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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4437/2016

ATAS/1079/2018 du 19.11.2018 ( AI ) , ADMIS

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/4437/2016 ATAS/1079/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 19 novembre 2018

6ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée au LIGNON, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Mélanie MATHYS DONZE

 

 

recourante

 

contre

OFFICE DE L'ASSURANCE-INVALIDITÉ DU CANTON DE GENÈVE, sis rue des Gares 12, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après : l’assurée ou la recourante), née le ______ 1973, de nationalité Suisse, originaire d’Haïti, mariée, mère de deux enfants nés en 2003 et 2006, titulaire d’un diplôme d’esthéticienne (1994), d’un certificat de massage sportif (1995) et d’un certificat de formation horlogère option assemblage (2008), a exercé comme dernier emploi, du 1er juillet 2002 au 25 septembre 2007 pour B______ SA, en tant qu’agente de production polyvalente (réglage et polissage sur machine automatique de polissage).

2.        Le 28 avril 2004, l’assurée a été opérée par le docteur C______, FMH chirurgie de la main, d’un syndrome du tunnel carpien et teno-synovite stenose de quervain au poignet droit dans le post-partum.

3.        Le 24 juin 2004, l’assurée a été opérée par la Dr C______ d’une ténosynovite substénosante au poignet gauche et d’un syndrome du tunnel carpien gauche.

4.        Le 12 février 2009, le docteur D______, FMH neurologie, a effectué un bilan neurologique et électroneuromyographique et conclut à des signes séquellaires d’une neuropathie sensitive myélinique du nerf médian droit dans le canal carpien après décompression chirurgicale. En particulier, il n’y avait pas de signe en faveur d’une neuropathie lésionnelle des nerfs cubitaux ni du nerf médian gauche. Il se demandait si les douleurs au niveau de la face ventrale du poignet droit n’étaient pas en rapport avec une tendinite des fléchisseurs du carpe. Par ailleurs, l’assurée présentait des acroparesthésies intermittentes à prédominance nocturne, vraisemblablement posturales, dans le territoire des nerfs cubitaux sans atteinte lésionnelle objectivable.

5.        Le 19 mars 2009, l’assurée a été opéré par le Dr C______ d’un syndrome du tunnel du fléchisseur radial du carpe au poignet droit.

6.        Le 24 septembre 2010, une scintigraphie osseuse a conclu à une absence d’évidence scintigraphique d’une souffrance osseuse multi-focale à l’origine de la symptomatologie de l’assurée. Découverte fortuite d’une hyperfixation bien délimitée du tiers moyen de la diaphyse moyenne du tibia droit en regard d’un épaississement de la corticale postérieure sans ostéolyse suspecte, sans réaction périostée agressive d’allure quiescente.

7.        Le 2 janvier 2011, la doctoresse E______, FMH médecine interne, a rempli un rapport médical AI attestant de diagnostics de ténosynovite substénosante au poignet gauche en 2004 (décompression chirurgicale), tunnel carpien droit et kyste ténosynovial droit opéré en 2009, neuropathie ulnaire droite opérée en 2014, lombo-sciatalgies (hernie discale) en 1998, status post-réduction mammaire bilatérale en 2007. Elle suivait l’assurée depuis 1997 ; il existait une persistance d’une gêne douloureuse au coude, une perte de force aux mains, des troubles de la sensibilité, des lombalgies chroniques en exacerbation actuellement ; elle était incapable d’exercer un travail manuel avec les mains (ouvrière dans l’horlogerie), en raison d’une gêne fonctionnelle des mains et de douleurs dorsolombaires chroniques ; on pouvait s’attendre à une reprise de l’activité professionnelle dans un poste adapté.

8.        Une IRM du 10 août 2011, a conclu à une hernie discale sous forme d’une protrusion L4-L5, comprimant de manière modérée la partie ventrale du sac dural, en contact étroit avec les racines L5 à leur sortie du sac dural, dans le cadre d’un canal étroit relatif. Discret débord discal L5-S1. Discrète discopathie L4-L5 et L5-S1.

