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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4365/2009

ATAS/338/2010 (3) du 25.03.2010 ( PC ) , ADMIS

Descripteurs : ; PC ; DÉPENSE ; LOYER ; DEVOIR D'ASSISTANCE(FAMILLE)
Normes : LPC 3 al.1 let b; OPC-AVS/AI 16c; CC 278 al.2
Résumé : La bénéficiaire de prestations complémentaires partage avec son mari un appartement de 3 pièces. Y sont également logés les deux enfants mineurs du mari (qui en a la garde suite à un jugement de divorce, la mère, sans ressource, vivant par ailleurs au Kosovo) et un enfant majeur de 20 ans qui suit des cours de français. Il convient en l'occurrence de reconnaître de la part de la belle-mère un devoir moral d'assistance envers les enfants mineurs de son mari, enfants de qui l'on ne peut par ailleurs exiger qu'ils subviennent à leurs propres besoins. Dès lors, un loyer proportionnel ne saurait être retenu pour ces derniers, le logement occupé par cette famille ne comportant de surcroît pas de pièce pour les enfants. Cette solution se justifie d'autant plus que le couple bénéficierait de prestations complémentaires plus élevées s'il n'avait pas d'enfants à charge, aucune imputation de loyer en fonction du nombre d'habitants ne pouvant dans ce cas être effectuée. Toutefois il en va différemment de l'enfant majeur qui perçoit des prestations d'assistance de la part de l'Hospice général, comportant probablement une part pour le loyer. Le dossier est renvoyé au SPC pour instruction de ce dernier point.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4365/2009 ATAS/338/2010

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 2

du 25 mars 2010

 

En la cause

Madame H__________, domiciliée à GENEVE, comparant avec élection de domicile en l'Étude de Maître Sarah BRAUNSCHMIDT

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLEMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENEVE

intimé

 


EN FAIT

Madame H__________ (ci-après l'assurée ou la recourante) est au bénéfice d'une rente d'invalidité de l'AI. Le 27 février 2009, elle a déposé une demande de prestations complémentaires auprès du SERVICE DES PRESTATIONS COMPLEMENTAIRES (ci-après l'intimée ou le SPC).

La recourante est mariée avec Monsieur H__________ depuis 2006. Ce dernier est le père de trois enfants, HA__________, né en 1989, HB__________, né en 1993 et HC__________, né le 10 janvier 1997, issus d'une précédente union, dissoute par un jugement de divorce du 27 novembre 2002, qui a attribué au père la garde des trois enfants.

La recourante a été sous-locataire de 2004 à 2007 d'un appartement de trois pièces sis à la rue Prévost Martin à Genève pour un loyer annuel de 13'200 fr tout compris. Elle est devenue locataire principale de ce logement depuis le 15 décembre 2007, conjointement avec son époux. Le loyer annuel a été fixé du 15 décembre 2007 au 31 décembre 2008 à 13'200 fr plus 1'668 fr de charges (1'380 fr pour le chauffage et 288 fr pour le téléréseau) et depuis le 1er décembre 2008 à 13'200 fr plus 1'848 fr de charges (1'560 fr pour le chauffage et 288 pour le téléréseau). Ils habitent ce logement avec les deux enfants les plus jeunes, soit HB__________ et HC__________.

Par décision du 28 mai 2009, le SPC a fixé le droit aux prestations complémentaires de l'assurée du 1er décembre 2006 au 31 mai 2009. Le plan de calcul des prestations pour les diverses périodes considérées tient compte:

d'un loyer annuel de 10'800 fr plus 480 fr de charges du 1er décembre 2006 au 30 novembre 2007;

d'un loyer net de 13'488 depuis le 1er décembre 2007;

d'un loyer de 13'488 fr plus 1'380 fr de charges depuis le 1er octobre 2008* d'un loyer de 7’434 fr depuis le 1er octobre 2008;

* Rectification d’une erreur matérielle le 26.04.2010/MSS/WMH

d'un loyer net de 7'434 fr depuis le 1er mai 2009.

Par décision du 28 mai 2009 également, le SPC a fixé le droit aux prestations complémentaires de l'assurée dès le 1er juin 2009, en tenant compte d'un loyer net de 7'434 fr.

