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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/384/2019

ATAS/351/2019 du 18.04.2019 ( CHOMAG ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/384/2019 ATAS/351/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 18 avril 2019

5ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée aux ACACIAS

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENEVE

 

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______, née le ______ 1982, est au bénéfice d’un délai-cadre d’indemnisation de l’assurance-chômage depuis le 12 janvier 2018.

2.        Selon le plan d’action du 23 janvier 2018, l’assurée était tenue d’effectuer au minimum dix recherches d’emploi par mois et de remettre le formulaire de ses recherches à de l’office régional de placement (ci-après : ORP) en fin de mois ou au plus tard le 5 du mois suivant. Il y est en outre mentionné que les recherches d’emploi doivent être reparties sur l’ensemble du mois concerné et non groupées sur un seul jour ou une courte période.

3.        Le 5 juin 2018, l’assurée à remis à l’ORP le formulaire des preuves des recherches personnelles d’emploi pour le mois de mai 2018. Il y figure neuf recherches d’emploi effectuées en mai 2018 et une recherche datée du 4 juin 2018.

4.        Le 5 juillet 2018, l’assurée a remis à l’ORP le formulaire des preuves des recherches personnelles d’emploi pour le mois de juin 2018 qui mentionne neuf recherches d’emploi effectuées en juin 2018 et une recherche datée du 4 juillet 2018.

5.        Le 3 août 2018, l’assurée a déposé à l’ORP le formulaire des preuves des recherches personnelles d’emploi pour le mois de juillet 2018, mentionnant neuf recherches d’emploi effectuées durant ce mois et une recherche datée du 3 août 2018.

6.        Le lundi 8 octobre 2018, l’assurée a déposé à l’ORP le formulaire des preuves des recherches personnelles effectuées en septembre 2018. Ce formulaire contient neuf recherches d’emploi pour le mois de septembre et une recherche effectuée le 3 octobre 2018. Ce formulaire de recherches était accompagné d’une lettre du 8 octobre 2018 de l’assurée, dans laquelle celle-ci s’est excusée pour le retard d’un jour pour ses recherches du mois de septembre. Elle a relevé à cet égard qu’elle se mariera le 26 octobre prochain et qu’elle avait été avec sa mère et son témoin de mariage à Annemasse pour des retouches de sa robe de mariée, lesquelles avaient pris beaucoup plus de temps que prévu. A son retour, sa mère qui habitait à Lausanne et ne connaissait pas les lieux, s’était trompée d’itinéraire et avait pris la route blanche (contournement le long du Salève) au lieu de prendre l’autoroute pour la sortie vers Thônex. Par conséquent, elle était sortie à Bardonnex et il leur avait fallu ensuite traverser Genève depuis Plan-Les-Ouates. De ce fait, elle s’était trouvée dans un embouteillage et était revenu trop tard à Genève. Elle était consciente qu’elle sera certainement sanctionnée pour ce retard. Toutefois, comme c’était la première fois que cela se produisait, elle espérait que la pénalité était proportionnelle à son manquement.

7.        Par décision du 5 novembre 2018, l’office cantonal de l’emploi (ci-après : OCE) a suspendu le droit à l’indemnité de chômage de cinq jours à compter du 1er octobre 2018 au motif que les recherches avaient été déposées avec un léger retard et que l’assurée n’avait effectué que neuf démarches, alors qu’un nombre de dix avait été fixé selon le plan d’actions du 23 janvier 2018. Partant, la démarche datée du 3 octobre 2018, ne pouvait être prise en considération pour le mois de septembre.

8.        Par courrier reçu le 20 novembre 2018, l’assurée a formé opposition à cette décision. Elle a fait valoir avoir déposées le formulaire de ses recherches dans la matinée du lundi 7 octobre et non pas du 8 octobre (sic) comme cela était indiqué dans la décision, et avoir joint une lettre d’excuse pour expliquer les raisons du retard. De ce fait, elle contestait la durée de la suspension du droit à l’indemnité de chômage, dès lors que la remise avec un retard d’une journée constituait une faute très légère justifiant uniquement une suspension d’un jour, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral. Concernant le nombre de recherches d’emploi pour le mois de septembre, elle a allégué que, depuis le mois de janvier 2018, sa conseillère en personnel de l’ORP ne l’avait jamais informée de l’obligation de faire correspondre rigoureusement les dates des recherches d’emploi avec le mois en cours. Par ailleurs, elle croyait de bonne foi qu’il était cohérent de noter toutes les recherches effectuées entre le 6 du mois courant et le 5 du mois suivant, étant précisé qu’elle déposait toujours le formulaire le 5 du mois suivant. Enfin, elle a répété qu’elle avait déposé pour la première fois le formulaire des recherches d’emploi avec du retard.