9.        Le 21 septembre 2011, l’assurée a été opérée par le Dr C______ d’une neuropathie ulnaire au coude droit.

10.    Le 3 octobre 2011, le Dr F______ a attesté de séances d’infiltration en septembre 2011 avec amélioration de la hernie discale.

11.    Le 7 novembre 2011, l’assurée a déposé une demande de prestations d’invalidité.

12.    Le 10 janvier 2012, le Dr C______, a rempli un rapport médical AI attestant de polyarthralgies chroniques ; il suivait l’assurée depuis juin 2002 ; il existait une diminution de la force et de l’endurance ; une évaluation professionnelle était indispensable et la capacité de travail était totale dans une activité adaptée ; l’assurée était en incapacité de travail totale post-opératoire depuis le 22 septembre 2011.

13.    Le 10 janvier 2012, les docteurs G______, médecin interne et M______, médecin adjoint au service de neurologie des Hôpitaux Universitaires de Genève (ci-après : HUG), ont rendu un rapport selon lequel, cliniquement, l’assurée souffrait d’une lombosciatalgie L5 avec un déficit sensitivomoteur. L’imagerie montrait un corrélat morphologique avec hernie discale L4-L5. Au vu de la constatation clinico-radiologique, ils pouvaient poser une indication pour une intervention neurochirurgicale ; l’assurée y réfléchissait.

14.    Une IRM de la colonne lombaire du 17 janvier 2012 a conclu à une protrusion discale L4-L5 médiane et paramédiane droite, d’extension inchangée par rapport aux comparatifs d’août 2011, comprimant l’émergence de la racine L5 droite, à l’origine de la symptomatologie. Rétrécissement modéré du canal lombaire à ce niveau.

15.    Le 20 janvier 2012, le Service Médical Régional AI (ci-après : SMR) a estimé qu’il convenait de questionner la Dresse E______.

16.    Le 1er mars 2012, la Dresse E______ a attesté d’une capacité de travail entière dans un poste adapté (sans manutention fine ni lourde en raison du problème dorsal) et d’une capacité de travail nulle comme ouvrière en bijouterie ou opératrice.

17.    Le 7 mars 2012, le SMR a estimé qu’une expertise rhumatologique était nécessaire.

18.    Le 16 mars 2012, l’assurée a été opérée d’une hernie discale L4-L5 droite par le docteur H______, médecin adjoint au service de neurochirurgie des Hôpitaux Universitaires de Genève (ci-après : HUG).

19.    Une IRM du 29 mai 2012 a conclu à un status post-opératoire L4-L5 droit sans complication notable. Discopathie L5-S1 avec petite fissuration médiale prenant le contraste.

20.    Le 30 mai 2012, le docteur I______, FMH médecine interne et rhumatologique, a rendu son rapport d’expertise.

L’assurée se plaignait de douleurs lombaires droites avec irradiation au niveau de la fesse droite puis de la face postéro-latérale de la cuisse droite, de douleurs exacerbées par la position assise et la marche au-delà d’une heure ainsi que la charge ; il persistait de discrètes douleurs au niveau du coude droit. Le 16 mars 2012, l’assurée avait subi une cure de hernie discale L4-L5 droite par le Dr H______ lequel approuvait une incapacité de travail totale jusqu’au 1er mai 2012. La recrudescence des douleurs associées à un changement topographique des douleurs pouvait faire évoquer une atteinte radiculaire L4 ; l’état n’était pas stabilisé ; actuellement l’assurée était incapable de travailler mais en cas d’évolution favorable de la sciatalgie, les activités antérieures étaient exigibles ; il n’y avait pas de séquelle incapacitante due aux interventions de chirurgie de la main.

21.    Le 25 mai 2012, le Dr H______ a constaté des pseudos radiculalgies post-opératoire résiduelles.

22.    Par communication du 7 juin 2012, l’Office de l’assurance-invalidité (ci-après : l’OAI) a refusé des mesures d’intervention précoce et de réadaptation professionnelle.

23.    Le 12 septembre 2012, le Dr H______ a rendu un rapport de consultation suite aux plaintes de l’assurée concernant l’aggravation de douleurs lombaires droites non expliquées par une radiculalgie résiduelle L4-L5 ou une irradiation L1-L2 ; il fallait investiguer un problème au niveau de la hanche.

