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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2190/2017

ATAS/557/2018 du 25.06.2018 ( AVS ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2190/2017 ATAS/557/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 25 juin 2018

10ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à GENÈVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Florine KÜNG

 

recourant

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE COMPENSATION, sise rue des Gares 12, GENÈVE

 

intimée

 


EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après : l'intéressé ou le recourant), ressortissant français né le ______ 1949, domicilié à Genève, a travaillé jusqu'au 31 mai 2012 auprès du Bureau International du Travail (BIT), en qualité de fonctionnaire international, au bénéfice d'une carte de légitimation D, délivrée par le département fédéral des affaires étrangères (DFAE).

2.        Ayant pris sa retraite anticipée, il a été engagé, dès le mois de juin 2012, en qualité de traducteur auprès de l'Organisation Météorologique Mondiale (OMM), sous contrats de courte durée, pour les périodes suivantes :

-          du 1er juin au 31 juillet 2012 ;

-          du 3 septembre au 21 décembre 2012 ;

-          du 1er au 31 juillet 2013.

Il a parallèlement travaillé au sein du BIT, en qualité de fonctionnaire international temporaire durant les périodes suivantes :

-          du 5 juin au 28 juin 2013 ;

-          du 9 septembre au 15 novembre 2013 ;

-          du 13 janvier au 21 février 2014 ;

-          du 10 mars au 30 mai 2014 ;

-          du 2 au 27 juin 2014 ;

-          du 30 juin au 31 juillet 2014 ;

-          du 1er septembre 12 décembre 2014.

3.        En date du 28 mai 2015, la caisse genevoise de compensation (ci-après : CCGC ou l'intimée), statuant sur la base des attestations de salaires remises par l'intéressé, et au vu de l'absence de carte de légitimation valable, a rendu les décisions de cotisations personnelles pour salarié d'un employeur non soumis à cotisation (anobag), pour les années 2012 à 2014, étant encore précisé que le revenu d'activité lucrative déterminé par l'autorité de taxation ne correspond pas au revenu imposable mais au « résultat propre de l'entreprise », et que l'intéressé a atteint l'âge légal de la retraite le 19 mai 2014 :

-            pour 2012 (période du 1er juin au 31 décembre 2012) :

- revenu déterminant total : CHF 72'515.-

- Cotisations :

AVS/AI/APG (10.300 %) CHF 7'469.05

frais d'administration (2.800 %) CHF 209.15

AMAT (0.045 %) CHF 32.65

CAFI (1.700 %) CHF 1'232.75

AC (chômage 2.200 %) CHF 1'595.35

AC solidarité (1.000 %) CHF -.-

Total CHF 10'538.95

compte tenu des acomptes versés (CHF 10'767.55) et d'un intérêt rémunératoire le décompte se soldait par un montant de CHF 52.65 en faveur de l'intéressé ;

-            pour 2013 (période du 1er janvier au 31 décembre 2013) :

- revenu déterminant total : CHF 55'020.-

- Cotisations :

AVS/AI/APG (10.300 %) CHF 5'667.05

frais d'administration (2.800 %) CHF 158.70

AMAT (0.045 %) CHF 23.10

CAFI (1.700 %) CHF 1'045.40

AC (chômage 2.200 %) CHF 1'210.45

AC solidarité (1.000 %) CHF -.-

Total CHF 8'104.70

 

compte tenu des acomptes versés (CHF 3'535.35), et d'un intérêt moratoire, le décompte se soldait par un montant de CHF 4'663.30 en faveur de la caisse ;

 

-          pour 2012 (période du 1er janvier au 31 décembre 2014) :

salaire déterminant total : CHF 115'535.75

./. Abattement (pers. + âge retraite - CHF 9'800.-

Revenu déterminant total CHF 105'735.-

- Cotisations :

AVS/AI/APG (10.300 %) CHF 10'890.70

frais d'administration (2.800 %) CHF 304.95

AMAT (0.045 %) CHF 43.35

CAFI (1.700 %) CHF 2'431.90

AC (chômage 2.200 %) CHF 1'059.05

AC solidarité (1.000 %) CHF -.-

Total CHF 14'729.95

compte tenu des acomptes versés (CHF 1'965. 80), le décompte se soldait par un montant de CHF 12'764.15 en faveur de la caisse.

4.        Par courriers distincts du 29 juin 2015, l'intéressé, représenté par un conseil, a formé opposition contre chacune des décisions du 28 mai 2015 relatives aux années 2012 à 2014 inclusivement. Il conclut préalablement à la jonction des trois causes et principalement à l'annulation des décisions entreprises incluant celles relatives aux intérêts moratoires. Aucune explication n'a été fournie à l'intéressé à l'appui des décisions de cotisations querellées. Conformément à la législation sur l'AVS et aux directives sur l'assujettissement aux assurances AVS et AI (DAA) les fonctionnaires internationaux étrangers ne sont pas assurés à l'AVS/AI/APG/AC et ne peuvent pas y adhérer volontairement. L'intéressé n'a dès lors jamais cotisé à l'AVS durant toute son activité au sein du BIT. À compter du 1er juin 2012, à l'âge de 63 ans, et suite à sa retraite anticipée, l'opposant a poursuivi une activité professionnelle et a été engagé en qualité de traducteur auprès de l'OMM, sous contrats de courte durée (en 2012 et 2013), et - comme le précise l'OMM -, son statut doit être examiné à l'aune de l'Accord conclu entre le Conseil fédéral suisse et l'OMM, le 10 mars 1955, notamment en ce qui concerne l'exonération fiscale, mais également de l'Accord concernant les conditions d'emploi de traducteurs et éditeurs employés sur contrats à court terme. Selon l'alinéa 6 de ce dernier accord, les traducteurs sous contrat de courte durée ont le statut d'employés au même titre que tout autre fonctionnaire de l'OMM durant toute la période contractuelle, ce qui résulte également des instructions administratives de l'Union Interparlementaire (UIP) numéro 2007/2 du 21 janvier 2007. Cette interprétation de la fonction de traducteur renvoie à l'art. 18 de l'Accord sur le statut juridique de l'OMM en Suisse, selon lequel les fonctionnaires de l'OMM qui n'ont pas la nationalité suisse bénéficient des exemptions et facilités énumérés dans l'arrangement d'exécution de cet accord. L'art. 2 dudit arrangement conclu le 10 mars 1955 précise que l'Organisation Météorologique Mondiale est exempte de toutes contributions obligatoires à des institutions générales de prévoyance sociale, telles que les caisses d'assurance chômage, l'assurance-accidents, etc. En aucun cas l'opposant n'a assumé la fonction d'indépendant comme semble le croire l'intiméE. S'agissant des périodes où il a travaillé au sein du BIT (en 2013 et 2014), à l'instar de l'activité exercée auprès de l'OMM, l'art. 18 de l'Accord sur le statut juridique du BIT en Suisse prévoit que les fonctionnaires du Bureau International du Travail qui n'ont pas la nationalité suisse bénéficient des exemptions et facilités énumérées dans l'arrangement d'exécution du présent accord. L'art. 3 dudit arrangement prévoit la même clause d'exemption que celle applicable à l'OMM. Compte tenu de l'ensemble des lois suisses et accords précités, le fonctionnaire international de nationalité étrangère qu'est l'opposant ne pouvait valablement être soumis à l'AVS pour les années 2012, 2013 et 2014, et pour les trois années, les acomptes qu'il a d'ores et déjà été versés, doivent lui être restitués.

