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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3335/2005

ATAS/1084/2005 du 12.12.2005 ( CHOMAG ) , REJETE

Descripteurs : ; AC ; SUSPENSION DU DROIT À L'INDEMNITÉ ; CHÔMAGE IMPUTABLE À UNE FAUTE DE L'ASSURÉ ; GRAVITÉ DE LA FAUTE ; FAUTE GRAVE ; TRAVAIL CONVENABLE
Normes : LACI 30 al. 1; OACI 44 al. 1; OACI 45 al. 3
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3335/2005 ATAS/1084/2005

ARRET

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 6

du 12 décembre 2005

 

En la cause

Madame M__________, domiciliée c/o S__________,

recourante

 

contre

CAISSE CANTONALE GENEVOISE DE CHOMAGE, sise rue de Montbrillant 40, case postale 2293, 1211 GENEVE 2

intimée

 


EN FAIT

Mme M__________, née le 26 décembre 1963, (ci-après : l'assurée) a été engagée dès le 1er juillet 2004 à plein temps par APEC Diffusion SA (ci-après : l'employeur) en qualité d'assistante commerciale pour un salaire de fr. 5'600.- versé treize fois, par an.

Selon le contrat de travail signé entre les parties, il était convenu que ce salaire serait révisé après la période d'essai.

Par courrier du 23 octobre 2004, l'assurée a résilié son contrat de travail pour le 31 décembre 2004. Elle relevait qu'elle faisait suite aux propos tenus le même jour par l'employeur à son égard, qui l'avaient surprie et qu'elle ne supportait plus les gens qui mettaient sans arrêt la faute sur les autres, surtout si ce n'était pas justifié.

L'assurée s'est inscrite à l'Office cantonal de l'emploi (ci-après : l'OCE) le 10 janvier 2005 et un délai-cadre a été ouvert en sa faveur dès le 1er janvier 2005.

Par décision du 24 février 2005, la Caisse cantonale genevoise de chômage (ci-après : la caisse) a prononcé à l'encontre de l'assurée une suspension du droit à l'indemnité de 31 jours en raison du fait que cette dernière avait démissionné de son poste de travail sans s'assurer d'un autre emploi.

Le 2 mars 2005, l'assurée a fait opposition à cette décision en relevant que le travail était très intéressant mais que le comportement de l'employeur était devenu difficile à gérer et qu'il lui avait fait des remarques déplaisantes. Elle ne voulait pas continuer à travailler pour quelqu'un qui refusait de voir ce qu'une employée motivée pouvait lui apporter réellement.

Par décision du 24 août 2005, le Groupe réclamations de l'OCE a rejeté l'opposition. Un climat de travail tendu n'était pas suffisant pour qualifier un emploi de non convenable et l'impossibilité de conserver un emploi n'était admise que s'il était clairement établi que la continuation des rapports de travail était intolérable. L'assurée reconnaissait avoir démissionné sur un coup de tête, ce qui justifiait le prononcé d'une sanction fondée sur une faute grave. Or, la suspension de 31 jours était la sanction minimum en la matière.

Le 23 septembre 2005, l'assurée a recouru contre cette dernière décision auprès du Tribunal cantonal des assurances sociales en relevant qu'à son avis, l'employeur ne voulait pas réviser son salaire après les trois mois d'essai et que c'était pour cette raison qu'il avait commencé à lui faire des remarques désobligeantes. "Cela ne lui était jamais arrivé de donner son congé aussi rapidement".

Le 25 octobre 2005, la caisse a conclu au rejet du recours en relevant que les difficultés rencontrées par la recourante avec son employeur ne constituaient pas une raison valable pour démissionner sans s'assurer préalablement d'un nouvel emploi.

Le 14 novembre 2005, le Tribunal de céans a entendu la recourante en audience de comparution personnelle des parties. La caisse ne s'est pour sa part pas présentée.

La recourante a déclaré :

"J'ai donné ma démission d'X__________ SA pour le 31 décembre 2004. Je précise que j'ai donné deux mois de préavis alors que je n'étais liée que par un mois de préavis. Le travail était excellent. Je travaillais toutefois avec une personne qui après les trois mois d'essai m'a fait des critiques systématiques. Mon employeur m'avait accordé des vacances en octobre 2004, il m'a ensuite fait le reproche de les prendre. Je précise que je n'ai pas démissionné sur un coup de tête mais j'ai constaté que mon employeur ne voulait en réalité pas augmenter mon salaire comme cela était prévu après les trois mois d'essai. Quand j'ai commencé en juillet 2004 mon employeur n'était pas là. Je précise que la société n'avait que deux employés soit lui et moi-même. Les fournisseurs de la société étant à l'étranger j'ai dû parler anglais, espagnol et allemand, ce que j'ai fait dès le début. Mon employeur m'a ensuite reproché de ne pas maîtriser correctement toutes ces langues, alors même qu'en ce qui concernait le travail demandé (envois de mails et téléphones) mon niveau était suffisant. Je précise qu'au moment de la signature du contrat mon employeur avait été averti de mon niveau et qu'il s'en était contenté.