24.    Le 18 octobre 2012, le Dr C______ a attesté d’un état stationnaire et indiqué que durant l’automne une nouvelle injection intra-articulaire était prévue ; un travail adapté était possible.

25.    Le 29 octobre 2012, la Dresse E______ a attesté d’un état de santé amélioré suite à l’intervention de la hernie, par une légère amélioration des dorsalgies ; les douleurs au poignet et coude droit se chronicisaient ; elle présentait des difficultés à se baisser, à porter, à faire des travaux fins ; elle était capable de travailler à 50 % dans un travail de réceptionniste ou un petit travail de bureau dès 2013.

26.    Le 15 janvier 2013, la doctoresse J______, FMH rhumatologie, a rempli un rapport médical AI attestant d’hernie discale L4-L5 D – sciatalgies droites, périarthrite de la hanche droite, status opération du coude droit, d’une tendinite et du tunnel carpien gauche et droit ; elle suivait l’assurée depuis le 13 mai 2011, actuellement elle présentait des lombalgies avec irradiation S1 à droite, sans déficit, des douleurs rétrotrochantenienne infiltrée avec succès relatif ; l’incapacité de travail était totale depuis 2011 ; elle avait des douleurs au poignet droit, lombaire (avec irradiation au membre inférieur droit) et au coude gauche, un reconditionnement musculaire était nécessaire ; il était impossible de dire si une reprise de l’activité professionnelle était possible.

27.    Le 8 avril 2013, la Dresse E______ a attesté d’un état de santé aggravé par la péjoration des douleurs chroniques de ténosynovites persistante aux poignets et au coude droit, avec épuisement ; l’incapacité de travail était totale.

28.    Le 12 avril 2013, la Dresse J______ a attesté d’un état de santé amélioré sur le plan lombaire ; la capacité de travail était totale du point de vue lombaire mais il y avait des douleurs du poignet et au coude droit.

29.    Le 20 avril 2013, le Dr C______ a attesté d’un état de santé stationnaire, inchangé pour les membres supérieurs, et de douleurs plurifocales ; la capacité de travail était totale, s’agissant des membres supérieurs, dans un travail adapté.

30.    Le 18 juillet 2013, la doctoresse K______ du SMR a estimé que l’activité de polisseuse n’était plus adaptée mais que la capacité de travail était entière dans une activité adaptée. Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : éviter tout port de charge, et toute sollicitation répétitive des membres supérieurs et notamment des mains (activités impliquant de la dextérité pour des gestes de précision). Eviter les positions statiques prolongées (assis/debout), le porte à faux du rachis et les travaux en position accroupie ou à genoux. Privilégier un poste ou l’assurée pourrait changer de position à sa guise. La capacité de travail dans une activité adaptée était de 100 % en mars 2012, nulle dès mai 2012, de 50 % dès octobre 2012 et entière dès janvier 2013.

31.    Le 23 juillet 2013, l’OAI a fixé le degré d’invalidité de l’assurée à 11 %.

32.    Par projet de décision du 26 juillet 2013, l’OAI a rejeté la demande de prestations de l’assurée.

33.    Le 16 septembre 2013, l’assurée, représentée par le syndicat UNIA, a observé qu’elle contestait une capacité de travail totale dans une activité adaptée, laquelle n’avait pas été déterminée par l’OAI.

34.    La réadaptation professionnelle de l’OAI a convoqué l’assurée le 5 septembre 2014 et conclut à un état de santé non stabilisé, de sorte que des mesures professionnelles n’étaient pas indiquées.

35.    Le 26 juin 2014, les docteurs L______, médecin interne auprès du service de neurochirurgie des HUG, et M______ ont planifié une chirurgie après avoir constaté une récidive d’hernie discale L4-L5 à droite sous discopathie dégénérante L4-L5-L5-S1.

36.    Le 29 août 2014, l’assurée a été opérée par les docteurs N______, médecin interne au service de neurochirurgie des HUG, et M______ (intervention de spondylodèse L4-S1).

37.    Le 4 septembre 2014, les docteurs O______, médecin interne, M______ et P______, médecin chef du service, ont constaté une évolution favorable permettant une sortie le 5 septembre 2014.