5.        L'intéressé a produit des attestations des deux organisations internationales qui l'ont engagé à court terme pendant les années 2012 à 2014 soit :

-          de l'OMM, respectivement datées des 25 mars 2013 en ce qui concerne les périodes de 2012 (1er juin au 31 juillet et 3 septembre au 21 décembre 2012) et 24 avril 2014 en ce qui concerne l'unique période de 2013 (1er au 31 juillet 2013), attestations ayant la teneur utile suivante :

« La Division des ressources humaines certifie que (l'intéressé) a été engagé par l'Organisation météorologique mondiale à Genève en tant que traducteur, sous contrats de courte durée (dates respectives). À cet égard, référence est faite :

- à l'article 17 de l'Accord de siège de l'OMM prévoyant l'exonération fiscale des traitements versés par l'Organisation ; et

- à l'alinéa 6 de l'Accord concernant les conditions d'emploi des traducteurs et éditeurs employés sur contrat à court terme (« Short-term translators shall have the status of staff members during the period of their employment »). »

 

(Ndr. Agreement concerning conditions of employment of short-term translators, revisers, editors and précis-writers conclu entre l'Association Internationale des Traducteurs de Conférence (AITC) et les organisations internationales dont les Nations Unies, l'OMM et l'OIT entrée en vigueur le 1er janvier 1979, accessible à l'adresse: http://www.unsystem.org/content/agreement-concerning-conditions-employment-short-term-translators-revisers-editors-and)

-          du BIT, respectivement datées des 23 avril 2014 en ce qui concerne les périodes de 2013 (5 au 28 juin et 9 septembre au 15 novembre 2013) et 28 janvier 2015 en ce qui concerne les périodes de 2014 (13 janvier au 21 février ; 10 mars au 30 mai ; 2 au 27 juin ; 30 juin au 31 juillet et 1er septembre au 12 décembre 2014), attestations ayant la teneur utile suivante :

« Je soussignée, certifie que (l'intéressé) a été employé en qualité de fonctionnaire international temporaire par le Bureau International du Travail pendant les périodes suivantes (dates). Ledit fonctionnaire a été au bénéfice des privilèges et immunités prévus par l'accord conclu le 11 mars 1946 entre le Conseil fédéral suisse et l'Organisation Internationale du Travail pour régler le statut juridique de cette organisation en Suisse, et en particulier des exonérations fiscales visées par l'art. 17b) de cet accord. Signature : Pour le Directeur général : département du développement des ressources humaines»

6.        Par décision du 12 avril 2017, la CCGC a rendu une décision sur opposition pour les trois années concernées, joignant implicitement les oppositions relatives aux années 2012 à 2014 inclusivement. L'opposition du 29 juin 2015 était rejetée, et les décisions de cotisations personnelles pour les années 2012 à 2014 du 28 mai 2015 confirmées. La Mission permanente de la Suisse auprès de l'Office des Nations Unies et des autres organisations internationales de Genève (ci-après : Mission suisse) avait indiqué à la CCGC par courrier du 31 mars 2017 ne pas avoir été informée des contrats de courte durée de l'intéressé pour le compte de l'OMM et le BIT entre juin 2012 et fin 2015 et, qu'en tout état de cause, dans la mesure où aucune carte de légitimation n'avait été délivrée, elle (la Mission suisse) ne pouvait attester que l'intéressé bénéficiait de privilèges et immunités pendant cette période. Les ressortissants étrangers, le cas échéant les membres de leur famille ou leur partenaire enregistré au bénéfice de privilèges et d'immunités disposent de cartes de légitimation établies par le DFAE. En particulier, les ressortissants étrangers engagés avec un contrat d'une durée inférieure à un an, considérés comme des fonctionnaires « court terme » (temporaire), reçoivent une carte de légitimation de type « G » pour autant que la durée de leur contrat soit égale à au moins trois semaines (Lignes directrices sur la délivrance des cartes de légitimation du DFAE aux fonctionnaires des organisations internationales, page 8). À défaut d'avoir été dûment annoncées par l'organisation internationale à la Mission suisse, les personnes ne sont pas autorisées à travailler pour le compte de l'organisation et ne peuvent se prévaloir de privilèges et immunités (Lignes directrices citées, page 11). Ainsi, de juin 2012 à fin 2015 (sic!) l'intéressé n'était pas au bénéfice d'une carte de légitimation, son activité n'ayant d'ailleurs pas même été annoncée à la Mission suisse, de sorte que cette dernière n'est pas en mesure d'attester que durant cette période il bénéficiait de privilèges et immunités conformément aux règles du droit international public. Ainsi, en l'absence de preuve de privilèges et immunités, la CCGC ne pouvait exempter l'intéressé du paiement des cotisations sociales pour les années 2012 à 2014.

7.        Par mémoire du 19 mai 2017, l'intéressé, représenté par son conseil, a saisi la chambre des assurances sociales de la Cour de justice d'un recours contre la décision sur opposition de la CCGC du 12 avril 2017. Il conclut principalement à l'annulation de la décision entreprise ; cela fait dire et constater l'exemption du recourant de tout paiement de cotisations AVS/AI/APG/AC depuis 2012 et pour une durée indéterminée ; condamner l'intimée à rembourser au recourant les sommes versées à titre d'acomptes de cotisations sociales pour les années 2012 à 2014, le tout avec suite de dépens ; subsidiairement au renvoi de la cause à l'intimée pour instruction et nouvelle décision. En substance, il reprend son argumentation précédente, soulignant que l'intimée s'est bornée, sur opposition, à décrire une procédure à suivre par les autorités, et notamment par la Mission suisse, en se limitant à constater que cette procédure n'ayant pas été suivie par les organisations internationales concernées, la Mission suisse, faute de délivrance de carte de légitimation, ne pouvait attester que l'intéressé bénéficiait de privilèges et d'immunités durant la période litigieuse. L'intimée se reposait sur cette seule base pour dénier le droit du recourant à l'exemption de toute cotisation sociale pendant la période concernée. L'intimée n'a pas répondu aux nombreuses questions soulevées par le recourant, et ignore les pièces produites en procédure administrative ; elle se réfère même à des lignes directrices sur la délivrance des cartes de légitimation du DFAE, qui n'ont pas force de loi et qui de surcroît ont été adoptées en juillet 2015, soit postérieurement à la période litigieuse, la CCGC semblant d'ailleurs inclure l'année 2015 dans ses considérations, alors même qu'elle n'a rendu aucune décision de cotisations pour cette année-là. Le recourant explique à toutes fins utiles qu'il a été mis au bénéfice d'une carte de légitimation à compter de l'année 2016, soit peu après l'entrée en vigueur des lignes directrices évoquées. Il n'aurait de toute manière pas à pâtir de toute éventuelle négligence des organisations internationales qui ne respecteraient pas une procédure « imposée », étant encore rappelé qu'il est pour sa part muni d'attestations et/ou de contrats valablement établis par les organisations concernées, lui octroyant des privilèges et immunités de plein droit.

8.        L'intimée a conclu au rejet du recours par courrier du 20 juin 2017. Elle a pour l'essentiel repris son argumentation antérieure, observant que les caisses de compensation sont fondées à considérer que toute personne qui bénéficie d'une carte de légitimation établie par le DFAE est exemptée ex lege de l'AVS/AI/APG/AC pendant la période couverte par ladite carte (ATAS/364/2011 du 7 avril 2011 ; DAA n° 3021). Elles doivent soumettre à l'OFAS les cas dans lesquels subsistent des doutes concernant les cartes de légitimation, voire l'existence de privilèges et immunités conformément aux règles du droit international public (ATAS susmentionné et DAA n° 3024). Ayant ainsi soumis le cas pour avis à l'OFAS, ce dernier a confirmé que sans carte de légitimation il n'était pas possible de prouver que l'assuré était au bénéfice de privilèges et immunités, de sorte que les conditions de l'art. 1a al. 2 let. a LAVS n'étaient pas remplies.

