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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2952/2017

ATAS/34/2019 du 21.01.2019 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2952/2017 ATAS/34/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 21 janvier 2019

10ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à Genève, représentée par CARITAS GENEVE

recourante

 

contre

 

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______, née le _______ 1964, originaire de Saint-Domingue (République Dominicaine) mais ressortissante italienne, veuve depuis 1999, est arrivée en Suisse le 4 janvier 2005. Elle y a exercé le métier de péripatéticienne jusqu’en 2011. A ce moment, elle a souhaité changer de profession mais n’a pas été en mesure de trouver une activité qui lui convenait. Pendant plusieurs années, elle a toutefois œuvré bénévolement pour l’association B______ qui vient en aide aux prostituées. Par ailleurs, depuis 2010, elle est assistée par l’Hospice général.

2.        Le 31 août 2016, l’assurée a déposé une demande de prestations auprès de l’office de l’assurance-invalidité de Genève (OAI) en raison d’un état dépressif récurrent ainsi que de troubles (nécrose aseptique) de la hanche gauche, de gonalgies et de cervicalgies, existant depuis 2013. A teneur de la demande de prestations, elle était femme au foyer depuis le 1er septembre 2010.

3.        Le 8 novembre 2016, le docteur C______, spécialiste FMH en psychiatrie et psychothérapie d'enfants et d'adolescents, a adressé un rapport au service médical régional de l'assurance-invalidité (ci-après : SMR), dont il ressort qu’il avait suivi l’assurée entre septembre 2010 et début juillet 2016 à raison d'une fois par semaine à cause de troubles dépressifs anxieux chroniques. Le traitement psychothérapeutique, accompagné de médicaments anxiolytiques, avait permis à l’assurée de calmer ses angoisses. Toutefois, il persistait une grande fragilité au vu de la chronicité de la psychopathologie, qui maintenait l’assurée dans un état de persécution permanent. Cet état était également alimenté par le « harcèlement » de son ancien patron (péripatéticienne), qui essayait de la récupérer. Elle se sentait très seule, toute sa famille résidant à Saint-Domingue. Pendant la thérapie, l’assurée avait suivi des cours de français et d'informatique. Sur le plan psychique, le médecin précité ne voyait pas d'atteinte susceptible d’empêcher l’assurée d’exercer, par exemple, un travail de bureau. Sur le plan somatique, selon les dires de la patiente, elle souffrait de troubles articulaires (hanche, genou et jambe droite), raison pour laquelle Le Dr C______ renvoyait le SMR au médecin généraliste.

4.        Le 20 janvier 2017, le docteur D______, généraliste FMH, a brièvement répondu aux questions posées par l'OAI: les atteintes à la santé ayant conduit au dépôt de la demande de prestations étaient un état anxio-dépressif et des douleurs à la hanche sur nécrose aseptique de la tête fémorale gauche. Ces atteintes étaient incapacitantes depuis 2015.

En annexe à son courrier figuraient :

-        le compte-rendu de la tomodensitométrie axiale computérisée du bassin et des articulations coxo-fémorales, daté du 4 juillet 2013, évoquant une sclérose de surcharge au niveau du versant iliaque et une sclérose hétérogène avec des lacunes d'aspect marécageux au niveau de la tête fémorale gauche, posant le diagnostic de nécrose aseptique ;

-        un courrier du docteur E______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, du 15 octobre 2013, dont il ressort que l’assurée se déplaçait avec une canne anglaise et qu’elle présentait une discrète boiterie. Elle souffrait de douleurs périarticulaires avec une mobilité toutefois conservée. Depuis quelques semaines, la symptomatologie s’était aggravée malgré la prise de Célébrex.

5.        A teneur d’une note interne, datée du 20 février 2017, l’OAI retenait le statut ménager, l’assurée s’étant qualifiée de femme au foyer dans sa demande de prestations.

6.        Le Dr C______ a établi un nouveau certificat en date du 1er avril 2017. La patiente avait quitté son ancienne activité professionnelle. Depuis lors elle souffrait d'un état dépressif anxieux en lien avec ses difficultés à se réinsérer dans un nouveau milieu socio-professionnel. Son état de santé ne lui permettait pas de postuler pour un nouveau poste. Grâce au traitement, elle avait pu calmer ses angoisses persécutrices et se stabiliser dans le nouveau domicile qui lui avait été assigné. Cependant, elle était actuellement à nouveau persécutée par son ancien milieu professionnel. Elle se sentait isolée à Genève, loin de ses racines familiales. Depuis une année, elle était retombée dans un état dépressif anxieux. Pour cette raison, le médecin précité la rencontrait régulièrement.