38.    Le 31 octobre 2014, le Dr M______ a indiqué une persistance des douleurs lombaires, dans la face droite ; le résultat de l’opération était relativement favorable mais une évaluation était nécessaire dans quelques mois.

39.    Le 2 décembre 2014, le Dr M______ a constaté une amélioration progressive et douce.

40.    Le 6 février 2015, la Dresse E______ a attesté d’un état de santé stationnaire avec une très discrète amélioration des douleurs post opératoire ; une reprise de travail n’était actuellement pas envisageable.

41.    Le 27 février 2015, le Dr M______ a constaté une nette amélioration de la sciatalgie droite avec persistance d’une paresthésie de l’hallux droit séquellaire et de lombalgies importantes.

42.    Le 28 mai 2015, le Dr M______ a constaté la persistance de lombalgies importantes gênant l’assurée dans sa vie quotidienne, avec amélioration transitoire de 60 % pour trois jours post infiltration foraminale de la racine L4, effectuée par le Docteur Q______, FMH anesthésiologie ; l’évolution post opératoire était difficile. Une IRM lombaire du 26 mai 2015 montrait un rétrécissement foraminal relatif au niveau L4-L5 et L5-S1 à droite avec une racine L5 présentant des critères inflammatoires.

43.    Le 22 juin 2015, le Dr Q______ a évoqué l’absence de cause facettaire mais la possibilité d’une décompensation du disque sus-jacent à la spondylodèse. Si le résultat positif de l’infiltration du nerf L5 ne se maintenait pas, il fallait considérer la possibilité d’une lombosciatalgie séquellaire.

44.    Le 9 octobre 2015, la Dresse K______ a estimé qu’une capacité de travail de 50 % était exigible dans une activité adaptée depuis octobre 2015, selon l’indication de la Dresse E______. Les limitations fonctionnelles étaient les suivantes : capacité fonctionnelles : sur le plan cognitif et psychiatrique il n’y avait pas de limitations à retenir de même pour ce qui était de l’utilisation de ses membres supérieurs (bras et mains). En revanche, il était nécessaire que le poste respecte les limitations fonctionnelles suivantes : pas de port de charges, pas de position statique assise au-delà de quarante-cinq minutes sans possibilité de varier les positions au minimum une fois par heure de préférence à la guise de l’assurée, pas de position statique de l’assurée, pas de position statique debout prolongée (< 30 min), pas de position en porte-à-faux ou en antéflexion du rachis et surtout contre résistance. Eviter les positions en génuflexion ou accroupies, pas de montée ou descente d’escaliers. Eviter les activités en hauteur ou sur terrain instable.

45.    Le 28 janvier 2016, la réadaptation a proposé un stage d’orientation professionnelle du 1er février au 1er mai 2016 et le 29 janvier 2016 l’OAI l’a pris en charge auprès de l’entreprise sociale privée PRO (ci-après : PRO).

46.    Le rapport d’évaluation de PRO du 17 mai 2016 a constaté onze jours de présence suivis d’une incapacité de travail pour maladie et a conclu à l’incapacité de l’assurée de reprendre une activité dans l’économie traditionnelle ou dans un milieu protégé. Les douleurs l’empêchaient d’exécuter même les tâches les plus légères. De plus, son état somatique influençait visiblement son moral ; l’assurée pensait qu’il était important de travailler et d’être indépendante. Le fait de ne pas réussir à réaliser ce besoin l’affligeait.

47.    Le 3 juin 2016, l’OAI a fixé le degré d’invalidité de la recourante en référence à l’année 2015 à 61 %, compte tenu d’une activité exigible à 50 %, avec une déduction de 20 % sur le revenu d’invalide et un revenu sans invalidité en 2015 de CHF 56'520.-.

48.    Le 20 juin 2016, le Dr C______ a attesté que l’assurée présentait des pathologies pluri-focales des deux membres supérieurs. Ces pathologies s’étaient développées dans un contexte rhumatismal aspécifique et se manifestaient de façons multiples tant par des hyperlaxités ligamentaires douloureuses, des neuropathies périphériques compressives et des polyarthralgies. Cet état douloureux était invalidant pour toutes les activités manuelles même légères en particulier les mouvements répétitifs ou le port de charge.