9.        Le recourant a répliqué par mémoire du 12 juillet 2017. Il persiste intégralement dans ses conclusions. Se référant à la réponse de l'intimée, il a observé que jusqu'au 31 mai 2012, il avait travaillé auprès de l'OMM et qu'ayant atteint l'âge requis, il a simplement pris sa retraite qui n'était pas une retraite anticipée. Il n'avait pas travaillé « parallèlement » au sein du BIT et de l'OMM, comme le démontrent les dates d'engagements respectifs auprès de chacune de ces organisations internationales. L'intimée ne répondait toujours pas à la problématique soulevée. Quant aux Lignes directrices visées par la CCGC, dont l'entrée en vigueur été fixée au 15 juillet 2015, celles-ci ne peuvent s'appliquer au cas d'espèce. Ainsi, à défaut d'existence de telles directives pour les périodes concernées par la décision objet du recours, la délivrance d'une carte de légitimation de type G pour un fonctionnaire international avec un contrat de courte durée, comme indiqué dans ces directives, n'est pas déterminante. Il en est de même s'agissant du soi-disant devoir de l'organisation internationale d'« informer » la Mission suisse de l'existence des contrats de travail concernés. D'ailleurs, si l'OMM et le BIT n'ont jamais procédé à l'annonce des contrats de courte durée de l'intéressé avant le 15 juillet 2015, alors qu'elles y ont pourtant procédé dès l'entrée en vigueur des Lignes directrices, cela signifie bien qu'il n'existait aucune obligation à cet égard avant juillet 2015. L'intimée ne le conteste d'ailleurs pas dans ses écritures. En tant qu'elle se fonde sur l'avis de l'OFAS du 6 avril 2017, ce dernier n'a pas été renseigné de manière complète sur la situation, dès lors que l'intimée s'est abstenue de lui dépeindre toute la situation du cas d'espèce, et notamment de lui indiquer les périodes concernées. Il n'est ainsi pas surprenant de constater que l'administration fédérale confirme le contenu des Lignes directrices, qui ne sont pas applicables à la période litigieuse. Ceci dit et reprenant son argumentation antérieure, le recourant se réfère aux attestations des organisations internationales qui prouvent bien, selon lui, qu'il était au bénéfice des privilèges et immunités durant les périodes concernées (2012 à 2014).

10.    L'intimée a dupliqué par écriture du 20 juillet 2017. Elle persiste dans ses conclusions en rejet du recours. S'il est vrai que les Lignes directrices évoquées ne sont entrées en vigueur qu'au 15 juillet 2015, elles ont remplacé le recueil de directives concernant les organisations internationales et les fonctionnaires internationaux de la Mission suisse du 1er avril 1987. Ainsi avant l'entrée en vigueur des lignes directrices précitées, l'exigence d'annonce de prise de fonction des fonctionnaires à la Mission suisse et l'obtention d'une carte de légitimation prévalaient déjà pour l'attestation de privilèges et immunités. Si elle avait cité ces lignes directrices, c'était pour décrire le contexte dans lequel les privilèges et immunités peuvent être invoqués et non pour construire son raisonnement. En effet, le fait que la carte de légitimation atteste que son titulaire est au bénéfice de privilèges et immunité ressort de l'art. 17 al. 3 de l'ordonnance du 7 décembre 2007 relative à la loi fédérale sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordées par la Suisse en tant qu'État hôte (OLEH– RS 192. 121).

11.    Le recourant a encore formulé des observations par rapport à la duplique de l'intimée, ceci par courrier du 11 août 2017. Bien que l'art. 17 al. 3 OLEH prévoit que la carte de légitimation sert de titre de séjour et atteste d'éventuels privilèges et immunités, cela ne signifie encore pas que dans le cas d'espèce dite carte de légitimation était nécessaire, ce qui est d'ailleurs contesté en l'état, ni même que l'octroi d'une telle carte est l'unique moyen permettant de bénéficier de privilèges et immunités.

12.    L'intimée a brièvement indiqué à la chambre de céans qu'elle n'avait pas de commentaires supplémentaires à formuler.

13.    Par courrier du 11 décembre 2017, la chambre de céans a interpellé la Mission suisse : elle se réfère à la réponse de cette dernière (courrier du 31 mars 2017), aux questions posées par la CCGC dans ses courriers des 17 novembre 2016 et 28 mars 2017. N'étant pas certaine, au vu de la teneur des courriers de la CCGC susmentionnés, que cette dernière ait soumis à la Mission suisse les attestations des organisations internationales concernées, la chambre de céans les lui soumettait, en l'invitant à préciser sa réponse du 31 mars 2017, sur le point de savoir si, à teneur des attestations susmentionnées, la Mission suisse était en mesure de confirmer que l'intéressé bénéficiait bien des privilèges et immunités pendant les périodes litigieuses, et se trouvait sous le statut mentionné par les quatre attestations concernées. D'un autre côté, l'intimée ayant fait référence aux Lignes directrices entrées en vigueur le 15 juillet 2015, soit postérieurement à la période litigieuse, dans la mesure où ces nouvelles directives indiquent qu'elles annulent et remplacent le Recueil de directives concernant les organisations internationales et les fonctionnaires internationaux de la Mission suisse du 1er avril 1987, la chambre de céans invitait la Mission suisse à lui faire tenir un exemplaire de ses anciennes directives.

14.    Par courrier du 18 décembre 2017, la Mission suisse a répondu au courrier précédent. Elle observe tout d'abord qu'aux termes des accords de siège que le Conseil fédéral a conclus avec chaque organisation internationale sise en Suisse, il appartient au DFAE de régulariser le séjour des personnes appelées en qualité officielle par les organisations internationales, et c'est la Mission suisse qui est compétente pour délivrer une carte de légitimation du DFAE aux personnes concernées. Au vu des documents soumis, les contrats effectués par l'intéressé avaient tous une durée supérieure à trois semaines. L'OMM et le BIT auraient dû les annoncer à la Mission suisse en sollicitant la délivrance d'une carte de légitimation de type G. Il aurait ainsi reçu une carte pour la durée de chaque contrat en échange de son permis. Le recourant a donc effectué ces différents contrats tout en restant au bénéfice de son permis, ce qui est contraire aux règles. Il est certes de la responsabilité de ses employeurs d'effectuer les démarches nécessaires pour que l'intéressé soit mis au bénéfice de carte de légitimation, mais il était également de la responsabilité de l'intéressé de s'en assurer. En tant qu'ancien fonctionnaire de l'OMM, il avait été titulaire d'une carte de légitimation de type D de 2000 à 2012. Il pouvait difficilement prétendre qu'il ne savait pas qu'il devait avoir une carte pour effectuer ces contrats de courte durée. Bien qu'une carte de légitimation ne soit pas constitutive de droits, elle seule permet à son titulaire de justifier son statut auprès des autorités suisses. Si une personne n'a pas été annoncée à la Mission suisse par une organisation, et que cette dernière n'a pas sollicité une carte de légitimation en faveur de cette personne, la Mission suisse ne peut pas attester que la personne bénéficiait de privilèges et immunités. Le cas échéant, il appartient à l'intéressé lui-même d'apporter la preuve de sa qualité de fonctionnaire international, ce qu'il a fait en fournissant des attestations établies par les organisations internationales concernées. Il appartient à l'autorité suisse saisie de déterminer si, sur la base des preuves produites, elle peut, ou non, reconnaître un statut de fonctionnaire international à une personne qui n'avait pas de carte de légitimation ou qui n'avait pas été annoncée à la Mission suisse. Les organisations internationales ne sont pas des employeurs soumis à la législation sociale suisse. En revanche, chaque organisation doit mettre en place un régime de prévoyance. La Mission suisse ignore si le recourant a été affilié au régime de prévoyance de l'OIT et de l'OMM (Caisse commune des pensions du personnel des Nations Unies) vu la durée limitée de ces contrats. Au besoin, l'intéressé devrait pouvoir donner tous renseignements utiles à cet égard. Quant à la demande d'une copie de la Directive OI 2 du 1er avril 1987 sur le recrutement sur place du personnel de services généraux des organisations internationales, le statut de fonctionnaire à court terme, non suisse, qui reçoit une carte de légitimation de type G n'a été introduit qu'en 1997 et n'a pas fait l'objet d'une directive. Les règles de la Directive OI 2 (de 1987) s'appliquaient à cette catégorie de personnes. Dès 1997, la Mission suisse ne délivre une carte de légitimation que si la durée du contrat de la personne est d'au moins trois semaines (pour des raisons techniques liées à la production des cartes de légitimation qui ne sont plus établies sous la forme papier mais en format « carte de crédit » en plastique). Ces modifications ne figurent toutefois pas dans la Directive OI 2 de 1987. Toutefois, il ressort de cette directive qu'une personne, recrutée sur place, reçoit une carte de légitimation en échange de son permis ; cette règle est demeurée inchangée.

