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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3759/2013

ATAS/242/2014 du 26.02.2014 ( LAA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3759/2013 ATAS/242/2014

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 26 février 2014

9ème Chambre

 

En la cause

Monsieur H___________, domicilié à CHENE-BOURG, représenté par CARITAS GENEVE

 

 

recourant

 

contre

SUVA CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sis Fluhmattstrasse 1; LUZERN, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître ELSIG Didier

 

 

intimée

 


EN FAIT

1.        Monsieur à H___________, (ci-après : l’assuré ou le recourant), né en 1967, a été victime d’un accident de moto en 1995, lors duquel il a subi une fracture du pilon tibial gauche et une luxation acromio-claviculaire droite.

2.        L’assuré a subi plusieurs opérations et deux séjours dans les cliniques de réhabilitation de la SUVA. Il a continué de se plaindre de douleurs et de limitations fonctionnelles au niveau de la cheville gauche. Il indiquait ne pas pouvoir appuyer la plante du pied gauche et devoir marcher sur la pointe.

3.        Lors de son examen médical du 5 mai 2003, le médecin d’arrondissement de la SUVA, le Dr L___________, spécialiste FMH chirurgie, relevait une très longue évolution après un accident de moto avec fractures, arthrose de la cheville et douleurs nerveuses importantes, opérations itératives et échec d’une première reconversion professionnelle.

4.        La Dresse M___________, spécialiste FMH en médecine interne a diagnostiqué, dans son rapport à la SUVA du 9 novembre 2004, des douleurs mixtes nociceptives et neurogènes du tiers distal du membre inférieur gauche et de la cheville gauche après fracture ouverte en avril 1995, sans signaler d’évolution depuis son rapport de février 2004. Un traitement médicamenteux était en cours. Elle rencontrait le patient une fois par deux mois et un suivi orthopédique était effectué une fois par an. Il s’agissait d’un traitement chronique. En remarque, elle mentionnait qu’il s’agissait d’un cas d’AI. Elle craignait un dommage permanent orthopédique et neurologique.

5.        Dans une expertise du 26 avril 2005, le Dr N___________, spécialiste FMH psychiatre et psychothérapie, a posé le diagnostic de trouble dépressif récurrent (F33.11), trouble mixte de la personnalité (F61.0) et troubles mentaux et du comportement liés à l’utilisation de dérivés de cannabis avec dépendance et utilisation continue (F12.25). En réponse aux questions de la SUVA, l’expert précisait qu’il n’y avait aucune amélioration notable à attendre même avec un traitement psychiatrique. Au regard des seuls troubles psychiques, M. H___________ n’avait plus aucune capacité de travail, son rendement était nul dans toutes les activités lucratives habituelles. Le spécialiste précisait que les perturbations sévères, ayant valeur de maladie, de sa personnalité et de ses comportements, amènent une incapacité d’adaptation et des répercussions sociales persistantes et de plus en plus invalidantes. Lors de l’expertise, le Dr N___________ a relevé que les plaintes de l’assuré étaient tant psychiques que physiques, avec des problèmes à la cheville.

6.        Par décision du 26 janvier 2006, l’assuré a été mis au bénéfice d’une rente complète d’invalidité de la SUVA depuis le 1er octobre 2005.

Il a également perçu une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 50% selon une décision de la SUVA du 26 janvier 2006. Selon le dossier de la SUVA, la moitié était liée aux douleurs chroniques et aux atteintes à l’appareil locomoteur, l’autre étant due aux troubles psychiques.

7.        Le 1er juin 2012, M. H___________ a fait l’objet d’une dénonciation, selon laquelle le domicile de l’assuré à Chêne-Bourg ne correspondrait pas à son adresse effective laquelle se situerait à Sainte-Croix. Il y effectuerait des travaux de jardinage et d’élagage contre rémunération, perçue sans être déclarée officiellement. La dénonciation était signée et pouvait être utilisée tant sur le plan interne qu’externe si nécessaire. Le dénonciateur laissait à la SUVA le soin de vérifier le bien-fondé des allégations et d’examiner si les activités fournies étaient compatibles avec l’invalidité de l’assuré.

