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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/5004/2007

ATAS/410/2008 (2) du 08.04.2008 ( PC ) , ADMIS

Descripteurs : ; PC ; PRESTATION COMPLÉMENTAIRE ; PREUVE ; ADMINISTRATION DES PREUVES ; APPRÉCIATION DES PREUVES ; LOYER ; CONTRÔLE DES HABITANTS ; INDICE
Normes : OPC16c
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/5004/2007 ATAS/410/2008

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 2

du 8 avril 2008

 

En la cause

Monsieur H_________, domicilié c/o I_________, à GENEVE

 

recourant

 

contre

OFFICE CANTONAL DES PERSONNES ÂGÉES, sis route de Chêne 54, GENEVE

intimé

 


EN FAIT

Monsieur H_________ (ci-après le recourant), né au mois de mars 1968, célibataire, a déposé au mois de février 2003 une demande de prestations complémentaire à sa rente d'invalidité, auprès de l'Office cantonal des personnes âgées (ci-après OCPA), dans laquelle il a mentionné vivre avec sa mère. L'OCPA l'a mis au bénéfice de prestations complémentaires avec effet au 1er février 2003.

Entre 2004 et 2007 plusieurs changements, ayant des répercussions sur la prise en compte du loyer du recourant, sont survenus, qu'il a régulièrement annoncés à l'OCPA conformément à son obligation. C'est ainsi que le 6 mars 2004, il a informé l'office que son frère avait quitté l'appartement; au mois de juillet 2004 qu'ils étaient à nouveau trois; entre l'été et l'automne 2004, qu'il vivait seul avec un contrat de sous-location; à partir du 28 janvier 2005 qu'ils étaient à nouveau trois dans le logement familial; dès le 18 avril 2006 que sa mère avait quitté le logement pour prendre un logement seule; dès le 6 novembre 2006, qu'ils vivaient à nouveau à trois dans l'appartement, à savoir avec son frère et son neveu, enfin que dès le 4 avril 2007, ils étaient à nouveau deux, le recourant et son frère.

En fonction de ces changements l'OCPA a rendu des décisions prenant en compte, pour le partage du montant du loyer, le nombre d'occupants, conformément aux règles légales. C'est ainsi notamment que par décision du 24 avril 2006, l'OCPA a tenu compte du départ de la mère du recourant et réparti à nouveau le loyer entre le recourant et son frère.

Par décision du 27 août 2007, l'OCPA reprend le calcul relatif au loyer pour la période d'une part du 1er novembre 2006 au 31 décembre 2006, d'autre part pour le mois de janvier 2007, enfin pour la période postérieure au 1er février 2007. Pour ces trois périodes, l'OCPA n'a pris en compte qu'un tiers du loyer comptant comme dépenses reconnues du recourant.

Le recourant s'est opposé à cette décision, en réitérant que sa mère avait quitté l'appartement et qu'elle habitait désormais 19 rue Rothschild, de sorte que pour la période postérieure à son départ, le loyer devait être divisé par deux et non par trois.

Par décision sur opposition du 13 décembre 2007, l'OCPA a rejeté l'opposition au motif que la mère du recourant n'avait pas procédé à son changement d'adresse auprès de l'Office cantonal de la population (ci-après l'OCP), qu'elle restait dès lors inscrite légalement à la rue de Lyon 12 et qu'il était par conséquent obligé d'en tenir compte et de répartir à parts égales le loyer entre trois personnes.

Dans son recours du 17 décembre 2006, le recourant s'oppose à cette vision des choses et explique que sa mère n'a pas fait le changement d'adresse officiel auprès de l'OCP parce qu'en raison de son départ de l'appartement , la régie X_________ a résilié le bail, de sorte qu'il convenait d'attendre que la situation s'éclaircisse.

Dans sa réponse du 22 janvier 2008, l'OCPA conclut au rejet du recours. Il considère que "cette situation irrégulière n'est pas opposable" à l'office et maintient que de ce fait un loyer proportionnel correspondant au tiers du loyer doit être pris en compte conformément à l'art. 16 c al. 1 de l'Ordonnance sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI (ci-après OPC).

