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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2439/2021

ATAS/1215/2021 du 25.11.2021 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/2439/2021 ATAS/1215/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 25 novembre 2021

3ème Chambre

 

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à GENEVE, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Michael RUDERMANN

 

recourant

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, DCS – SPC, sis Route de Chêne 54, GENEVE

 

 

intimé

 


 

 

EN FAIT

 

A.      a. Monsieur A______ (ci-après : le bénéficiaire), né en 1959, est au bénéfice de prestations complémentaires cantonales et fédérales. Le ______ 2018, il a épousé Madame B______, née en 1970.

b. Par décisions des 5 et 11 avril 2019, le service des prestations complémentaires (ci-après : SPC) a recalculé le montant des prestations dues à son bénéficiaire pour la période du 1er janvier 2016 au 30 avril 2019 et au-delà, en tenant compte de l’augmentation de la rente de prévoyance de l'intéressé, de son mariage, d’un loyer proportionnel (en raison du partage de son logement avec son beau-fils), ainsi que d’un gain potentiel pour son épouse. Au terme desdits calculs, le SPC est parvenu à la conclusion qu’à compter du 1er mai 2019, le droit aux prestations complémentaires devait être nié, les dépenses étant désormais entièrement couvertes par les revenus. Il a en outre réclamé la restitution de CHF 14'563.20 versés à tort durant la période considérée.

c. Sur opposition, par décision du 4 septembre 2019, le SPC est partiellement revenu sur sa position : il a maintenu que la prise en compte d’un gain potentiel pour l’épouse de son bénéficiaire était justifiée dans son principe, mais reconnu qu’en conformité à la jurisprudence et aux directives de l’office fédéral des assurances sociales (OFAS), il aurait dû accorder à l'intéressée un délai d’adaptation préalable. En conséquence, la prise en compte du revenu potentiel était suspendue du 1er septembre 2018 au 30 avril 2019. Pour le surplus, le SPC renonçait au loyer proportionnel. Reprenant ses calculs pour la période du 1er janvier 2016 au 30 avril 2019, le SPC a reconnu à son bénéficiaire le droit à un solde de CHF 7'394.-. Le SPC a par ailleurs annulé sa demande en remboursement des subsides.

B.       a. Le 4 octobre 2019, le bénéficiaire a interjeté recours contre cette décision en concluant à ce qu’il soit renoncé à toute prise en considération d’un gain hypothétique concernant son épouse.

b. Le SPC a rappelé avoir renoncé à la prise en compte d’un gain potentiel pour un laps de temps de six mois correspondant à une période d’adaptation. Au vu des éléments versés à la procédure, il s'est cependant déclaré prêt à renoncer également à tout gain potentiel en mai 2019, à ne retenir, pour la période de juin, juillet et août 2019, que les gains effectifs réalisés, à renoncer également au gain potentiel en septembre 2019 pour raisons médicales et à accorder un nouveau délai de six mois à l’épouse de son bénéficiaire - jusqu’à fin mars 2020 - pour entreprendre des démarches en vue de son intégration. Pour permettre la reconsidération de la décision sur opposition et des nouveaux calculs valables dès le 1er mai 2019, le bénéficiaire était invité à produire les bulletins de salaire de son épouse.

c. Le bénéficiaire a produit divers documents, au nombre desquels une décision du Service national de l’emploi de la République de Serbie du 6 août 2015, ainsi le certificat de salaire annuel de son épouse, faisant état d'une période d'engagement du 24 juin au 20 septembre 2019.

d. Le 16 décembre 2019, le SPC s’est déterminé et a maintenu les propositions formulées précédemment, à savoir :

-          "prolonger la suspension du gain potentiel pour le mois de mai 2019 ;

-          prendre en considération des gains effectifs réalisés durant les mois de juin, juillet et août 2019 selon les relevés de salaire transmis [ ];

-          renoncer au gain potentiel pour le mois de septembre 2019, pour raisons médicales ;

-          accorder un nouveau délai de six mois de suspension du gain potentiel pour permettre à l’épouse d'entreprendre des démarches en vue de son intégration sociale et professionnelle ;

-          réaliser un nouvel examen de la situation de l'épouse pour le 1er avril 2020."