8.        Le 14 septembre 2012, la SUVA a donné mandat à un enquêteur de surveiller l’assuré.

9.        L’enquêteur a rendu un premier rapport le 15 octobre 2012. L’observation avait porté sur la période des mercredi 26 septembre au vendredi 28 septembre 2012 puis du jeudi 4 octobre 2012. L’enquêteur a indiqué que l’assuré a notamment été vu en train de marcher, conduire ainsi que monter et descendre de son véhicule sans paraître gêné dans ses mouvements et sa boiterie. Une remorque, immatriculée au nom de l’assuré, était régulièrement accrochée à la jeep. La boîte aux lettres du domicile genevois était au nom d’un tiers. Plusieurs photographies étaient jointes, dont trois de l’assuré. Sur deux d’entre elles, celui-ci était en mouvement de marche, sans particularité apparente.

10.    Selon un rapport du 31 mai 2013, l’observation a porté sur la période du mardi 7 mai 2013 (de 6h59 à 12h48) , du mardi 14 mai 2013 (de 6h57 à 12h17), du lundi 27 mai 2013 (de 6h59 à 16h), du mercredi 29 mai 2013 (de 7h11 à 11h35), du jeudi 30 mai 2013 (de 7h03 à 10h56). 28 photos étaient jointes au rapport sur lesquelles M. H___________ était en activité. Elles ont été prises lors de chaque observation. Les activités effectuées étaient diverses. Les positions de M. H___________ étaient variées (debout, assis, en train de marcher, en train de se lever, plié en avant, en train de balayer). Sur plusieurs, lors de différentes observations, il portait des objets, dans différentes positions : sur le côté, devant, voire juste derrière son dos, bras tendu. Les objets portés sont divers (balais, brouette, lampe, différents outils de jardin, tronçonneuse, seau). Sur deux photos il semblait pousser ou faire basculer une tondeuse (petit tracteur). Le rapport de l’enquêteur mentionne que celui-ci avait vu M. H___________ se déplaçant au volant d’une jeep, d’une voiture SUZUKI et d’une moto, effectuant des travaux d’entretien de jardin, marchant, se baissant, portant, poussant des charges sans paraître être gêné dans ses mouvements et dans sa boiterie. L’assuré a été vu procédant à des travaux d’entretien de jardin de particuliers à deux adresses, l’une à Sainte-Croix et l’autre à la Côte-aux-Fées. En ces lieux, il avait notamment tondu la pelouse, ramassé l’herbe, effectué des finitions avec une débroussailleuse, balayé et planté des tuteurs. L’assuré fréquentait la déchetterie de Sainte-Croix. Il a été qualifié, par l’enquêteur, de dynamique, organisé, méfiant et attentif à son environnement lors de ses déplacements et sur le lieu de ses activités.

11.    Le 8 août 2013, la SUVA a auditionné M. H___________. Celui-ci a indiqué que son incapacité totale de travail perdurait. Il n’avait jamais repris d’activité professionnelle. Le traitement médical était toujours en cours auprès de la Dresse  [recte :______] M___________.

A l’issue de l’entretien, l’assuré a été informé des résultats de l’enquête et a pu prendre connaissance notamment des photos.

12.    Par courrier du 9 août 2013, l’assuré a fait part de son désarroi. Il ne contestait pas avoir rendu certains services. Il n’avait jamais été rémunéré. Il était important pour lui de pouvoir se rendre utile pour ses proches.

13.    Par courrier du 12 août 2013, la SUVA a informé M. H___________ qu’elle suspendait, avec effet immédiat, l’ensemble des prestations allouées.

14.    Par courrier du 2 septembre 2013, la Dresse M___________ a souhaité avoir des nouvelles de l’état d’avancement du dossier au vu de la suspension de la rente.

15.    Le 28 octobre 2013, la SUVA a prononcé une décision provisionnelle de suspension des prestations. Un éventuel recours contre la décision n’avait pas d’effet suspensif.

L’assurance invalidité a fait de même par décision du 12 novembre 2013.

16.    Par courriel du 29 octobre 2013, la SUVA a sollicité le bureau central des expertises de la SUVA à Lucerne en le priant d’effectuer rapidement une expertise interdisciplinaire de l’assuré, associant la chirurgie orthopédique, la neurologie et la psychiatrie.

17.    Par courriel du 13 novembre 2013, ledit bureau d’expertises a accepté le mandat et confirmé les noms des experts. Le rapport d’expertise devait pouvoir être rendu d’ici à fin janvier ou courant février 2014.

18.    Le 22 novembre 2013, l’assuré a interjeté recours contre la décision du 28 octobre 2013. Il concluait à la restitution de l’effet suspensif dans l’attente d’une décision définitive.