9.        Par courriel du 28 novembre 2018, l’OCE a invité la conseillère en personnel de l’assurée à lui transmettre le dossier de celle-ci, tout en soulignant que cette dernière avait relevé n’avoir jamais été rendue attentive au fait qu’elle ne pouvait pas mentionner dans le formulaire des recherches personnelles d’emploi celles se rapportant au mois précédent ou au mois suivant. Il s’était en outre avéré qu’elle avait agi de la sorte également en juin et juillet et que la conseillère en personnel n’avait pas réagi.

10.    Par courrier du 29 novembre 2018, l’OCE a informé l’assurée qu’il ressortait de son dossier qu’elle mentionnait sur son formulaire de recherches personnelles d’emploi également celles effectuées au début du mois suivant et qu’elle procédait de la sorte chaque mois depuis plusieurs mois. L’obligation de ne mentionner que les recherches d’emploi du mois en cours ne lui avait jamais été rappelée depuis qu’elle bénéficiait des indemnités de l’assurance-chômage, raison pour laquelle aucune sanction ne sera exceptionnellement prononcée à son encontre pour ce motif. Toutefois, l’attention de l’assurée était attirée sur le fait qu’elle devait respecter à l’avenir les remarques mentionnées sur le formulaire de recherches d’emploi, à savoir que les démarches devaient être inscrites pour chaque mois civil, sous peine de se voir infliger une pénalité.

11.    Par décision du 21 décembre 2018, l’OCE a rejeté l’opposition de l’assurée à sa décision du 5 novembre 2018 au motif qu’elle avait remis le formulaire des recherches d’emploi pour septembre 2018 le lundi 8 octobre 2018. Par ailleurs, la quotité de la suspension de cinq jours correspondait au barème du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO) et respectait ainsi le principe de la proportionnalité.

12.    Par acte du 29 janvier 2019, l’assurée a formé recours à cette décision, en contestant la durée de la suspension du droit à l’indemnité. Elle a expliqué que son organisation personnelle avait été compromise en octobre en raison de la gestion de son déménagement et de son mariage. Par ailleurs, il ne s’agissait que d’un retard très léger, raison pour laquelle une sanction d’un jour de suspension paraissait correcte. Concernant le nombre de recherches d’emploi durant le mois de septembre, elle a répété que sa conseillère en personnel ne l’avait jamais informée de l’obligation de faire correspondre rigoureusement les dates des recherches avec le mois en cours. Ayant systématiquement rendu ses fiches le 5 du mois suivant, il lui semblait cohérent de noter toutes les recherches effectuées entre le 6 du mois courant et le 5 du mois suivant. De surcroît, elle avait reçu le 29 novembre 2018 un courrier de l’OCE l’informant qu’il annulait sa décision et lui remettait en lieu et place un avertissement. Partant, s’agissant d’un premier manquement, la recourante a conclu à la réduction de la durée de la suspension à un jour.

13.    Dans sa réponse du 21 février 2019, l’intimé a conclu au rejet du recours, en se référant à sa décision sur opposition quant aux motifs.

14.    La recourante n’ayant pas fait usage de son droit de réplique, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté dans les délai et forme prescrits par la loi, le recours est recevable, compte tenu de la suspension des délais entre le 18 décembre et le 2 janvier inclusivement (art. 38 al. 4 let. c et 56 ss LPGA).

3.        Est litigieuse en l’occurrence la question de savoir si l’intimé était fondé de suspendre le droit à l’indemnité journalière de chômage de cinq jours, au motif que la recourante avait remis ses recherches d’emploi le 8 au lieu du 5 octobre.

En ce qui concerne le nombre de recherches d’emploi en septembre 2018, il n’est pas contesté que la recourante a effectué durant ce mois neuf recherches d’emploi, ainsi qu’une dixième le 3 octobre 2018. Toutefois, l’intimé ne s’est plus prévalu de ce fait dans sa décision sur opposition, mais uniquement de la remise tardive du formulaire des preuves des recherches d’emploi. Il a par ailleurs expressément informé la recourante, par courrier du 29 novembre 2018, qu’il renonçait à lui infliger une sanction en raison de recherches d’emploi insuffisantes en septembre 2018, dès lors qu’elle n’avait pas été rendue attentive à l’obligation de faire correspondre les dates des recherches avec le mois en cours.

Par conséquent, la suspension de cinq jours, confirmée par la décision querellée, est dorénavant uniquement fondée sur la remise tardive du formulaire des preuves des recherches d’emploi à l’ORP et non sur le nombre insuffisant des recherches durant le mois de septembre 2018. Cette dernière question ne fait donc plus l’objet du litige.

4.        Aux termes de l’art. 17 al. 1 LACI, l’assuré qui fait valoir des prestations d’assurance doit, avec l’assistance de l’office du travail compétent, entreprendre tout ce que l’on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l’abréger.

Il lui incombe en particulier de chercher du travail, au besoin en dehors de la profession qu’il exerçait précédemment. Il doit apporter la preuve des efforts qu’il a fournis.

