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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4720/2019

ATAS/239/2020 du 18.03.2020 ( CHOMAG ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4720/2019 ATAS/239/2020

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 18 mars 2020

4ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, GENÈVE

 

 

recourante

 

contre

OFFICE CANTONAL DE L'EMPLOI, sis rue des Gares 16, GENÈVE

 

 

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après l'assurée ou la recourante) s'est inscrite auprès de l'office cantonal de l'emploi (ci-après l'OCE ou l'intimé) le 24 juillet 2018.

2.        À teneur du plan d'actions signé le 2 août 2018 par l'assurée, celle-ci devait faire au moins dix recherches d'emploi par mois et remettre le formulaire à l'office régional de placement (ci-après l'ORP) en fin de mois ou au plus tard le 5 du mois suivant.

3.        Le 26 mars 2019, le service juridique de l'OCE a informé l'assurée qu'il renonçait exceptionnellement à prononcer une sanction à son encontre pour ne pas s'être présentée à un entretien de conseil le 22 mars 2019 en raison d'une inadvertance de sa part.

4.        Par décision du 21 juin 2019, le service juridique de l'OCE a suspendu l'assurée dans son droit à l'indemnité pour neuf jours, au motif qu'elle ne s'était pas présentée sans excuse valable à un entretien de conseil qui devait se dérouler le 19 juin 2019.

5.        Le 13 septembre 2019, l'ORP a accusé réception d'un certificat médical de l'assurée attestant de son incapacité totale de travail du 11 au 15 septembre 2019.

6.        Le 26 septembre 2019, le service juridique de l'OCE a suspendu le droit de l'assurée à l'indemnité pour huit jours, au motif que ses recherches personnelles d'emploi relatives au mois d'août 2019 avaient été remises le 9 septembre 2019, soit avec un léger retard de deux jours ouvrables.

7.        L'assurée a formé opposition à la décision précitée le 24 octobre 2019. Elle s'excusait pour le léger retard avec lequel elle avait remis ses recherches d'emploi pour le mois d'août 2019. Elle faisait preuve d'assiduité afin de trouver un emploi et était actuellement engagée en qualité de stagiaire à 100% au sein des Établissements publics pour l'intégration (ÉPI). Elle travaillait toute la semaine et lorsqu'elle rentrait du travail, elle était épuisée. Elle n'avait pas toujours le courage, ni l'énergie nécessaires pour effectuer ses recherches. Ne maîtrisant pas les outils informatiques, celles-ci lui prenaient très souvent plus de temps qu'il n'en fallait. Cela lui occupait au minimum un week-end. Elle demandait au service juridique de croire en sa bonne volonté et sa bonne foi et de reconsidérer sa décision, qui la mettait dans une situation financière inconfortable.

8.        Par décision sur opposition du 21 novembre 2019, l'OCE a constaté que l'assurée était dans l'obligation de respecter son plan d'actions et qu'elle n'avait fait valoir aucun motif excusant valablement son manquement. Elle avait été en mesure de remettre ses recherches d'emploi du mois d'août 2019 dans le délai légal, notamment par un envoi postal, n'ayant pas été empêchée de le faire pour des raisons indépendantes de sa volonté. C'était donc à juste titre qu'une sanction avait été prononcée contre elle. La durée de celle-ci respectait le barème du Secrétariat d'État à l'économie (ci-après SECO) et le principe de la proportionnalité, s'agissant d'un troisième manquement sanctionné.

9.        L'assurée a formé recours contre la décision précitée auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice le 21 décembre 2019, pour les motifs déjà développés dans son opposition.

10.    Par réponse du 27 janvier 2020, l'OCE a conclu au rejet du recours.

11.    Sur ce, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité, du 25 juin 1982 (loi sur l'assurance-chômage, LACI - RS 837.0).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté dans le délai et la forme prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56 et 60 LPGA).

3.        Le litige porte sur le bien-fondé de la suspension de huit jours du droit à l'indemnité de la recourante, au motif que ses recherches personnelles d'emploi relatives au mois d'août 2019 ont été remises avec deux jours ouvrables de retard à l'ORP.

4.        L'assuré a droit à l'indemnité de chômage s'il satisfait, entre autres conditions, aux exigences du contrôle (art. 8 al. 1 let. g LACI). À cet effet, il lui incombe, avec l'assistance de l'office du travail compétent, d'entreprendre tout ce qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour éviter le chômage ou l'abréger; en particulier, il est tenu de rechercher du travail et d'apporter la preuve des efforts fournis dans ce but (art. 17 al. 1 LACI).

Selon l'art. 26 al. 2 de l'ordonnance sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 31 août 1983 (OACI - RS 837.02), l'assuré doit remettre la preuve de ses recherches d'emploi pour chaque période de contrôle au plus tard le cinq du mois suivant ou le premier jour ouvrable qui suit cette date. À l'expiration de ce délai, et en l'absence d'excuse valable, les recherches d'emploi ne sont plus prises en considération. Cette disposition a été jugée conforme à la loi (ATF 139 V 164).

