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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3363/2018

ATAS/481/2019 du 31.05.2019 ( LPP ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3363/2018 ATAS/481/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 31 mai 2019

5ème Chambre

 

En la cause

BALOISE-FONDATION COLLECTIVE POUR LA PREVOYANCE PROFESSIONNELLE OBLIGATOIRE, p.a. Bâloise Vie SA; Aeschengraben 21, BASEL

 

demanderesse

 

contre

A______ (SUISSE) SA, p.a. Me Christian FISCHELE, avocat, route des Jeunes 4, LES ACACIAS

 

défenderesse

 


EN FAIT

1.        Monsieur B______ (ci-après : l'employé), né le ______ 1956, a été engagé par A______ (Suisse) SA (ci-après : A______ ou la défenderesse) le 1er octobre 2006 en qualité de directeur général (CEO) pour un salaire mensuel brut de
EUR 16'670.- payable douze fois par an. À ce titre, il était affilié auprès de la Bâloise-Fondation collective pour la prévoyance professionnelle obligatoire (ci-après : la fondation de prévoyance ou la demanderesse) pour son deuxième pilier.

2.        Le 29 avril 2008, l'employé et A______ ont signé un nouveau contrat de travail pour une durée indéterminée, prévoyant toujours le même salaire mensuel brut, qui correspondait à un montant CHF 23'607.60 par mois selon un taux de change fixe convenu entre les parties.

3.        Le 30 avril 2008, le capital-actions de A______ a été vendu à C______ Europe SA, avec siège au Luxembourg, société qui était elle-même contrôlée par C______ AG, avec siège à Zoug.

4.        Durant l'année 2009, le compte bancaire de l'employé a été crédité à plusieurs reprises de divers montants - payés en partie par C______ Europe SA avec des mentions justificatives telles que « salaire c/o A______ » ou encore « acompte salaire Emixx » - mais aussi par A______ (paiement de CHF 50'038.-, valeur 7 août 2009, sans mention).

5.        Par courrier du 29 juin 2009, A______ a résilié le contrat de travail de l'employé pour le 31 décembre 2009.

6.        Par pli du 7 janvier 2010 adressé à A______, C______ Europe SA et C______ AG, l'employé a réclamé le paiement de CHF 117'280.65 à titre d'arriérés de salaire et de remboursement de frais pour l'année 2009.

7.        Le 12 janvier 2010, A______ a fait savoir à l'employé qu'elle ne le considérait plus comme son salarié depuis le 1er janvier 2009 puisqu'il ne fournissait plus de prestation de travail en sa faveur, mais au bénéfice d'C______ AG. Le contrat de travail avait été ainsi tacitement transféré de A______ à C______ AG.

8.        Le 20 janvier 2010, A______ a adessé à la fondation de prévoyance la déclaration de départ de l'employé au 31 décembre 2008.

9.        Suite à ladite déclaration, la fondation de prévoyance a établi, le 28 janvier 2018, une facture de mutation de CHF 16'726.55 en faveur de A______, correspondant au solde du compte courant des parties. Cette somme se composait en premier lieu
du montant de CHF 12'209.40, représentant les cotisations payées en trop pour
l'année 2009. S'y ajoutaient CHF 45.80 à titre d'intérêts dus sur ce montant ainsi que le solde positif du compte courant pour l'année 2009, à hauteur de
CHF 4'471.35.

10.    Par pli du 18 février 2010, A______, agissant par son administrateur, a prié la fondation de prévoyance de bien vouloir lui verser le montant de CHF 16'726.55.

11.    Le 10 mars 2010, la fondation de prévoyance a crédité le compte bancaire de son administrateur du montant de CHF 16'744.30, soit CHF 16'726.55 en principal et CHF 17.75 en intérêts.

12.    Par demande parvenue au greffe de la Juridiction des Prud'hommes le 3 mai 2010, l'assuré a assigné A______ en paiement de CHF 117'280.65 plus intérêts moratoires au taux de 5 % l'an dès le 1er septembre 2009.

13.    Par jugement TRPH/______/2011 du 22 mars 2011, le Tribunal des Prud'hommes a considéré que le transfert des actions de A______ en mains d'C______ n'avait pas opéré de changement d'employeur. Aussi a-t-il condamné A______ à payer la somme brute de EUR 71'171.32 ou CHF 107'468.10 (soit un montant de EUR 56'609.32 ou CHF 85'480.07 à titre d'arriérés de salaires, ainsi qu'un montant de EUR 14'562.- ou CHF 21'988.- pour dix-neuf jours de vacances non prises), invité la partie qui en a la charge à opérer les déductions sociales, légales et usuelles et prononcé la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer à concurrence de CHF 107'468.10.

14.    Par arrêt CAPH/______/2011 du 30 novembre 2011, la chambre des Prud'hommes de la Cour de justice, statuant sur l'appel interjeté par A______ contre le jugement TRPH/______/2011 du 22 mars 2011, a confirmé ce dernier.

15.    Par arrêt 4A_37/2012 du 2 avril 2012, le Tribunal fédéral a rejeté le recours formé par A______ contre l'arrêt de la chambre des Prud'hommes du 30 novembre 2011.

16.    Par courrier du 23 avril 2013, l'employé a informé la fondation de prévoyance qu'il avait invité A______, le 3 juillet 2012, à se conformer à l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2012 du 2 avril 2012 et, partant, à lui verser les montants auxquels elle avait été condamnée, ainsi qu'à lui transmettre l'attestation de paiement des cotisations sociales afférentes aux salaires déjà versés en 2009. Expliquant que ces démarches auprès de A______ s'étaient révélées infructueuses, l'employé a demandé que la fondation de prévoyance invitât cette dernière à lui verser les cotisations LPP afférant aux salaires qui avaient déjà été payés en 2009 et qu'elle prît, à l'encontre de A______, toute mesure nécessaire au recouvrement des cotisations LPP dues non seulement sur les salaires déjà versés en 2009 (part patronale et part employé) mais aussi sur la somme brute de CHF 107'468.10 ou EUR 71'171.32 au paiement de laquelle A______ avait été condamnée par le Tribunal fédéral.