La décision était arbitraire et basée sur des faits non pertinents pour mettre en cause l’incapacité de travail de l’assuré. Les motifs retenus par la SUVA pour supprimer toutes prestations avec effet immédiat étaient erronés. Les travaux de jardinage ou menus travaux de rénovation qu’il avait effectués en trois endroits (chez M. I___________, aujourd’hui décédé, chez la famille J___________ et pour le père de son amie) représentaient moins de dix heures mensuelles. Il s’agissait d’activités mineures qui nécessitaient peu de capacités physiques. La tonte du jardin ou la plantation de quelques fleurs étaient effectuées lentement, à titre gratuit et en adéquation avec son handicap. Les travaux d’entretien étaient anecdotiques et réalisés, pour la majeure partie, par le père de sa compagne. Il s’était effectivement inscrit dans un fitness mais ne s’y était jamais rendu. Il l’avait fait pour se rapprocher de son amie. Son inscription au club de pétanque n’avait été effectuée que dans l’optique de participer à la vie villageoise. Il ne s’agissait nullement de pratiquer une activité sportive. Il ne contestait pas se rendre parfois à la déchetterie. Tous les mouvements qu’il y accomplissait étaient compatibles avec sa santé. Il s’était racheté une moto à sa sortie de l’hôpital, ayant toujours possédé un tel véhicule. Il ne roulait que 600 à 1'000 kilomètres par an. Il avait toujours fait preuve d’un comportement exemplaire avec la SUVA, la tenant régulièrement informée de l’évolution de son état de santé. La remise en cause de son incapacité de travail revenait à considérer que tout déplacement devait lui être impossible. Tel n’était pas le sens de la loi. Les quelques informations et photos rapportées par le dénonciateur ne pouvaient amener à conclure à une amélioration notable de sa capacité de travail. La décision de suspension des prestations était arbitraire. Compte tenu de la situation financière difficile de l’assuré, il sollicitait la restitution de l’effet suspensif.

19.    Par réponse du 9 décembre 2013, la SUVA a conclu à l’irrecevabilité du recours, le recourant ne démontrant aucun préjudice irréparable, condition nécessaire pour l’obtention de mesures provisionnelles. Selon la jurisprudence, la suspension temporaire du versement de la rente ne causait pas un préjudice irréparable.

Subsidiairement le recours devait être rejeté. La dénonciation et les rapports des détectives étaient suffisants pour douter du maintien de l’incapacité de travail de M. H___________. L’intimée était en train d’instruire la cause, notamment par la mise en œuvre d’une expertise multidisciplinaire. Dans l’hypothèse où M. H___________ aurait recouvré une capacité de travail même partielle, il était à craindre que la procédure en restitution des prestations versées à tort ne se révèle infructueuse. L’intérêt de la SUVA à suspendre devait primer celui du recourant à percevoir sa rente.

Sur effet suspensif, la SUVA s'opposait à la restitution de l'effet suspensif.

Le dossier de la SUVA a été transmis à la chambre de céans par courrier du même jour.

20.    Par courrier du 18 décembre 2013, un délai a été imparti au recourant pour prendre connaissance de l’entier du dossier et formuler toutes observations utiles dans un délai au 15 janvier 2014.

21.    Par arrêt incident sur effet suspensif du 19 décembre 2013, la demande de restitution de l’effet suspensif a été rejetée et la suite de la procédure réservée.

22.    Le recourant n’a fourni aucune détermination dans le délai fixé.

23.    Par courrier du 20 janvier 2014, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

 

 

EN DROIT

 

1.        La recevabilité du recours a été admise dans l’arrêt incident du 19 décembre 2013. Il n’y a pas lieu d’y revenir.

2.        L'objet du litige porte sur le bien-fondé de la décision provisionnelle de la SUVA du 3 septembre 2013, par laquelle celle-ci a suspendu le versement de la rente d'invalidité versée au recourant.

3.        La décision de suspension d'une rente, qui suspend à titre provisoire une rente d'invalidité est une mesure provisionnelle (ATF du 3 mars 2010 9C 10616/2009; ATAS/1042/2010 du 14 octobre 2010). Le but d'une telle mesure est de sauvegarder un intérêt protégé par la loi et qui paraît menacé. Si l'autorité ne fait que décider une mesure dont les effets sont transitoirement les mêmes que ceux qui découlent d'une mesure que la loi lui permet de prendre à titre définitif, une base légale expresse n'est pas nécessaire (Pierre MOOR, Droit administratif, vol. II: Les actes administratifs et leur contrôle, 2ème éd., Berne 2002, p. 528, n° 2.2.6.8, p. 272). Lorsqu'il s'agit d'examiner une mesure provisionnelle ou un retrait de l'effet suspensif, il y a lieu de procéder à une pesée des intérêts en présence, qui s'effectue selon les mêmes critères (Ueli KIESER, Das Verwaltungsverfahren in der Sozialversicherung, p. 190 ss n. 406). On peut donc se référer aux principes légaux et jurisprudentiels en matière d'effet suspensif pour examiner la conformité au droit de la décision de suspension de la rente.

