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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4251/2021

ATAS/490/2022 du 25.05.2022 ( CHOMAG ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4251/2021 ATAS/490/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 25 mai 2022

4ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à ARCHAMPS, France

 

 

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

A. a. Monsieur A______ (ci-après : l’assuré ou le recourant) est né le ______ 1967, célibataire et sans enfant.

b. Il s’est inscrit à l’office cantonal de l’emploi (ci-après : l’OCE ou l’intimé) pour le 1er février 2021 et un délai-cadre courait jusqu’au 31 mai 2022.

c. Le 23 juin 2021, lors d’un entretien téléphonique avec son conseiller en personnel, il a annoncé à ce dernier qu’il voulait annuler son dossier pour des raisons personnelles au 30 juin 2021 et qu’il enverrait une confirmation par courriel.

d. Par courriel du 1er juillet 2021, l’assuré a confirmé à son conseiller en personnel que comme discuté lors de leur dernier entretien, il n’était plus au chômage depuis le 1er juillet 2021 et que celui-ci pouvait procéder aux formalités liées à cette information. Il le remerciait pour son support ces derniers mois et lui souhaitait une bonne continuation.

e. L’assuré a rempli le 14 juillet 2021 un questionnaire en vue d’une exportation des prestations à l’étranger et l’a transmis à l’office régional de placement (ci-après : l’ORP) le 19 suivant. Il y indiquait que le but de son départ, qui était définitif, était la recherche d’un emploi en France et d’autres raisons, sans précision. Il n’avait pas encore effectué des démarches en vue d’y trouver un emploi, car il avait été occupé à son déménagement.

f. Le 20 juillet 2021, l’ORP a informé l’assuré que pour pouvoir traiter sa demande, il avait besoin de ses justificatifs de recherches d’emploi dès le 1er juillet 2021.

g. Le 20 juillet 2021, l’assuré a transmis à l’ORP une recherche d’emploi précisant en avoir fait trois autres.

h. Par décision du 21 juillet 2021, l’OCE a refusé à l’assuré le droit à l’exportation de ses prestations de chômage. À la suite de la demande des justificatifs des recherches d’emploi pour le mois de juillet 2021, il s’avérait que l’assuré recherchait toujours un travail en Suisse. Le but de l’exportation des prestations de chômage était de faire valoir son droit aux prestations en vue de chercher un emploi dans un autre État membre que la Suisse. Partant, il convenait de refuser à l’intéressé le droit à l’exportation de ses prestations au chômage.

i. Le 12 septembre 2021, l’assuré a formé opposition à la décision du 21 juillet 2021 et transmis :

-       une liste de 18 recherches d’emploi effectuées en France entre le 6 juillet et le 27 août 2021 ;

-       un courrier que lui avait adressé Pôle Emploi le 2 août 2021 concernant les actions définies en commun avec son conseiller qu’il s’engageait à mettre en œuvre pour faire aboutir sa recherche d’emploi ou son projet professionnel ;

-       une confirmation de son inscription à Pôle Emploi du 5 juillet 2021 à partir du 2 juillet 2021 ;

-       un courrier du 5 juillet 2021 de Pôle emploi lui précisait qu’en s’inscrivant comme demandeur d’emploi le 2 juillet 2021, il devait s’engager à rechercher activement un emploi. Dans ce cadre, il allait rencontrer un conseiller afin d’établir avec lui un projet personnalisé d’accès à l’emploi. Ensemble, ils feraient le point sur ses compétences et le métier qu’il souhaitait exercer et définiraient les actions à mettre en œuvre.

j. Par décision sur opposition du 6 octobre 2021, l’OCE a rejeté l’opposition, dès lors que la demande de l’assuré n’était pas motivée par sa volonté de rechercher un emploi en France et qu’il n’avait pas formulé sa demande d’exportation au moins 14 jours avant son départ, son opposition devait être rejetée.