Par courrier du 31 janvier 2008, le Tribunal a interrogé la régie X__________ Cie afin de savoir s'il est exact que la mère du recourant, Madame I_________, avait annoncé avoir quitté l'appartement, si cet appartement était bien occupé par les fils de la locataire et où en était une éventuelle procédure de contestation du congé.

Dans sa réponse du 13 février 2008, la régie explique ce qui suit: Madame I_________ est locataire de l'appartement de trois pièces situé au 1e étage de l'immeuble. Elle n'occupe plus cet appartement depuis le mois de mai 2006, et ses deux fils vivent dans l'appartement. Le propriétaire a résilié le contrat de bail de manière anticipée en raison de cette situation. Tant les fils que la locataire ont contesté le congé et une nouvelle tentative de conciliation doit avoir lieu prochainement.

Le Tribunal a ordonné la comparution personnelles des parties, qui s'est tenue le 11 mars 2008. A cette occasion les parties ont déclaré ce qui suit :

 

"Madame J________ : Je représente formellement l'OCPA, dont tous les juristes étaient indisponibles ce jour, mais ne peut prendre aucune décision ni ne peut pas répondre aux questions. Je transmettrai celles-ci aux juristes.

 

Monsieur H_________ : J'explique qu'en effet à la suite du départ de ma maman de l'appartement en avril 2006 l'OCPA en a tenu compte et a calculé le loyer sur la base de deux occupants. J'ai ensuite annoncé en novembre 2006 que nous étions trois car mon neveu nous avait rejoint mon frère et moi et l'OCPA a tenu compte de cet élément dans la décision contestée. Toutefois, lorsque j'ai annoncé en juillet 2007 que nous étions à nouveau seuls mon frère et moi dans l'appartement. L'OCPA a tenu compte pour 2007 de trois personnes, au motif que ma maman n'avait pas fait son changement d'adresse. Je produis avec copie pour l'OCPA le formulaire d'annonce de changement d'adresse de ma maman du 3 mars 2008, qui fait suite à l'audience de la Commission de conciliation des baux et loyers, la copie du bail à loyer de ma maman et la copie du Procès-Verbal de conciliation du 28 février 2008. Lors de cette audience mon frère et moi avons été autorisés à rester dans l'appartement jusqu'au 31 janvier 2010. La bailleresse a accordé à cette fin une prolongation unique de bail à ma maman, titulaire du bail jusqu'à cette date. Mon frère et moi nous sommes engagés à quitter les lieux à cette date."

Les pièces produites sont un formulaire d'annonce de changement d'adresse effectué par Madame I_________, avec comme nouvelle adresse, annoncé depuis le 1er mai 2006, mentionnant que ce n'est qu'en 2008 que la CCBL a statué sur le sort du bail, lui permettant de changer officiellement d'adresse. Le formulaire date du 3 mars 2008. Quant au bail à loyer, il concerne un appartement de deux pièces rue Rotschild en vigueur depuis le 1er mai 2006 d'une durée indéterminée. Enfin le procès-verbal de conciliation du 28 février 2008 confirme la prolongation unique du bail au 31 janvier 2010 accordée à la locataire, ainsi que l'engagement des fils de celle-ci à quitter les locaux à cette date au plus tard.

A l'issue de l'audience, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

Conformément à l'art. 56 V al. 1 let. a chif. 3 de la loi genevoise sur l'organisation judiciaire (LOJ), le Tribunal cantonal des assurances sociales connaît des contestations prévues à l’art. 56 de la Loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales (ci-après : LPGA) qui sont relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et invalidité du 19 mars 1965 (ci-après LPC). Sa compétence est ainsi établie pour juger du cas d’espèce.

Le recours est recevable à la forme (art. 56 à 60 LPGA).

Les prestations complémentaires tant fédérales que cantonales sont destinées à couvrir les besoins vitaux des personnes bénéficiaires de rente de l'AVS ou de l'AI, dont les dépenses ne sont pas couvertes par les ressources. Les prestations correspondent à la différence entre le revenu annuel déterminant et le revenu minimum d'aide sociale (art. 4 LPCC et art. 3 a LPC).