Par fax du 25 juin 2009, pro infirmis, agissant pour le compte de l'assurée a formé opposition contre la décision du 28 mai 2009, en tant qu'elle retenait un loyer proportionnel pour les enfants mineurs à charge. Le SPC a répondu le 30 juin 2009 qu'un nouvel examen du cas serait effectué. Par fax du 16 juillet 2009, pro infirmis a communiqué au SPC la décision de l'Hospice général accordant une aide financière mensuelle de 360 fr "en faveur du groupe familial". Malgré cette aide, la partie du loyer non prise en compte par le SPC n'était pas couverte. Ainsi l'opposition, qui ne portait que sur le loyer proportionnel, était maintenue.

Par décision sur opposition du 5 novembre 2009, le SPC a maintenu sa position et rejeté l'opposition. La motivation de la décision sera reprise plus bas en tant que de besoin.

Par décisions du 27 novembre 2009, le SPC a fixé le droit aux prestations de l'assurée, du 1er juillet au 31 octobre 2009, du 1er au 30 novembre 2009 et depuis le 1er décembre 2009, afin de tenir compte des modifications de revenu intervenues. Les décisions tiennent compte d'un loyer annuel de 7'434 fr.

Par acte du 4 décembre 2009, l'assurée forme recours contre la décision sur opposition du 5 novembre 2009 et conclut à ce que celle-ci soit annulée, en tant qu'elle ne prend pas en compte l'intégralité du loyer acquitté à concurrence des barèmes légaux. C'est en raison de l'obligation d'entretien du père envers ses deux enfants, à laquelle l'assurée doit contribuer selon l'article 278 de code civil et selon un devoir moral, que l'entier du loyer doit être retenu.

Par réponse du 22 janvier 2010, le SPC conclut au rejet du recours, et fait valoir que le devoir d'assistance de l'article 278 CC n'est que subsidiaire et ne trouve application que lorsque la personne intéressée a les ressources suffisantes pour contribuer à l'entretien des enfants du conjoint, ce qui n'est pas le cas de l'assurée.

Lors de l'audience de comparution personnelle des parties du 2 mars 2010, la recourante a indiqué que les deux fils de son mari, soit HB__________ et HC__________, vivent avec eux depuis septembre 2008. Avant cela, ils vivaient avec leur grand-mère paternelle au Kosovo, âgée de 82 ans. HA__________, soit le fils aîné, les a rejoints en septembre 2009. Il est majeur et assisté par l'Hospice général. Il ne travaille pas et va commencer un cours de français chez CARITAS. Lorsqu'il aura trouvé un travail, il quittera la maison. Les trois garçons dorment dans le salon. Les deux petits sont encore à l'école. La mère des enfants est restée au Kosovo, elle ne travaille pas et ne contribue pas à leur entretien. Elle s'est remariée.

Le SPC a confirmé que si l'appartement était habité uniquement par le couple, il prendrait en compte l'intégralité du loyer dans les limites du maximum pour couples. Le fait qu'il s'agisse d'un trois pièces, cuisine incluse, n'a pas d'incidence sur l'appréciation de la situation, le loyer étant réparti également entre chaque occupant de l'appartement.

La cause a été gardée à juger à l'issue de l'audience.

 

 

EN DROIT

La Loi sur l'organisation judiciaire, du 22 novembre 1941 (LOJ ; RS E 2 05) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales statuant conformément à l'art. 56V al. 1 let. a ch. 3 LOJ en instance unique, sur les contestations prévues à l’art. 56 de la Loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA ; RS 830.1) qui sont relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006.

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

Formé dans les délai et forme prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 43 LPCC).

Est litigieuse la question de la prise en compte de l'intégralité du loyer du logement familial ou d'une part proportionnelle aux seules personnes bénéficiaires de prestations complémentaires occupant ce logement.

a) Pour les personnes qui ne vivent pas en permanence ou pour une longue période dans un home ou dans un hôpital (personnes vivant à domicile), les dépenses reconnues sont notamment le loyer d'un appartement et les frais accessoires y relatifs (art. 3b al. 1 let. b LPC).