Les mesures provisionnelles ne sont légitimes, aux termes de la loi, que si elles s'avèrent nécessaires au maintien de l'état de fait ou à la sauvegarde des intérêts compromis. En revanche, elles ne sauraient, en principe tout au moins, anticiper sur le jugement définitif, ni équivaloir à une condamnation provisoire sur le fond, ni non plus aboutir abusivement à rendre d'emblée illusoire le procès au fond (ATF 119 V 506 consid. 3 et les références citées). Si la protection du droit ne peut exceptionnellement être réalisée autrement, il est possible d'anticiper sur le jugement au fond par une mesure provisoire, pour autant qu'une protection efficace du droit ne puisse être atteinte par la procédure ordinaire et que celle-ci produirait des effets absolument inadmissibles pour le requérant (ATF du 24 juin 2002 I 278/2002).

4.        La LPGA ne contient pas de dispositions propres sur l'effet suspensif. Par renvoi des art. 55 al. 1 LPGA et 1 al. 3 PA, l'art. 55 al. 2 et 4 PA, concernant le retrait de l'effet suspensif, s'applique à la procédure devant les autorités cantonales de dernière instance qui ne statuent pas définitivement en vertu du droit public fédéral.

L'art. 55 PA prévoit que le recours a effet suspensif (al. 1), et que sauf si elle porte sur une prestation pécuniaire, la décision de l’autorité inférieure peut prévoir qu’un recours éventuel n’aura pas d’effet suspensif (al. 2). Conformément à l'art. 66 PA, si aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s’y oppose, la juridiction de recours peut, sur la demande de la partie dont les intérêts sont gravement menacés, retirer ou restituer l’effet suspensif (al. 3).

L'entrée en vigueur de la LPGA n'a rien changé à la jurisprudence en matière de retrait par l'administration de l'effet suspensif à une opposition ou à un recours ou de restitution de l'effet suspensif (ATF du 20 avril 2005, I 196/05, consid. 4.3). Ainsi, la possibilité de retirer l'effet suspensif au recours n'est pas subordonnée à la condition qu'il existe, dans le cas particulier, des circonstances tout à fait exceptionnelles qui justifient cette mesure (ATF du 26 octobre 2006, I 5400/06, consid. 2.2). Il incombe bien plutôt à l'autorité appelée à statuer, en application de l'art. 55 PA, d'examiner si les motifs qui parlent en faveur de l'exécution immédiate de la décision l'emportent sur ceux qui peuvent être invoqués à l'appui de la solution contraire. L'autorité dispose sur ce point d'une certaine liberté d'appréciation. En général, elle se fondera sur l'état de fait tel qu'il résulte du dossier, sans effectuer de longues investigations supplémentaires (ATF du 19 septembre 2006, I 439/06, consid. 2). En procédant à la pesée des intérêts en présence, les prévisions sur l'issue du litige au fond peuvent également être prises en considération; il faut cependant qu'elles ne fassent aucun doute (ATF du 24 mai 2006, I 231/06, consid. 3.3). Par ailleurs, l'autorité ne saurait retirer l'effet suspensif au recours lorsqu'elle n'a pas de raisons convaincantes pour le faire (ATF 124 V 88 consid. 6a).

S'agissant des intérêts en présence, notre Haute Cour admet que l'intérêt de l'administration est généralement prépondérant lorsque la situation financière de celui qui bénéficie de prestations ne lui permettrait pas de les restituer s'il s'avérait dans le jugement au fond qu'elles étaient perçues à tort (ATF du 14 novembre 2005, I 63/05, consid. 5.3; ATF 119 V 503, consid. 4; ATF 105 V 266, consid. 3).

5.        Une décision est arbitraire lorsqu'elle méconnaît gravement une règle de droit ou un principe juridique clair et indiscuté, ou qu'elle contredit de manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. L'arbitraire ne résulte donc pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable. Par ailleurs, pour qu'une décision soit annulée pour cause d'arbitraire, il ne suffit pas que la motivation formulée soit insoutenable, il faut encore que la décision apparaisse arbitraire dans son résultat (ATF 129 I p. 8).