7.        Le 11 avril 2017, l'OAI a diligenté une enquête ménagère au domicile de l'assurée. Selon le rapport y relatif, l'entretien aurait duré environ 1h15. L'assurée comprenait et parlait assez bien le français, si l'on s'exprimait lentement. Les atteintes à la santé étaient une nécrose de la tête fémorale et une atteinte psychiatrique non invalidante (état dépressif anxieux avec sentiment de persécution). L'intéressée avait travaillé comme vendeuse en République Dominicaine de 1987 à 1994, puis avait été femme au foyer de 1994 à 2005, puis péripatéticienne indépendante de 2005 à 2011. Sans handicap, elle aurait l'obligation financière de travailler pour subvenir à ses propres besoins. Elle était aidée par l'Hospice général depuis 2010. L’assurée n’arrivait pas à donner des précisions sur la nature et l'importance de l'activité lucrative. Elle avait quitté son emploi en raison de son incapacité de travail durable dès 2015.

Avant l’atteinte, l’assurée gérait son ménage, entretenait son logement, effectuait ses courses et préparait ses repas normalement. Il en allait de même de la lessive et du repassage. Son fils était âgé de 17 ans et vivait chez sa grand-mère à Saint-Domingue. Elle travaillait bénévolement pour B______. Une amie, de cette association, l’aidait cependant pour rédiger une lettre en français ou pour comprendre le sens d'un courrier.

Depuis son atteinte, elle ne pouvait s’occuper que des tâches qui s’effectuaient à sa hauteur, mais pas de tout ce qui demandait de la force ou qui impliquait le fait de se baisser ou de monter sur un tabouret. Elle était ainsi en mesure de conduire seule son ménage et de cuisiner des repas simples, nécessitant des aliments qu’elle pouvait préparer assise à table, avant de se lever pour les cuire. Elle avait perdu le goût de cuisiner mais préparait un petit repas pour son amie, qui venait environ trois fois par semaine pour l’aider dans ses tâches ménagères. Elle pouvait faire la vaisselle et l'entretien, à sa hauteur, de l'évier et du plan de travail; le sol, le four et le frigo étant quant à eux nettoyés par son amie. S’agissant de l'entretien du logement, son amie venait une fois par semaine passer l'aspirateur, nettoyer les sols et les sanitaires, laver sporadiquement les vitres (grande baie vitrée au salon), et faire la poussière en hauteur. Une amie l’aidait également à faire les emplettes et courses diverses, une fois par semaine. L’assurée marchait avec une ou deux cannes à l'extérieur, selon les jours. Elle allait occasionnellement seule acheter une ou deux denrées dans le quartier, mais sortait peu seule, hormis pour ses rendez-vous médicaux. S’agissant de la lessive et de l’entretien des vêtements, l’assurée avait du mal à descendre le caddie plein de linge à la buanderie de l'immeuble. C’était donc son amie qui s’en occupait une fois par semaine. Concrètement, elles allaient ensemble à la buanderie et mettaient ensuite les vêtements à sécher, puis remontaient pour les plier directement. L’assurée pliait le linge léger, son amie se chargeant des effets plus lourds, comme les draps et les linges. Elle n’effectuait pas de repassage. Depuis l'atteinte, l’assurée avait arrêté de travailler à B______ car elle n'avait plus de motivation ni le moral pour faire cela, se sentant angoissée et déprimée et n'arrivant plus à aider ces femmes en situation difficile.

En raison de ces limitations, l’infirmière a retenu un taux d’empêchement total de 37% (aucune exigibilité n’étant prise en considération, l’assurée vivant seule dans son appartement), soit :

 

Travaux

Exigibilité
en %

Pondération
en %

Empêchement en %

Empêchement pondéré

Conduite du ménage

 

5 %

0 %

0 %

Exigibilité

0 %

0 %

0 %

Alimentation

 

35 %

25 %

8.75 %

Exigibilité

0 %

25 %

8.75 %

Entretien du logement

 

20 %

40 %

8 %

Exigibilité

0 %

40 %

8 %

Emplettes et courses diverses

 

10 %

40 %

4 %

Exigibilité

0 %

40 %

4 %


 

Lessive et entretien des vêtements

 

20 %

30 %

6 %

Exigibilité

0 %

30 %

6 %

Soins aux enfants ou aux autres membres de la famille

 

0 %

0 %

0 %

Exigibilité

0 %

0 %

0 %

Divers

 

10%

100 %

0 %

Exigibilité

0%

100%

10 %

Total des champs d’activité

 

 

100 %

Total de l’exigibilité retenue

 

 

0 %

Total – empêchement pondéré sans exigibilité

 

36.75 %

Total – empêchement pondéré avec exigibilité

 

37 %

8.        Le 27 avril 2017, le SMR, sous la plume de la Dresse F______, a expliqué qu’il avait contacté le Dr C______ le 11 avril 2017, son certificat du 1er avril 2017 étant en contradiction avec le précédent, sur lequel il s'était basé pour conclure à une capacité de travail entière dans une activité adaptée. Lors de cet entretien téléphonique, le psychiatre traitant avait confirmé que sur le plan psychiatrique, l'assurée pouvait effectuer une activité adaptée aux limitations fonctionnelles, mais il avait tout de même souligné qu’elle restait fragile et qu'il fallait éviter les situations de stress. Selon le psychiatre traitant, il subsistait certains symptômes psychiatriques n'empêchant toutefois pas l'assurée de travailler. En conséquence, le rapport du SMR du 7 février 2017 restait valable.

