimé pour son activité indépendante lui paraissant hors d’atteinte, elle se prévalait du salaire statistique dans la branche particulière intitulée « autres services personnels », niveau de qualification 2, lequel tenait mieux compte de ses connaissances du domaine et du fait que son activité était tournée vers le conseil, ce qui impliquait une rémunération aléatoire. Son revenu d’invalide après abattement de 10% pouvait être estimé à CHF 20'571.80. Sa comparaison avec le revenu sans invalidité retenu par l’intimé de CHF 58’8542.- mettait en exergue un degré d’invalidité de 65%, lequel ouvrait droit à un trois-quarts de rente.

À titre subsidiaire, elle a sollicité un reclassement professionnel tendant à l’obtention d’un diplôme de formatrice d’adultes (certificat FSEA ou brevet fédéral), mesure qui lui paraissait de prime abord susceptible de réduire son degré d’invalidité.

21.    Invité par la Chambre de céans à se déterminer, l’intimé, dans sa réponse du 14 juin 2016, a conclu au rejet du recours.

S’agissant du revenu d’invalide, il s’est référé aux explications données par son Service de réadaptation en février et avril 2016.

Quant au reclassement professionnel, il a répété que l’assurée, qui avait déjà exercé le même genre d’activité par le passé, disposait déjà des compétences requises pour son activité professionnelle, tant sous l’angle de la formation que de la gestion. Il a rappelé qu’un assuré ne pouvait prétendre, selon la jurisprudence, qu’aux mesures nécessaires pour atteindre le but de la réadaptation mais pas à celles qui seraient les meilleures dans son cas.

22.    La recourante a répliqué le 15 juillet 2016.

Elle a persisté dans l’argumentation exposée dans son recours et dans ses conclusions tendant à l’octroi d’un trois-quarts de rente, subsidiairement d’un reclassement.

Par ailleurs, elle a signalé qu’une aggravation de sa dépression l’empêchait désormais de travailler. Cette aggravation, apparemment postérieure à la décision querellée, serait prochainement investiguée.

À l’appui de ses écritures, elle a joint un rapport établi le 26 mai 2016 par le Dr J_____, médecin adjoint au département de psychiatrie des Hôpitaux universitaires de Genève : sa patiente a investi le peu d’argent dont elle disposait et énormément d’efforts pour se réadapter par elle-même dans une activité d’enseignement spécialisé, laquelle ne lui permet pas, en l’état, de subvenir à ses besoins essentiels. Sa capacité de gain lui paraît donc nettement surévaluée. Dans ce contexte, il constate une détérioration de la thymie de l’assurée, aujourd’hui dépressive, ce qui l’empêche de travailler. À terme, c’est l’ensemble du projet qui lui paraît menacé, à supposer qu’il soit viable.

23.    Cette écriture a été communiquée à l’intimé le 15 juillet 2016, suite à quoi la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Les modifications de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 21 mars 2003 (4ème révision), du 6 octobre 2006 (5ème révision) et du 18 mars 2011 (révision 6a), entrées en vigueur le 1er janvier 2004, respectivement, le 1er janvier 2008 et le 1er janvier 2012, entraînent la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de l'assurance-invalidité. Sur le plan matériel, sont en principe applicables les règles de droit en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 129 V 1 consid. 1; ATF 127 V 467 consid. 1 et les références). En ce qui concerne en revanche la procédure, et à défaut de règles transitoires contraires, le nouveau droit s'applique sans réserve dès le jour de son entrée en vigueur (ATF 117 V 93 consid. 6b; ATF 112 V 360 consid. 4a; RAMA 1998 KV 37 p. 316 consid. 3b).

En l’espèce, les faits juridiquement déterminants remontent à 2014. Par conséquent, le droit éventuel aux prestations doit être examiné au regard des dispositions de la LPGA et de la LAI, dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2012 (ATF 130 V 445 et les références, voir également ATF 130 V 329).