17.    Le 25 octobre 2016, la fondation de prévoyance a adressé à A______ une facture d'un montant de CHF 15'606.70, soit CHF 12'209.40 représentant les cotisations dues pour l'année 2009 et CHF 3'397.30 les intérêts pour la période du 1er juillet 2009 au 31 décembre 2015.

18.    Le 9 décembre 2016, la fondation de prévoyance a invité A______ à payer la somme de CHF 16'218.85 jusqu'au 23 décembre 2016, celle-ci se composant du montant de CHF 15'606.70 auquel s'ajoutaient des intérêts à hauteur de CHF 612.15.

19.    Selon l'extrait du compte courant établi le 5 janvier 2017 par la fondation de prévoyance (état au 31 décembre 2016), la somme due par A______ s'élevait désormais à CHF 16'230.95, avec les intérêts encourus du 1er janvier au 31 décembre 2016 de CHF 624.25.

20.    Le 31 janvier 2017, A______ a invité la fondation de prévoyance à annuler sa facture de cotisation au motif qu'elle n'avait versé aucun salaire à son employé en 2009. La procédure prud'homale ouverte par l'employé n'y changeait rien puisque celui-ci n'avait rien entrepris en vue de l'exécution de l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2012 du 2 avril 2012. En conséquence, elle n'était débitrice d'aucune cotisation envers la fondation de prévoyance.

21.    En réponse à ce courrier, la fondation de prévoyance a rappelé à A______
le 7 février 2017 qu'aux termes de l'arrêt de la Chambre des Prud'hommes CAPH/______/2011 du 30 novembre 2011, confirmé par arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2012 du 2 avril 2012, le salaire mensuel brut convenu s'élevait à
EUR 16'670.-, versé douze fois l'an. C'était ce salaire, converti en francs suisses qui devait être retenu pour déterminer les cotisations sociales ainsi que les contributions paritaires à la prévoyance professionnelle.

22.    Par sommation du 8 février 2017, la fondation de prévoyance a réclamé à A______ le paiement de CHF 16'324.75 d'ici au 22 février 2017 en l'avertissant que, dans le cas contraire, des frais de poursuite d'au moins CHF 500.- seraient également dus. En l'état, la somme réclamée se composait du report du solde du compte courant au
31 décembre 2016 (CHF 16'230.95) et des intérêts courus depuis lors (CHF 93.80).

23.    Suite à une réquisition de poursuite formée le 15 juin 2017 par la fondation de prévoyance, un commandement de payer, daté du 29 septembre 2017 et portant sur la somme de CHF 16'824.75 avec intérêts à 5 % dès le 23 février 2017, a été notifié à A______ le 17 novembre 2017. Le montant réclamé en principal incluait les frais contractuels de réquisition de poursuite à hauteur de CHF 500.-.

24.    Le 27 novembre 2017, A______ a formé opposition audit commandement de payer.

25.    Le 5 décembre 2017, l'Office des poursuites a adressé une facture de CHF 166.10
à la fondation de prévoyance, qui représentait les frais de notification du commandement de payer n° 1_____ .

26.    Le 26 septembre 2018, la fondation de prévoyance a déposé une demande en paiement et en reconnaissance de dette auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice, concluant, principalement, à ce que A______ fût condamnée au paiement de CHF 16'824.75 avec intérêts à 5 % l'an à compter du 23 février 2017, CHF 166.10 en frais de poursuite (n° 1_____ ) et CHF 1'000.- de frais contractuels d'action, et à ce que la mainlevée définitive de l'opposition formée au commandement de payer dans la poursuite n° 1_____ fût ordonnée. Ella a fait valoir, en substance, qu'il avait été jugé de manière définitive que l'employé et la défenderesse étaient liés par un contrat de travail jusqu'au 31 décembre 2009 et qu'en conséquence, l'employé devait être assuré jusqu'à cette date au titre de la prévoyance professionnelle obligatoire. Selon le plan de prévoyance applicable, le salaire assuré correspondait au salaire AVS prévisible, plafonné au montant de la limite supérieure (soit CHF 82'080.-), diminué du montant de coordination (CHF 23'940.-). Par « salaire AVS prévisible », il fallait comprendre le salaire prévu dans le contrat, soit, en l'espèce, un salaire s'élevant à EUR 16'670.- par mois, respectivement EUR 200'040.- par année (soit EUR 16'670.- x 12). Alors que la demanderesse avait converti cette somme au taux de change en vigueur au 1er janvier 2009, ce qui donnait un salaire annuel de CHF 297'964.-, le Tribunal des Prud'hommes avait, pour sa part, appliqué un taux de change de 1.51 qui correspondait au taux de change moyen durant l'année 2009. En appliquant celui-ci, le salaire s'élevait à CHF 302'060.40 (soit EUR 200'040.- x 1.51). Toutefois, compte tenu du plafond de CHF 82'080.-, la question de savoir si le salaire AVS prévisible s'élevait à CHF 297'964.- ou à CHF 302'060.40 par an pouvait ainsi rester indécise. Comme les cotisations se calculaient d'après le sexe, l'âge et le salaire assuré, celles de l'employé s'élevaient à CHF 12'209.40 du 1er janvier au 31 décembre 2009. Ce montant représentait la somme des cotisations pour un homme situé dans la tranche d'âge de 45 à 54 ans, catégorie pour laquelle le taux de cotisation s'élevait à 21 % du salaire assuré de CHF 58'140.- [soit (82'080 - 23'940) x 21 / 100 = CHF 12'209.40].