15.    Invitées à se prononcer sur le courrier susmentionné de la Mission suisse, les parties ont brièvement pris position :

-          par courrier du 4 janvier 2018, l'intimée considère qu'au vu des explications données et de la Directive produite par la Mission suisse, elle n'avait pas d'observations particulières à formuler. Elle maintient donc sa position, et persiste à conclure au rejet du recours et à la confirmation de la décision entreprise ;

-          par courrier du 6 février 2018, le recourant a observé que jusqu'au 31 mai 2012 il avait été engagé en qualité de travailleur permanent, comme l'atteste le document établi par l'OMM, produit à l'appui de cette écriture. Il bénéficiait dès lors d'une carte de légitimation qui lui permettait au surplus de résider en Suisse sans procéder à une quelconque demande de permis de séjour. La situation était bien différente et surtout bien plus claire que celle d'un travailleur temporaire. Depuis le 1er juin 2012, il a été engagé en qualité de « travailleur temporaire », statut (n') ayant fait l'objet d'une directive claire qu'à partir du 1er juillet 2015, obligeant de ce fait les employeurs à faire procéder à la délivrance de cartes de légitimation, ce qui n'était manifestement pas habituel jusqu'alors. Les explications de la Mission suisse tendent à le confirmer. Dans tous les cas la Mission suisse confirme qu'une carte de légitimation n'est pas constitutive de droits à elle seule, et permet simplement de justifier d'un statut. En l'absence d'une telle carte il semble que la Mission suisse ne peut simplement pas confirmer ou infirmer si le travailleur est un fonctionnaire international et bénéficie de ce fait des privilèges et immunités ; c'est au travailleur de le démontrer ; et en l'espèce, comme l'atteste d'ailleurs la Mission suisse, le recourant a été en mesure de prouver qu'il était au bénéfice de privilèges et immunités, selon les attestations des organisations internationales concernées, ce qui est décisif en l'espèce. Enfin, et comme semblait le prédire la Mission suisse, le recourant confirmait selon attestation produite, qu'à compter du 1er juin 2012 il n'était pas affilié à un régime de prévoyance, en raison du type de contrat conclu. Quoi qu'il en soit, il a été en mesure de prouver son statut de fonctionnaire international au bénéfice de privilèges et immunités, l'OMM et l'OIT l'ayant formellement confirmé par le biais des attestations figurant déjà au dossier.

16.    Sur quoi, la chambre de céans a entendu les parties en comparution personnelle le 9 avril 2018:

17.    Le recourant a déclaré : « Pour répondre à votre question, mes relations avec les organisations internationales ont débuté déjà dans le courant des années 1990 où je venais pour de courtes périodes à Genève, comme traducteur, presque exclusivement pour l’OMM, pour qui je faisais déjà antérieurement des traductions à domicile. J’étais en effet à l’époque domicilié à Montpellier. Je travaillais d’ailleurs parallèlement pour d’autres organisations internationales dans d’autres coins du monde. Je n’avais donc pas de permis de séjour à Genève. Le premier contrat d’une certaine durée que j’ai eu pour l’OMM était sauf erreur un contrat pour 11 mois en 1999. Je ne me souviens pas si j’ai alors été au bénéfice d’une carte de légitimation. Je me suis installé à Genève à fin 1998, dans la perspective du contrat susmentionné. C’est donc l’OMM qui m’a proposé à l’époque de venir m’installer à Genève car un poste allait s’ouvrir pour moi. De fait, après le premier engagement de 11 mois, j’ai été engagé à plein temps, de janvier 2000 à mai 2012. Pour cette période j’ai bien été au bénéfice d’une carte de légitimation. Lorsque j’ai pris ma retraite, âgé de 63 ans, après avoir bénéficié d’une prolongation d’une année par rapport à l’âge officiel de la retraite dans les organisations internationales (62 ans), j’ai donc rendu ma carte de légitimation et j’ai demandé un permis aux autorités genevoises qui m’ont d’emblée délivré un permis C. Je tenais en effet à rester à Genève, car j’avais un fils de 8 ans et, séparé de sa mère, nous étions en garde alternée. Il était scolarisé à Genève. Dès le début juin 2012, déjà pour terminer l’année, j’ai été immédiatement réengagé mais pour des contrats de courtes durées par l’OMM. En 2013 je n’ai pas travaillé pour l’OMM ni pour une autre organisation pendant la première partie de l’année, sous réserve du fait que le BIT m’avait confié un mandat que j’exécutais à domicile. C’était mon premier contact avec le BIT, et c’était pour un travail de courte durée, lequel avait d’ailleurs donné satisfaction raison pour laquelle j’ai été mis au bénéfice d’un premier contrat de courte durée au BIT en juin 2013 sauf erreur. Par la suite, j’ai de nouveau très régulièrement été mis au bénéfice de ce type de contrats, pour le BIT, et sauf erreur une fois pour un mois en 2013 pour l’OMM. C’est donc vers fin 2012 début 2013 sauf erreur que j’ai eu mes premiers contacts avec l’AVS, dans la mesure où j’avais en vue ces missions à domicile, et je m’attendais à devoir à ce titre cotiser à la sécurité sociale. L’AVS m’avait d’ailleurs enregistré en tant qu’indépendant. ».

Mme B______ pour l'intimée a déclaré : « A ce sujet, je confirme effectivement que les premiers contacts avec le recourant remontent à cette époque. Nous avons dû l’affilier sauf erreur « anobag » c’est les personnes qui sont employées par des entreprises qui ne sont pas astreintes à cotiser à l’AVS. A l’époque M. A______ nous avait remis des bulletins de salaires de l’OMM par rapport à ses engagements de courtes durées. ».

Le recourant a repris : « Je dois préciser que je remettais d’ailleurs les mêmes attestations de revenus à l’Administration fiscale auprès de laquelle je bénéficiais d’une exonération fiscale au vu de la qualité de mon employeur et de mon statut de fonctionnaire international temporaire. Pour répondre à votre question, au départ, je pensais être astreint à des cotisations de sécurité sociale, raison pour laquelle j’ai payé des acomptes, mais je dois dire que j’ai réagi assez lentement avant de réaliser que très probablement, mon statut m’exonérait de ces obligations. En discutant de cela avec des personnes autour de moi, mes collègues pour commencer, puis l’AVS elle-même. Je n’ai d’ailleurs pas tout de suite compris le sens des réponses que me donnait la caisse de compensation, car les choses me paraissaient un peu floues, car on me disait que les Suisses étaient astreints à cotisation alors que les permis C (comme moi) ne le seraient pas. Je confirme que depuis sauf erreur fin 2015 début 2016 les procédures au niveau des organisations internationales ont changé, et désormais l’administration des organisations internationales intervient systématiquement auprès des personnes engagées à courts termes, soit pour plus de 3 semaines, pour leur demander de déposer leur permis de séjour auprès de l’autorité cantonale en échange d’une carte de légitimation. Par exemple, je viens de terminer un contrat de courte durée (en l’espèce 2 mois et demi) : j’ai dû par conséquent déposer ma carte de légitimation à la Mission suisse et récupérer mon permis C. Normalement cette démarche devrait être entreprise auprès de l’OCPM. Dans le cas d’espèce la Mission suisse l’avait gardé. Ce système est un peu compliqué, et il demande évidemment de l’attention. ».

Mme B______ : « Pour répondre à votre question, le cas de M. A______ n’est pas unique chez nous. Nous avons d’autres fonctionnaires internationaux qui, n’ayant pas de carte de légitimation, mais de nationalité étrangère, à qui nous prélevons des cotisations AVS/AI etc. et que nous avons également recensés sous le statut de « anobag ». Il y a notamment le cas de personnes qui sont engagées par une organisation internationale et qui pendant une première période de 3 mois (par rapport à un exemple que j’ai en tête) ne disposent pas de carte de légitimation, étant pendant cette période dans une sorte de statut temporaire. Je vais demander à ma hiérarchie si l’on peut vous produire une sélection d’exemples pour illustrer mon propos. Pour répondre à une question d’un juge, les « anobag » sont taxés à hauteur de 10,3 % comme un indépendant, avec toutefois l’assurance-chômage en plus. ».

Le recourant a précisé : « Je n’ai pas fait l’objet d’une taxation AVS après les années concernées par ce recours. Je crois d’ailleurs que j’ai été radié de l’AVS en 2016, car j’avais récupéré ma carte de légitimation. ».

Sur quoi la chambre de céans a fixé un délai au 27 avril 2018 à l’intimée pour produire des exemples représentatifs qualitativement et quantitativement.