Pour le reste, le SPC notait que, selon la décision de la Sécurité sociale serbe, l'épouse de son bénéficiaire restait capable d’effectuer un travail adapté, ce qui justifiait de ne pas renoncer définitivement à tout gain potentiel.

e. Le 20 janvier 2020, le SPC a accepté de ne prendre en considération aucun gain potentiel du 1er au 30 juin 2019 également.

f. Par écriture du 2 avril 2020, le SPC a proposé de retenir un montant de CHF 3'059.- à titre de gain pour la période du 1er juillet au 30 septembre 2019, somme correspondant au revenu net indiqué dans l’attestation de salaire. Le calcul de la prestation ne pouvant se faire que pour un mois entier, il suggérait de renoncer à prendre en considération tout revenu en juin 2019, la semaine d’activité du mois de juin étant compensée avec celle, manquante, de septembre 2019.

g. Le 9 avril 2020, le bénéficiaire a indiqué que cette proposition lui semblait cohérente. Il continuait en revanche à contester toute prise en compte de gain après septembre 2019.

h. Le 22 mai 2020, le SPC a procédé au réexamen de la situation au 1er avril 2020. Au vu de la situation sanitaire exceptionnelle, il a proposé de prolonger le délai d'adaptation de six mois supplémentaires - jusqu’à fin septembre 2020 -, afin qu’un projet réaliste d’insertion professionnelle puisse être construit (proposition renouvelée le 8 juillet 2020).

C.      Le 18 mars 2021, la Cour de céans a statué. Seule restant litigieuse la période postérieure à septembre 2020 (terme de la période d'adaptation), la Cour a pris acte de l’accord des parties s’agissant de la période antérieure et statué sur le fond pour la suite, en faisant droit à la conclusion du bénéficiaire visant à ce qu'aucun gain potentiel ne soit pris en considération au-delà de septembre 2019.

Le dispositif de l'arrêt était le suivant (ATAS/245/2021) :

D’accord entre les parties :

2.        Prend acte de la proposition de l’intimé de :

-       renoncer à un gain potentiel en mai et juin 2019 ;

-       prendre en considération les gains effectifs réalisés en juillet et août 2019 selon les relevés de salaires transmis ;

-       renoncer à tout gain potentiel en septembre 2019, pour raisons médicales ;

-       accorder un nouveau délai à l’épouse du recourant pour entreprendre des démarches en vue de son intégration sociale et professionnelle, d’octobre 2019 à fin septembre 2020.

3.        L’y condamne en tant que de besoin.

4.        Réforme la décision du 4 septembre 2019 en ce sens.

Pour le surplus, au fond :

5.        L’admet en ce sens qu’il est dit qu’aucun gain potentiel ne doit être pris en considération à partir d’octobre 2020 non plus.

6.        Renvoie la cause à l’intimé pour nouveau calcul des prestations dues depuis janvier 2016 dans le sens des considérants.

7.        Condamne l’intimé à verser au recourant la somme de CHF 3'000.- à titre de participation à ses frais et dépens.

8.        Dit que la procédure est gratuite.

D.      a. Le 23 juin 2021, le SPC a rendu une nouvelle décision sur opposition, recalculant le droit aux prestations conformément aux termes de l'accord passé entre les parties en avril et mai 2020, d'une part, de l'arrêt de la Cour de céans, d'autre part. Ce faisant, il convient de noter, s'agissant du gain potentiel imputé à l'épouse du bénéficiaire :

–        qu'aucun revenu n'a été retenu en mai et juin 2019,

–        qu'ont été pris en considération les gains effectifs réalisés entre juillet et septembre 2019 selon l'attestation de salaire produite dans le cadre de la procédure de recours (faisant état d'un montant total de CHF 3'059.-),

–        qu'aucun gain n'a plus été pris en compte à compter d'octobre 2019.

b. Le 16 juillet 2021, le bénéficiaire a saisi la Cour de céans d'un recours en contestant le montant retenu à titre de gain d’activité effectif pour son épouse entre juillet et septembre 2019, soit CHF 3'059.-.