La dette de la défenderesse se récapitulait ainsi comme suit :

 

Débit

Crédit

Report solde 2016 en faveur de la défenderesse

 

CHF 0.-

Cotisation 2009

CHF 12'209.40

 

Intérêts du 01.01.09 au 31.12.15

CHF 3'397.30

 

Intérêts 2016

CHF 624.25

 

Intérêts du 01.01.17 au 22.02.17

CHF 93.80

 

Réquisition de poursuite

CHF 500.00

 

Total dû à la demanderesse :

CHF 16'824.75

 

Commandement de payer

CHF 166.10

 

Frais d'action en justice selon règlement

CHF 1'000.00

 

 

27.    Par réponse du 12 novembre 2018, la défenderesse a conclu, sous suite de frais et dépens, au déboutement de la demanderesse de toutes ses conclusions ainsi qu'à l'annulation de la poursuite n° 1_____ du 29 septembre 2017. À l'appui de ses conclusions, elle a allégué qu'elle n'avait jamais gagné d'argent et que ses seuls revenus provenaient du fait qu'elle refacturait l'activité de l'employé à C______ Europe SA selon un schéma convenu d'avance entre les parties. Pour des raisons de forme et de pure convenance personnelle souhaitées par l'employé, ce dernier et la défenderesse avaient conclu un nouveau contrat le 29 avril 2008. L'employé savait que son contrat serait repris par C______ Europe SA qui devait acheter toutes les actions de la défenderesse. Cette vente d'actions avait eu lieu le 30 avril 2008. Par conséquent, les droits et obligations relatifs aux rapports de travail de l'employé avaient été transférés tacitement à C______ Europe SA à cette même date. Par arrêt du 2 avril 2012, le Tribunal fédéral avait certes condamné la défenderesse au versement d'un salaire à l'employé pour 2009 mais ce dernier n'en avait jamais demandé l'exécution. De plus, la défenderesse ne disposait d'aucun fonds depuis 2008 et n'avait donc jamais été en mesure de payer quoi que ce soit à son ex-employé pour l'année 2009. Du fait du non-versement effectif d'un salaire pour l'année 2009, aucune cotisation de prévoyance professionnelle n'était due à la demanderesse.

28.    Par réplique du 4 décembre 2018, la demanderesse a relevé que selon l'extrait du compte individuel AVS de l'employé, établi le 12 octobre 2016 par la Caisse cantonale genevoise de compensation, un salaire de CHF 217'132.- avait bien été annoncé à l'AVS. Ce montant correspondait à ce qui avait été effectivement versé par la défenderesse à titre de salaire pour 2009. De plus, des cotisations AVS avaient été facturées sur ce montant. Ainsi, des cotisations LPP étaient dues sur le salaire AVS déterminant. Enfin, selon le plan de prévoyance applicable, c'était le salaire AVS prévisible au 1er janvier qui faisait foi pour le calcul des cotisations LPP. Ce salaire restait le même pour l'année considérée, pour autant qu'il ne s'agît pas d'un salaire fictif, ce qui n'était pas le cas au vu du jugement du 22 mars 2011 du Tribunal des Prud'hommes, confirmé par l'arrêt de la Chambre des Prud'hommes du 30 novembre 2011, lui-même confirmé par l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2012 du 2 avril 2012. Par conséquent, il paraissait « aberrant » que les cotisations LPP fussent dues uniquement en cas de paiement effectif du salaire. Au contraire, celles-ci étaient dues.

29.    Le 14 janvier 2019, la défenderesse a persisté dans ses conclusions en se référant au motifs indiqués dans sa réponse du 12 novembre 2018.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu'aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du Code des obligations [CO - RS 220]; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP - RS 831.40]; art. 142 du Code civil [CC - RS 210]).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        L'ouverture de l'action prévue à l'art. 73 al. 1 LPP n'est soumise comme telle à l'observation d'aucun délai (SPIRA, Le contentieux des assurances sociales fédérales et la procédure cantonale, Recueil de jurisprudence neuchâteloise 1984, p. 19; SCHWARZENBACH-HANHART, Die Rechtspflege nach dem BVG, SZS 1983, p. 182).

3.        Respectant la forme prévue à l'art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10), la demande est recevable.

4.        Le litige porte sur la mainlevée de l'opposition formée au commandement de payer n° 1_____ .

5.        a. La LPP institue un régime d'assurance obligatoire des salariés (art. 2 al. 1 LPP). L'art. 7 al. 1 aLPP, dans sa teneur en vigueur du 1er janvier 2009 au 31 décembre 2010, précise que les salariés auxquels un même employeur verse un salaire annuel supérieur à CHF 18'990.- sont soumis à l'assurance obligatoire pour les risques de décès et d'invalidité dès le 1er janvier qui suit la date à laquelle ils ont eu 17 ans et, pour la vieillesse, dès le 1er janvier qui suit la date à laquelle ils ont eu 24 ans (art. 7 al. 1 aLPP). L'assurance obligatoire commence en même temps que les rapports de travail et prend fin, notamment, en cas de dissolution des rapports de travail, le salarié restant assuré auprès de l'institution de prévoyance pour les risques de décès et d'invalidité, durant un mois après la fin des rapports avec l'institution de prévoyance (art. 10 LPP).

b. Aux termes de l'art. 7 al. 2 LPP, est pris en considération le salaire déterminant au sens de la loi fédérale du 20 décembre 1946 sur l'assurance-vieillesse et survivants (LAVS - RS 831.10).

Le salaire déterminant comprend toute rémunération pour un travail dépendant, fourni pour un temps déterminé ou indéterminé (art. 5 al. 2, 1ère phrase LAVS). Quatre conditions doivent ainsi être réalisées. Un travail est fourni pour une durée déterminée ou indéterminée et celui-ci constitue une activité rémunérée et dépendante (cf. ég. art. 10 LPGA). En revanche, il n'importe pas de savoir si le rapport de travail existe encore ou s'il a déjà pris fin. Est en principe déterminant le moment auquel la rémunération entre dans la sphère de maîtrise de l'ayant droit (moment de réalisation). Pour les prestations en argent, ce moment coïncide avec l'instant auquel le compte bancaire ou postal de l'intéressé est crédité du montant concerné. Pour les prestations en nature, il convient de se référer au moment de leur remise au bénéficiaire ou de leur consommation par celui-ci. En revanche, lorsqu'aucun paiement n'a lieu mais que le travailleur bénéficie d'un crédit équivalent (« Gutschrift ») ou d'une compensation avec une contre-créance, il y a lieu de présumer que le moment de réalisation coïncide avec celui de l'octroi du crédit, respectivement celui de la compensation. Ceci est important notamment pour les personnes rémunérées à la commission. Pour ces dernières, le revenu est réputé réalisé au moment de la naissance du droit à la commission et non, par exemple, à un moment ultérieur convenu pour son paiement (cf. Hans-Ulrich STAUFFER, Berufliche Vorsorge, 2ème éd. 2012, p. 192 s., n. 536 et 540 et l'arrêt du Tribunal fédéral des assurances du 12 septembre 1996, rendu en la cause M.S. et publié in Pratique VSI 1/1997, p. 24 consid. 4b/cc, lequel précise qu'un revenu [in casu : une commission] soumis à cotisations est considéré comme réalisé au moment où l'assuré acquiert le droit à la prestation, même si celle-ci n'est versée que quelques années plus tard).