18.    Par courrier du 27 avril 2018 l'intimée a indiqué à la chambre de céans que ses applications informatiques ne lui permettaient pas de ressortir une liste d'exemples de situations similaires à celle du recourant. Elle pouvait toutefois confirmer que les ressortissants étrangers domiciliés et exerçant une activité lucrative en Suisse sont assurés à l'AVS. Seuls ceux bénéficiant de privilèges et immunités sont exemptés, conformément à l'art. 1a al. 2 LAVS. En pratique la mise au bénéfice de privilèges et d'immunité est admise sur la base d'une carte de légitimation valable du DFAE. Certes, la carte de légitimation n'est pas constitutive de droits mais elle seule permet à son titulaire de justifier son statut auprès des autorités suisses, comme le relève la Mission suisse dans son courrier du 18 décembre 2017 à la chambre de céans. L'intimée persiste dans ses conclusions.

19.    Le recourant a pris position par rapport au courrier précédent, par lettre de son conseil du 15 mai 2018. Il conteste fortement le contenu de cette correspondance. L'absence de tout exemple de cas similaires, qui aurait soi-disant été soumis à l'AVS, ne fait d'ailleurs que confirmer l'argumentation du recourant. Il persiste dans ses conclusions.

20.    Sur quoi les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1.        a. Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 1 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants, du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10). Elle est donc compétente pour statuer sur le présent recours, qui porte sur une décision sur opposition rendue par l’intimée en application de la LAVS.

b. La procédure devant la chambre de céans est régie par les dispositions de la LPGA et celles du titre IVA (soit les art. 89B à 89I) de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), complétées par les autres dispositions de la LPA en tant que les articles précités n'y dérogent pas (art. 89A LPA), les dispositions spécifiques que la LAVS contient sur la procédure restant réservées (art. 1 al. 1 LAVS; cf. notamment art. 84 ss LAVS).

Le recours a été interjeté en temps utile dans les forme et délai prévus par la loi (art. 60 et 61 let. b LPGA et 89B LPA). Il est donc recevable.

2.        L’objet du litige porte sur la question de savoir si c’est à juste titre que l’intimée a considéré le recourant comme un salarié d'un employeur non soumis à cotisation, en l'assujettissant ainsi à des cotisations AVS/AI/APG AMAT, CAFI et AC pendant les périodes de 2012 (dès le 1er juin 2012), 2013 et 2014 pendant lesquelles il était sous contrats de courte durée pour l'Organisation Météorologique Mondiale (OMM) et/ou le Bureau International du Travail (BIT), ou si au contraire, comme le soutient le recourant, il devait être considéré pendant les périodes concernées comment fonctionnaire international au bénéfice de privilèges et immunités, et à ce titre non soumis à la sécurité sociale suisse.

3.        Selon l'art. 1a LAVS, sont assurés conformément à la présente loi : a. Les personnes physiques domiciliées en Suisse ; b. Les personnes physiques qui exercent en Suisse une activité lucrative; c. Les ressortissants suisses qui travaillent à l'étranger : 1. Au service de la Confédération ; 2. Au service d'organisations internationales avec lesquels le Conseil fédéral a conclu un accord de siège et qui sont considérées comme employeur au sens de l'art. 12 ; 3. Au service d'organisations d'entraide privées soutenues de manière substantielle par la Confédération en vertu de l'art. 11 de la loi fédérale sur la coopération au développement et l'aide humanitaire internationale (al. 1).

Selon l'alinéa 2 de cette disposition, ne sont pas assurés : a. Les ressortissants étrangers qui bénéficient de privilèges et d'immunités, conformément aux règles du droit international public ; b. … ; c. Les indépendants et les salariés dont l'employeur n'est pas tenu de payer des cotisations, lorsqu'ils ne remplissent les conditions énumérées à l'al.1 que pour une période relativement courte ; le Conseil fédéral règle les modalités.

Selon l'art. 1b du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS ; RS 831.101), sont considérés comme ressortissants étrangers bénéficiant de privilèges et d'immunités, les membres du personnel des missions diplomatiques, des missions permanentes ou autres représentations auprès des organisations intergouvernementales et des missions spéciales visées à l'art. 2 de la loi fédérale du 22 juin 2007 sur l'Etat hôte (LEH ; RS 192.12), ainsi que les membres de leur famille sans activité lucrative.

Ainsi, la Confédération peut accorder des privilèges, des immunités et des facilités aux bénéficiaires suivants: les organisations intergouvernementales, les institutions internationales, les organisations internationales quasi-gouvernementales, les missions diplomatiques, les postes consulaires, les missions permanentes ou autres représentations auprès des organisations intergouvernementales, les missions spéciales, les conférences internationales, les secrétariats ou autres organes créées par un traité international, les commissions indépendantes, les tribunaux internationaux, les tribunaux arbitraux et les autres organismes internationaux (art. 2 al. 1 let. a à m LEH). Les privilèges et immunités comprennent notamment l'exemption du régime de la sécurité sociale suisse (art. 3 al. 1 let. h LEH). Enfin, l'étendue personnelle et matérielle des privilèges, des immunités et des facilités est fixée cas par cas en fonction du droit international, des engagements internationaux de la Suisse et des usages internationaux (art. 4 al. 1 let. a LEH).

Il sied de préciser que la pratique internationale et les conventions internationales pertinentes prévoient toujours l'octroi de privilèges, immunités et facilités non seulement à l'organe lui-même, mais également à toutes les personnes qui sont appelées officiellement auprès de lui, à un titre ou à un autre, de façon temporaire ou permanente, ainsi qu'aux personnes qui les accompagnent. Le but de ces privilèges et immunités n'est pas d'avantager ces individus, mais bien d'assurer l'accomplissement efficace de leurs fonctions officielles. Ainsi, les personnes mentionnées à l'art. 2 al. 2 LEH ne bénéficieront pas de privilèges, immunités et facilités pour elles-mêmes, mais dans l'intérêt de l'organe international concerné et elles ne pourront bénéficier d'un statut privilégié que si l'organe lui-même remplit les conditions fixées par la LEH. Ce principe est d'ailleurs explicitement rappelé dans le préambule de la Convention de Vienne du 18 avril 1961 sur les relations diplomatiques (CV - RS 0.191.01; cf. Message du Conseil fédéral relatif à la LEH, FF 2006 VII 7603) (ATAS/364/2011 du 7 avril 2011 consid.7a).

Les fonctionnaires internationaux étrangers ne sont pas assurés à l’AVS/AI/APG/AC et ne peuvent pas y adhérer volontairement (arrêt du Tribunal fédéral C 297/06 du 15 mars 2007, ATF 133 V 233).

Sauf disposition contraire de l’Accord avec l’UE, resp. de l’AELE ou d’une convention de sécurité sociale, les ressortissants étrangers qui jouissent de privilèges et d’immunités conformément aux règles du droit international public sont exemptés de l’AVS/AI/APG et AC obligatoire (art. 1a al. 2 let. a LAVS; art. 1b RAVS) (VSI 1993 p. 72).

Les ressortissants étrangers - et, le cas échéant, les membres de leur famille ou leur partenaire enregistré - au bénéfice de privilèges et d’immunités conformément aux règles du droit international public disposent de cartes de légitimation établies par le Département fédéral des affaires étrangères - DFAE (RCC 1985 p. 463).

L'Ordonnance relative à la loi fédérale sur les privilèges, les immunités et les facilités, ainsi que sur les aides financières accordés par la Suisse en tant qu'Etat hôte du 7 décembre 2007 [Ordonnance sur l'Etat hôte, OLEH – RS 192.121]) règle notamment les conditions d'entrée sur le territoire suisse, de séjour et de travail des personnes bénéficiaires, l'art. 17 réglant les conditions de délivrance et le type de carte de légitimation qu'il délivre aux bénéficiaires énumérés sur la base des éléments fournis par le bénéficiaire institutionnel concerné (par exemple – dans le cas d'espèce l'OMM ou l'OIT); l'al. 3 de cette disposition précise que la carte de légitimation du DFAE sert de titre de séjour en Suisse, atteste d'éventuels privilèges et immunités dont jouit son titulaire et exempte ce dernier de l'obligation du visa pour la durée de ses fonctions.