3.        Le délai de recours est de 30 jours. Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 60 al. 1 et 56 à 61 LPGA).

4.        Est litigieux le droit de la recourante à des prestations de l’assurance-invalidité, plus particulièrement l'évaluation de son degré d’invalidité.

5.        Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

En vertu de l’art. 28 al. 1er LAI, l’assuré a droit à une rente d’invalidité aux conditions suivantes : sa capacité de gain ou sa capacité d’accomplir ses travaux habituels ne peut pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles (let. a); il a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40 % en moyenne durant une année sans interruption notable (let. b); au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40 % au moins (let. c). L’art. 28 al. 2 LAI dispose que l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70 % au moins, à trois quarts de rente s’il est invalide à 60 % au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50 % au moins ou à un quart de rente s’il est invalide à 40 % au moins.

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

6.        a. Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI). La comparaison des revenus s'effectue, en règle ordinaire, en chiffrant aussi exactement que possible les montants de ces deux revenus et en les confrontant l'un avec l'autre, la différence permettant de calculer le taux d'invalidité (méthode générale de comparaison des revenus; ATF 128 V 29 consid. 1; ATF 104 V 135 consid. 2a et 2b).

b. Pour fixer le revenu sans invalidité, il faut établir ce que l'assuré aurait, au degré de la vraisemblance prépondérante, réellement pu obtenir au moment déterminant s'il n'était pas invalide. Ce revenu doit être évalué de manière aussi concrète que possible si bien qu’il convient, en règle générale, de se référer au dernier salaire que l’assuré a obtenu avant l’atteinte à sa santé, en tenant compte de l’évolution des salaires (ATF 129 V 222 consid. 4.3.1).

c. Quant au revenu d'invalide, il doit aussi être évalué avant tout en fonction de la situation professionnelle concrète. En l'absence d'un revenu effectivement réalisé, la jurisprudence considère que le revenu d'invalide peut être évalué sur la base des statistiques salariales (ATF 129 V 472 consid. 4.2.1 p. 475; 126 V 75 consid. 3b/aa p. 76 et les références). Dans ce cas, il convient de se fonder, en règle générale, sur les salaires mensuels indiqués dans la table ESS TA1, à la ligne «total secteur privé» (ATF 124 V 321 consid. 3b/aa p. 323). Toutefois, lorsque cela apparaît indiqué dans un cas concret pour permettre à l'assuré de mettre pleinement à profit sa capacité résiduelle de travail, il y a lieu parfois de se référer aux salaires mensuels de secteurs particuliers (secteur 2 [production] ou 3 [services]), voire à des branches particulières. Tel est notamment le cas lorsqu’avant l'atteinte à la santé, l'assuré a travaillé dans un domaine pendant de nombreuses années et qu'une activité dans un autre domaine n'entre pas en ligne de compte. En outre, lorsque les circonstances du cas concret le justifient, on peut s'écarter de la table TA1 (secteur privé) pour se référer à la table TA7 (secteur privé et secteur public [Confédération] ensemble), si cela permet de fixer plus précisément le revenu d'invalide et que le secteur en question est adapté et exigible (arrêt 9C_237/2007 du 24 août 2007 consid. 5.1, non publié aux ATF 133 V 545, et les références citées).

Dans l’enquête suisse sur la structure des salaires 2012, certains tableaux qui servent de documents de référence pour l’assurance-invalidité ne se présentent plus sous la même forme qu’auparavant. En particulier, des « niveaux de compétences » remplacent les « niveaux de qualifications requises pour le poste de travail ». Ces niveaux de compétences ont été définis en fonction du type de travail, de la formation nécessaire à la pratique de la profession et de l’expérience professionnelle. Le niveau 1 constitue désormais le niveau de compétence le plus bas (alors qu’il correspondait auparavant au niveau des qualifications le plus élevé), et le niveau 4 le niveau de compétences le plus élevé (alors qu’il était le niveau des qualifications le plus bas). Le niveau 1 de l’ESS 2012 correspond donc au niveau de qualifications 4 des ESS établies jusqu’en 2010 (Office fédéral des assurance sociales, lettre circulaire AI n° 328 du 22 octobre 2014).