Le loyer d'un appartement y compris les frais accessoires fait partie des dépenses reconnues tant pour les prestations complémentaires fédérales que pour les prestations complémentaires cantonales et vient donc en déduction des ressources (art. 3 b al. 1 let. b LPC et 6 al. 1 let. a LPCC). L'article 16 c OPC prévoit sous le titre "partage obligatoire du loyer" ce qui suit : "Al. 1 : Lorsque des appartements ou des maisons familiales sont aussi occupés par des personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires, le loyer doit être réparti entre toutes les personnes. Les parts des loyers des personnes non comprises dans le calcul de la prestation complémentaires annuelle. Al. 2 : En principe, le montant du loyer est réparti à parts égales entre toutes les personnes". Cet article est applicable également aux prestations cantonales en vertu de l'art. 1A LPCC.

Dans un arrêt publié aux ATF 127 V 16 le Tribunal fédéral des assurances, (ci-après le TFA) a jugé cette disposition, entrée en vigueur le 1er janvier 1998, conforme à la loi dans la mesure où elle vise à empêcher le financement indirect de personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires. Il a cependant également affirmé, dans un arrêt ultérieur (VSI 2001 p. 234) que le nouvelle article 16 c OPC laisse une place à une répartition différente du loyer et que des exceptions demeurent possibles dans le cadre du nouveau droit. Tel est le cas par exemple lorsque le ménage commun, sans contrepartie financière, découle d'une obligation d'entretien de droit civil. Dans des circonstances particulières, une obligation d'ordre moral peut aussi justifier de faire une exception à la règle (cf. ATF 105 partie V 271, ATF p. 21 / 02 du 8 janvier 2003).

Dans le cas d'espèce, les pièces produites dans le cadre de l'instruction du dossier ont permis d'établir que la mère du recourant, titulaire du contrat de bail de l'appartement, a quitté celui-ci pour le laisser à ses deux fils, et à pris un bail à loyer pour un appartement de 2 pièces, avec effet au 1er mai 2006 et pour une durée indéterminée. Il est également apparu qu'elle n'avait pas officialisé ce changement d'adresse en raison de la procédure de résiliation de bail qui avait suivi son départ de l'appartement familial. Elle a confirmé son départ en rendant son changement d'adresse officiel, à la suite de l'audience de conciliation en matière de baux et loyer. Devant cette autorité, le bail de la mère du recourant a été prolongé jusqu'au 31 janvier 2010, et les deux fils de la locataire ont été autorisés à vivre dans les lieux jusqu'au 31 janvier 2010 également.

Or, on rappellera que l'on ne s'écarte pas d'un texte clair de la loi (cf. ATF 129 V 258 a contrario). L'article 16c OPC prévoit que le loyer doit être partagé par les personnes qui occupent un même appartement. Le critère est dès lors le fait de vivre ensemble en un même lieu, et non pas de s'être ou non annoncé à telle ou telle adresse auprès de l'OCP. Certes, l'OCPA doit pouvoir se fier aux indications officielles, et l'annonce officielle d'un changement d'adresse constitue dès lors un indice. Il y aurait toutefois formalisme excessif à refuser de prendre en compte une situation concrète établie et prouvée par pièce (voir par exemple ATF 119 Ia IV).

Par conséquent, le départ de la mère du recourant doit être pris en compte dès le 1er mai 2006 et dès cette date le loyer doit être divisé en deux, sauf pour la période du mois de novembre 2006 à mars 2007, pendant laquelle le recourant a vécu dans l'appartement avec son frère et son neveu. Dès le 1er avril 2007, le loyer doit être à nouveau divisé entre le recourant et son frère. Par conséquent, les décisions litigieuses seront annulées, et le dossier renvoyé à l'OCPA pour nouveau calcul au sens des considérants.


PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

L'admet, et annule les décisions des 27 août et 13 décembre 2007.

Invite l'OCPA à rendre une nouvelle décision au sens des considérants.

Dit que la procédure est gratuite.

 

La greffière

 

 

 

Florence SCHMUTZ

 

La Présidente

 

 

 

Isabelle DUBOIS

 

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le