4.        En règle générale, les instructions, les circulaires et les directives administratives – ou, en d’autres termes, les ordonnances administratives – n’ont, selon la jurisprudence et la doctrine, pas force de loi et ne constituent pas du droit fédéral au sens de l’article 49 lettre a PA (ATF 121 II 473 consid. 2b p. 478, ATF 121 IV 64 consid. 3 p. 66, ATA /763/2002 du 3 décembre 2002, consid. 5 et les références citées).

Si les directives, circulaires ou instructions émises par l’administration ne peuvent contenir de règles de droit, elles peuvent cependant apporter des précisions quant à certaines notions contenues dans la loi ou quant à la mise en pratique de celle-ci. Sans être lié par elles, le juge peut néanmoins les prendre en considération en vue d’assurer une application uniforme de la loi envers chaque administré. Il ne doit cependant en tenir compte que si elles respectent le sens et le but de la norme applicable (ATF 121 II 473 consid. 2b).

Emise par l’autorité chargée de l’application concrète, l’ordonnance administrative est un mode de gestion : elle rend explicite une ligne de conduite, elle permet d’unifier et de rationaliser la pratique, elle assure ce faisant aussi l’égalité de traitement et la prévisibilité administrative et elle facilite le contrôle juridictionnel, puisqu’elle dote le juge de l’instrument nécessaire pour vérifier que l’administration agit selon des critères rationnels, cohérents et continus, et non pas selon une politique virevoltante du cas par cas (ATA /763/2002 du 3 décembre 2002 consid. 5 et les références citées).

Ainsi l'Office fédéral des assurances sociales (OFAS) a-t-il émis les Directives sur l’assujettissement aux assurances AVS et AI (DAA) valables dès le 1er janvier 2009 dont le chapitre 3.5.2 (ch. 3068ss) pose les principes applicables aux fonctionnaires internationaux de nationalité étrangère

Selon le ch. 3068 les fonctionnaires internationaux étrangers ne sont pas assurés à l’AVS/Al/APG/AC et ne peuvent pas y adhérer volontairement; et aux termes du ch. 3069 les fonctionnaires internationaux étrangers ne doivent aucune cotisation sur le revenu de leur travail pour l’organisation.

La Mission suisse a émis des directives concernant notamment la délivrance des cartes de légitimation et le recrutement sur place du personnel des services généraux des organisations internationales, en date du 1er avril 1987. Elles prévoyaient notamment que les personnes de nationalité étrangère dont le séjour en Suisse avait déjà acquis un caractère stable et durable au moment de leur engagement (détenteurs de permis B ou C) pouvaient être recrutées sur place. Elles recevaient alors une carte de légitimation ou une attestation pour la durée de leurs fonctions, en échange de leur autorisation de séjour ou d'établissement. Lorsque leurs fonctions prenaient fin, ils pouvaient prétendre au droit précédemment acquis en matière de travail, de séjour et d'établissement. La durée des fonctions n'était pas imputée sur le temps de résidence comptant pour l'obtention de l'autorisation d'établissement (Directive OI 2). Ces anciennes directives ont été remplacées par les Lignes directrices sur la délivrance des cartes de légitimation du DFAE aux fonctionnaires des organisations internationales, entrées en vigueur le 15 juillet 2015. Ces nouvelles directives prévoient notamment une procédure d'annonce, par l'organisation internationale à la Mission suisse, sur la base d'un formulaire disponible en ligne. Ces directives précisent désormais qu'à défaut d'avoir été dûment annoncées par l'organisation internationale à la Mission suisse, les personnes ne sont pas autorisées à travailler pour le compte de l'Organisation et ne peuvent se prévaloir de privilèges et immunités.

5.        S'agissant des accords de siège conclus par le Conseil fédéral avec les organisations internationales concernées, sises en Suisse, soit en l'occurrence avec l'OMM, d'une part, et avec le BIT (respectivement OIT) d'autre part, les conditions relatives aux immunités et privilèges des fonctionnaires internationaux sont régies :

-          en ce qui concerne l'OMM, par l'Accord entre le Conseil Fédéral Suisse et l'Organisation Météorologique Mondiale pour régler le statut juridique de cette Organisation en Suisse conclu le 10 mars 1955 entré en vigueur avec effet dès le 20 décembre 1951 [RS 0.192.120.242] (ci-après : l'accord OMM) ;

-          en ce qui concerne le BIT, par l'Accord entre le Conseil fédéral suisse et l'Organisation Internationale du Travail pour régler le statut juridique de cette organisation en Suisse conclu le 11 mars 1946 entré en vigueur le 27 mai 1946 [RS 0.192.120.282] (ci-après : l'accord OIT)

L'art. 14 de ces accords respectifs mentionne que les autorités suisses prendront toutes mesures utiles pour faciliter l'entrée sur le territoire suisse, la sortie de ce territoire et le séjour à toutes les personnes appelées, en qualité officielle, auprès de l'Organisation. En pratique, c'est le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) à qui il appartient de régulariser le séjour des personnes visées par cette disposition, et c’est la Mission suisse qui est compétente pour délivrer une carte de légitimation du DFAE à ces personnes (voir notamment à ce sujet le courrier de la Mission suisse à la chambre de céans du 18 décembre 2017).

De l'accord OMM : selon l'art. 18 de cet accord, les fonctionnaires de l'Organisation Météorologique Mondiale qui n'ont pas la nationalité suisse bénéficient des exemptions et facilités énumérées dans l'arrangement d'exécution du présent accord. Les privilèges et facilités en matière de douane sont accordés conformément au règlement douanier du Conseil Fédéral applicable aux organisations internationales.

Selon l'art. 2 de l'Arrangement d'exécution de l'accord conclu entre le Conseil Fédéral Suisse et l'Organisation Météorologique Mondiale pour régler le statut juridique de cette organisation en Suisse conclu le 10 mars 1955 [RS 0.192.120.242.1] l'Organisation Météorologique Mondiale est exempte de toutes contributions obligatoires à des institutions générales de prévoyance sociale, telles que les caisses d'assurance chômage, l'assurance accidents, etc., étant entendu que l'Organisation Météorologique Mondiale assurera, dans la mesure du possible et dans des conditions à convenir, l'affiliation aux systèmes suisses d'assurance de ceux de ses agents qui ne sont pas assurés d'une protection sociale équivalente par l'Organisation elle-même.

De l'accord OIT: selon l'art. 18 de cet accord, les fonctionnaires du Bureau International du Travail qui n'ont pas la nationalité suisse bénéficient des exemptions et facilités énumérées dans l'arrangement d'exécution du présent accord.

Selon l'art. 3 de l'Arrangement d'exécution de l'Accord conclu entre le Conseil Fédéral Suisse et l'Organisation Internationale du Travail pour régler le statut juridique de cette organisation en Suisse conclu le 11 mars 1946 (RS 0.192.120.282.1), l'Organisation Internationale du Travail est exempte de toutes contributions obligatoires à des institutions générales de prévoyance sociale, telles que les caisses de compensation, les caisses d'assurance-chômage, l'assurance -accidents, etc., étant entendu que l'Organisation Internationale du Travail assurera, dans la mesure du possible et dans des conditions à convenir, l'affiliation aux systèmes suisses d'assurance de ceux de ses agents qui ne sont pas assurés d'une protection sociale équivalente par l'Organisation elle-même.