49.    Le 1er juillet 2016, la doctoresse R______ du SMR a estimé qu’aucun élément ne permettait d’expliquer l’échec du stage.

50.    Le 16 septembre 2016, la réadaptation a estimé que d’autres mesures professionnelles n’étaient pas indiquées.

51.    Le 26 septembre 2016, l’OAI a fixé le degré d’invalidité en référence à l’année 2013 à 21 %, compte tenu d’une activité exigible de 100 %, avec une déduction de 15 % sur le revenu d’invalide et un revenu sans invalidité de CHF 55'720.-. Le même jour, il l’a fixé à 60 % en référence à l’année 2012, compte tenu d’une activité exigible à 50 %, avec une déduction de 20 % sur le revenu d’invalide et un revenu sans invalidité de CHF 51'638.-.

52.    Par projet d’acceptation de rente du 29 septembre 2016, l’OAI a alloué à la recourante une rente entière d’invalidité du 1er septembre au 31 décembre 2012, un trois-quarts de rente du 1er janvier au 31 mars 2013, une rente entière du 1er août 2014 au 31 décembre 2015 et un trois quart de rente dès le 1er janvier 2016.

L’incapacité de travail était totale dès le 21 septembre 2011 puis de 50 % dans une activité adaptée dès le 1er octobre 2012 (entrainant un degré d’invalidité de 60 %) ; ensuite la capacité de travail était de 100 % dans une activité adaptée dès le 1er janvier 2013, puis nulle dès le 1er août 2014 ; enfin il existait une capacité de travail de 50 % dans une activité adaptée dès le 1er octobre 2015.

53.    Par trois décisions du 21 novembre 2016, l’OAI a alloué à la recourante :

-          Une rente entière d’invalidité du 1er septembre au 31 décembre 2012, soit un arriéré de rente de CHF 14'323 (dont CHF 3'649.35 de compensation).

-          Un trois-quarts de rente d’invalidité du 1er janvier au 31 mars 2013, soit un arriéré de rente de CHF 8'129.-.

-          Une rente entière d’invalidité du 1er août 2014 au 31 décembre 2015 et un trois-quarts de rente d’invalidité dès le 1er janvier 2016, soit un arriéré de rente de CHF 91'090.-.

54.    Le 23 décembre 2016, l’assurée, représentée par un avocat, a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice à l’encontre des trois décisions du 21 novembre 216 en concluant à leur annulation et à l’octroi d’une rente entière d’invalidité depuis le 1er septembre 2012. Le SMR s’était fondé sur l’avis de la Dresse E______ du 6 février 2015. Cette médecin ne relevait qu’une très légère amélioration des douleurs post opératoires et ne précisait pas la capacité de travail dans un poste adapté.

Les décisions litigieuses n’étaient pas motivées, le dossier était très peu documenté, pour la période 2013-2014 ; pour 2013, il ressortait néanmoins des avis du médecin-traitant que sa capacité de travail était nulle dans l’activité habituelle et ne pouvait être évaluée dans une activité adaptée (Dresse J______ avis de janvier 2013), que son état s’était aggravé et que sa capacité de travail était nulle (Dresse E______ avis d’avril 2013) et qu’une capacité de travail était possible dans une activité ne sollicitant pas du tout les membres supérieurs (Dr C______ avis d’avril 2013).

Il était étonnant que le SMR retienne une capacité de travail totale en 2013 et l’OAI avait failli à son devoir d’instruction pour 2014 ; l’aggravation avait débuté de façon évidente avant août 2014, date de l’intervention chirurgicale, comme attesté par les Drs E______ et M______ ; l’aggravation avait débuté en tous les cas depuis décembre 2013 ; pour 2016, la tentative de réadaptation chez PRO avait été un échec alors même qu’il s’agissait d’une activité adaptée et l’OAI n’avait à tort pas requis l’avis des médecins traitants ; or, son état ne s’était pas amélioré et elle continuait de souffrir, avec d’importantes limitations fonctionnelles ; elle prenait de puissants antidouleurs et portait des attelles aux poignets ; à l’automne 2016, elle avait encore été opérée au coude. Une expertise judiciaire devait être ordonnée si la chambre de céans n’admettait pas l’évidence de l’invalidité.

