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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3595/2019

ATAS/1090/2019 du 26.11.2019 ( LAA ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3595/2019 ATAS/1090/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 26 novembre 2019

9ème Chambre

 

En la cause

Monsieur A______, domicilié à NEYDENS, France

 

 

recourant

 

contre

CAISSE NATIONALE SUISSE D'ASSURANCE EN CAS D'ACCIDENTS, sise Division juridique, Fluhmattstrasse 1, LUCERNE

 

 

intimée

 


EN FAIT

1.        Monsieur A______ (ci-après : l'assuré), né le ______ 1996 et domicilié en France, a été engagé en qualité de stagiaire le 10 octobre 2016 par la société ORIF, Organisation romande d'intégration et de formation professionnelle (ci-après : l'employeur). À ce titre, il était couvert contre les accidents professionnels et non professionnels par la caisse nationale suisse d'assurance en cas d'accidents (ci-après : la CNA).

2.        Le 6 janvier 2017, l'assuré a glissé sur une plaque de verglas et a chuté en sortant de chez lui.

3.        Le 25 janvier 2017, la CNA a indiqué à l'assuré et à son employeur qu'elle prenait le cas en charge. L'indemnité journalière se montant à CHF 138.40 par jour dès le 9 janvier 2017.

4.        Dans un rapport médical complémentaire du 24 mars 2017, le Dr B______, spécialiste FMH en chirurgie orthopédique, a diagnostiqué une fissuration du cuboïde pied droit.

5.        Le 29 mars 2017, le docteur C______, ostéopathe traitant de l'assuré, a diagnostiqué des douleurs séquellaires de nombreuses chutes. L'évolution était défavorable et le pronostic mauvais.

6.        Le 31 mars 2017, la Permanence de Carouge a retenu une torsion de la cheville.

7.        Une arthro-IRM (imagerie à résonnance magnétique) réalisée le 10 mai 2017 a mis en évidence des kystes touchant le grand os, l'os crochu, le lunatum et le pôle proximal de l'os scaphoïde, ainsi qu'un oedème du versant dorsal du pôle proximal et du corps de l'os crochu compatible avec une zone de contusion osseuse post-traumatique dans le contexte clinique.

8.        Le 9 juin 2017, le docteur D______, chirurgien FMH, a diagnostiqué une contusion du scaphoïde de la main gauche et une tendinite des fléchisseurs D2 à D5.

9.        Par courrier du 29 août 2017, annulant et remplaçant celui du 6 janvier 2017, la CNA a informé l'assuré que son indemnité journalière s'élevait à CHF 147.40 par jour dès le 9 janvier 2017.

10.    Le 28 septembre 2017, le Dr D______ a préconisé une arthroscopie au vu des douleurs persistantes.

11.    Le 9 novembre 2017, l'assuré a subi une arthroscopie du poignet gauche, un shaving de la medio-carpienne gauche, une infiltration intra-articulaire de la medio-carpienne gauche et une tenosynovectomie des fléchisseurs de D3 et D4 gauche.

12.    Le 6 mars 2018, le Dr D______ a relevé que l'évolution était défavorable suite à l'intervention du 9 novembre 2017. L'assuré souffrait de douleurs diffuses tant au niveau des doigts qu'au niveau du poignet. La région du ligament scapho-lunaire et du lunotriquétral étaient quasiment intouchables.

13.    Dans une appréciation médicale du 8 août 2018, le docteur E______, médecin d'arrondissement de la CNA, a diagnostiqué un canal lombaire étroit par arthrose articulaire postérieure évoluant depuis 2003, hors de tout contexte traumatique, une arthrose médio-carpienne gauche, des séquelles d'entorse de la cheville droite et troubles dégénératifs médio-tarsiens, une ténosynovite des tendons fléchisseurs profond superficiels des 3ème et 5ème doigt du long fléchisseur du pouce de la main gauche et des séquelles consolidées d'une fracture du cuboïde du pied droit. La chute de 2017 avait pu au maximum décompenser très légèrement l'état antérieur et cependant uniquement quelques jours, maximum trois. Il n'était pas certain que la causalité naturelle d'atteinte de cette colonne dans le mécanisme de déclenchement puisse même être retenue. La situation n'était pas tout à fait stabilisée, en particulier au niveau de la cheville.