9.        Par projet de décision du 11 avril, confirmé le 6 juin 2017, l'OAI a nié le droit de l’assurée à des mesures professionnelles et à une rente d’invalidité. Dès lors que l'assurée n'exerçait plus d'activité lucrative depuis de nombreuses années, le statut retenu était celui d'une personne entièrement occupée à ses travaux habituels. Sur le plan médical, le SMR reconnaissait l’existence d'une atteinte à la santé invalidante depuis 2015. Afin d'évaluer l'ampleur de l'empêchement subi en raison de ses atteintes à la santé dans l'accomplissement de ses travaux habituels, il avait été procédé à une enquête économique sur le ménage à son domicile en date du 10 avril 2017. Il en ressortait des empêchements de 37 %. Inférieur à 40 %, le degré d'invalidité n'ouvrait par conséquent pas le droit à une rente d'invalidité. Au vu du statut retenu, des mesures professionnelles n’étaient pas envisageables.

10.    Le 7 juillet 2017, représentée par Caritas, l’assurée (ci-après : recourante) a interjeté recours contre la décision du 6 juin 2017, concluant, avec suite de frais et dépens, préalablement à l’octroi d’un délai pour compléter le recours et, principalement, à l'annulation de la décision de l'OAI du 6 juin 2017 et à l’octroi d’une rente d’invalidité et de mesures de réinsertion professionnelle. A l’appui de ses conclusions, elle a notamment contesté le degré d'invalidité retenu par l'enquêtrice à domicile, et notamment l'estimation de son empêchement à s'acquitter de la conduite du ménage, à l'entretien du logement, à effectuer ses emplettes et courses diverses, à faire la lessive et entretenir ses vêtements. L'estimation selon l'enquête économique ne tenait en effet pas suffisamment compte des limitations tant physiques que psychiques. La recourante contestait également le refus de mesures professionnelles, lequel n’était d'ailleurs pas du tout motivé par l'OAI.

11.    Par courrier du 2 août 2017, l’OAI (ci-après : l'intimé) a répondu et a conclu au rejet du recours, la recourante n’alléguant aucun fait précis étayé par un élément figurant au dossier susceptible de remettre en cause les empêchements retenus par l’enquêtrice de l'OAI.

12.    La recourante a répliqué par courrier du 28 septembre 2017 et a persisté dans les termes de son recours. S'agissant de l'enquête économique sur le ménage, l'enquêtrice avait minimisé ses troubles psychiques, pourtant dûment attestés par le Dr C______ dans son rapport du 1er avril 2017, alors qu’ils nécessitaient un traitement médicamenteux ainsi qu'un suivi psychiatrique régulier. C’était à tort que ces affections avaient été qualifiées de non-invalidantes alors qu’il s'agissait justement d'une des limitations principales dans ses activités quotidiennes. L'OAI n'avait mis sur pied aucune expertise médicale. Il convenait donc de retenir le diagnostic et les limitations attestées dans le rapport médical du psychiatre traitant. Concrètement, elle avait beaucoup de mal à s'organiser et était très vite découragée dans la conduite de son ménage. Elle était incapable de faire son ménage seule et recevait l'aide d'une amie chaque semaine. Il en allait de même pour les emplettes et courses diverses, dès lors qu’elle ne pouvait porter les achats. Pour ces raisons, les empêchements relatifs à la conduite du ménage, à l’entretien du logement, aux emplettes et courses divers ainsi qu’à la lessive et à l’entretien des vêtements avaient été mal évalués.

S'agissant des mesures professionnelles, l'OAI persistait à ne pas expliquer les motifs ayant conduit à son refus. En effet, elle présentait un taux d'invalidité d'au moins 37 %, et était motivée à reprendre une activité. Elle pourrait par exemple bénéficier de mesures de réadaptation de type mesures de réinsertion préparant à la réadaptation professionnelle. Au regard du parcours professionnel et des traumatismes vécus (conditions extrêmes, violences et menaces graves), les mesures précitées semblaient d'autant plus indiquées.