La recourante a produit :

-          Une attestation du 5 décembre 2016 de la Dresse E______ résumant les arrêts de travail de la recourante (100 % du 15 mars au 1er mai 2012 – dès le 5 septembre 2014 pour six semaines – du 25 février au 30 avril 2015 – dès le 29 février 2016) et indiquant que l’état douloureux chronique persistant et évoluant depuis 2014 ne permettait pas d’envisager un retour dans le monde professionnel.

-          Un bilan d’évaluation de la douleur (questionnaire des HUG) du 16 juin 2016 et un questionnaire d’OSWESTNY du 21 novembre 2016 de l’ensemble hospitalier de la Côte.

55.    Trois recours ont été enregistrés par la chambre de céans (A/4437/2016 – A/4438/2016 et A/4439/2016) puis joints sous le n° A/4437/2016, par ordonnance du 31 janvier 2017.

56.    Le 3 janvier 2017, la Dresse R______ du SMR a rappelé que le Dr C______ avait attesté d’une capacité de travail de 100 % dans une activité adaptée, sans sollicitation des membres supérieurs et que la Dresse E______ avait confirmé par téléphone en octobre 2015 une capacité de travail de 50 % dans une activité adaptée ; l’état de santé du coude gauche opéré en octobre 2016 n’était pas clair et on ne savait pas si les limitations fonctionnelles avaient changé, ni si l’état de santé s’était globalement aggravé après l’avis du SMR du 9 octobre 2015.

57.    Le 7 février 2017, l’OAI a conclu préalablement à ce que la recourante produise des pièces médicales circonstanciées relativement à l’atteinte du coude gauche.

58.    Le 24 février 2017, la recourante a produit un avis du Dr C______ du 13 janvier 2017 selon lequel la problématique étant complexe, il ne lui était pas possible de se prononcer sur une capacité résiduelle globale, que s’agissant des membres supérieurs une capacité de travail totale était possible dans une activité sans mouvement répétitif même léger et sans charge (telle que réceptionniste avec usage intermittent du clavier).

Elle a relevé qu’outre les atteintes aux membres supérieurs, elle souffrait de poly-algies de sorte que l’audition des Drs M______ et Q______ était nécessaire.

59.    Le 3 mars 2017, la recourante a communiqué :

-          Une convocation du centre multidisciplinaire d’étude et de traitement de la douleur (ci-après : centre de la douleur) pour le 17 juin 2016,

-          Une convocation du centre de la douleur pour le 7 novembre 2016,

-          Un courrier du 6 décembre 2016 du docteur S______, chef de clinique au centre de la douleur sollicitant la caisse maladie Mutuel Assurance Maladie pour la prise en charge d’un appareil électroneurostimulateur transcutanée (TENS) en raison de douleurs neurogènes persistantes sur atteinte radiculaire L5 droite de la recourante,

-          Un rapport opératoire pour une intervention du 26 octobre 2016 par le Dr C______ en raison d’une neuropathie ulnaire au coude gauche.

Elle a relevé que le TENS n’était pas efficace de sorte que se posait la question d’une intervention chirurgicale au niveau lombaire afin de poser des électrodes au niveau de la colonne, par le docteur T______, FMH anesthésiologie.

60.    Le 9 mars 2017, la recourante a communiqué un avis du Dr M______ du 28 février 2017 selon lequel elle présentait des lombosciatalgies bilatérales persistantes malgré deux opérations lombaires, ce qui configurait un syndrome du dos rebelle à la chirurgie (Failed Back Surgery Syndrom – FBSS). Les douleurs présentées par la recourante étaient extrêmement invalidantes, avec une dégradation notable de sa qualité de vie. Le Dr S______, anesthésiste et spécialiste de la douleur des HUG, avait vu la recourante en consultation le 23 novembre 2016 et estimait une invalidité selon le score d’Oswestry (ODI) à 54 %, compatible avec une incapacité fonctionnelle sévère.