14.    Le 18 janvier 2019, l'assuré a subi une arthroscopie de la cheville droite.

15.    Le 24 juillet 2019, le Dr E______ a relevé que l'incapacité de travail de l'assuré n'était plus en lien avec les suites accidentelles concernant l'assurance-accident. Le cas était stabilisé. Les limitations fonctionnelles de l'assuré étaient les suivantes : pour la cheville : pas de marche prolongée, pas de terrain accidenté, pas d'échelle ; pour le membre supérieur gauche : pas de travail au-dessus du plan des épaules, limitation des port-à-faux, pas de soulèvement de charges ni d'utilisation de la main gauche.

16.    Par courrier du 26 juillet 2019, la CNA a informé l'assuré qu'il n'y avait plus lieu d'attendre de la continuation du traitement une amélioration notable des suites de l'accident du 6 janvier 2017 concernant les troubles de la cheville droite et du poignet gauche. Par conséquent, elle mettait fin au paiement des soins médicaux avec effet au 31 août 2019. Elle continuerait cependant à prendre en charge les contrôles médicaux encore nécessaires et verserait les indemnités journalières jusqu'au 30 novembre 2019. Son éventuel droit à d'autres prestations d'assurance serait examiné par la suite et le droit à l'indemnité pour atteinte à l'intégrité allait être confirmé dans la décision d'attribution. La CNA a précisé que l'ancienne activité de ferblantier / couvreur n'était plus adaptée et ceci de manière définitive. L'assuré avait toutefois une activité complète dans une activité adaptée tout en respectant les limitations énumérées par le Dr E______.

17.    Par acte du 22 septembre 2019, l'assuré a formé « appel » contre le courrier de la CNA du 26 juillet 2019 devant la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : CJCAS). Il a indiqué que, contrairement à ce qui ressortait dudit courrier, sa main gauche et sa cheville droite n'étaient pas du tout stabilisées.

18.    Par réponse du 5 novembre 2019, la CNA a conclu à l'irrecevabilité du « recours ». Il n'y avait eu ni décision formelle, ni opposition, ni décision sur opposition. À considérer qu'il s'agissait d'une opposition formée contre la décision informelle du 26 juillet 2019, celle-ci était irrecevable pour cause de tardiveté.

19.    Dans ses observations du 14 novembre 2019, l'assuré a produit des nouveaux rapports médicaux et contesté la décision de la CNA.

20.    La chambre de céans a transmis cette écriture à la CNA.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 5 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-accidents, du 20 mars 1981 (LAA - RS 832.20).

Sa compétence pour juger du cas d'espèce est ainsi établie.

2.        Se pose au préalable la question de la recevabilité du recours interjeté le 22 septembre 2019 contre le courrier de l'intimée du 26 juillet 2019.

3.        a. Selon l'art. 49 al. 1 à 3 LPGA, l'assureur doit rendre par écrit les décisions qui portent sur des prestations, créances ou injonctions importantes ou avec lesquelles l'intéressé n'est pas d'accord (al. 1). Si le requérant rend vraisemblable un intérêt digne d'être protégé, l'assureur rend une décision en constatation (al. 2). Les décisions indiquent les voies de droit. Elles doivent être motivées si elles ne font pas entièrement droit aux demandes des parties. La notification irrégulière d'une décision ne doit entraîner aucun préjudice pour l'intéressé (al. 3).

Aux termes de l'art. 51 LPGA, les prestations, créances et injonctions qui ne sont pas visées à l'art. 49 al. 1, peuvent être traitées selon une procédure simplifiée (al. 1). L'intéressé peut exiger qu'une décision soit rendue (al. 2).

Un assureur-accidents ne peut pas nier définitivement le droit à toute prestation en relation avec un accident assuré en mettant simplement fin, en procédure simplifiée, à l'octroi de prestations temporaires (indemnité journalière et traitement médical). Dans la mesure où des prestations durables sont en jeu, il lui appartient de rendre une décision formelle (ATF 132 V 412 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_377/2009 du 18 février 2010 consid. 4.2).

La distinction entre la procédure prévue par l'art. 49 et celle de l'art. 51 LPGA s'effectue de la manière suivante : il y a décision uniquement dans le cas où le document est qualifié de tel ou s'il contient, au moins, une indication des voies de droit. Si une décision présente un défaut, ses conséquences seront alors examinées conformément à l'art. 49 al. 3 LPGA. Si le courrier, dans lequel l'assureur fait valoir sa position, ne respecte pas les conditions précitées, il ne peut être qualifié de décision, de sorte que la procédure ne doit pas tendre à la notification d'une décision sur opposition mais à celle d'une décision (arrêt du Tribunal fédéral 8C_738/2007 du 26 mars 2008).