Dans un arrêt B 11/01 du 4 avril 2002, traitant spécifiquement d'un cas de prévoyance professionnelle, le Tribunal fédéral des assurances a précisé la jurisprudence tirée de l'arrêt M.S. La jurisprudence relative à la détermination du gain assuré en matière d'assurance-chômage (cf. DTA 1985, p. 81 consid. 2c) s'applique par analogie à la prévoyance professionnelle obligatoire dans la mesure où la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI - RS 837.0), plus particulièrement son art. 23 al. 1, renvoie à la notion de salaire déterminant au sens de la LAVS. On ne saurait se baser néanmoins sans distinction sur le salaire convenu par les parties au contrat de travail car cela comporterait un risque d'ententes abusives, en ce sens que des salaires fictifs jamais payés feraient l'objet d'attestations indiquant à tort qu'ils correspondraient à la réelle et commune volonté des parties. Si le Tribunal fédéral des assurances avait admis, dans un arrêt C 14/94 du 31 mai 1994, publié in PJA 1994 p. 1460 s. (NDLR: les passages reproduits dans cette revue ne traitent que du cas d'invalidité survenu après un changement d'institution de prévoyance), que c'était le salaire convenu et non celui effectivement payé qui représentait le salaire « obtenu normalement » au sens de l'art. 23 al. 1 LACI, c'était parce que dans l'arrêt en cause, il était question d'un rapport de travail de longue durée dans le cadre duquel le salaire convenu n'avait jamais été contesté. Si ce dernier n'avait pas été payé au cours des derniers mois, c'était uniquement en raison de l'insolvabilité de l'employeur. Dans l'arrêt B 11/01 du 4 avril 2002, tous ces éléments faisaient défaut. En effet, l'assuré était au service de l'employeur depuis seulement deux mois lorsqu'il avait connu, dès fin février 1996, une période d'incapacité de travail de longue durée. De plus, l'employeur, qui était tombé en faillite seulement en septembre 1998, n'avait payé à l'employé que CHF 2'225.80 au cours des deux premiers mois de l'année 1996 en lieu et place du salaire convenu (CHF 4'500.- brut, respectivement CHF 5'000.- brut par mois à partir du 17 février 1996). Le point de savoir si cela était licite sous l'angle du contrat de travail n'avait pas à être tranché dans le cadre de la procédure qui avait pour objet de déterminer si le salaire minimum de l'art. 7 al. 1 LPP était atteint. L'assuré avait par ailleurs assigné son employeur devant la juridiction des Prud'hommes, ce qui démontrait bien que la question du salaire était litigieuse. En conclusion, le Tribunal fédéral des assurances a jugé qu'en pareilles circonstances, il ne se justifiait pas d'établir le salaire annuel minimum déterminant pour la prévoyance professionnelle obligatoire sur la base d'un salaire qui n'avait jamais été payé à concurrence du montant contractuellement prévu (arrêt du Tribunal fédéral B 11/01 du 4 avril 2002 consid. 4c).

6.        a. La convention dite d'affiliation d'un employeur à une fondation collective ou à une fondation commune est un contrat sui generis fondé sur l'art. 11 LPP (ATF 120 V 299 consid. 4a et les références). L'employeur affilié à une institution de prévoyance par un tel contrat est tenu de verser à celle-ci les cotisations qu'elle fixe dans ses dispositions réglementaires (art. 66 al. 1, 1ère phrase LPP).

b. Selon l'art. 8 al. 1 LPP, dans sa teneur en vigueur au 1er janvier 2009, la partie du salaire annuel comprise entre CHF 22'155.- et CHF 75'960.- doit être assurée. Cette partie du salaire est appelée « salaire coordonné ».

L'art. 8 LPP ne figure pas dans la liste des dispositions qui, aux termes de l'art. 49 al. 2 LPP, s'appliquent également à la prévoyance plus étendue. Les institutions de prévoyance peuvent par conséquent, dans leurs règlements, renoncer totalement à une déduction de coordination ou assurer des revenus trois fois plus élevés que la rente de vieillesse annuelle maximale de l'AVS. Les institutions de prévoyance doivent toutefois respecter deux limites. D'une part, elles ne doivent pas assurer dans la caisse de pension des revenus qui soient plus élevés que le salaire AVS ou le revenu soumis obligatoirement à l'AVS des indépendants. D'autre part, le revenu assurable est limité au décuple du montant limite supérieur de l'art. 8 al. 1 (cf. art. 79c LPP ; Jürg BRECHBÜHL, in SCHNEIDER, GEISER, GÄCHTER, Commentaire LPP et LFLP, n. 17 ad art. 8 LPP).

c. Selon l'art. 3 al. 1 let. b de l'ordonnance sur la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (OPP 2 - RS 831.441.1), l'institution de prévoyance peut, dans son règlement, s'écarter du salaire déterminant dans l'AVS en fixant d'avance le salaire coordonné annuel à partir du dernier salaire connu ; les changements déjà convenus au moment de la fixation du salaire coordonné seront pris en considération.

La fixation praenumerando a pour conséquence que le salaire coordonné diffère du salaire AVS lorsque des modifications de salaire non convenues et imprévues apparaissent en cours d'année. Dans ce cas, celles-ci restent sans effet sur le montant des cotisations. Cependant, les institutions de prévoyance sont libres de prévoir dans leurs règlements que le salaire coordonné sera adapté en conséquence lors d'une augmentation ou d'une diminution du salaire annuel en cours d'année (Jürg BRECHBÜHL, op. cit., n. 12 ad art. 8 LPP).