Il était étonnant que l’OAI tienne compte d’une capacité de travail résiduelle dès le 1er janvier 2016 car l’assurée était inapte au travail en 2016 en raison des douleurs dorso-lombaires persistantes, même dans une activité adaptée ; entre janvier et mars 2013, elle était suivie par le Dr H______ et l’évolution avait été défavorable après l’intervention de 2012 ; entre mars et juillet 2014, elle était suivie par le Dr Q______ qui pourrait évaluer sa capacité de travail.

La recourante a relevé qu’il ressortait clairement de cet avis qu’elle présentait une invalidité totale ; il convenait ainsi d’entendre le Dr H______.

61.    Le 10 mars 2017, le docteur U______ du SMR a estimé que le Dr C______ confirmait une capacité de travail de 100 % dans une activité adaptée, de sorte que l’intervention au coude n’avait pas eu d’incidence durable ; le Dr S______ indiquait que le TENS avait permis une très nette amélioration de la douleur, de sorte que la prise en charge par le centre de la douleur avait permis une nette amélioration ; la capacité de travail de 50 % devait donc être confirmée.

62.    Le Dr U______ a estimé le 16 mars 2017 que le Dr M______ ne fournissait aucun élément médical nouveau et que le suivi par le centre de la douleur était postérieure à la décision de l’OAI.

63.    Le 17 mars 2017, l’OAI a conclu au rejet du recours en se fondant sur les avis du SMR et en relevant que sa décision était suffisamment motivée.

64.    Le 10 avril 2017, la recourante a répliqué en relevant que l’échec du stage chez PRO était dû à ses problèmes de santé ; le SMR admettait que l’état de santé s’était aggravé dès août 2014 mais n’admettait une baisse de la capacité de travail que dès octobre 2015 ; les avis du SMR étaient en contradiction avec ceux des spécialistes ; le Dr S______ n’avait pas constaté une amélioration des douleurs mais préconisé un essai à domicile du TENS ; le Dr C______ avait attesté d’une faible capacité de travail et le Dr M______ avait précisé la capacité de travail depuis 2012 en excluant toute capacité actuelle ainsi qu’entre l’intervention de 2012 et mars 2013 ; son état ne s’était pas du tout amélioré comme le prétendait le SMR mais détérioré ; enfin les décisions litigieuses n’étaient pas du tout motivées.

65.    Le 20 avril 2017, l’OAI a persisté dans ses conclusions.

66.    Le 4 septembre 2017, la chambre de céans a entendu les parties en audience de comparution personnelle.

La recourante a déclaré : « Mon état de santé ne va pas du tout car j’ai des douleurs en permanence dans le bas du dos qui irradient dans la jambe droite. Les deux interventions n’ont pas amélioré la situation, j’ai même une cicatrice qui s’est fibrosée et qui appuie sur le nerf. Je dois prendre de l’Irfen 600 trois fois par jour, du Dafalgan 1g deux fois par jour et un patch de morphine. Je réfléchis à une intervention visant la pose d’électrode. Je dois revoir le Dr M______ à ce sujet. Le but est de neutraliser la douleur en pressant sur un bouton qui serait posé au niveau du ventre. L’opération ne garantit toutefois pas de réussite. J’ai toujours des douleurs aux deux poignets en raison d’arthrose et je dois porter une protection pour les deux coudes sinon j’ai des douleurs.

Je me sens inutile car je ne peux pas faire grand-chose dans le ménage et suis aidé par mon mari et mes enfants.

Actuellement je suis suivie par la Dresse E______, je dois également voir le Dr M______ et je suis aussi suivie par le Dr C______. Je ne vois plus le Dr Q______ lequel m’avait fait des infiltrations dans le dos. Je n’ai plus de suivi non plus avec le Dr H______ lequel m’a toutefois adressé au chirurgien qui propose de me poser des électrodes.

Je considère que je suis totalement incapable de travailler en raison des douleurs permanentes.

Vous me dites que la Dresse E______ a indiqué à l’AI que j’étais capable de travailler à 50 %. Cela est dû au fait qu’en octobre 2015 j’avais la volonté d’essayer de travailler à 50 % et j’en avais fait part à ma médecin. Toutefois je n’ai pas réussi à tenir ce rythme quand j’ai tenté d’effectuer un stage organisé par l’AI et j’ai dû abandonner celui-ci en raison des douleurs.