b) D'après l'art. 16c OPC-AVS/AI, lorsque des appartements ou des maisons familiales sont aussi occupés par des personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires, le loyer doit être réparti entre toutes les personnes. Les parts de loyer des personnes non comprises dans le calcul des prestations complémentaires ne sont pas prises en compte lors du calcul de la prestation complémentaire annuelle (al. 1). En principe, le montant du loyer est réparti à parts égales entre toutes les personnes (al. 2). Par loyer au sens de cette disposition, il faut entendre le loyer brut, comprenant l'acompte mensuel pour les frais accessoires (art. 3b al. 1 let. b LPC).

c) Selon la jurisprudence, le critère déterminant est le logement commun, indépendamment du fait de savoir s'il y a bail commun ou si l'un des occupants paie seul le loyer (ATF 127 V 17 consid. 6b; ATFA non publié du 13 mars 2002, P 53/01, consid. 3a/aa). Aussi, lorsque plusieurs personnes occupent le même foyer ou font ménage commun, il y a lieu à partage à parts égales du loyer qui est pris en compte dans le calcul des prestations complémentaires (ATFA non publié du 16 août 2005, P 66/04, consid. 2). Toutefois, l’art. 16c OPC ne saurait impliquer dans tous les cas un partage systématique du loyer en cas de ménage commun. En effet, la disposition incriminée ne prévoit la répartition du loyer que si les personnes faisant ménage commun ne sont pas comprises dans le calcul des PC. Ainsi, un partage du loyer n’entre pas en ligne de compte à l’endroit des époux, des personnes qui ont des enfants ayant ou donnant droit à une rente et des orphelins faisant ménage commun (cf. art. 3a al. 4 LPC). De plus, la jurisprudence rendue sous l'ancien droit en matière de répartition du loyer n’a pas perdu toute sa signification (cf. Pratique VSI 5/2001 p. 236). D'après cette jurisprudence (ATF 105 V 271 consid. 2), la règle générale de la répartition du montant du loyer à parts égales mérite d'être confirmée et des dérogations ne doivent être admises qu'avec prudence, si l'on veut éviter le risque de graves abus. L'exemple de la personne qui occupe, à elle seule, la plus grande partie de l'appartement ne saurait néanmoins être le seul cas spécial autorisant une exception. Il peut ainsi se présenter des situations où un intéressé a des motifs valables de supporter à lui seul le loyer, bien qu'il partage l'appartement avec un tiers, et de ne demander de ce tiers aucune participation; ces motifs peuvent être d'ordre juridique (p. ex. une obligation d'entretien), mais aussi d'ordre moral (p. ex. la contrepartie de services rendus gratuitement).

Le Tribunal Fédéral a admis un devoir moral dans le cas d'un infirmier en psychiatrie qui partage le logement d'une bénéficiaire de prestations complémentaires, alors que le maintien à domicile de cette personne serait impossible sans la présence de l'infirmier et que la bénéficiaire loue un petit logement à loyer modique (ATF 105 V 271).

a) Les père et mère doivent pourvoir à l'entretien de l'enfant. L'entretien est assuré par les soins et l'éducation ou lorsque l'enfant n'est pas sous la garde de ses père et mère, par des prestations pécuniaires (art. 276 CC).