7.        a. Lorsqu'il n'est pas possible d'établir ou d'évaluer de manière fiable les deux revenus provenant d'une activité lucrative, il faut appliquer la méthode extraordinaire d'évaluation de l'invalidité (ATF 128 V 30 consid. 1). Selon cette méthode, on commence par déterminer, sur la base d'une comparaison des activités, quel est l'empêchement provoqué par la maladie ou l'infirmité, après quoi l'on apprécie séparément les effets de cet empêchement sur la capacité de gain. Une certaine diminution de la capacité de rendement fonctionnelle peut certes, dans le cas d'une personne active, entraîner une perte de gain de la même importance, mais n'a pas nécessairement cette conséquence. Si l'on voulait, dans le cas des personnes actives, se fonder exclusivement sur le résultat de la comparaison des activités, on violerait le principe légal selon lequel l'invalidité, pour cette catégorie d'assurés, doit être déterminée d'après l'incapacité de gain (ATF 128 V 30 consid.1; ATF 104 V 136 consid. 2; VSI 1998 p. 122 consid. 2a et p. 257 consid. 2b).

b. La méthode extraordinaire est souvent utilisée pour les indépendants, principalement ceux qui travaillent dans l'agriculture ou qui exercent un métier manuel lorsque, en raison de leur état de santé, ils se voient contraints d'abandonner l'activité qu'ils exercent à titre principal et de modifier la structure de leur exploitation par l'engagement de nouveaux collaborateurs (VALTERIO, Droit de l'assurance-vieillesse et survivants (AVS) et de l'assurance-invalidité (AI), Schulthess, 2011, ch. 2183). Selon la jurisprudence, la comparaison des résultats d'exploitation réalisés dans une entreprise artisanale avant et après la survenance de l'invalidité ne permet de tirer des conclusions valables sur la diminution de la capacité de gain due à l'invalidité que dans le cas où l'on peut exclure au degré de vraisemblance prépondérante que les résultats de l'exploitation aient été influencés par des facteurs étrangers à l'invalidité. En effet, les résultats d'exploitation d'une entreprise artisanale dépendent souvent de nombreux paramètres difficiles à apprécier, tels que la situation conjoncturelle, la concurrence, l'aide ponctuelle de membres de la famille, des personnes intéressées dans l'entreprise ou des collaborateurs. Généralement, les documents comptables ne permettent pas, en pareils cas, de distinguer la part du revenu qu'il faut attribuer à ces facteurs (étrangers à l'invalidité) et celle qui revient à la propre prestation de travail de l'assuré (VSI 2/1998 p. 122 consid. 2c; VSI 5/1998 p. 255 consid. 4a; RCC 1979, p. 228ss; ATAS/112/2009; ATAS 526/2005).

c. L'application de la méthode extraordinaire suppose que les conséquences de la baisse de rendement puissent être établies. Ainsi par exemple, l'invalidité ne devra pas être évaluée selon la méthode extraordinaire, mais selon la méthode de comparaison des revenus lorsque, en raison d'un changement important intervenu dans l'exploitation d'un indépendant (p.ex. cessation d'activité, vente de l'exploitation), les répercussions économiques de la baisse de rendement sur les divers champs d'activité ne peuvent plus être établies de manière réaliste.

8.        Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux. Ainsi, en principe, lorsqu’au stade de la procédure administrative, une expertise confiée à un médecin indépendant est établie par un spécialiste reconnu, sur la base d'observations approfondies et d'investigations complètes, ainsi qu'en pleine connaissance du dossier, et que l'expert aboutit à des résultats convaincants, le juge ne saurait les écarter aussi longtemps qu'aucun indice concret ne permet de douter de leur bien-fondé (ATF 125 V 351 consid. 3b/bb).