13.    L'intimé a dupliqué par courrier du 11 octobre 2017 et a persisté dans ses conclusions. L'enquête économique reposait sur un examen de la situation sur place et non sur des critères médico-théoriques. En réponse à l'argument selon lequel les troubles psychiques seraient minimisés, l'intimé a relevé que le psychiatre traitant avait précisé qu'il ne voyait pas d'atteinte psychopathologique empêchant la recourante de faire, par exemple, un travail de bureau (rapport du 8 novembre 2016). Se fondant sur ce rapport, le SMR avait considéré, dans un avis du 7 février 2017, qu'il n'y avait pas de diagnostic incapacitant selon le psychiatre traitant. Dans son rapport du 1er avril 2017, le psychiatre mentionnait notamment que la recourante souffrait d'un état dépressif anxieux en lien avec sa difficulté de réinsertion dans un nouveau milieu socioprofessionnel et que son état de santé ne lui permettait pas de se présenter pour postuler à un nouveau poste. Dans son avis du 27 avril 2017 le SMR a relevé qu'ayant pris connaissance du certificat susmentionné, il avait interrogé le psychiatre traitant le 11 avril 2017; ce dernier lui avait confirmé que sur le plan psychiatrique la recourante pouvait effectuer une activité adaptée aux limitations fonctionnelles, même si elle restait fragile, mais qu’il fallait éviter les situations de stress. Suite à cette conversation téléphonique, le SMR avait donc conclu que son avis du 7 février 2017 restait valable. Contrairement à ce qu'alléguait la recourante, l'enquêtrice à domicile a préalablement pris connaissance de l'entier du dossier de l'assurée. Elle a donc tenu compte de son état de santé tant physique que psychique. Le rapport d'enquête sur le ménage présentait par conséquent toutes les caractéristiques requises pour se voir reconnaître une pleine valeur probante. Enfin s'agissant des mesures d'ordre professionnel, elles n’étaient pas indiquées. En effet, la recourante à laquelle l'office reconnaissait des empêchements dans le ménage au taux de 37 % ne remplissait manifestement pas les conditions d'octroi de mesures professionnelles, lesquelles n’étaient ni nécessaires ni de nature à rétablir, maintenir ou améliorer sa capacité à accomplir les travaux habituels.

14.    Par courrier du 20 novembre 2017, la recourante a informé la chambre de céans qu’elle avait été examinée les 2 et 7 novembre 2017 par les médecins du service de radiologie des HUG, respectivement du service de chirurgie thoracique des HUG, en raison d’une grosseur suspecte dans le cou. Par ailleurs, l'amie dont il était question dans la réplique se tenait à disposition pour venir témoigner de l'aide qu'elle lui apportait deux fois par semaine pour accomplir ses tâches ménagères.

Enfin, la recourante a produit à toutes fins utiles une copie du rapport médical de son psychiatre, datée du 3 octobre 2017, dont il ressort que les difficultés de réinsertion professionnelle persistaient, l’état de l’assurée s’étant aggravé en raison de ses difficultés à dormir compte tenu du bruit fait par sa voisine, laquelle hurlait et donnait des coups sur le mur adjacent à son appartement. Cette voisine la réveillait et empêchait tout son environnement de dormir. Par conséquent, le Dr C______ confirmait une incapacité de travailler pour un temps indéterminé.

15.    Par courrier du 18 avril 2018, la recourante s'est à nouveau adressée à la chambre de céans pour indiquer, suite à son courrier du 22 novembre 2017, que la grosseur suspecte dans le cou s'était heureusement révélée bénigne. Elle a encore produit un rapport du Dr G______, non daté mais établi en avril 2018, attestant qu’elle souffrait d'eczéma chronique et d'urticaire dans un contexte atopique avec une nette aggravation depuis deux ans. Ces affections, consécutives à l’état dépressif, nécessitaient des injections intramusculaires de cortisone ainsi qu'un traitement médicamenteux quotidien à base d'antihistaminiques. Enfin, le témoignage de l'amie qui apportait à son aide à la tenue du ménage, apparaissait d'autant plus important que l’intimé avait retenu un degré d'invalidité de 37 % sans tenir compte de l'aide apportée par l'intéressée.

16.    Sur quoi la chambre de céans a procédé à l'audition des parties en comparution personnelle le 4 juin 2018.

A cette occasion, la recourante a confirmé qu’elle contestait l’évaluation des empêchements de l’enquête sur le ménage, étant précisé que l’infirmière s’était présentée avec beaucoup de retard, vers 15h ou 15h30 au lieu de 13h. Contrairement à ses allégations, elle n’était pas restée 1h15 mais tout au plus 20 à 30 minutes. Dans ces conditions, elle ne comprenait pas comment l’enquêtrice pouvait prétendre connaître les conditions d’existence personnelle d’une patiente dans un si court laps de temps. Elle ne pouvait pas effectuer la plupart des tâches ménagères, raison pour laquelle son amie venait deux fois par semaine pour l’aider. Elle passait l’aspirateur et l’accompagnait ensuite aux courses. En effet, elle souffrait de deux hernies discales, d’une nécrose de la hanche et à l’époque, elle s’était fait opérer du genou, par arthroscopie. Elle se déplaçait sans béquilles mais elle les gardait en cas de besoin à la maison. Le médecin lui avait conseillé de ne pas trop les utiliser, car c’était mieux pour elle moralement, par rapport au regard des autres. Il lui avait également expliqué que marcher trop souvent avec des béquilles pouvait avoir pour conséquence de mauvaises postures.