B. a. L’assuré a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice le 16 décembre 2021. Il s’était désinscrit de l’OCE le 30 juin 2021 pour cause de déménagement en France suite à un changement de projet professionnel. Suite à son inscription auprès de Pôle Emploi le 2 juillet 2021, il avait appris l’existence de la procédure d’exportation des prestations à faire valoir auprès de l’OCE. Il avait donc demandé à l’OCE l’exportation des prestations, le 14 juillet 2021.

Il faisait valoir que la circulaire du SECO indiquait que la personne assurée faisait valoir son droit à l’exportation de prestations au moyen du formulaire idoine « en principe » 14 jours avant son départ. L’intimé n’avait pas fait valoir qu’il avait fait une demande tardive dans sa première décision, mais seulement dans sa décision sur opposition. Il devait exister des exceptions puisque les termes en principe étaient utilisés.

Dans son cas, il avait pris sa décision de déménager en France au courant du premier trimestre 2021 sans être au courant de cette disposition qui lui demandait d’avertir l’OCE au moins 14 jours avant son départ. Il n’avait en réalité appris l’existence de cette procédure à faire valoir auprès de l’OCE qu’une fois enregistré auprès de l’agence nationale pour l’emploi (ci-après : l’ANPE). Dans ces conditions, il n’avait pas pu faire sa demande à l’avance. Il avait eu l’occasion de préciser à l’OCE à plusieurs reprises avoir fait des recherches professionnelles en France dès le 1er juillet, notamment dans son opposition du 13 septembre 2021.

b. Par réponse du 11 janvier 2022, l’intimé a conclu au rejet du recours.

c. Convoqué à une audience de comparution personnelle devant la chambre de céans, l’assuré ne s’est pas présenté sans excuse.

d. Le 24 avril 2022, le recourant a fait valoir qu’il avait été surpris de recevoir le procès-verbal de la comparution personnelle du 13 avril 2022, car il n’avait jamais été averti de cette comparution. Il s’excusait pour son absence et demandait à être reconvoqué et transmettait une nouvelle adresse de correspondance en Suisse.

e. Dûment convoqué à cette dernière adresse pour une audience fixée le 11 mai 2022, le recourant ne s’y est pas présenté sans excuse.

f. Le 15 mai 2022, le recourant a présenté des excuses pour son absence à l’audience du 11 mai et expliqué qu’il avait été malade dans la nuit précédant celle-ci et qu’il n’avait pu joindre un médecin de garde de nuit, l’équivalent de SOS Médecins n’existant pas en France. Il demandait qu’une nouvelle audience soit fixée.

EN DROIT

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Par ailleurs, en vertu de l'art. 58 al. 2 LPGA, si l'assuré ou une autre partie sont domiciliés à l'étranger, le tribunal des assurances compétent est celui du canton de leur dernier domicile en Suisse ou celui du canton de domicile de leur dernier employeur suisse.

En l'espèce, le recourant, désormais domicilié en France, a travaillé en dernier lieu dans le canton de Genève, où il était domicilié jusqu'à la fin du mois de juin 2020. La chambre de céans est donc compétente à raison du lieu et de la matière pour connaître du recours.

2.             Interjeté dans les forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (cf. art. 49 al. 3 LMC et art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

3.             La LPGA, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, est applicable (art. 1 al. 1 LACI).

4.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

5.             Le litige porte sur le droit du recourant à l’exportation des prestations de chômage.

6.              

6.1 Selon l'art. 8 LACI l’assuré a droit à l’indemnité de chômage :

a. s’il est sans emploi ou partiellement sans emploi (art. 10);

b. s’il a subi une perte de travail à prendre en considération (art. 11);

c. s’il est domicilié en Suisse (art. 12);

d. s’il a achevé sa scolarité obligatoire, qu’il n’a pas encore atteint l’âge donnant droit à une rente AVS et ne touche pas de rente de vieillesse de l’AVS;

e. s’il remplit les conditions relatives à la période de cotisation ou en est libéré (art. 13 et 14); f. s’il est apte au placement (art. 15); et g. s’il satisfait aux exigences du contrôle (art. 17).