Le juge peut accorder pleine valeur probante aux rapports et expertises établis par les médecins d'un assureur social aussi longtemps que ceux-ci aboutissent à des résultats convaincants, que leurs conclusions sont sérieusement motivées, que ces avis ne contiennent pas de contradictions et qu'aucun indice concret ne permet de mettre en cause leur bien-fondé. Le simple fait que le médecin consulté est lié à l'assureur par un rapport de travail ne permet pas encore de douter de l'objectivité de son appréciation ni de soupçonner une prévention à l'égard de l'assuré. Ce n'est qu'en présence de circonstances particulières que les doutes au sujet de l'impartialité d'une appréciation peuvent être considérés comme objectivement fondés. Etant donné l'importance conférée aux rapports médicaux dans le droit des assurances sociales, il y a lieu toutefois de poser des exigences sévères quant à l'impartialité de l'expert (ATF 125 V 351 consid. 3b/ee).

En ce qui concerne les rapports établis par les médecins traitants, le juge peut et doit tenir compte du fait que, selon l'expérience, le médecin traitant est généralement enclin, en cas de doute, à prendre parti pour son patient en raison de la relation de confiance qui l'unit à ce dernier (ATF 125 V 351 consid. 3b/cc).

9.        Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

10.    a. En l'espèce, le SMR, se fondant sur l’expertise du Dr G_____, considère que l’assurée dispose d’une capacité de travail exigible nulle depuis septembre 2014 dans l'activité d'esthéticienne mais de 50% depuis juin 2015 dans une activité adaptée, y-compris dans l'activité indépendante exercée, moyennant le respect de diverses limitations fonctionnelles d'épargne lombaire. Cette exigibilité de 50% dans une activité adaptée n’est pas contestée par la recourante et coïncide au demeurant avec les conclusions de ses médecins, émanant notamment de la Dresse F_____ et du Dr K_____. Il n’y a pas lieu d’y revenir.

b. À l’appui de son recours, l’assurée produit un bref rapport psychiatrique du Dr J_____ du 26 mai 2015, faisant état d’« une détérioration importante de la thymie de la patiente, aujourd’hui dépressive », ce qui rendrait désormais impossible l’exercice de toute activité professionnelle.

Dans ses écritures du 15 juillet 2016, la recourante indique que l’aggravation évoquée par le Dr J_____ serait postérieure à la décision litigieuse. C’est le lieu de rappeler que le juge appelé à se prononcer sur la légalité d'une décision rendue par une assurance sociale doit apprécier l'état de fait déterminant existant au moment où la décision attaquée a été rendue. Les faits survenus postérieurement, qui ont modifié cette situation, doivent normalement faire l’objet d’une nouvelle décision administrative (ATF 121 V 366 consid. 1b). Quoi qu’il en soit, la valeur probante de ce rapport succinct est sujette à caution : il repose manifestement sur les seules plaintes de l’assurée et ne contient ni description clinique, ni anamnèse, ni motivation.

Partant, le rapport du Dr J_____ ne remet pas en question l’exigibilité retenue de 50% dans une activité adaptée.

11.    Il convient à présent d’examiner le calcul du degré d'invalidité, que l’intimé a fixé à 37% sur la base d’une comparaison des gains.

a. Dans la mesure où la recourante exerce une activité indépendante, on peut se demander si la méthode extraordinaire d’évaluation de l’invalidité devrait lui être appliquée. Tel n’est toutefois pas le cas. En effet, l’intéressée a sollicité son inscription au registre du commerce en janvier 2014, soit à une période où elle rencontrait vraisemblablement déjà des problèmes de santé puisque, selon l’expertise du Dr G_____, la fréquence et la durée de ses lombalgies a augmenté « depuis deux ans ». Au vu la date de l’expertise, l’aggravation dont il est question peut être située en juin 2013. Il en résulte que le début de l’activité indépendante est concomitant voire postérieur à la survenance de l’atteinte. Partant, c’est à bon escient que l’intimé a opté pour la méthode générale de comparaison des gains (ATAS/784/2011 consid. 8). La recourante ne le conteste pas.