Le recourant allègue que les parties se seraient mises d’accord sur la prise en compte d’un gain effectif de CHF 3'059.- pour juillet et août 2019 uniquement et que c’est ce montant qui aurait dû être pris en compte, sous déduction d’un forfait de CHF 1'500.-, le solde étant pris en considération à raison des deux tiers, soit un montant final de CHF 1'039.- pour juillet et août 2019 seulement. Il critique au surplus l'annualisation du revenu effectivement réalisé par son épouse, arguant qu'il s'agit déjà d'un revenu annuel et qu'il aurait ainsi été artificiellement augmenté à CHF 12'236.-.

Selon lui, le calcul aurait dû être le suivant : 3'059 – 1'500 = 1'559 de revenu global pour juillet et août 2019, soit 1'039.35 à raison des deux tiers = 519.65 CHF/mois en juillet et août 2019, ce qui ouvrirait le droit à une prestation complémentaire fédérale de 1'067.40 CHF/mois et à une prestation complémentaire cantonale de 1'636.25 CHF/mois durant ces deux mois, respectivement de CHF 1'154.- et CHF 1'127.- en septembre 2019.

c. Invité à se déterminer, le SPC conclut au rejet du recours. Il rappelle que la Cour avait, dans son arrêt, pris acte de sa proposition du 2 avril 2020, laquelle consistait à fixer le gain d’activité à CHF 3'059.- pour la période du 1er juillet au 30 septembre 2019, montant correspondant au salaire net ressortant de l’attestation de salaire produite. Cette proposition rectifiait la proposition initiale formulée le 31 octobre 2019, puisqu’il ressortait dudit certificat de salaire que la période d’engagement s’était étendue du 24 juin au 20 septembre 2019.

E.       a. Pour le surplus, le SPC a formulé une demande de rectification de l'arrêt de la Cour du 18 mars 2021 (procédure 3695/2019), à laquelle le bénéficiaire s'est opposé.

b. Ce nonobstant, la Cour de céans, en date du 28 octobre 2021 (ATAS/1116/2021) a rectifié le chiffre 1 du dispositif de son arrêt du 18 mars 2021 en ce sens :

"D’accord entre les parties :

2.        Prend acte de la proposition de l’intimé de :

-          renoncer à un gain potentiel en mai et juin 2019 ;

-          prendre en considération les gains effectifs réalisés entre juillet et septembre 2019 selon les relevés de salaires transmis ;

-          accorder un nouveau délai à l’épouse du recourant pour entreprendre des démarches en vue de son intégration sociale et professionnelle, d’octobre 2019 à fin septembre 2020.

 

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30).

Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours est recevable (art. 56ss LPGA) .

3.        Le litige porte sur la comptabilisation du gain effectif réalisé par l'épouse du recourant du 24 juin au 20 septembre 2019 dans le calcul du droit aux prestations de ce dernier.

4.        Le recourant conteste la répartition de ce revenu de juillet à septembre 2019, d'une part, son annualisation, d'autre part.

L'intimé rappelle quant à lui que les parties étaient tombées d'accord, en avril et mai 2020, sur la prise en compte du revenu effectif de CHF 3'059.- pour la période du 1er juillet au 30 septembre 2019, correspondant au salaire net ressortant de l’attestation de salaire produite. Le SPC avait alors précisé que, dès lors que le calcul de la prestation ne pouvait se faire que pour un mois entier, il serait renoncé à prendre en considération un revenu en juin 2019 (la semaine d’activité effectuée ce mois-là étant compensée avec celle, manquante, fin septembre).