6.        En l’espèce, M. H___________ a été vu, à plusieurs reprises, sur des périodes différentes (septembre 2012 et mai 2013) effectuer des activités physiques variées à l’instar du jardinage, du bricolage, de la conduite d’une voiture ou d’une moto notamment. Selon le détective, son comportement n’a jamais mis en évidence de limitations fonctionnelles.

Ces activités interpellent compte tenu du fait que l’assuré bénéficie d’une rente invalidité pour une atteinte à l’appareil locomoteur.

Les photos prises par le détective et ses rapports d’observation peuvent laisser à penser que l’assuré a peut-être recouvré tout ou partie de sa capacité de travail. Celui-ci n’a jamais été vu en train de souffrir ou d’être entravé dans ses mouvements. Sa mobilité ne semble pas prétéritée par des problèmes liés à son membre inférieur gauche. Ces constatations doivent toutefois être fortement relativisées par le fait que l’assuré souffre de troubles psychiques graves et invalidants qui ont été dûment mis en évidence par l’expertise du Dr N___________ notamment. Ceux-ci ont participé à la décision d’octroi de la rente complète d’invalidité et ont justifié une indemnité pour atteinte à l’intégrité de 25%, étant encore relevé que selon le dossier SUVA, l’atteinte psychique était plus grave que le taux précité, mais que seule une partie des troubles psychiques invalidants étaient en lien de causalité avec l’accident. Le Dr N___________ mentionnait même que les troubles psychiques induisaient une incapacité totale de travailler. Non forcément perceptibles pour le dénonciateur et pour l’enquêteur, ces troubles relativisent les photos et rapport d’enquête. Il n’en demeure pas moins que selon lesdites pièces l’assuré peut manifestement entreprendre un certain nombre de travaux physiques qui semblent compatibles avec son état de santé et ses atteintes tant somatiques que psychiques. C’est ainsi à juste titre que la SUVA a décidé d’une nouvelle expertise multidisciplinaire, en l’espèce orthopédique, neurologique et psychiatrique pour déterminer les atteintes dont souffre encore l’assuré et pouvoir déterminer quelles en sont les conséquences sur la capacité de gain.

7.        Conformément à la loi, il convient, en matière de mesures provisionnelles, d’effectuer une pesée des intérêts entre celui, privé, de Monsieur H___________ à conserver sa rente jusqu’à la fin de l’instruction de la procédure de révision et celui de la SUVA à ne pas verser une rente qui ne pourrait pas être remboursée si l’assuré devait être condamné à l’issue de la procédure à la lui restituer.

De jurisprudence constante, le Tribunal fédéral admet que l’intérêt de l’administration est généralement prépondérant lorsque la situation financière de celui qui bénéficie de prestations ne lui permettrait pas de les restituer s'il s'avérait dans le jugement au fond qu'elles étaient perçues à tort. En l’espèce, l’intérêt de la SUVA doit, selon la jurisprudence, primer l’intérêt de l’assuré à percevoir sa rente, pendant l’instruction de la cause, compte tenu du fait que l’issue de la procédure de révision est incertaine et qu’il ne peut pas être affirmé qu’elle sera favorable au recourant, au vu des éléments versés au dossier par le rapport d’enquête.

8.        Le recourant allègue que la décision arbitraire. Cet argument ne peut être retenu. En effet, la décision litigieuse ne méconnaît pas gravement une règle de droit ou un principe juridique clair et indiscuté, et ne contredit pas de manière choquante le sentiment de la justice ou de l'équité. Même si la situation financière de l’assuré est probablement gravement obérée depuis la décision litigieuse, celle-ci est fondée, en droit, compte tenu des éléments qui précèdent, à savoir principalement le rapport d’enquêtes et les photos y relatives.

9.        Il s'ensuit que la décision attaquée, en tant que mesure provisionnelle, est justifiée et que le recours doit être rejeté.

10.    Cela étant, une telle mesure - dont les conséquences ne sont pas négligeables pour le recourant - ne saurait perdurer. La Cour de céans invite dès lors l’intimé à faire preuve de diligence dans l’instruction de la procédure de révision et à statuer rapidement sur le fond. C'est dans ce cadre, dans l'hypothèse d'une suppression totale ou partielle de la rente, que la révision en raison d'une modification notable du degré d'invalidité ou la reconsidération de la dernière décision pourra être contestée et examinée sur le fond par la Chambre de céans.

11.    La procédure étant gratuite, il n'est pas perçu de frais.

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant sur incident

A la forme :

1.      Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.      Le rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Brigitte BABEL

 

La présidente

 

 

 

 

Francine PAYOT ZEN-RUFFINEN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral de la santé publique par le greffe le