b. La comparaison des revenus s’effectue au moment de la naissance du droit à la rente (ATF 129 V 222). En l'espèce, le droit éventuel à la rente naît en septembre 2015, une année après la naissance de l'incapacité de travail (art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI). Il convient donc de se placer en 2015 pour procéder à la comparaison des gains.

c. Selon la jurisprudence, le revenu sans invalidité se déduit du salaire réalisé en dernier lieu avant l’atteinte à la santé. L’intimé l’a fixé ici à CHF 58'542.- sur la base du dernier salaire réalisé par l'assurée en août 2012 comme gérante de l'institut C______, indexé jusqu'en 2014.

En l’occurrence, l’assurée a effectivement perçu un salaire annuel de CHF 57'600.- jusqu’en août 2012, selon sa dernière fiche de salaire et son contrat de travail. Ce montant doit toutefois être adapté à l’évolution des salaires nominaux jusqu’en 2015 et non pas jusqu’en 2014 (ISS en 2012 : 2'630 et en 2015 : 2’686). Ce faisant, on obtient un revenu sans invalidité de CHF 58'826.- en 2015.

d. S’agissant du revenu d'invalide, l’intimé l’a estimé à CHF 36'830.- sur la base de l'Enquête suisse sur la structure des salaires 2012 (tableau TA1_tirage_skill_level, ligne 85, niveau de compétence 3), en tenant compte d'un taux d'occupation exigible de 50% et d’un abattement de 10%.

La recourante soutient que son revenu d’invalide ne devrait pas être évalué sur la base de la branche particulière « enseignement » (ligne 85) des statistiques salariales mais de la branche « autres services personnels » (ligne 96).

e. Préalablement, il paraît opportun de relever que l’assurée a fondé l_____ SÀRL en novembre 2015, de sorte que le résultat d'exploitation de cette entreprise ne permettrait pas, au vu de sa brève existence, de fixer de manière fiable le revenu d’invalide qu’elle peut encore réaliser malgré l’atteinte à la santé. Il en va de même des deux entreprises individuelles dont elle a été titulaire entre janvier 2014 et janvier 2016. En effet, il est notoire que les personnes qui se mettent à leur compte ne réalisent pas, au début de leur nouvelle activité, les mêmes revenus que des entrepreneurs établis depuis plusieurs années et qu'elles consentent souvent des sacrifices financiers importants durant cette période. C’est donc à juste titre que l’intimé a évalué le revenu d’invalide sur une base statistique.

f. Il convient à présent de déterminer quelle base statistique est pertinente in casu.

Selon la nomenclature générale des activités économiques, la branche « enseignement » (ligne 85) des ESS - sur laquelle s'est fondé l'intimé - englobe non seulement l’enseignement délivré par les institutions composant le système scolaire traditionnel, mais aussi l’enseignement pour adultes et l’enseignement d’activités sportives et récréatives. Sous le titre « enseignement secondaire technique ou professionnel » (secteur spécifique n° 8532), elle regroupe notamment l’enseignement comportant une spécialisation par matière et associant connaissances théoriques et qualifications pratiques axées sur un emploi tel qu’il est dispensé, par exemple, dans les écoles d’esthétique et de coiffure (Office fédéral de la statistique, Nomenclature générale des activités économiques [NOGA 2008], notes explicatives, p. 218 ss).