Dans un arrêt 9C_568/2007 du 14 mars 2008, publié aux ATF 134 V 223, le Tribunal fédéral a considéré que lorsque le règlement d'affiliation d'une institution de prévoyance prévoit que le salaire annuel - et donc le salaire coordonné - se détermine praenumerando le 1er janvier, respectivement au moment de l'affiliation du collaborateur concerné à l'institution de prévoyance, cela ne fait pas obstacle à la prise en compte rétroactive, par cette institution, d'une rectification salariale à la hausse, fondée sur un jugement d'une juridiction administrative constatant que l'employeur a violé la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (LEg - RS 151.1 ; ATF 134 V 223 consid. 3.2 ; Isabelle VETTER-SCHREIBER, BVG-FZG-Kommentar, 3ème éd. 2013, n. 1 ad art. 8 LPP).

d. L'employeur est débiteur de la totalité des cotisations envers l'institution de prévoyance. Celle-ci peut majorer d'un intérêt moratoire les cotisations payées tardivement (art. 66 al. 2 LPP). Le taux d'intérêt se détermine en premier lieu selon la convention conclue par les parties dans le contrat de prévoyance et, à défaut, selon les dispositions légales sur les intérêts moratoires des art. 102 ss. CO (SVR 1994, BVG n° 2 p. 5 consid. 3b/aa ; RSAS 1990 p. 161 consid. 4b).

Selon l'art. 105 al. 3 CO, des intérêts ne peuvent être portés en compte pour cause de retard dans le paiement des intérêts moratoires. L'art. 105 al. 3 CO interdit la composition (anatocisme) de l'intérêt moratoire : le créancier ne peut pas faire courir un (nouvel) intérêt moratoire sur une dette d'intérêt moratoire déjà échue par une (nouvelle) interpellation, ni même une poursuite ou une demande en justice, le but étant de protéger le débiteur contre une augmentation exponentielle imprévue de sa dette qui résulterait de la composition des intérêts. Les parties peuvent cependant convenir d'ajouter un intérêt moratoire échu au capital et faire courir un intérêt sur le tout : il s'agit en principe d'une novation. Celle-ci peut être convenue d'avance, notamment par une convention de compte courant (art. 117 CO). C'est pourquoi, le Tribunal fédéral considère que l'art. 105 al. 3 CO est une règle de droit dispositif qui interdit au créancier de provoquer unilatéralement une capitalisation des intérêts, mais pas aux parties de la stipuler (ATF 131 III 13 consid. 9.3 ; JdT 2005 I 499 ; Luc THÉVENOZ, in Commentaire romand, CO-I, 2ème éd. 2012, n. 6 et 7 ad art. 105 CO).

7.        a. La relation contractuelle entre la demanderesse et la défenderesse est régie notamment par le contrat d'affiliation signé par les parties en mai 2009, valable du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2014 - lequel annule et remplace le précédent contrat d'affiliation du 1er octobre 2006, absent du dossier -, les conditions contractuelles d'affiliation à la Bâloise-Fondation collective pour la prévoyance professionnelle obligatoire, édition 2006, pour les clients « Prevo » (ci-après : conditions contractuelles) ainsi que par le plan de prévoyance n° 21, édition 2008 (« Prevocompact » ; ci-après : plan de prévoyance n° 21). Faisant usage de la faculté laissée par l'art. 3 al. 1 let. b OPP 2, le contrat d'affiliation prévoit à son art. 6 al. 1 que l'employeur effectue des paiements trimestriels d'avance correspondant au moins aux montants dus pour les mois écoulés depuis le début de l'année civile. À noter qu'une disposition libellée de manière identique se trouve au ch. V6 § 1 des conditions contractuelles. Sous la rubrique intitulée « Comment calcule-t-on votre salaire assuré ? » le plan de prévoyance n° 21 - qui n'a pas été affecté par la prolongation du contrat d'affiliation entré en vigueur le 1er janvier 2010 (cf. pce 5 p. 8 dem.) - indique que le salaire assuré correspond au salaire AVS prévisible, plafonné toutefois au montant de la limite supérieure LPP, diminué du montant de coordination.

L'annexe au plan de prévoyance n° 21, « Prevocompact », édition 2009 fixe le montant de la déduction de coordination à CHF 23'940.- et le montant limite supérieur (« plafond LPP ») à CHF 82'080.-.

b. Selon le ch. A5, 1ère phrase, du règlement Prevo Bâloise-Fondation collective pour la prévoyance professionnelle obligatoire, édition de janvier 2009 (ci-après : le règlement de prévoyance), l'obligation de contribuer débute avec l'admission à la caisse de prévoyance et dure jusqu'à la retraite, au plus tard cependant jusqu'au moment de la sortie de la caisse de prévoyance (cf. ch. G1 à G11 du règlement de prévoyance). Aux termes du ch. G1 du règlement de prévoyance, la couverture d'assurance prend fin à la date de la dissolution des rapports de travail ou lorsque les conditions légales à satisfaire pour être soumis à la LPP ne sont plus remplies.

c. Selon le ch. V6 § 2, 1ère phrase des conditions contractuelles, la fondation tient un compte courant avec intérêts et le cas échéant des comptes de dépôt pour chaque caisse de prévoyance. Les cotisations et coûts des assurances conclues avant le 1er juillet sont portés au compte de l'employeur avec valeur au 1er juillet d'une année civile, par la fondation. Le ch. V6 § 4 des conditions contractuelles prévoit que les fonds de la caisse de prévoyance sont placés sous forme de créances portant intérêts. Les intérêts débiteurs et créditeurs du compte courant et des comptes de dépôt peuvent être adaptés aux nouvelles situations sans avertissement préalable. L'intérêt débiteur n'est pas inférieur au taux d'intérêt minimal fixé pour la capitalisation des avoirs de vieillesse selon la LPP.