J'étais contente de mon travail durant les trois premiers mois soit jusqu'à fin septembre. Le jour où je suis partie en vacances, soit un vendredi, mon employeur a commencé à critiquer mon travail. Je constate que cette période correspond au mois au cours duquel mon salaire aurait dû être augmenté et j'ai eu la forte impression qu'il ne souhaitait pas l'augmenter et qu'il me critiquait pour cette raison-là. Je suis ensuite partie en vacances autour du 10 octobre. J'ai donné ma démission avant la fin du mois d'octobre. Il est totalement faux de dire que mon employeur m'a proposé de rester jusqu'au 15 avril 2005. Il m'a uniquement dit avant Noël que si j'avais envie je pouvais revenir au mois de janvier car "il n'était pas si méchant". J'ai pris la décision de démissionner avant de partir en vacances en octobre. Je précise qu'il a émis des critiques à mon encontre le vendredi où je partais en vacances d'octobre. C'est ce jour-là que j'ai pris la décision de démissionner et que je lui ai remis ma lettre de démission.

Je n'ai pas pu discuter avec lui ce jour-là. Il m'a fait ses critiques et je suis restée abasourdie. J'ajoute que mon employeur faisait beaucoup de pression sur mon travail lequel n'était pas toujours facile. Toutefois, si mon employeur ne m'avait pas critiquée comme il l'a fait je serais restée car le travail me plaisait. Après ces critiques la relation de confiance était, de mon point de vue, brisée et je ne souhaitais plus renouer avec lui. J'ai repris le travail fin octobre jusqu'à Noël. J'ai eu l'occasion d'en reparler avec lui mais je ne souhaitais plus continuer ce travail".

Le 25 novembre 2005, la caisse a relevé qu'il n'était pas établi que l'employeur faisait systématiquement des critiques à la recourante et que des reproches ne justifiaient en aucun cas une démission.

Cette écriture a été transmise à la recourante pour information et la cause gardée à juger.

EN DROIT

La loi genevoise sur l’organisation judiciaire (LOJ) a été modifiée et a institué, dès le 1er août 2003, un Tribunal cantonal des assurances sociales, composé de 5 juges, dont un président et un vice-président, 5 suppléants et 16 juges assesseurs (art. 1 let. r et 56 T LOJ).

Suite à l’annulation de l’élection des 16 juges assesseurs, par le Tribunal fédéral le 27 janvier 2004 (ATF 130 I 106), le Grand Conseil genevois a adopté, le 13 février, une disposition transitoire urgente permettant au Tribunal cantonal des assurances sociales de siéger sans assesseurs à trois juges titulaires, ce, dans l’attente de l’élection de nouveaux juges assesseurs.

Conformément à l'art. 56 V al. 1 let. a ch. 8 LOJ, le Tribunal cantonal des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’article 56 LPGA qui sont relatives à la loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 25 juin 1982 (LACI).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

Interjeté dans les délai et forme prévus par la loi, le recours est recevable (art. 60 et 61 LPGA, par renvoi de l’art. 1 al. 1 de loi fédérale sur l’assurance-chômage obligatoire et l’indemnité en cas d’insolvabilité du 25 juin 1982 - LACI, et art. 89B de la loi genevoise sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA).

Le litige porte sur la suspension du droit de la recourante à l'indemnité de chômage pour une durée de 31 jours.