En l'occurrence, la recourante exploite « L_____». D’après le site internet de cet établissement, il s'agit d'une école au sein de laquelle l’assurée dispense des cours de conseil en image. Elle y offre une formation complète de coach en image sanctionnée par un diplôme, des formations spécifiques s’adressant aux conseillers en image confirmés, ainsi que des cours de relooking destinés aux coiffeurs, esthéticiennes et opticiens (cf. dossier intimé, pièce 101). Étant donné que l’assurée se consacre désormais à la formation, le choix de l’intimé de se fonder sur le salaire statistique de la branche particulière « enseignement » des ESS pour évaluer le revenu d’invalide ne prête pas le flanc à la critique.

Que la recourante n'ait pas achevé de formation supérieure ne permet pas de remettre en question la pertinence de ce choix. D'une part, il ne ressort pas de la nomenclature générale des activités économiques que la branche « enseignement » des statistiques salariales ne regrouperait que des activités exigeant une formation supérieure. D'autre part, force est de constater qu’en dépit de son faible bagage académique, l'assurée a été en mesure de dispenser des cours auprès de l'école B______, de l'Ecole-club N_____ et de l’Office fédéral O______ (O_____). Elle ne peut donc pas être suivie lorsqu’elle laisse entendre que l’absence de diplôme idoine anéantirait ses perspectives d’engagement dans l’enseignement.

Quant à la branche particulière des « autres services personnels » dont l’intéressée se prévaut, elle ne paraît pas appropriée pour fixer son revenu d’invalide : si cette branche couvre effectivement l'activité d’esthéticienne (Office fédéral de la statistique, idem, p. 244), force est de constater qu’il s’agit de l’activité exercée avant l’atteinte à la santé, laquelle est désormais proscrite par les médecins. Il n’y a donc pas lieu de s’y référer pour fixer le revenu d’invalide que l’assurée peut encore réaliser malgré son atteinte lombaire.

g. Reste à examiner le degré de compétence retenu par l’intimé, dont la recourante soutient qu’il devrait être fixé au niveau 2 plutôt qu’au niveau 3.

Selon la jurisprudence, le choix du niveau de qualification professionnelle (1+2, 3 ou 4), en tant que facteur entrant dans la détermination du gain d'un assuré sur la base des statistiques salariales (ATF 124 V 321), se fonde sur l'expérience générale de la vie et constitue dès lors une question de droit que le juge peut revoir librement (arrêts du Tribunal fédéral 9C_24/2009 du 6 mars 2009 ; I 732/06 du 2 mai 2007, consid. 4.2.2, publié in SVR 2008 IV n° 4 p. 9). Il convient de se référer aux circonstances particulières du cas concret (années d'expérience professionnelle, formation, diplômes, position dirigeante ou indépendante, salaire, etc.) pour déterminer quel niveau de qualification correspond au mieux à la situation économique de l'assuré (arrêts du Tribunal fédéral 8C_955/2009 du 30 avril 2010 consid. 4.2.1; I 97/00 du 29 août 2002 consid. 1.2).

En l’espèce, la recourante est titulaire de deux CFC d’esthéticienne / employée de commerce et d’un certificat de conseillère en image obtenu en France, mais elle ne dispose d'aucun diplôme spécifique à l’enseignement. Bien qu’elle soit nantie d’une bonne expérience professionnelle dans les soins esthétiques et les services administratifs, son bagage est sensiblement plus limité dans le domaine de la formation, qui est directement en lien avec l’activité exercée. Ainsi, selon son curriculum vitae et son extrait de compte AVS, elle a donné quelques cours à l’O_____ en 2004, puis a mis sur pied un concept de formation de coach en image en 2005-2006 tout en donnant des formations à l’Ecole-club N_____. Elle a également travaillé d’août 2008 à avril 2009 auprès de l’école B______, mais ne semble pas avoir d’autre expérience dans l’enseignement. Enfin, l’assurée a perçu durant toute sa carrière des revenus modestes, lesquels n'ont que rarement dépassé CHF 40'000.- et n’ont jamais excédé les CHF 57'600.- touchés dans sa dernière activité salariée.