b) Selon l'art. 278 al. 2 CC, chaque époux est tenu d'assister son conjoint de façon appropriée dans l'accomplissement de son obligation d'entretien envers les enfants nés avant le mariage, disposition qui concrétise le devoir d'assistance entre époux prévu à l'art. 159 al. 3 CC (Hegnauer/Meier, Droit suisse de la filiation, n° 20.08 p. 124; Hausheer/Spycher/Kocher/Brunner, Handbuch des Unterhaltsrechts, éd. 1997, n° 06.31, p. 327). L'obligation d'entretien de la famille découle de l'art. 163 CC. La famille, au sens de cette disposition, comprend les personnes à l'égard desquelles un époux a un devoir d'entretien, notamment les enfants d'une précédente union (Deschenaux/Steinauer, Le nouveau droit matrimonial, éd. 1987, p. 54), à condition toutefois que ces derniers vivent dans la communauté domestique (Forni, Le norme patrimoniali degli effetti del matrimonio in generale, in Studi sul nuovo diritto matrimoniale e successorio, Rep. 120/1987 p. 12). Dans cette hypothèse, leur entretien entre dans l'entretien général de la famille auquel les époux doivent pourvoir en commun en vertu de l'art. 163 al. 1 CC (arrêt 5P.182/2000 du 24 octobre 2000; Hausheer/Reusser/Geiser, op. cit., n. 17 ad art. 163 CC; Hegnauer/Meier, op. cit., n° 20.09, p. 124). Le Tribunal fédéral a précisé que, en vertu de son devoir d'assistance, un conjoint est tenu d'aider l'autre dans l'accomplissement de son obligation d'entretien envers son ex-époux (art. 159 al. 3 CC; ATF 79 II 140/141; Hausheer/Reusser/Geiser, Kommentar zum Eherecht, n. 41 ad art. 159 CC) ou ses enfants nés avent le mariage (art. 278 al. 2 CC; ATF 111 III 13 consid. 6e p. 20; 108 II 272 consid. 4b p. 277). Ce devoir ne saurait toutefois être étendu au point de reporter sur cet époux le poids des obligations alimentaires de son conjoint, qu'il financerait alors de ses propres deniers (cf. Bühler/Spühler, op. cit. , n. 74 ad art. 153 aCC; Kehl/Kehl, Die Abänderung und Ergänzung von Scheidungs- und Trennungsurteilen, vol. I, p. 30 no 213). Dans les limites des ressources dont il dispose ou qu'il pourrait obtenir en travaillant, chacun des époux doit aider son conjoint à assumer l'entretien d'un enfant né hors mariage (ATF III 68; JT 2001 I 562).

Toutefois, ce devoir d'assistance des beaux-parents ne se confond pas avec l'obligation d'entretien et, par rapport à celle-ci, il joue un rôle subsidiaire (ATF 120 II 285; JT 1996 I 213; Hausheer/Reusser/Geiser, Kommentar zum Eherecht, n. 29 ad art. 159 CC; Grossen, Le statut patrimonial de base, les effets généraux du mariage, in Le nouveau droit du mariage, p. 12). Ainsi, le nouveau conjoint ne doit l'assistance que dans la mesure où il dispose encore de moyens après la couverture de son entretien et de celui de ses propres enfants (arrêt 5C.82/2004 du 14 juillet 2004 consid. 3.2.1, in: FamPra.ch 2005 p. 172). Si l'enfant vit auprès de sa mère et son beau-père, il appartient au père biologique de supporter les coûts financiers de l'entretien de l'enfant; l'assistance du beau-père se résume à compenser une éventuelle différence entre la contribution d'entretien insuffisante du père biologique et les besoins de l'enfant et à supporter le risque lié à l'encaissement des contributions d'entretien. Le beau-père n'est en effet tenu d'assister son conjoint que "de façon appropriée". Il faut qu'on puisse raisonnablement attendre de lui qu'il contribue à l'entretien de l'enfant né avant le mariage, ce qui signifie notamment qu'il faut mettre en balance les moyens dont il dispose avec ceux de l'autre parent (arrêt 5C.82.2004du 14 juillet 2004, en la cause X. contre Y.).

Les beaux-parents ont un devoir indirect d'assistance qui dans certains cas exceptionnels peut aussi avoir pour conséquence que le conjoint du débiteur de l'entretien doit prendre une activité lucrative ou augmenter celle qu'il exerce déjà (Hausheer/Reusser/Geiser, Commentaire bernois, n. 42 et Bräm/Hasenböhler, Commentaire zurichois, n. 143, chacun ad art. 159 CC; cf. aussi Breitschmid, Commentaire bâlois, n. 5 ad art. 278 CC; critique, mais d'accord au moins sur le résultat, Hegnauer, Commentaire bernois, n. 59 s. et 66 ad art. 278 CC). Le TF s'est rallié en principe à cette conception juridique, et cela indépendamment du fait que l'enfant né hors mariage vit ou non dans la famille de son géniteur (ATF 127 III 68; ATF 126 III 353, c. 4b non publié; arrêt du TF du 12 novembre 1998, c. 3c in Rep. 1999 p. 60; arrêt non publié du 9 août 1995 en la cause W. c. J., c. 4b, 5 C.127/1995).