Elle était très motivée pour se réintégrer professionnellement. Elle avait été prise en charge par l’association B______ lorsqu’elle avait quitté son ancien métier de péripatéticienne, et grâce cette aide, elle avait pu notamment apprendre le français et l’informatique et travailler dans des ateliers. Elle souhaitait faire du bénévolat et venir en aide aux filles qui exerçaient le même métier mais une personne de l’association précitée lui avait suggéré de s’occuper en premier lieu de sa santé avant de penser à aider les autres. En 2017, elle avait beaucoup contribué à l’aide aux jeunes prostituées, qui étaient également soutenues par B______, et ses connaissances en espagnol lui avaient été utiles dans ce contexte. Cela étant, après en avoir discuté avec son conseil et pris connaissance des dernières écritures de l’OAI, elle renonçait à contester la décision entreprise s’agissant des mesures professionnelles.

Sa dépression s’était aggravée en raison des problèmes familiaux (décès de son père qui vivait en République dominicaine et crises d’épilepsie de son fils de 17 ans).

17.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

 


 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        À teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

Toutefois, les modifications légales contenues dans la LPGA constituent, en règle générale, une version formalisée dans la loi de la jurisprudence relative aux notions correspondantes avant l'entrée en vigueur de la LPGA; il n'en découle aucune modification du point de vue de leur contenu, de sorte que la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée (ATF 130 V 343 consid. 3).

3.        Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA; art. 62 al. 1 de la de loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

4.        Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente d'invalidité, singulièrement sur les empêchements dans le ménage résultant de ses atteintes à la santé. Lors de l’audience du 4 juin 2018, la recourante a renoncé à contester la décision s’agissant du refus de mesures professionnelles, de sorte que ce point n’est plus litigieux.

5.        a. Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al. 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008). Pour les personnes sans activité rémunérée, qui sont aussi couvertes par la LAI, la loi consacre une conception particulière de l'invalidité, qui substitue la capacité d’accomplir les travaux habituels à la capacité de gain; est déterminant l'empêchement, causé par l'atteinte à la santé, d'accomplir les travaux habituels, comme la tenue du ménage, l'éducation des enfants, les achats, ainsi que toute activité artistique ou d'utilité publique (art. 8 al. 3 LPGA, auquel renvoie l'art. 5 al. 1 LAI ; art. 27 du règlement sur l'assurance-invalidité, du 17 janvier 1961 [RAI – RS 831.201]).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré ou, si une sphère ménagère doit être prise en compte, sur sa capacité d’accomplir les travaux habituels (arrêt du Tribunal fédéral I.654/00 du 9 avril 2001 consid. 1 ; ATAS/502/2017 du 20 juin 2017 consid. 4b).

b. L’octroi d’une rente d’invalidité suppose que la capacité de l’assuré de réaliser un gain ou d’accomplir ses travaux habituels ne puisse pas être rétablie, maintenue ou améliorée par des mesures de réadaptation raisonnablement exigibles, que l’assuré ait présenté une incapacité de travail d’au moins 40% en moyenne durant une année sans interruption notable, et qu’au terme de cette année il soit invalide à 40 % au moins (art. 28 al. 1 LAI), la rente d’invalidité alors allouée étant un quart de rente, une demie-rente, un trois quarts de rente ou une rente entière selon que le taux d’invalidité est, respectivement, de 40 à 49%, de 50 à 59%, de 60 à 69% ou de 70% ou plus (art. 28 al. 2 LAI).

6.        Tant lors de l’examen initial du droit à la rente qu’à l’occasion d’une révision de celle-ci (art. 17 LPGA), il faut déterminer quelle méthode d’évaluation de l’invalidité appliquer en fonction du statut du bénéficiaire potentiel de la rente, à savoir s'il s'agit d'un assuré exerçant une activité lucrative à temps complet, d'un assuré exerçant une activité lucrative à temps partiel ou d'un assuré non actif. Cet examen conduit à appliquer respectivement la méthode générale (ou, selon les circonstances, extraordinaire) de comparaison des revenus, la méthode mixte ou la méthode spécifique (art. 28a LAI, en corrélation avec les art. 27 ss RAI).

a. Chez les assurés travaillant dans le ménage, le degré d'invalidité se détermine, en règle générale, au moyen d'une enquête économique sur place, alors que l'incapacité de travail correspond à la diminution - attestée médicalement - du rendement fonctionnel dans l'accomplissement des travaux habituels (ATF 130 V 97).