Au vu de ces circonstances, notamment de la modeste expérience professionnelle acquise dans le domaine de l’enseignement sans titre spécifique, il n’est pas justifié de se fonder sur le niveau de compétence 3 de la branche idoine, qui correspond à l’ancien niveau de qualification 2 des ESS jusqu’en 2010 et suppose par conséquent des travaux « très qualifiés » (arrêt du Tribunal fédéral 9C_110/2009 du 23 décembre 2009, consid. 4.2). Il y a lieu de retenir un niveau de compétence 2 (correspondant aux « connaissances professionnelles spécialisées » selon l’ancienne terminologie), lequel tient mieux compte des spécificités du cas d’espèce.

12.    En se fondant sur la ligne 85, niveau de compétence 2 de l’ESS 2012 pour une femme (tableau TA1_tirage_skill_level), on obtient un revenu annuel d’invalide de CHF 65'256.- pour un plein temps. Comme les salaires bruts standardisés tiennent compte d’un horaire de travail de 40 heures par semaine, inférieur à la moyenne usuelle dans les entreprises de 41,7 heures en 2015 (Office fédéral de la statistique – statistique de la durée normale du travail dans les entreprises, DNT), ce montant doit être augmenté une première fois à CHF 68'029.- (65’256 x 41.7 : 40), puis une seconde à CHF 69'477.- afin de tenir compte de l’évolution des salaires nominaux jusqu’en 2015 (ISS en 2012 : 2'630 et en 2015 : 2'686). Rapporté au taux d’activité exigible de 50% et moyennant l’abattement non contesté de 10%, le revenu d’invalide s’élève en définitive à CHF 31’265.- (50% x 90% x 69'477).

13.    La comparaison des gains met en exergue un degré d’invalidité de 46,8% (58'826 – 31’265) / 58’826). En principe, ce taux donne à l’assurée droit au versement d’un quart de rente d’invalidité dès le 1er septembre 2015, une année après la naissance de son incapacité de travail (art. 28 al. 2 LAI).

14.    Reste toutefois à examiner si sa capacité de gain peut être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles, condition préalable au versement d’une rente (art. 28 al.1 let. a LAI).

a. À teneur de l’art. 8 al.1er LAI, les assurés invalides ou menacés d’une invalidité (art. 8 LPGA) ont droit à des mesures de réadaptation pour autant que ces mesures soient nécessaires et de nature à rétablir, maintenir ou améliorer leur capacité de gain ou leur capacité d’accomplir leurs travaux habituels (let. a) et que les conditions d’octroi des différentes mesures soient remplies (let. b). Pour déterminer si une mesure est de nature à maintenir ou à améliorer la capacité de gain d'un assuré, il convient d'effectuer un pronostic sur les chances de succès des mesures demandées (ATF 132 V 215 consid. 3.2.2 et les références).

Sont réputées nécessaires et appropriées toutes les mesures de réadaptation professionnelle qui contribuent directement à favoriser la réadaptation dans la vie active. L’étendue de ces mesures ne saurait être déterminée de manière abstraite, puisque cela suppose un minimum de connaissances et de savoir-faire et que seules seraient reconnues comme mesures de réadaptation professionnelle celles se fondant sur le niveau minimal admis. Au contraire, il faut s’en tenir aux circonstances du cas concret. Celui qui peut prétendre au reclassement en raison de son invalidité a droit à la formation complète qui est nécessaire dans son cas, si sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être sauvegardée ou améliorée de manière notable (ATF 124 V 108 consid. 2a; VSI 1997 p. 85 consid. 1).

b. Selon l’art. 17 LAI, l’assuré a droit au reclassement dans une nouvelle profession si son invalidité rend cette mesure nécessaire et que sa capacité de gain peut ainsi, selon toute vraisemblance, être maintenue ou améliorée (al. 1er). La rééducation dans la même profession est assimilée au reclassement (al. 2).