En ce qui concerne le statut des traducteurs employés sur contrat à court terme, les attestations de l'OMM se réfèrent l'Accord concernant les conditions d'emploi des traducteurs et éditeurs employés sur contrat à court terme, conclu entre l'Association Internationale des Traducteurs de Conférence (AITC) et les organisations internationales dont les Nations Unies, l'OMM et l'OIT entrée en vigueur le 1er janvier 1979 (Agreement concerning conditions of employment of short-term translators, revisers, editors and précis-writers) dont l'alinéa 6 précisait : " Short-term translators shall have the status of staff members during the period of their employment". » Cet accord a par la suite été remplacé par un nouvel accord intitulé : "Agreement between the United Nations System /Chief Executives Board for Coordination and the Association internationale des traducteurs de conférence regulating the conditions of employment of short-term translators and persons serving in related functions entré en vigueur au 1er janvier 2013 : le statut figurant à l'alinéa 6 du précédent accord étant désormais consacré par l'art. 25 du nouvel accord: " Short-term translators shall have the status of officials during the period of their employment. As such, they shall: a) Enjoy the privileges and immunities, and have the responsibilities resulting from the Convention on the Privileges and Immunities of the United Nations, the Convention on the Privileges and Immunities of the Specialized Agencies, or other such arrangements in regard to the immunities and privileges of other signatory Organizations and relevant agreements with host countries as apply, to each individual Organization; …"

6.        En l'espèce, il est établi et non contesté que le recourant était au bénéfice d'une carte de légitimation dans le cadre de son engagement auprès de l'OMM depuis la fin des années 90 et en particulier à plein temps depuis le 1er janvier 2000, jusqu'à fin mai 2012, date à laquelle il a pris sa retraite. À la fin de son contrat, il a rendu sa carte de légitimation et, compte tenu notamment de sa situation personnelle et familiale à Genève, il a sollicité un permis de séjour des autorités suisses, qui lui ont d'emblée délivré un permis C, vu sa nationalité française et le nombre d'années qu'il avait vécu à Genève. Ainsi a-t-il expliqué lors de son audition par la chambre de céans que, dès le début juin 2012, il a toutefois été immédiatement réengagé mais pour des contrats de courtes durées par l’OMM, notamment pour lui permettre de poursuivre son activité jusqu'à la fin de l'année en cours. En 2013, pendant la première partie de l’année, sous réserve d'un mandat que le BIT lui avait confié et qu'il exécutait à domicile il n'a pas travaillé pour l’OMM ni pour une autre organisation. Ce premier mandat confié par le BIT ayant donné satisfaction, il a par la suite été mis au bénéfice d’un premier contrat de courte durée au BIT en juin 2013, suivi par la suite d'une série d'autres contrats de courte durée, en 2013 et 2014 pour le BIT, et entre deux engagements pour le BIT, en 2013, il encore bénéficié d'un contrat de courte durée d'un mois pour l’OMM en juillet 2013.

Il a expliqué que, pensant qu'il serait assujetti à la sécurité sociale suisse, dès lors qu'il effectuerait des mandats à domicile, il s'était annoncé à la caisse de compensation, en présentant ses bulletins de salaire relatifs aux contrats de courte durée conclus avec l'OMM et le BIT. La caisse de compensation l'avait, selon ses souvenirs, enregistré comme indépendant ; l'intimée pour sa part indique - ce qui ressort des décisions de cotisations personnelles du 28 mai 2015, comme « anobag ». Il explique que c'est dans ce contexte qu'il a versé des acomptes de cotisations, avant de réaliser qu'en raison de son statut (étranger sous contrats de courte durée d'une organisation internationale) il n'était probablement pas assujetti à la sécurité sociale suisse ; il a indiqué, sans être contredit, qu'à l'époque, les renseignements qu'il avait reçus à cet égard de la CCGC paraissaient peu clairs et incertains, car on lui disait que les Suisses étaient astreints à cotisation alors que les titulaires de permis d'établissement ne le seraient pas.

En définitive, il n'est pas contesté que l'intégralité des montants qui ont servi de base au calcul des cotisations personnelles du recourant proviennent de son activité professionnelle pour l'OMM, respectivement pour le BIT, dans le cadre des contrats de courte durée dont il a bénéficié, en qualité de traducteur pour l'OMM, respectivement de fonctionnaire international temporaire pour le BIT, pendant les années 2012, 2013 et 2014.

Or, il ressort de la législation applicable, rappelée ci-dessus, que ce soit en droit interne (art. 1a al. 2 let. a LAVS, 1b let. c RAVS, ou les dispositions visées de la LEH), ou des dispositions contenues dans les accords de siège conclus entre le Conseil fédéral et l'OMM, respectivement l'OIT, ou encore des autres dispositions et principes de droit international public (notamment, de la Convention de Vienne, art. 33 CV e.g.), et des directives de l'OFAS ou de la Mission suisse, que les ressortissants étrangers, membres du personnel des organisations internationales, bénéficient de privilèges et d’immunités, et ne sont notamment pas assurés à la sécurité sociale du pays hôte, en l'espèce la Suisse, et ne sont donc pas astreints au paiement de cotisations sociales.

7.        L'intimée objecte en l'espèce que le recourant, faute d'avoir pu justifier d'être au bénéfice d'une carte de légitimation délivrée par le DFAE, pendant les périodes où il a travaillé pour les organisations internationales concernées, au bénéfice de contrats de courte durée, n'a pas pu démontrer qu'en raison de son statut il bénéficiait des privilèges et immunités.

Elle fonde son point de vue, d'une part sur le fait qu'ayant interpellé l'OFAS, en ces termes : « Dans le cas d'un ressortissant étranger ayant pris sa retraite anticipée, mais continuant de travailler pour de courtes durées dans des organisations internationales, (par exemple comme traducteur ou fonctionnaire temporaire), si cette personne n'a pas été annoncée auprès de la Mission suisse et mise au bénéfice d'une carte de légitimation alors qu'elle aurait dû l'être, devrions-nous l'exempter de cotisations sociales ou appliquer le droit stricto sensu, à savoir l'affilier comme anobag, dans la mesure où sans carte de légitimation elle ne peut attester d'immunités et privilèges au sens de l'art. 1a al. 2 let. a LAVS ? », cet office lui a confirmé que « sans carte de légitimation, il n'est pas possible de prouver que la personne est au bénéfice de privilèges et immunités. ». La condition de l'art. 1a al. 2 let. a LAVS ne serait, selon l'OFAS, pas remplie, l'Office fédéral ajoutant que si cette personne « estime » être au bénéfice de privilèges et immunités, elle devrait demander une carte de légitimation auprès du DFAE.

L'intimée se fonde d'autre part sur un échange de correspondance avec la Mission suisse à qui elle demandait notamment le 28 mars 2017 de bien vouloir se déterminer s'agissant de la reconnaissance du statut de fonctionnaire international de l'intéressé du 1er juin 2012 à fin 2015. Après avoir exposé que l'intéressé avait, à compter du 1er juin 2012, été engagé sous contrats de courte durée, comme traducteur pour l'OMM (2012 et 2013) et comme fonctionnaire international temporaire auprès du BIT en 2014, - relevant que pour la période concernée l'intéressé n'était pas au bénéfice d'une carte de légitimation -, la CCGC demandait à la Mission suisse de bien vouloir lui indiquer si pour la période litigieuse l'intéressé « devait être considéré comme un fonctionnaire international au bénéfice d'une carte de légitimation, et de ce fait être exempté de payer des cotisations sociales en Suisse ». La Mission suisse lui a répondu que l'intéressé, du 3 janvier 2000 au 31 mai 2012 (date de sa retraite) avait été titulaire d'une carte de légitimation de type « D » ; que depuis le 4 janvier 2016 il avait eu différents contrats de courte durée pour l'OIT et avait été mis au bénéfice d'une carte de légitimation de type « G » (pour les périodes correspondant aux divers contrats de courte durée, en 2016 et en 2017) ; qu'en revanche, la Mission suisse n'avait pas été informée des contrats de courte durée pour le compte de l'OMM et de l'OIT entre juin 2012 et fin 2015 ; qu'en tout état de cause ces organisations internationales ne lui avaient pas annoncé l'intéressé, et qu'en conséquence elle n'était donc pas en mesure d'attester que durant cette période il bénéficiait de privilèges et d'immunités.