Pour évaluer l'invalidité des assurés travaillant dans le ménage, l'administration procède à une enquête sur les activités ménagères et fixe l'empêchement dans chacune des activités habituelles conformément aux chiffres 3095 de la circulaire concernant l'invalidité et l'impotence de l'assurance-invalidité. En ce qui concerne la valeur probante d’un tel rapport d’enquête, il est essentiel qu’il ait été élaboré par une personne qualifiée qui a connaissance de la situation locale et spatiale, ainsi que des empêchements et des handicaps résultant des diagnostics médicaux. Il y a par ailleurs lieu de tenir compte des indications de l'assuré et de consigner dans le rapport les éventuelles opinions divergentes des participants. Enfin, le texte du rapport doit apparaître plausible, être motivé et rédigé de manière suffisamment détaillée par rapport aux différentes limitations, de même qu'il doit correspondre aux indications relevées sur place. Si toutes ces conditions sont réunies, le rapport d’enquête a pleine valeur probante. Lorsque le rapport constitue une base fiable de décision dans le sens précité, le juge n’intervient pas dans l’appréciation de l’auteur du rapport sauf lorsqu’il existe des erreurs d’estimation que l’on peut clairement constater ou des indices laissant apparaître une inexactitude dans les résultats de l’enquête (ATF 129 V 67 consid. 2.3.2 non publié au Recueil officiel mais dans VSI 2003 p. 221; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 733/06 du 16 juillet 2007).

Il n'existe pas de principe selon lequel l'évaluation médicale de la capacité de travail l'emporte d'une manière générale sur les résultats de l'enquête ménagère. Une telle enquête a valeur probante et ce n'est qu'à titre exceptionnel, singulièrement lorsque les déclarations de l'assuré ne concordent pas avec les constatations faites sur le plan médical, qu'il y a lieu de faire procéder par un médecin à une nouvelle estimation des empêchements rencontrés dans les activités habituelles (VSI 2004 p. 136 consid. 5.3 et VSI 2001 p. 158 consid. 3c; arrêts du Tribunal fédéral des assurances I 308/04 et I 309/04 du 14 janvier 2005).

b. Il existe dans l'assurance-invalidité - ainsi que dans les autres assurances sociales - un principe général selon lequel l'assuré qui demande des prestations doit d'abord entreprendre tout ce que l'on peut raisonnablement attendre de lui pour atténuer les conséquences de son invalidité (cf. ATF 138 I 205 consid. 3.2). Pour satisfaire à l'obligation de réduire le dommage (voir ATF 129 V 463 consid. 4.2 et 123 V 233 consid. 3c ainsi que les références), une personne qui s'occupe du ménage doit faire ce que l'on peut raisonnablement attendre d'elle afin d'améliorer sa capacité de travail et réduire les effets de l'atteinte à la santé; elle doit en particulier se procurer, dans les limites de ses moyens, l'équipement ou les appareils ménagers appropriés. Si l'atteinte à la santé a pour résultat que certains travaux ne peuvent être accomplis qu'avec peine et nécessitent beaucoup plus de temps, on doit néanmoins attendre de la personne assurée qu'elle répartisse mieux son travail (soit en aménageant des pauses, soit en repoussant les travaux peu urgents) et qu'elle recoure, dans une mesure habituelle, à l'aide des membres de sa famille. La surcharge de travail n'est pas déterminante pour le calcul de l'invalidité lorsque la personne assurée ne peut, dans le cadre d'un horaire normal, accomplir tous les travaux du ménage et par conséquent qu'elle a besoin, dans une mesure importante, de l'aide d'une personne extérieure qu'elle doit rémunérer à ce titre (RCC 1984 p. 143 consid. 5).

7.        Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

b. Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. À cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1 ; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3 ; ATF 125 V 351 consid. 3).

Sans remettre en cause le principe de la libre appréciation des preuves, le Tribunal fédéral des assurances a posé des lignes directrices en ce qui concerne la manière d'apprécier certains types d'expertises ou de rapports médicaux. Ainsi, lorsque l'assuré présente ses propres moyens de preuve pour mettre en doute la fiabilité et la validité des constatations du médecin de l'assurance, il s'agit souvent de rapports émanant du médecin traitant ou d'un autre médecin mandaté par lui. Ces avis n'ont pas valeur d'expertise et, d'expérience, en raison de la relation de confiance liant le patient à son médecin, celui-ci va plutôt pencher, en cas de doute, en faveur de son patient. Ces constats ne libèrent cependant pas le tribunal de procéder à une appréciation complète des preuves et de prendre en considération les rapports produits par l'assuré, afin de voir s'ils sont de nature à éveiller des doutes sur la fiabilité et la validité des constatations du médecin de l'assurance (arrêt 8C_408/2014 et 8C_429/2014 du 23 mars 2015 consid. 4.2).