6. a) Dans le cadre de l'examen des prestations complémentaires, le Tribunal Fédéral a écarté l'obligation légale de contribution après la majorité d'un enfant, celle-ci étant limitée par les conditions économiques et les ressources des parents (Philippe Meier, Martin Stettler, Droit civil, vol. VI/2, Les effets de la filiation, p. 319 et ss), et un tel entretien n'étant exigible, selon la jurisprudence du Tribunal fédéral, que dans la mesure où, après prise en compte de la contribution d'entretien à l'enfant majeur, le débiteur dispose encore d'un revenu dépassant d'environ 20% le minimum vital au sens large (Pra 2000 n° 123 p. 719). Dans un second temps, il n'a pas reconnu l'existence d'une obligation d'ordre moral de cet assuré envers sa fille, âgée de plus de 25 ans, ne bénéficiant plus de rente pour enfant, mais encore en formation. Il précise que "pour compréhensible et louable que soit l'attitude du prénommé de vouloir loger sa fille majeure encore en formation, on n'est pas en présence d'une situation assimilable à celle qui a donné lieu à l'arrêt 105 V 271, car les dispositions civiles régissant l'obligation d'entretien des parents (lesquelles visent en priorité l'intérêt de l'enfant), n'imposent même pas à un père se trouvant dans les circonstances économiques du recourant d'assumer les besoins courants et les frais engendrés par la formation de son enfant majeur. Enfin, on ne saurait y voir, comme le laisse entendre le recourant, une entorse à l'égalité des chances. Il existe en effet des aides spécifiques de l'Etat destinés à permettre à des enfants majeurs d'entreprendre et de mener à terme une formation supérieure dans les cas où ni le père ni la mère ne peuvent assumer cette charge" (Arrêt P 21/02 du 8 janvier 2003).

On comprend de cet arrêt qu'en raison de ses ressources limitées, le père d'un enfant majeur n'est pas tenu à une obligation morale d'entretien, ce d'autant que l'étudiant peut bénéficier d'une bourse d'études, de sorte que dans ce cas, l'obligation morale ne peut pas suppléer la fin d'une obligation d'entretien légale.

b) Le Tribunal Fédéral a confirmé que la vie commune qui se fonde sur une obligation morale ou légale peut justifier une répartition différente, voire la renonciation à la répartition du loyer (VSI 2001 pag. 237 consid. 2b; sentenza in re W. del 19 gennaio 2001 consid. 2b, P 26/00, ATF 105 V 273 consid. 2). L'exception doit être admise sans autre lorsque la vie commune est liée à l'obligation légale fondée sur les article 276 et 277 CC. A défaut, cela impliquerait de procéder à la répartition lorsque le bénéficiaire vit avec ses propres enfants qui ne sont pas inclus dans le calcul des prestations complémentaires. Cette solution serait incompatible avec le but poursuivi par la LPC consistant en la couverture adéquate des besoins essentiels en considération des circonstances concrètes, personnelles et économiques.Une autre solution serait du reste inadmissible en tenant compte du principe constitutionnel de l'égalité de traitement. En fait, les assurés avec des enfants non inclus dans les calculs de la rente seraient désavantagés par rapport à ceux sans enfants, et à ceux avec des enfants avec droit à la rente (VSI 2001 pag. 237 consid. 2b; arrêt P 76/01 du 9 janvier 2003). Dans cette affaire, il a admis une répartition proportionnelle du loyer, car le fils des bénéficiaires n'entrait plus dans le calcul PC, car il était majeur, sans suivre une formation. Le cas est donc similaire à celui de l'étudiante majeure.

7. En l'espèce, le principe du devoir d'assistance de l'assurée en faveur de son conjoint pour l'entretien des deux enfants mineurs de ce dernier, qui font ménage commun avec leur père et l'assurée, ne fait pas de doute. Il est établi que la mère des enfants, restée au Kosovo et sans revenu propre, ne peut pas du tout contribuer à leur entretien, de sorte que la condition de subsidiarité de l'assistance du conjoint à l'entretien des enfants nés hors mariage est réalisée. L'assurée peut être contrainte de contribuer à l'entretien des enfants de son mari seulement si elle dispose de moyens après couverture de son propre entretien, ce qui n'est pas le cas de la recourante, de sorte que l'on ne peut pas retenir, dans le cas d'espèce, une obligation légale d'assistance au sens de l'article 278 al. 2 CCS ou d'entretien, qui justifierait de renoncer à la répartition du loyer.