La nationalité ne joue en principe aucun rôle en ce qui concerne le droit à l'indemnité de chômage, ce droit étant subordonné à la condition du domicile en Suisse. Pour les étrangers, cette condition est précisée à l'art. 12 LACI. Le droit suisse ne prévoit en principe pas d'exportation des prestations, sauf dans un cas particulier découlant des accords bilatéraux (Boris RUBIN Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage Schulthess 2014 ad art.8 N 7).

6.2 Le Secrétariat d’État à l’économie (SECO) a établi une Circulaire relative aux conséquences des règlements (CE) n° 883/2004 et 987/2009 sur l’assurance-chômage (Circulaire IC 883). Selon le ch. G3, l’exportation des prestations est autorisée uniquement si le séjour à l’étranger vise la prise d’un emploi dans le but de mettre fin au chômage ; s’agissant des assurés qui prévoient d’entreprendre une activité indépendante, la demande d’exportation des prestations ne peut être validée (voir également ch. G41 de la Circulaire IC 883 et arrêt de la Cour des assurances sociales du Tribunal cantonal vaudois ACH 15/13 – 65/2013 du 21 mai 2013 consid. 3c et 4). Dès qu’un ORP reçoit une « demande de prestations en cas de recherche d’emploi à l’étranger », il examine immédiatement le droit à l’autorisation d’exportation des prestations. Il convient notamment de vérifier si les conditions d’application personnelles et matérielles sont remplies. En outre, l’ORP vérifie notamment que le séjour à l’étranger vise la recherche d’un emploi dans le but de mettre fin au chômage. L'exportation des prestations peut uniquement être refusée lorsqu'il existe de sérieux motifs de douter du sérieux de la recherche d'emploi (Circulaire IC 883, ch. G40 et G41).

Selon le ch. G37 de cette circulaire, la personne assurée fait valoir son droit à l'exportation des prestations au moyen du formulaire « demande de prestations en cas de recherches d'emploi à l'étranger ». Ce formulaire comporte notamment une case réservée à la date de départ prévue, ainsi qu'à la mention de l'État dans lequel la recherche d'emploi sera effectuée. Le ch. G53 précise que la personne assurée n'a pas droit à l'exportation des prestations, si elle n'a pas fait la demande avant son départ. En revanche, si le PD U2 n’a pas (encore) été émis ou a été perdu, l’ORP reconnaît le droit à l’exportation des prestations par le biais du document U008. L'institution compétente à l'étranger ne peut y remédier en demandant le document U008.

6.3 La brochure Info-Service " Être au chômage " éditée par le SECO, mise à disposition de toutes les personnes qui s'inscrivent au chômage, et disponible en outre sur le site officiel de l'État de Genève, mentionne, p.21 sous le titre " Prestations en cas de recherche d'emploi à l'étranger " : « Si vous souhaitez chercher un emploi dans un état membre de l’UE ou de l’AELE, vous pouvez exporter à l’étranger, à certaines conditions, votre droit suisse à l’indemnité de chômage pour une durée maximale de 3 mois (exportation de prestations). Cette brochure est en outre complétée par l'Info-Service " Prestations en cas de recherche d’emploi à l’étranger (Etats membres de l’UE/AELE)". Elle précise se baser sur les règlements (CE) N° 883/2004 et (CE) N° 987/2009 applicables en Suisse. Cet Info-Service vous donne des informations générales. Le texte légal est seul déterminant. Si vous avez des questions concrètes, vous pouvez vous adresser aux organes d’exécution : l’office régional de placement (ORP); l’autorité cantonale; la caisse de chômage. ».