8.        Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3, ATF 126 V 353 consid. 5b, ATF 125 V 193 consid. 2). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

9.        Est litigieuse en l’espèce la question des taux d’empêchement retenus par l’infirmière de l’OAI s’agissant de la conduite du ménage, de l’entretien du logement, des emplettes et courses diverses et de la lessive et de l’entretien des vêtements.

a. A titre liminaire, la chambre de céans relève que dans son rapport du 8 novembre 2016, le Dr C______ n’a pas retenu d’atteinte psychique invalidante. Le 1er avril 2017, il a évoqué un état dépressif anxieux en lien avec la difficulté de réinsertion dans un nouveau milieu socio-professionnel et a considéré que la recourante n’était pas en mesure de postuler pour un nouvel emploi. Lors d’un entretien téléphonique, le 11 avril 2017, le Dr C______ aurait informé le SMR que la recourante était en mesure d’exercer une activité adaptée aux limitations fonctionnelles mais qu’il fallait éviter les situations de stress. La recourante présentait certes certains symptômes psychiatriques mais cela ne l’empêchait pas de travailler. Enfin, le 3 octobre 2017, le médecin précité a évoqué une aggravation de l’état de santé psychique de la recourante suite à des difficultés à dormir en raison du tapage nocturne de sa voisine.

Force est ainsi de constater que les rapports produits par le Dr C______ ne comportent aucune description des limitations fonctionnelles sur le plan psychique. Bien plus, à plusieurs reprises, ce médecin a confirmé la capacité de la recourante à exercer une activité adaptée. Dans de telles conditions, c’est à juste titre que l’intimé n’a pas pris en considération l’atteinte psychique.

Seule l’atteinte à la santé physique, à savoir la nécrose de la tête fémorale, constitue dès lors une atteinte invalidante. Elle entraîne, selon le SMR, les limitations fonctionnelles suivantes : pas de position debout prolongée, pas de marche en terrain irrégulier, pas de montée ni descente d’escalier et pas de port de charge.

b. Lorsqu’il s'agit d'évaluer la capacité d'un assuré à accomplir des tâches ménagères, un empêchement ne peut être pris en compte que s’il ne parvient plus à exécuter la tâche en question et si cette tâche doit être confiée à des tiers rétribués ou à des proches qui enregistrent de ce fait une perte de gain ou pour lesquels cela représente une charge disproportionnée (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 518/2004 du 25 novembre 2005, consid. 4).

Il convient donc d’examiner pour chaque rubrique contestée si la recourante est encore en mesure d’exécuter la tâche en question et, dans la négative, si une tierce personne rétribuée ou un de ses proches s’en occupe.

b/aa. Comme indiqué précédemment, la recourante conteste tout d’abord l’absence d’empêchement dans la conduite du ménage, ce par quoi il faut entendre la planification, l’organisation, la répartition du travail et le contrôle.

Si la recourante évoque certes le fait qu’elle a beaucoup de mal à s’organiser, elle n’explique pas en quoi il lui serait impossible d’effectuer certaines des tâches relevant de la conduite du ménage. Bien plus, elle semble confondre conduite du ménage et ménage au sens d’entretien du logement. En tout état, il ne ressort pas de l’enquête, ni au demeurant des écritures de la recourante, que certains aspects de la conduite du ménage aient dû être confiés à son amie.

Dans de telles circonstances, il n’y a pas de raison de s’écarter de l’estimation de l’enquêtrice.

b/bb. La recourante conteste également l’empêchement de 40% retenu par l’enquêtrice s’agissant de l’entretien du logement, lequel comprend les actes suivants : épousseter, passer l’aspirateur, entretenir les sols, nettoyer les vitres, faire les lits.

Il ressort de l’enquête ménagère que la recourante est en mesure de faire ce qui est à sa hauteur mais non ce qui demande de la force, le fait de se baisser ou de monter sur un tabouret. C’est ainsi son amie qui vient une fois par semaine passer l’aspirateur, nettoyer les sols, faire les sanitaires, faire les vitres et épousseter en hauteur. Vu les limitations fonctionnelles retenues par le SMR, il paraît douteux que la recourante puisse changer les draps du lit. Tout au plus peut-on considérer qu’elle est en mesure de faire son lit tous les matins.

En résumé, la recourante peut épousseter ce qui est à sa hauteur et vraisemblablement faire son lit tous les matins. Toutes les autres activités ont dû être déléguées à son amie. Par ailleurs, il ne ressort pas de l’enquête ménagère – ni du reste des écritures de l’OAI – que la recourante aurait pu effectuer lesdites activités en les répartissant sur la semaine.