D'après l'art. 30 al. 1 let. c LACI, le droit de l'assuré à l'indemnité est suspendu notamment lorsqu'il est établi que celui-ci ne fait pas tout ce qu'on peut raisonnablement exiger de lui pour trouver un travail convenable. Un autre motif de suspension, selon l'art. 30 al. 1 let. d LACI, est le fait pour un assuré de ne pas observer les prescriptions de contrôle du chômage ou les instructions de l'autorité compétente, notamment refuser un travail convenable, ne pas se présenter à une mesure de marché de travail ou l'interrompre sans motif valable, ou encore compromettre ou empêcher, par son comportement, le déroulement de la mesure ou la réalisation de son but. Une suspension du droit à l'indemnité doit être prononcée pour chaque faute, même s'il s'agit d'une simple négligence (Bulletin LACI/D2).

5.        La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute (art. 30 al. 3 phr. 3 LACI). Elle est de 1 à 15 jours en cas de faute légère, de 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne et de 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 3 OACI).

En tant qu'autorité de surveillance, le SECO a adopté un barème (indicatif) à l'intention des organes d'exécution. Un tel barème constitue un instrument précieux pour ces organes d'exécution lors de la fixation de la sanction et contribue à une application plus égalitaire des sanctions dans les différents cantons. Cela ne dispense cependant pas les autorités décisionnelles d'apprécier le comportement de l'assuré compte tenu de toutes les circonstances - tant objectives que subjectives - du cas concret notamment des circonstances personnelles, en particulier celles qui ont trait au comportement de l'intéressé au regard de ses devoirs généraux d'assuré qui fait valoir son droit à des prestations (cf. arrêts du Tribunal fédéral 8C_601/2012 du 26 février 2013 et 8C_537/2013 du 16 avril 2014). Selon le barème du SECO (Bulletin LACI/D79.E.1), la remise tardive des recherches d'emploi pendant la période de contrôle entraîne la première fois une suspension de cinq à neuf jours, la seconde fois une suspension de dix à dix-neuf jours et la troisième fois le renvoi pour décision à l'autorité cantonale.

La durée de la suspension du droit à l'indemnité de chômage est fixée compte tenu non seulement de la faute, mais également du principe de proportionnalité (Thomas NUSSBAUMER, Arbeitslosenversicherung, in : Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Soziale Sicherheit, 2ème éd., n° 855, p. 2435).

Selon l'art. 45 al. 5 OACI, si l'assuré est suspendu de façon répétée dans son droit à l'indemnité, la durée de suspension est prolongée en conséquence. Les suspensions subies pendant les deux dernières années sont prises en compte dans le calcul de la prolongation.

L'antécédent à prendre en compte, au sens de l'art. 45 al. 5 OACI, doit avoir lui-même fait l'objet d'une sanction. Le fait que les sanctions prononcées portent sur des motifs différents n'est pas décisif (Boris RUBIN, Commentaire de la loi sur l'assurance-chômage, 2014, n. 97 ad. art. 30 et les références citées).

La quotité de la suspension du droit à l'indemnité de chômage dans un cas concret constitue une question relevant du pouvoir d'appréciation (arrêt du Tribunal fédéral 8C_194/2013 du 26 septembre 2013 consid. 5.2). Le juge ne s'écarte de l'appréciation de l'administration que s'il existe de solides raisons. Il y a abus du pouvoir d'appréciation lorsque l'autorité, tout en restant dans les limites du pouvoir d'appréciation qui est le sien, se fonde sur des considérations qui manquent de pertinence et sont étrangères au but visé par les dispositions légales applicables, ou viole des principes généraux du droit tels que l'interdiction de l'arbitraire et de l'inégalité de traitement, le principe de la bonne foi et le principe de la proportionnalité (ATF 123 V 150 consid. 2).

6.        En l'espèce, la recourante ne conteste pas avoir remis ses recherches d'emploi pour le mois d'août 2019 avec un léger retard. Elle n'a pas invoqué de faits permettant de considérer une absence de faute, étant rappelé qu'une suspension du droit à l'indemnité doit être prononcée même s'il s'agit d'une simple négligence. La sanction est donc justifiée dans son principe.

S'agissant de la durée de la suspension prononcée, l'intimé l'a fixée en tenant compte du fait qu'il s'agissait d'un troisième manquement, la prolongeant en conséquence. Or, selon l'art. 45 al. 5 OACI et la doctrine précitée, seuls des manquements sanctionnés peuvent être pris en compte pour prolonger la durée de la suspension. En l'occurrence, s'il est établi que la recourante avait commis précédemment deux manquements, en ne se présentant pas à des entretiens de conseil, elle n'a été sanctionnée qu'à une reprise pour ce motif. Dès lors, en tenant compte du fait qu'il s'agissait d'un troisième manquement pour fixer la durée de la suspension, l'intimé n'a pas respecté la teneur de l'art. 45 al. 5 OACI et il se justifie, en conséquence, de réduire la sanction prononcée à 6 jours.

7.        Le recours sera ainsi partiellement admis et la décision querellée réformée, en ce sens la durée de la suspension est réduite à 6 jours.

8.        Il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure à la recourante, qui n'est pas assistée d'un conseil et qui n'a pas fait valoir de frais engendrés par la procédure (art. 61 let. g LPGA).

9.        La procédure est gratuite (art. 61 let. a LPGA).

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet partiellement.

3.        Réforme la décision sur opposition du 21 novembre 2019, en ce sens que la durée de la suspension est réduite à six jours.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Isabelle CASTILLO

 

La présidente

 

 

 

 

Catherine TAPPONNIER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'au Secrétariat d'État à l'économie par le greffe le