Par reclassement, la jurisprudence entend l’ensemble des mesures de réadaptation de nature professionnelle qui sont nécessaires et suffisantes pour procurer à l’assuré une possibilité de gain à peu près équivalente à celle que lui offrait son ancienne activité. En règle générale, l’assuré n’a droit qu’aux mesures nécessaires, propres à atteindre le but de réadaptation visé, mais non pas à celles qui seraient les meilleures dans son cas (ATF 124 V 110 consid. 2a et les références ; VSI 2002 p. 109 consid. 2a). En particulier, l’assuré ne peut prétendre à une formation d’un niveau supérieur à celui de son ancienne activité, sauf si la nature et la gravité de l’invalidité sont telles que seule une formation d’un niveau supérieur permet de mettre à profit d’une manière optimale la capacité de travail à un niveau professionnel plus élevé. On notera aussi que si les préférences de l’intéressé quant au choix du genre de reclassement doivent être prises en considération, elles ne sauraient toutefois jouer un rôle déterminant (RCC 1988 p. 266 consid. 1).

c. En l’espèce, l’intimé considère que des mesures d’ordre professionnel sont superflues, car elles ne seraient pas susceptibles de réduire le dommage de l’assurée, autrement dit d’améliorer sa capacité de gain. Il allègue que l’intéressée dispose déjà de toutes les compétences requises pour sa nouvelle activité, que ce soit sous l’angle de la gestion ou de la formation, car elle a déjà exercé des activités similaires par le passé. Par ailleurs, il relève que cette dernière ne peut prétendre qu’aux mesures nécessaires pour atteindre le but de la réadaptation mais pas à celles qui seraient les meilleures dans son cas.

Dans son recours, l’assurée conclut subsidiairement à l’octroi d’une mesure de reclassement en se limitant à affirmer que « la question demeure ouverte sur la pertinence d’une mesure permettant de diminuer le préjudice, notamment par la prise en charge du certificat de formatrice d’adulte FSEA voire du brevet de formatrice d’adulte (…) ».

c. Ce faisant, elle ne démontre pas en quoi le refus de l’intimé de lui accorder des mesures d’ordre professionnel serait contraire au droit. Quoi qu’il en soit, on peut raisonnablement considérer que la prise en charge de l’une ou l’autre des formations évoquée n’entraînerait pas une diminution notable de son degré d’invalidité, puisque, même nantie d’une telle formation, ses qualifications académiques resteraient faibles. Partant, la décision litigieuse doit être confirmée en tant qu’elle nie le droit aux mesures d’ordre professionnel.

15.    Au vu de ce qui précède, le recours sera partiellement admis et la décision litigieuse annulée. Il sera dit que la recourante a droit à un quart de rente d’invalidité dès le 1er septembre 2015. Pour le reste, le recours sera rejeté.

La recourante, représentée par un mandataire, obtient partiellement gain de cause, de sorte qu’elle a droit à une indemnité à titre de participation à ses frais et dépens, que la Cour fixe en l’occurrence à CHF 3’000.- (art. 61 let. g LPGA ; art. 89H al. 3 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA; RS E 5 10 ; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA ; RS E 5 10.03).

La procédure de recours en matière de contestation portant sur l’octroi ou le refus de prestations de l’assurance-invalidité étant soumise à des frais de justice, un émolument de CHF 500.- est mis à charge de l’intimé (art. 69 al. 1 bis LAI).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet partiellement et annule la décision du 12 avril 2016.

3.        Dit que la recourante a droit à un quart de rente d’invalidité dès le 1er septembre 2015.

4.        Rejette le recours pour le surplus.

5.        Condamne l’intimé à verser à la recourante une indemnité de CHF 3'000.- à titre de dépens.

6.        Met un émolument de CHF 500.- à la charge de l’intimé.

7.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Alicia PERRONE

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le