Dans de telles circonstances, le taux de 40% admis par l’intimé dans la rubrique « entretien du logement » (pondérée à 20%) ne paraît pas adapté à l’importance de l’aide apportée par l’amie de la recourante de sorte que c’est un taux de 60% qui aurait dû être retenu (voir ATAS/658/2018 du 10 juillet 2018 pour un cas similaire).

b/cc. La recourante conteste également le taux de 40% retenu par l’enquêtrice en ce qui concerne les emplettes et courses diverses.

Force est toutefois de constater que l’enquêtrice a pris en considération l’aide apportée par l’amie de la recourante, étant précisé qu’avant l’atteinte déjà, la recourante avait besoin d’aide pour la rédaction ou la compréhension d’un courrier en français. Par ailleurs, la recourante admet elle-même qu’elle est en mesure d’aller seule, occasionnellement, acheter une ou deux denrées dans le quartier. En d’autres termes, elle peut effectuer les courses légères.

Partant, il n’y a pas lieu de revenir sur le taux de 40% retenu par l’enquêtrice.

b/dd. Enfin, la recourante conteste l’empêchement de 30% retenu pour la rubrique « lessive et entretien des vêtements » (laver, suspendre, ramasser, repasser, raccommoder et nettoyer les chaussures).

Selon l’enquête ménagère, une fois par semaine, l’amie de la recourante et cette dernière descendent à la buanderie avec un caddie rempli de linge et mettent ensemble les habits à sécher. Puis elles remontent les vêtements pour les plier directement, sans les repasser. L’assurée peut plier et ranger les choses légères, son amie faisant les effets les plus lourds, comme les draps et les linges.

Certes, la recourante n’est pas en mesure de faire seule la lessive et de plier son linge. Cela étant, elle est capable d’effectuer, avec l’aide de son amie, plusieurs aspects de cette rubrique. On ne peut donc retenir un empêchement total d’effectuer ces tâches. Cela étant, au vu de l’importance de l’aide apportée par l’amie de la recourante, le taux de 30% ne paraît pas adapté, de sorte qu’il conviendrait de retenir un empêchement de 50%.

c. Eu égard aux considérations qui précèdent, un empêchement total de 44.75% (arrondi à 45%) doit être retenue dans la sphère ménagère soit :

Conduite du ménage :

0%

Alimentation :

25%

Entretien du logement :

60%

Emplettes et courses diverses :

40%

Lessive et entretien des vêtements :

50%

Soins aux enfants ou aux autres membres de la famille :

0%

Divers :

100%

Le pourcentage de 45% ouvre droit à un quart de rente d’invalidité.

10.    Reste à déterminer la date à partir de laquelle la recourante percevra le quart de rente d’invalidité.

a. En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI, le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations. La rente est versée dès le début du mois au cours duquel le droit prend naissance (art. 29 al. 3 LAI).

Ces principes s’appliquent, par analogie, lorsque l’assuré n’exerce pas d’activité lucrative, étant précisé que dans ce contexte l'incapacité de travail correspond à la diminution - attestée médicalement - du rendement fonctionnel dans l'accomplissement des travaux habituels (MEYER/REICHMUTH, Bundesgesetz über die Invalidenversicherung (IVG), 2014, n° 27 ad Art. 28 et ATF 130 V 97).

b. En l’espèce, selon le Dr D______, l’atteinte incapacitante ayant conduit au dépôt de la demande de prestations, le 31 août 2016, existe depuis 2015. Par conséquent, en 2016, la recourante présentait, depuis un an, une diminution du rendement fonctionnel dans l’accomplissement de ses travaux habituels au sens de l’art. 28 al. 1 let. b LAI par analogie et une invalidité de 45%.

Dans la mesure où la recourante a déposé sa demande de prestations le 31 août 2016, son droit au quart de rente naît le 1er février 2017 conformément aux art. 29 al. 1 et 3 LAI.

11.    Au vu de ce qui précède, le recours sera admis et la décision du 6 juin 2017 sera annulée. La recourante sera mise au bénéfice d’un quart de rente d’invalidité à compter du 1er février 2017.

Vu l’issue du litige, une indemnité de CHF 1'000.- sera accordée à la recourante à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]), à charge de l’intimé.

Etant donné que, depuis le 1er juillet 2006, la procédure n'est plus gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 200.-.


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet et annule la décision du 6 juin 2017.

3.        Met la recourante au bénéfice d’un quart de rente d’invalidité à compter du 1er février 2017.

4.        Condamne l’intimé à verser à la recourante une indemnité de CHF 1'000.- à titre de dépens.

5.        Met un émolument de CHF 200.- à la charge de l’intimé.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Florence SCHMUTZ

 

Le président

 

 

 

 

Mario-Dominique TORELLO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le