6.4 L’art. 27 LPGA prévoit que, dans les limites de leur domaine de compétence, les assureurs et les organes d’exécution des diverses assurances sociales sont tenus de renseigner les personnes intéressées sur leurs droits et obligations (al. 1er). Chacun a le droit d’être conseillé, en principe gratuitement, sur ses droits et obligations. Sont compétents pour cela les assureurs à l’égard desquels les intéressés doivent faire valoir leurs droits ou remplir leurs obligations (al. 2).

L’alinéa premier ne porte que sur une information générale des assurés, par le biais par exemple de brochures d’informations ou de lettres-circulaires. En revanche, l’alinéa 2 prévoit l’obligation de donner une information précise ou un conseil dans un cas particulier, de sorte qu’il peut conduire à l’obligation de verser des prestations sur la base du principe de la bonne foi.

Plus particulièrement, le devoir de conseil de l'assureur social au sens de l'art. 27 al. 2 LPGA comprend l'obligation d'attirer l'attention de la personne intéressée sur le fait que son comportement pourrait mettre en péril la réalisation de l'une des conditions du droit aux prestations (ATF 131 V 472 consid. 4.3). Les conseils ou renseignements portent sur les faits que la personne qui a besoin de conseils doit connaître pour pouvoir correctement user de ses droits et obligations dans une situation concrète, face à l'assureur (cf. EUGSTER, ATSG und Krankenversicherung : Streifzug durch Art. 1-55 ATSG, RSAS 2003 p. 226). Le devoir de conseil s'étend, non seulement aux circonstances de faits déterminantes, mais également aux circonstances de nature juridique (SVR 2007 KV n° 14 p. 53 et la référence). Son contenu dépend entièrement de la situation concrète dans laquelle se trouve l'assuré, telle qu'elle est reconnaissable pour l'administration (MEYER, Grundlagen, Begriff und Grenzen der Beratungspflicht der Sozialversicherungsträger nach Art. 27 Abs. 2 ATSG, in : Sozialversicherungsrechtstagung 2006, St-Gall 2006, p. 27 n° 35).

7.             En l’espèce, le recourant n’a appris la possibilité de faire une demande d’exportation qu’après s’être inscrit à Pôle Emploi, le 2 juillet 2021, et il a fait sa demande en retournant le formulaire requis à l’ORP le 19 juillet, soit après avoir quitté la Suisse. Il n’a dès lors pas droit à l’exportation des prestations, en application du ch. G53 circulaire IC 883, qui conditionne ce droit au fait d’en faire la demande avant son départ. Contrairement à ce qu’allègue que le recourant, cette disposition ne mentionne pas que cela ne serait le cas « qu’en principe ».

Le recourant ne peut se prévaloir d’un défaut d’information de la part de l’ORP, dès lors qu’il a reçu, lors de son inscription au chômage, une brochure d’information qui mentionnait le droit à l’exportation des prestations et qu’il n’a manifestement pas cherché à obtenir des informations de son conseiller en personnel, qu’il n’a même pas informé de son départ pour la France.

Le fait que l’intimé n’ait pas fait valoir que la demande était tardive dans sa première décision, mais seulement dans sa décision sur opposition, ne peut lui être reproché, car la décision sur opposition remplace la décision initiale (ATF 131 V 407 consid. 2.1.2.1) et permet à l'autorité administrative d'examiner sa décision initiale et cas échéant de l'annuler ou de la modifier.

7.1 La décision de l’intimé devant être confirmée en raison de la tardiveté de la demande d’exportation des prestations, il n’est pas nécessaire d’examiner les autres griefs du recourant.

7.2 La chambre de céans renoncera à fixer une nouvelle audience, estimant que le recourant ne s’est pas excusé valablement de son absence à l’audience du 11 mai 2022, dans la mesure où il l’a fait tardivement, soit quatre jours après l’audience, et sans produire de certificat médical. Elle estime d’autre part qu’une audience n’est pas nécessaire pour juger la présente cause, qui peut l’être sur la base des pièces au dossier.

8.             Infondé, le recours sera rejeté.

La procédure est gratuite (art. 61 let. fbis a contrario LPGA).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le