La loi ne précise pas dans quel laps de temps l'intéressé doit déclarer son désaccord avec le mode de règlement choisi par l'administration conformément à l'art. 51 al. 2 LPGA. Mais, d'après la jurisprudence, on contreviendrait aux principes de l'équité et de la sécurité du droit si l'on considérait comme sans importance, du point de vue juridique, une renonciation - expresse ou tacite - à des prestations. On peut en effet attendre de la personne qui n'admet pas une certaine solution, et qui entend voir statuer sur ses droits dans un acte administratif susceptible de recours, qu'elle fasse connaître son point de vue dans un délai d'examen et de réflexion convenable (ATF 126 V 23 consid. 4b p. 24 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_377/2009 consid. 4.1). En règle générale, ce droit s'éteint une année après que l'assureur a fait connaître sa volonté de manière simplifiée. Un délai plus long entre éventuellement en considération lorsque l'assuré pouvait croire de bonne foi que l'assureur poursuivrait l'élucidation de l'affaire et n'avait pas encore pris de décision définitive ; cette hypothèse concerne surtout l'assuré profane en droit et dépourvu de conseil juridique. Si l'assuré ne respecte pas ce délai, ordinaire ou prolongé, il perd son droit de demander une décision formelle afin de recourir contre celle-ci, et la volonté communiquée de façon simplifiée lui est désormais opposable (ATF 134 V 145).

b. Conformément à l'art. 52 al. 1 LPGA, les décisions peuvent être attaquées dans les trente jours par voie d'opposition auprès de l'assureur qui les a rendues, à l'exception des décisions d'ordonnancement de la procédure. Les décisions sur opposition et celles contre lesquelles la voie de l'opposition n'est pas ouverte sont sujettes à recours dans un délai de trente jours (art. 56 al. 1 et 60 al. 1 LPGA).

4.        En l'espèce, dans son courrier du 26 juillet 2019, l'intimée a clairement indiqué au recourant qu'elle entendait mettre un terme au versement des indemnités journalières avec effet au 30 novembre 2019, compte tenu du fait qu'il n'y avait plus lieu d'attendre de la continuation du traitement une amélioration notable des suites de l'accident du 6 janvier 2017. Elle a également mis fin au paiement des soins médicaux avec effet au 31 août 2019. L'éventuel droit à la rente allait être examiné et le droit à l'indemnité pour atteinte à l'intégrité devait être confirmé dans la décision d'attribution.

Ainsi que le relève l'intimée, ce courrier ne constitue pas une décision formelle au sens de l'art. 49 al. 1 LPGA. Il n'est pas qualifié comme tel et ne contient pas l'indication des voies de droit. Il s'agit donc d'une simple communication rendue conformément à la procédure simplifiée (art. 51 al. 1 LPGA). Conformément à la jurisprudence précitée, dans la mesure où elle entendait mettre un terme au versement des indemnités journalières et au paiement des soins médicaux, l'intimée aurait dû adresser au recourant une décision en bonne et due forme. Quand bien même la procédure ordinaire n'a pas été suivie, le courrier du 26 juillet 2019 acquière les mêmes effets qu'une décision à l'expiration d'un délai d'un an. Dans ce délai, le recourant peut toutefois contester l'application de la procédure simplifiée et solliciter la notification d'une décision formelle.

Dans son recours du 22 septembre 2019, le recourant a contesté le courrier de l'intimée du 26 juillet 2019. Certes, le recourant n'a pas conclu à la notification d'une décision formelle. Toutefois, au vu de la teneur de son recours, l'intéressé a contesté la stabilisation de son état de santé. Le recours doit ainsi être interprété comme une demande de décision formelle sur la question de la stabilisation du cas et, partant, sur la suppression du paiement des soins médicaux et du versement des indemnités journalières, avec effet au 30 novembre 2019. Cette demande intervient en outre dans le délai d'un an prévu par la jurisprudence.

Partant, il y a lieu de déclarer le recours irrecevable, l'intimée étant toutefois invitée à rendre une décision formelle sur les questions de la stabilisation du cas et de la suppression des indemnités journalières, décision contre laquelle le recourant pourra faire valoir ses droits.

5.        Pour le surplus, la procédure est gratuite.

* * * * * *

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours irrecevable.

2.        Renvoie le dossier à l'intimée, à charge pour elle de se prononcer, dans une décision formelle, sur les questions de la stabilisation du cas et de la suppression du paiement des soins médicaux avec effet au 31 août 2019 et de celle des indemnités journalières au 30 novembre 2019.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu'elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110) ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie NIERMARÉCHAL

 

La présidente

 

 

 

 

Eleanor McGREGOR

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu'à l'Office fédéral de la santé publique par le greffe le