8.        Il ressort des pièces produites par la demanderesse qu'au vu du salaire de l'employé, qui s'élevait à CHF 297'964.- en 2009, correspondant à un salaire assuré de CHF 58'140.- (soit le plafond LPP de CHF 82'080.- moins la déduction de coordination de CHF 23'940.-), et d'un taux de cotisation global s'élevant à 21 % du salaire assuré pour un homme dans la tranche d'âge de 45 à 54 ans (cf. pce 10, p. 2 dem.), les cotisations dues pour 2009, avec les intérêts, s'élèvent à CHF 16'324.75, soit CHF 12'209.40 (CHF 58'140 x 21 : 100) et CHF 4'115.35 à titre de cotisations, respectivement d'intérêts du 1er juillet 2009 au 22 février 2017. Le calcul de ces intérêts, à concurrence de CHF 4'115.35 est conforme au ch. V6 des conditions contractuelles. En tant que les intérêts échus s'ajoutent à la dette de cotisations de CHF 12'209.40 année après année (cf. pce 34 dem.), il s'agit d'une dérogation conventionnelle à l'art. 105 al. 3 CO qui ne prête pas le flanc à la critique.

9.        La défenderesse conteste devoir les cotisations pour 2009, motif pris qu'elle n'a jamais été invitée à exécuter l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2012 du 2 avril 2012 et est dépourvue de liquidités. Elle soutient qu'il n'y a pas lieu de prélever des cotisations sur le salaire assuré en 2009 puisque les arriérés de salaire dus à l'employé pour l'année 2009 ne lui ont jamais été payés.

La jurisprudence du Tribunal fédéral des assurances, relative à la détermination du gain assuré en matière d'assurance-chômage (cf. DTA 1985, p. 81 consid. 2c) s'applique par analogie à la prévoyance professionnelle obligatoire dans la mesure où l'art. 23 al. 1 LACI, à l'instar de l'art. 7 al. 2 LPP, renvoie à la notion de salaire déterminant au sens de la LAVS (cf. ci-dessus : consid. 6b). La jurisprudence relative à l'art. 23 al. 1 LACI retient certes que le salaire contractuel n'est déterminant que si les parties respectent sur ce point les clauses contractuelles. Le Tribunal fédéral des assurances précise cependant à ce sujet qu'il s'agit d'éviter des accords abusifs selon lesquels les parties conviendraient d'un salaire fictif qui, en réalité, ne serait pas perçu par le travailleur (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 5/06 du 28 mars 2006 consid. 1).

En l'espèce, il ressort toutefois clairement des éléments de la procédure prud'homale que la défenderesse ne contestait pas la quotité des prétentions en paiement de l'employé, fondées sur le contrat de travail mais sa légitimation passive - sans succès (arrêt CAPH/204/2011 du 30 novembre 2011, consid. 5.1 à 5.3 et 8). Dans la présente procédure, la défenderesse ne met pas non plus en cause la quotité des cotisations et des intérêts conventionnels réclamés mais le principe même de leur paiement. En argumentant de la sorte, elle oublie que dans le jugement TRPH/180/2011 du 22 mars 2011, le Tribunal des Prud'hommes a constaté qu'une partie du salaire qu'elle devait pour l'année 2009 a bien été versée à l'employé (cf. consid. 4a dudit jugement), ce que confirme également l'extrait du compte individuel AVS de l'employé, lequel fait état d'un salaire de CHF 217'132.- payé par la défenderesse en 2009.

En second lieu, l'arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 11/01 du 4 avril 2002 précité (cf. ci-dessus : consid. 6b) n'interdit pas de se référer au salaire contractuel (en lieu et place du salaire effectivement versé) en cas de rapport de travail de longue durée dans le cadre duquel le salaire convenu n'est pas contesté mais n'est pas payé en raison de l'insolvabilité de l'employeur (cf. arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 14/94 du 31 mai 1994, cité au consid. 4c de l'arrêt B 11/01 déjà évoqué). Or, en l'occurrence, les rapports de travail, qui ont pris naissance le 1er octobre 2006, sont de longue durée et qu'en tant que la défenderesse allègue, bilan 2009 à l'appui, ne disposer d'aucun fonds depuis 2008 et ne pas être en mesure de payer quoi que ce soit à son employé pour 2009 (mémoire de réponse, p. 6), la défenderesse doit être considérée comme insolvable.

Enfin, le fait qu'aux termes du plan de prévoyance n° 21, le traitement cotisant soit déterminé praenumerando, en fonction du salaire AVS prévisible au 1er janvier, illustre au besoin que le montant et l'exigibilité des cotisations ne sont pas nécessairement corrélés au salaire effectivement payé. On rappellera à cet égard que, selon l'ATF 134 V 223 consid. 3.2 précité, ce mode de fixation des cotisations ne fait pas obstacle à la prise en compte rétroactive, par la demanderesse, d'une rectification salariale à la hausse, laquelle est fondée en l'espèce sur l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2012 du 2 avril 2012, dans la cause opposant la défenderesse à son ex-employé.

Au vu de ce qui précède la prétention de cotisations, y compris les intérêts et frais, de la demanderesse est fondée.

10.    a. Aux termes de l'art. 41 al. 2 LPP, les actions en recouvrement de créances se prescrivent par cinq ans quand elles portent sur des cotisations ou des prestations périodiques, par dix ans dans les autres cas. Les art. 129 à 142 CO sont applicables.

b. Le délai de prescription commence à courir uniquement à partir du moment où la prestation est devenue exigible. En effet, l'art. 41 al. 2 LPP renvoie notamment à l'art. 130 al. 1 CO, qui associe le début du délai de prescription à l'exigibilité des cotisations (Sylvie PETREMAND, in SCHNEIDER, GEISER, GÄCHTER (éd.), Commentaire LPP et LFLP, n. 12 et 15 ad art. 41 LPP). L'exigibilité signifie que le créancier a le droit de réclamer la prestation et le débiteur l'obligation de l'exécuter (ATF 129 III 535 consid. 3.2.1).