Selon l'art. 30 al. 1 let. a LACI, l'assuré doit être suspendu dans l'exercice de son droit à l'indemnité lorsqu'il est sans travail par sa propre faute. Tel est notamment le cas de l'employé qui a résilié lui-même le contrat de travail, sans être préalablement assuré d'un autre emploi, à moins qu'on n'eût pu exiger de lui qu'il conservât son ancien emploi (art. 44 al. 1 let. b OACI). Il y a lieu d'admettre de façon restrictive les circonstances pouvant justifier l'abandon d'un emploi (DTA 1989, n° 7 p. 89, consid. 1a et les références; voir également ATF 124 V 234). La durée de la suspension est proportionnelle à la gravité de la faute (art. 30 al. 3 LACI). Elle est de 1 à 15 jours en cas de faute légère, 16 à 30 jours en cas de faute de gravité moyenne, et 31 à 60 jours en cas de faute grave (art. 45 al. 2 let. a à c OACI). Il y a notamment faute grave lorsque l'assuré abandonne un emploi réputé convenable sans être assuré d'obtenir un nouvel emploi (art. 45 al. 3 OACI; ATFA du 12 avril 2005, cause C 185/04).

a. En l'espèce, il n'est pas contesté que la recourante a résilié de sa propre initiative le contrat de travail qui la liait à son employeur. Elle ne saurait dès lors exciper de sa faute au sens de l'art. 44 al. 1 lit. B OACI que si elle était assurée d'un autre emploi ou si on ne pouvait exiger qu'elle conservât son ancien emploi.

b. La recourante prétend que la continuation des rapports de travail lui était devenue insupportable dès lors que la veille de son départ en vacances, l'employeur avait émis des critiques sur son travail. Elle était restée abasourdie et n'avait pu discuter avec lui. Elle avait donc décidé le jour-même d'envoyer sa lettre de démission.

Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral des assurances, des désaccords sur le montant du salaire ou un rapport tendu avec des supérieurs ou des collègues de travail ne suffisent pas à justifier l'abandon d'un emploi. Dans ces circonstances, on doit, au contraire, attendre de l'assuré qu'il fasse l'effort de garder sa place jusqu'à ce qu'il ait trouvé un autre emploi (STAUFFER, Bundesgesetz über die obligatorische Arbeitslosenversicherung und Insolvenzentschädigung, p. 41 ad art. 30 et les références; SVR 1997 AlV n° 105 p. 323 consid. 2a; DTA 1986 n° 23 p. 90 consid. 2b). Par contre, on ne saurait en règle générale exiger de l'employé qu'il conserve son emploi, lorsque les manquements d'un employeur à ses obligations contractuelles atteignent un degré de gravité justifiant une résiliation immédiate au sens de l'art. 337 CO (RUBIN, Assurance-chômage, Droit fédéral, Survol des mesures de crise cantonales, Procédure, Delémont 2005, p. 275; MUNOZ, La fin du contrat individuel de travail et le droit aux indemnités de l'assurance-chômage, Lausanne 1992, p. 182; ATF du 12 avril 2005, cause C 185/04).

En l'espèce, les motifs invoqués par la recourante, qui se rapportent exclusivement à des critiques formulées par son employeur la veille de son départ en vacances, soit à une seule occasion, et alors même qu'elle considérait par ailleurs le travail comme "excellent", ne sont pas de nature à justifier qu'il fût mis fin aux rapports de travail sans garantie d'un nouvel emploi. On ne saurait en particulier voir dans les allégués de la recourante un juste motif de résiliation. Dans ces conditions, la caisse était en droit de considérer qu'il pouvait être exigé de la recourante qu'elle conservât son emploi au sein de la société jusqu'à ce qu'elle fût assurée d'avoir obtenu un nouveau contrat. Il ne peut dès lors lui être fait grief d'avoir considéré que le comportement de la recourante était constitutif d'une faute grave et d'avoir prononcé une suspension du droit à l'indemnité de chômage d'une durée de 31 jours, correspondant à la sanction minimale prévue pour ce type de fautes.

Partant, le recours ne peut qu'être rejeté.


PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES

Statuant

(conformément à la disposition transitoire de l’art. 162 LOJ)

A la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

Le rejette.

Dit que la procédure est gratuite.

Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification par plis recommandé adressé au Tribunal fédéral des assurances, Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE, en trois exemplaires. Le délai ne peut être prolongé. Le mémoire doit : a) indiquer exactement quelle décision le recourant désire obtenir en lieu et place de la décision attaquée; b) exposer pour quels motifs il estime pouvoir demander cette autre décision; c) porter sa signature ou celle de son représentant. Si le mémoire ne contient pas les trois éléments énumérés sous lettres a) b) et c) ci-dessus, le Tribunal fédéral des assurances ne pourra pas entrer en matière sur le recours qu’il devra déclarer irrecevable. Le mémoire de recours mentionnera encore les moyens de preuve, qui seront joints, ainsi que la décision attaquée et l’enveloppe dans laquelle elle a été expédiée au recourant (art. 132, 106 et 108 OJ).

 

La greffière

 

Nancy BISIN

 

La Présidente

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties et au Secrétariat d’Etat à l’économie par le greffe le