L’art. 26 de l’ordonnance du 31 août 1983 sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité (OACI) dans sa teneur en vigueur dès le 1er avril 2011 dispose à cet égard que l’assuré doit cibler ses recherches d’emploi, en règle générale selon les méthodes de postulation ordinaires (al. 1). Il doit remettre la preuve de ses recherches d’emploi pour chaque période de contrôle au plus tard le 5 du mois suivant ou le premier jour ouvrable qui suit cette date. A l’expiration de ce délai, et en l’absence d’excuse valable, les recherches d’emploi ne sont plus prises en considération (al. 2). L’office compétent contrôle chaque mois les recherches d’emploi de l’assuré (al. 3).

5.        a. Selon l'art. 30 al. 3 LACI, la durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute. En vertu de l'art. 45 al. 3 OACI, elle est d’un à quinze jours en cas de faute légère, de seize à trente jours en cas de faute de gravité moyenne et de trente-et-un à soixante jours en cas de faute grave.

La durée de la suspension du droit à l'indemnité de chômage est fixée compte tenu non seulement de la faute, mais également du principe de proportionnalité (Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in: Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2ème éd., n° 855, p. 2435).

b. En tant qu'autorité de surveillance, le secrétariat d’État à l’économie (SECO) a adopté un barème (indicatif) à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour ces organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances - tant objectives que subjectives - du cas concret notamment des circonstances personnelles, en particulier celles qui ont trait au comportement de l’intéressé au regard de ses devoirs généraux d’assuré qui fait valoir son droit à des prestations (cf. arrêt du Tribunal fédéral 8C 601/2012 du 26 février 2013 ; 8C 537/2013 du16 avril 2014). Selon le barème du SECO (Bulletin LACI/IC D72, état au 1.1.2019), le défaut de recherches d’emploi ou la remise tardive de celles-ci pendant la période de contrôle entraîne la première fois une suspension de cinq à neuf jours, la seconde fois une suspension de dix à dix-neuf jours et la troisième fois le renvoi pour décision à l’autorité cantonale (Bulletin LACI/IC D79 1.D et 1.E).

c. L’OCE a également établi un barème, lequel prévoit, pour un premier manquement, en raison de remise tardive des recherches d’emploi et si celles-ci sont qualitativement et quantitativement suffisantes, une suspension du droit à l’indemnité d’un jour par jour de retard et de cinq jours au-delà d’un retard de 5 jours.

d. Dans plusieurs arrêts, le Tribunal fédéral a confirmé une sanction de cinq jours de suspension du droit à l’indemnité d’assurés qui avaient remis la preuve de leurs recherches personnelles d’emploi après avoir pris connaissance de la décision de suspension (ATF 139 V 164 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C 73/2013 du 29 août 2013 ; 8C 194/2013 du 26 septembre 2013 ; 8C 537/2013 du 16 avril 2014).

Dans un arrêt du 26 juin 2012 (8C 33/2012), le Tribunal fédéral a rappelé qu’une sanction identique ne s’imposait pas lorsque l’assuré ne faisait aucune recherche d’emploi ou lorsqu’il produisait ses recherches après le délai, surtout s’il s’agissait d’un léger retard qui avait eu lieu pour la première fois pendant la période de contrôle ; il a confirmé la réduction de la sanction de cinq à trois jours de suspension du droit à l’indemnité d’une assurée qui avait remis ses recherches d’emploi, lesquelles étaient faites en qualité et en quantité, avec quatorze jours de retard alors qu’il s’agissait d’un premier manquement.

6.        La chambre de céans doit se limiter à examiner si l’administration a fait un usage critiquable de son pouvoir d’appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 8C 316/2007 du 16 avril 2008).

Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 8C 73/2013 du 29 août 2013).

7.        Il est admis que la recourante a déposé le formulaire de ses recherches d’emploi pour septembre 2018 le lundi 8 octobre au lieu du vendredi 5 octobre 2018 qui était le dernier jour du délai légal. Toutefois, compte tenu du fait qu’un week-end sépare les 5 et 8 octobre 2018, le retard n’est que d’un jour ouvrable.

Il sied également de relever que la recourante avait jusqu’alors toujours respecté ses obligations en matière de chômage durant la période de contrôle et que l’intimé a reconnu que ses recherches étaient suffisantes qualitativement et quantitativement, en dépit d’une dixième recherche d’emploi effectuée le 3 octobre, puisqu’elle a expressément renoncé à sanctionner la recourante pour ce fait.

Au vu de ce qui précède, conformément au barème de l’intimé et de la jurisprudence en la matière, seule une suspension d’un jour est justifiée.

8.        Le recours sera donc admis et la décision querellée réformée dans le sens que le droit à l’indemnité est suspendu pendant une durée d’un jour.

9.        La procédure est gratuite.

 

***


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Réforme la décision du 21 décembre 2018 dans le sens que le droit à l’indemnité journalière de chômage est suspendu pendant une durée d’un jour.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Diana ZIERI

 

La présidente

 

 

 

 

Maya CRAMER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le