5.         

5.1 Aux termes de l’art. 2 al. 1 LPC, la Confédération et les cantons accordent aux personnes qui remplissent les conditions fixées aux art. 4 à 6 des prestations complémentaires destinées à la couverture des besoins vitaux. L’art. 9 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants (al. 1). Figurent notamment au nombre des revenus déterminants énumérés à l’art. 11 al. 1 LPC : deux tiers des ressources en espèces ou en nature provenant de l’exercice d’une activité lucrative, pour autant qu’elles excèdent annuellement 1’500 fr. pour les couples (let. a).

5.2 Au plan cantonal, ont droit aux prestations les personnes dont le revenu annuel déterminant n’atteint pas le revenu minimum cantonal d’aide sociale applicable, le montant de la prestation complémentaire correspondant à la différence entre les dépenses reconnues et le revenu déterminant du requérant (art. 4 LPCC). L'art. 5 al. 1 LPCC stipule que le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la loi fédérale et ses dispositions d'exécution, moyennant certaines dérogations

6.        En l'espèce, le recourant fait preuve d'une mauvaise foi évidente en soutenant qu'aucun gain ne devait être pris en compte en septembre 2019. Ainsi que l'a relevé la Cour de céans dans son arrêt en rectification, les parties s'étaient en effet mises d'accord pour fixer le gain d’activité à CHF 3'059.- pour la période du 1er juillet au 30 septembre 2019. Leurs déclarations sur ce point étaient parfaitement claires, ce qui a d'ailleurs motivé la rectification de l'erreur regrettablement commise par la Cour de céans dans la transcription dudit accord, erreur dont le recourant a cherché à tirer profit à son avantage.

Compte tenu de cet accord et de l'arrêt de la Cour de céans tel que rectifié le 28 octobre 2021, c'est à juste titre que, dans sa nouvelle décision sur opposition, le SPC a retenu un salaire annualisé de CHF 12'236.- (CHF 3'059.- / 3 mois x 12 mois), soit un gain mensuel moyen de CHF 1'019.67 pour la période considérée de juillet à septembre 2019.

S'agissant de l'annualisation de ce revenu, elle apparaît tout à fait légitime au vu de l'annualisation de l'ensemble des autres postes. Selon la jurisprudence, il est constant que le calcul des prestations complémentaires s'établit sur la base des dépenses reconnues et du revenu déterminant annualisés pour déterminer le montant de la prestation annuelle, qui est ensuite fractionnée en douze mois pour fixer le montant de la prestation mensuelle

L'annualisation, pour une période déterminée, ne se conçoit pas en fonction du nombre de jours que compte chaque mois, mais sur la base d'une année de 365 jours (voir notamment ATAS/276/2017 du 10 avril 2017 consid. 10b p.13ss : voir aussi sur le principe de l'annualisation ATAS/689/2017 du 21 août 2017 et ATAS/1092/2011 du 22 novembre 2011).

C’est ainsi qu'en l'espèce, pour la période considérée, du 1er juillet au 30 septembre 2019, la rente de vieillesse a été portée à CHF 10'464.- (soit 872.- CHF/mois), de la même manière que la rente servie par la prévoyance professionnelle, le loyer ou encore le forfait destiné à la couverture des besoins vitaux. Seul deux tiers du revenu annualisé ont été retenus dans les calculs, après une déduction forfaitaire de CHF 1'500.-, soit CHF 7'157.35, représentant 596.45 CHF/mois, c'est-à-dire un total de CHF 1'789.35 pour la période de juillet à septembre 2019).

Le calcul auquel a procédé l'intimé apparaît dès lors parfaitement correct. Le recours est rejeté.

 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

A la forme :

1.         Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.         Le rejette.

3.         Dit que la procédure est gratuite.

4.         Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SÉCHAUD

 

La Présidente

 

 

 

 

Karine STECK

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le