Cela étant, il faut admettre l'existence d'une obligation morale. En effet, à la différence du cas de l'étudiante majeure, l'obligation morale ne vient pas suppléer une obligation légale éteinte, mais existe en l'absence de toute obligation légale. Par ailleurs, les enfants ne sont pas sortis du cercle des bénéficiaires PC, car ils n'en ont jamais fait partie. De plus, à la différence du cas de l'étudiante majeure, il n'y a aucune autre aide spécifique de l'Etat pour l'entretien des deux enfants mineurs que celles déjà perçues. Ainsi, aucune personne ou organisme n'est tenu de payer la part de loyer proportionnelle mise à leur charge, étant précisé que l'on ne peut pas exiger des enfants mineurs qu'ils travaillent, en raison de leur jeune âge et de la scolarité suivie. Conformément à l'arrêt du Tribunal fédéral précité, une autre solution reviendrait à créer une inégalité de traitement choquante entre des familles avec ou sans enfants mineurs, entrant ou non dans le calcul des prestations complémentaires et serait incompatible avec le but poursuivi par la LPC consistant en la couverture adéquate des besoins essentiels en considération des circonstances concrètes, personnelles et économiques. Ainsi, la vie commune se fonde sur une obligation morale de la recourante envers les enfants de son conjoint.

La solution se justifie d'autant plus que le logement comprend un salon, une chambre à coucher et une cuisine, de sorte qu'en l'absence des enfants, le logement ne pourrait pas être considéré comme exagérément vaste ou onéreux pour un couple, les trois enfants dormant dans le salon. Ainsi, en l'absence des enfants, le montant des prestations complémentaires serait plus élevé, car la totalité du loyer serait pris en compte. Cette solution consacre une inégalité de traitement entre assurés et justifie, selon la jurisprudence du Tribunal Fédéral, de faire une exception au principe de la répartition du loyer.

Sur la base des mêmes principes, la recourante a aussi une obligation morale en faveur du fils majeur, qui a rejoint la famille en septembre 2009. Toutefois, sa situation diffère en ce sens qu'il est majeur et, de ce fait, bénéficie de l'assistance de l'Hospice Général. De plus, son statut et l'obligation légale d'entretien de son propre père sont incertains, dès lors qu'il prend des cours de français en vue de trouver du travail, sans qu'il soit possible de déterminer en l'état s'il s'agit d'une formation au sens de l'article 277 al. 2 CCS. Le SPC devra donc instruire la situation de ce fils majeur, dont la présence dans le logement était au demeurant inconnue jusqu'à l'audience du 2 mars 2010.

Ainsi, le recours est admis et la cause est renvoyée au SPC, qui devra rendre une nouvelle décision dès le 1er mai 2009, en tenant compte de la totalité du loyer, soit 15'048 fr par an, réduit à concurrence du maximum légal admis pour un couple, soit 15'000 fr. Dès le 1er octobre 2009, il pourra, le cas échéant, prendre en compte les 4/5ème du loyer seulement, après instruction complémentaire s'agissant de la situation du fils majeur.

La recourante obtenant gain de cause, une indemnité de 1'500 fr lui sera accordée à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA en corrélation avec l’art. 89H al. 3 de la loi du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative).


PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

Conformément à l'art. 56 U al. 2 LOJ

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

L'admet et annule la décision du 28 mai 2009.

Dit que le loyer du logement doit être pris en considération en totalité, à concurrence du maximum légal, dans le calcul des prestations complémentaires du 1er mai 2009 * 1er octobre 2008 au 30 septembre 2009.

* Rectification d’une erreur matérielle le 26.04.2010/MSS/WMH

Renvoie la cause au service des prestations complémentaires pour nouvelles décisions dans le sens des considérants, y compris pour la période postérieure au 1er octobre 2009.

Condamne le service des prestations complémentaires au versement d'une indemnité de procédure de 1'500 fr en faveur de la recourante.

Dit que la procédure est gratuite.

Dit que pour ce qui a trait aux prestations complémentaires fédérales, les parties peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la Loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF ; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

La greffière

 

 

Florence SCHMUTZ

 

La présidente

 

 

Sabina MASCOTTO

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le