La prescription peut être interrompue lorsque le créancier fait valoir ses droits par des poursuites ou par une action devant un tribunal (arrêt du Tribunal fédéral des assurances B 55/05 du 16 octobre 2006 ; Hans-Ulrich STAUFFER, op. cit., p. 409 n. 1113).

c. Une disposition légale sur l'exigibilité des créances de cotisations n'existe que depuis l'entrée en vigueur de la 1ère révision de la LPP au 1er janvier 2005. Il s'agit de l'art. 66 al. 4 LPP, disposition selon laquelle l'employeur transfère à l'institution de prévoyance sa contribution ainsi que les cotisations des salariés au plus tard à la fin du premier mois suivant l'année civile ou l'année d'assurance pour laquelle les cotisations sont dues. Avant la 1ère révision, seule faisait foi l'exigibilité tel qu'elle était réglée dans les dispositions contractuelles ou réglementaires de l'institution de prévoyance (cf. arrêt du Tribunal fédéral 9C_618/2007 du 28 janvier 2008 consid. 1.1.2).

d. Selon le Tribunal fédéral, si l'institution de prévoyance n'a pas connaissance de l'existence d'un emploi soumis à assurance à cause d'une violation inexcusable de son devoir d'annoncer par l'employeur, l'exigibilité des créances de cotisations est alors différée jusqu'à cette prise de connaissance (ATF 136 V 73 consid. 4.1 et 4.2). Le Tribunal fédéral a toutefois considéré que s'il était possible de réclamer, sans limite de temps, l'exécution de la créance de cotisation originaire (même très ancienne) envers l'employeur ayant violé de manière inexcusable son devoir d'annoncer, il en découlerait une solution incompatible avec le régime de la prescription. Pour ce motif, le Tribunal fédéral a complété, pour les créances de cotisations, et par la voie du comblement de lacune, le délai de prescription relatif de cinq ans à compter de la connaissance (raisonnablement exigible) d'un emploi soumis à assurance en y adjoignant un délai de prescription (absolu) de dix ans. Ainsi, même lorsque l'employeur viole de manière inexcusable son devoir d'annoncer et que l'institution de prévoyance ignore de manière non fautive l'existence d'un rapport individuel de prévoyance, chaque créance de cotisations se prescrit en tous cas dix ans après sa naissance virtuelle [« nach ihrem (virtuellen) Entstehen »]. Étant donné que l'exigibilité est différée jusqu'à la prise de connaissance du rapport individuel de prévoyance, seules peuvent être réclamées les créances de cotisations dont la naissance ne remonte pas à plus de dix ans à ce moment-là. Puisque les créances plus anciennes sont déjà prescrites (de manière absolue), elles ne sauraient faire courir un délai (relatif) de prescription de cinq ans (ATF 136 V 73 consid. 4.3).

e. Selon les conditions contractuelles de la demanderesse, l'employeur effectue des paiements trimestriels d'avance correspondant au moins au montant dus pour les mois écoulés depuis le début de l'année civile (ch. V6 § 1 des conditions contractuelles).

Sous la note marginale « communications, obligation d'annoncer », le ch. V8 des conditions contractuelles dispose que l'employeur s'engage à transmettre à la demanderesse toutes les informations nécessaires et à lui fournir dans les meilleurs délais tous les documents pour réaliser la prévoyance professionnelle, à savoir notamment :

- les indications relatives aux personnes devant être assurées conformément au règlement ;

- les indications concernant le salaire déterminant selon le règlement, sans procéder à la déduction d'un montant de coordination.

11.    En l'espèce, ce n'est qu'à réception du courrier du 23 avril 2013 de l'employé, auquel étaient joints le jugement TRPH/______/2011 du 22 mars 2011, l'arrêt CAPH/______/2011 du 30 novembre 2011 et l'arrêt du Tribunal fédéral 4A_37/2012 du 2 avril 2012, que la demanderesse a appris que l'employé n'avait en définitive pas quitté A______ fin 2008 mais au 31 décembre 2009 et que cette dernière lui devait CHF 107'468.10, soit CHF 85'480.07 bruts à titre de solde de salaire pour 2009 et CHF 21'988.- bruts pour dix-neuf jours de vacances non prises. Au regard du devoir d'annoncer prévu par le ch. V8 des conditions contractuelles, la défenderesse aurait dû informer la demanderesse de l'issue de cette procédure prud'homale au plus tard au moment de la notification de l'arrêt 4A_37/2012 précité. En s'abstenant de le faire, la défenderesse a violé de manière inexcusable son devoir d'annoncer. Quant à la demanderesse, il ressort de ses allégations - non contestées - et des pièces du dossier qu'elle ignorait de manière non fautive l'existence de ladite procédure jusqu'à réception du courrier du 23 avril 2013 de l'employé. Au regard de l'arrêt 136 V 73 précité, c'est à partir de la réception de ce courrier que le délai de prescription de cinq ans a commencé à courir.

En requérant, le 15 juin 2017, une poursuite à l'encontre de défenderesse pour les cotisations de prévoyance professionnelle relatives à l'année 2009, la demanderesse a donc agi en temps utile. On relèvera également qu'en date du 15 juin 2017, le délai de prescription (absolu) de dix ans n'était pas encore atteint.

12.    Les institutions de prévoyance ont des frais administratifs, pour le financement desquels elles peuvent prévoir des cotisations et adopter des dispositions dans leurs règlements (art. 65 al. 3 LPP ; Jürg BRECHBÜHL, op. cit., n. 32 s. ad art. 65 LPP, n. 5 s. ad art. 66 LPP).

Les conditions contractuelles prévoient au ch. V7 § 1 que si l'employeur ne verse pas les montants correspondant au moins aux montants dus pour le nombre de mois écoulés depuis le début de l'année civile, la fondation somme l'employeur, par écrit, de régler l'arriéré de primes par le virement du montant nécessaire. Ceci est également valable pour d'éventuels arriérés de primes datant des années précédentes. Le ch. V7 § 5 précise que la fondation prélève un montant pour frais de sommation et de recouvrement auprès de l'employeur. Ces montants sont fixés dans le règlement des coûts en vigueur.

Selon le règlement des coûts pour charges et prestations de service extraordinaires, édition 2008 (ci-après : règlement des coûts), la demanderesse prélève des frais notamment en cas de réquisition de poursuite (CHF 500.-, montant auquel s'ajoutent les frais de l'office des poursuites) et de demande en justice fondée sur l'art. 73 LPP (CHF 1'000.-).

13.    Compte tenu de ce qui précède, la défenderesse doit à la demanderesse la somme de CHF 16'824.75 (soit CHF 16'324.75 et les frais conventionnels de réquisition de poursuite à hauteur de CHF 500.-).