On ne saurait toutefois suivre l'intimée, et ceci pour plusieurs raisons qui vont suivre.

a. La question posée à l'OFAS manque à l'évidence de précisions et ne permettait guère à l'Office fédéral de se déterminer en pleine connaissance du statut de cet étranger, en particulier avant qu'il ne prenne sa retraite (anticipée ou non). On ne comprend pas, de l'énoncé des faits, que jusqu'à sa retraite, l'intéressé avait travaillé pour une organisation internationale, au bénéfice d'une carte de légitimation. On retiendra néanmoins que l'intimée admet au moins que le recourant n'ayant pas été annoncé à la Mission suisse, il n'a pas été mis au bénéfice d'une carte de légitimation « alors qu'il aurait dû l'être » (s'il avait seulement été annoncé à la Mission suisse). Ceci dit, la réponse de l'Office fédéral est beaucoup trop catégorique, comme on le verra plus loin : il estime de façon lapidaire que « sans carte de légitimation, il n'est pas possible de prouver que cette personne est au bénéfice de privilèges et immunités. ».

b. Quant à l'interpellation de la Mission suisse par l'intimée, la manière de présenter le cas n'est pas non plus exempt de critiques : la CCGC, après avoir indiqué que l'intéressé, pendant la période concernée, n'était pas au bénéfice d'une carte de légitimation, demande à la Mission suisse si l'intéressé (…) devait être considéré comme un fonctionnaire international au bénéfice d'une carte de légitimation ! Mais il y a plus : la CCGC n'a pas cru bon de soumettre à la Mission suisse les attestations précises de l'OMM et du BIT confirmant le statut de l'intéressé au regard des accords de siège et autres accords, confirmant le statut de fonctionnaire international ou assimilé, pendant la durée des contrats de courte durée. Ainsi, la Mission suisse s'est contentée de répondre que n'ayant pas été informée des contrats de courte durée pour le compte de ces organisations internationales, pour la période concernée, elle n'était donc pas en mesure d'attester que durant cette période, l'intéressé bénéficiait de privilèges et d'immunités. Cette réponse était manifestement insuffisante, faute de données de base suffisantes et adéquates. L'intimée ne pouvait s'en satisfaire, et l'on pouvait manifestement attendre d'elle qu'elle pallie à ce qu'elle avait omis dans sa première démarche, en soumettant les attestations successives des employeurs à la Mission suisse pour qu'elle puisse se déterminer en pleine connaissance de cause. En effet, c'est sur la base de ces éléments que la Mission suisse peut se déterminer, vérifier le statut de l'intéressé et ainsi attester que l'intéressé bénéficiait de privilèges et d'immunités, en délivrant en conséquence la carte de légitimation.

c. La chambre de céans ne s'y est pas trompée : elle a interrogé elle-même la Mission suisse, dans le cadre de l'instruction du recours, en lui soumettant en particulier les fameuses attestations des deux organisations internationales concernées. Et ainsi, la Mission suisse, répondant de manière complète, a relevé que les contrats effectués par l'intéressé avaient tous une durée supérieure à trois semaines, et qu'ainsi l'OMM et l'OIT aurait dû le lui annoncer, en sollicitant la délivrance d'une carte de légitimation du DFAE (de type « G »). L'intéressé aurait ainsi reçu une carte pour la durée de chaque contrat en échange de son permis. Elle a ensuite précisé que la carte de légitimation du DFAE n'est pas en soi constitutive de droit, en ajoutant - probablement dans une formulation trop catégorique compte tenu de ce qu'elle dira plus loin - la Mission a relevé « qu'elle seule (la carte de légitimation) permet à son titulaire de justifier son statut auprès des autorités suisses. ». Elle a répété que si une personne n'a pas été annoncée à la Mission suisse par une organisation et que cette dernière n'a pas sollicité une carte de légitimation du DFAE en faveur de cette personne, la Mission suisse ne peut pas attester que la personne bénéficiait de privilèges et d'immunités. Mais elle a ajouté une précision, déterminante en l'espèce : « le cas échéant, il appartient à (l'intéressé) d'apporter lui-même la preuve de sa qualité de fonctionnaire international, ce qu'il a fait en fournissant des attestations établies par l'OIT et l'OMM. Il appartient à l'autorité suisse saisie de déterminer si, sur la base des preuves produites, elle peut, ou non, reconnaître un statut de fonctionnaire international à une personne qui n'avait pas de carte de légitimation du DFAE ou qui n'avait pas été annoncée à la Mission suisse. ».

d. Il faut donc retenir des réponses de la Mission suisse, pleinement conformes aux principes de droit international public instaurant les privilèges et immunités, et notamment, parmi d'autres, les exemptions fiscales et l'exonération d'émarger au système de cotisations sociales de l'État hôte, que la carte de légitimation n'est pas constitutive de droits, mais qu'elle est au contraire la preuve simple que l'autorité compétente suisse (la Mission suisse) a vérifié que la personne concernée était au bénéfice des privilèges et immunités relevant des conventions internationales et/ou des accords de siège. Elle en atteste par la délivrance de la carte de légitimation. Dès lors, la seule présentation par son ayant-droit de cette carte à une autorité quelle qu'elle soit, du pays hôte, lui permet de se légitimer très simplement et en tout temps, sans autres preuves à apporter. Mais comme le relève la Mission suisse, en l'absence de carte de légitimation, notamment dans le cas où l'intéressé n'a pas été annoncé à la Mission suisse, il incombe alors à l'intéressé de rapporter la preuve de ce qu'il bénéficie des privilèges et immunités que son statut lui confère. Et dans le cas particulier, la Mission suisse constate que le recourant a rapporté cette preuve en fournissant les attestations de l'OMM et de l'OIT.

A cela s'ajoutant encore que la Mission suisse avait d'ores et déjà relevé dans sa première réponse à l'intimée, dans le cadre de la procédure administrative d'opposition, que depuis 2016, soit après la mise en place, dans les nouvelles directives - non applicables au cas d'espèce – d'une procédure d'annonce obligatoire pour les organisations internationales concernées, (que les précédentes directives ne prévoyaient pas sous cette forme), avec la conséquence qu'un défaut d'annonce à la Mission suisse, les personnes ne sont pas autorisées à travailler pour le compte de l'Organisation et ne peuvent se prévaloir de privilèges et immunités -, elle a régulièrement délivré la carte de légitimation à l'intéressé, sur la base des contrats de courte durée de même type que ceux concernant la période litigieuse (années 2012 à 2014). C'est dire que si ces annonces avaient été faites, à l'époque, la Mission suisse aurait délivré la carte de légitimation.

e. Certes, formellement, la Mission suisse indique dans son courrier à la chambre de céans qu'il appartient à l'autorité suisse saisie de déterminer si, sur la base des preuves produites, elle peut ou non reconnaître le statut de fonctionnaire international à une personne qui n'avait pas de carte de légitimation du DFAE et qui n'avait pas été annoncé à la Mission suisse. Cette remarque, logique, ne tient qu'au fait que la Mission suisse n'a de compétence que pour attester de ce que la personne dispose des privilèges et immunités, en raison de son statut par rapport à l'organisation internationale concernée, et non pas de rendre les décisions que ce statut implique, dans le cas particulier par rapport aux cotisations sociales.

En l'occurrence, et contrairement à ce que l'intimée persiste à soutenir, la chambre des assurances sociales considère que le recourant avait, au stade de l'opposition en tout cas, rapporté la preuve que son statut, au bénéfice des contrats de courte durée conclus avec l'OMM et l'OIT du 1er juin 2012 au 31 décembre 2014 – voire encore en 2015, bien que cette année-là ne fasse pas l'objet du présent litige, l'intimée semblant vouloir malgré tout y inclure cette année-là quand bien même elle n'a pas pris de décision de cotisations pour 2015 - lui permettait de se prévaloir des privilèges et immunités incluant l'exemption d'affiliation au système de sécurité sociale litigieux.

8.        Il résulte de ce qui précède que la décision litigieuse, soit la décision sur opposition du 12 avril 2017, et par là même les décisions de cotisations personnelles du 28 mai 2015 pour les années 2012 à 2014 inclusivement, doivent être annulées, avec pour conséquence que la cause sera retournée à l'intimée pour nouvelle décision, et en particulier pour qu'elle ordonne la restitution au recourant des acomptes de cotisations versées par lui, soit CHF 10'767.55 pour 2012, CHF 3'535.35 pour 2013, et CHF 1'965.80 pour 2014, après calcul du montant y compris les intérêts rémunératoires (art. 25 et 26 LPGA et en tant que de besoin, art. 16 al. 3 LAVS).

9.        Le recourant obtenant gain de cause, une indemnité de CHF 2'000.- lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA en corrélation avec l’art. 89H al. 3 de la loi du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative).

10.    Pour le surplus la procédure est gratuite (art. 61 lettre a LPGA et 89 H LPA).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Annule la décision sur opposition de la caisse cantonale genevoise de compensation du 12 avril 2017 et les décisions de cotisations personnelles du 28 mai 2015 pour les années 2012 à 2014 inclusivement.

4.        Condamne l’intimée à verser au recourant la somme de CHF 2'000.- à titre de participation à ses frais et dépens.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Florence SCHMUTZ

 

Le président

 

 

 

 

Mario-Dominique TORELLO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le