14.    a. Les décisions des autorités administratives fédérales portant condamnation à payer une somme d'argent sont exécutées par la voie de la poursuite pour dettes et sont, une fois passées en force, assimilées à des jugements exécutoires au sens de l'art. 80 al. 2 ch. 2 de la loi fédérale sur la poursuite pour dettes et la faillite du 11 avril 1889 (LP; Pierre-Robert GILLIERON, Commentaire de la LP, 1999, p. 1226, n. 45).

Il en est de même des décisions passées en force des autorités administratives cantonales de dernière instance qui statuent, dans l'accomplissement de tâches de droit public à elles confiées par la Confédération, en application du droit fédéral, mais qui ne statuent pas définitivement en vertu du droit fédéral - autrement dit, dont les décisions sont susceptibles d'un recours administratif auprès d'une autorité fédérale ou d'un recours de droit administratif (Pierre-Robert GILLIERON, op. cit. p. 1227 ; Carl JAEGER, Bundesgesetz über Schuldbetreibung und Konkurs, 1999 p. 621). Par autorités administratives fédérales, et par extension autorités administratives cantonales de dernière instance, il faut entendre les tribunaux fédéraux et les autres autorités ou organisations indépendantes de l'administration fédérale en tant qu'elles statuent dans l'accomplissement de tâches de droit public à elles confiées par la Confédération (art. 1 al. 2 lit. b et e de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968; PA - RS 172.021).

Dans les matières qui sont de son ressort, le juge des assurances constitue le juge ordinaire selon l'art. 79 LP et a, de ce fait, qualité pour lever une opposition à la poursuite en statuant sur le fond (ATF 109 V 51).

Ainsi, la chambre des assurances sociales statuant en dernière instance cantonale et dans l'accomplissement de tâches de droit public peut prononcer la mainlevée définitive d'une opposition à un commandement de payer, pour autant que la poursuite ne soit pas périmée.

b. À teneur de l'art. 88 al. 2 LP, le droit du créancier de requérir la continuation de la poursuite se périme par un an à compter de la notification du commandement de payer (première phrase) ; si opposition a été formée, ce délai ne court pas entre l'introduction de la procédure judiciaire ou administrative et le jugement définitif (seconde phrase).

En l'occurrence, le commandement de payer a été notifié à la défenderesse
le 17 novembre 2017, date à laquelle le délai de péremption d'un an a commencé à courir (ATF 125 III 45 consid. 3b). Par conséquent, la poursuite n'était pas périmée lorsque la fondation a saisi la chambre de céans, le 26 septembre 2018, de sorte qu'il y lieu de prononcer la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer.

15.    Quant aux intérêts moratoires, la demanderesse a imparti à la défenderesse, par la sommation du 8 février 2017, un délai au 22 février 2017 pour s'acquitter du solde débiteur (CHF 16'324.75) qu'affichait le compte courant en date du 7 février 2017. Par conséquent, la défenderesse devra également s'acquitter d'un intérêt moratoire au taux de 5 % l'an (à défaut de disposition réglementaire) sur le montant de CHF 16'824.75, et ce à compter du 23 février 2017, soit au lendemain de l'échéance fixée.

16.    En ce qui concerne les frais de poursuite, ils sont d'office supportés par le débiteur lorsque la poursuite aboutit (JdT 1974 III 32).

Partant, les frais du commandement de payer du 29 septembre 2017, notifié le 17 novembre 2017 dans le cadre de la poursuite n° 1_____ , qui se montent à CHF 166.10, seront également mis à la charge de la défenderesse.

17.    Au vu de ce qui précède, la demande sera admise, la défenderesse condamnée au paiement de CHF 16'824.75, avec intérêts à 5 % dès le 23 février 2017 et la mainlevée définitive de l'opposition au commandement de payer prononcée. La défenderesse sera également condamnée au paiement des frais de poursuite.

18.    La demanderesse réclame enfin, à titre de « frais contractuels d'action », la somme de CHF 1'000.- pour les démarches engagées auprès de la chambre de céans dans le cadre de son action en reconnaissance de dette, référence étant faite au ch. 2.2 du règlement des coûts.

À cet égard, l'art. 73 al. 2 LPP précise que les cantons doivent prévoir une procédure simple, rapide, et en principe gratuite. L'art. 89H al. 1 LPA prévoit quant à lui que la procédure est gratuite pour les parties. Toutefois, les débours et un émolument peuvent être mis à la charge de la partie qui agit de manière téméraire ou témoigne de légèreté (art. 89H al. 1, 2ème phrase LPA). Une indemnité est allouée au recourant qui obtient gain de cause (art. 89H al. 3 LPA).

En sa qualité d'institution chargée d'une tâche de droit public, la demanderesse n'a en principe pas droit à des dépens. Toutefois, les assureurs sociaux qui obtiennent gain de cause en procédure cantonale et sont représentés par un avocat ou, d'une autre manière, par une personne qualifiée, peuvent prétendre à des dépens lorsque l'adverse partie procède à la légère ou de manière téméraire (ATF 128 V 323).

La demanderesse agissant, en l'espèce, par l'intermédiaire de ses propres organes, il n'y a pas lieu de lui allouer une indemnité de procédure.

Pour le surplus, les conditions de l'art. 89H al. 1, 2ème phrase LPA, n'apparaissent pas remplies, de sorte que la procédure est gratuite.

 

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

Au fond :

2.        L'admet.

3.        Condamne A______ (Suisse) SA à payer à Bâloise-Fondation collective pour la prévoyance professionnelle obligatoire la somme de CHF 16'824.75 avec intérêts à 5 % l'an à compter du 23 février 2017.

4.        Condamne A______ (Suisse) SA à payer à Bâloise-Fondation collective pour la prévoyance professionnelle obligatoire la somme de CHF 166.10 à titre de frais de commandement de payer.

5.        Prononce la mainlevée définitive de l'opposition formée par A______ (Suisse) SA au commandement de payer n° 1_____ .

6.        Dit que la procédure est gratuite.

7.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

La présidente

 

 

 

 

Maya CRAMER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral des assurances sociales par le greffe le