Je dois aussi prendre un cachet pour dormir et je suis réveillée toutes les nuits à cause des douleurs. L’effet TENS n’a pas du tout marché et les douleurs n’ont pas du tout diminuées. Je porte des attelles aux poignets, des courroies pour les coudes et deux ceintures pour le dos. Je vais commencer un traitement de physiothérapie en piscine prochainement. Je ne peux marcher que dix minutes et seulement sur terrain plat. Je fais le minimum dans le ménage. Je fais à manger mais sans porter de casserole et je ne peux pas passer l’aspirateur ni faire de gros nettoyage.

Je souffre du dos depuis 2010, même avant. Après l’intervention de 2012 cela a été un peu mieux pendant deux mois puis à nouveau très mal. En 2002, j’avais des problèmes dans le haut du dos et j’ai subi une réduction mammaire pour cette raison. Après l’intervention de 2014 cela a également été un peu mieux pendant deux mois puis à nouveau très mal et j’ai fait des infiltrations pratiquées par le Dr Q______.

J’ai dû cesser le stage chez PRO car les douleurs se sont intensifiées, je me suis même évanouie de douleur. Mon poste de travail était adapté. Je devais effectuer des mouvements répétitifs. Je n’arrive pas à rester debout ou assise très longtemps, je dirais environ dix minutes. Je n’ai pas de formation de bureau, par exemple la dactylographie.

Je vais voir le Dr M______ pour essayer de trouver une solution à mon problème. »

67.    Le 5 décembre 2017, la recourante a informé la chambre de céans qu’elle s’était soumise à une IRM le 23 novembre 2017 dont elle fournirait prochainement le rapport ; elle persistait à requérir l’audition de ses médecins.

68.    Le 11 décembre 2017, la chambre de céans a informé les parties qu’elle entendait confier une expertise rhumatologique au Professeur V______, chef du service de rhumatologie du Centre hospitalier universitaire vaudois (ci-après : CHUV), et ordonner aussi une expertise en neurochirurgie ; un délai a été fixé aux parties au 2 janvier 2018 pour proposer le nom d’un expert neurochirurgien.

69.    Le 14 décembre 2017, la recourante a communiqué diverses pièces médicales :

-          Un rapport du Dr M______ du 9 novembre 2017 attestant de lombosciatalgies L5 droite persistantes et de Failed Back Surgery Syndrome ; l’assurée était extrêmement épuisée par la persistance de ses douleurs, qui étaient réfractaires à tout traitement, y compris les infiltrations, une participation à un programme PROMIDOS et les chirurgies ; il était notamment proposé une IRM lombaire le 23 novembre 2017 et un SPECT-CT le 13 novembre 2017.

-          Le rapport de scintigraphie osseuse avec SPECT/CT du 13 novembre 2017 concluant à la présence d’une hyperactivité intense sur les plateaux vertébraux de part et d’autre de l’espace inter-somatique L4-L5 au niveau de l’interface avec la cage. Absence de visualisation de pont osseux à ce niveau. Mise en évidence d’un foyer d’hyperfixation d’intensité modérée dans le greffon postérieur L5-S1 latéralisé à gauche avec persistance d’un liseré radio-transparent, témoignant d’une non-fusion.

-          Le rapport d’IRM de la colonne lombaire du 23 novembre 2017 concluant à un signe de fibrose post-opératoire récessale et foraminale L4-L5 et L5-S1 à droite, avec signes de conflit bifocale avec la racine L5 droite.

-          Un rapport de RX colonne lombaire du 28 novembre 2017 décrivant un contexte spondylodèse L4-L5-S1 fixée par trois paires de vis pédiculaire. Le matériel était en place. Contexte après résection des apophyses épineuses de L4 et L5. On note un minime liseré radio-transparent autour de la vis pédiculaire droite en L4. Status après mise en place de prothèses inter-somatiques. Sur le cliché de face, la colonne lombaire était un peu vers la gauche. Sur le cliché de profil, la lordose était conservée. Les lignes intervertébrales antérieures, postérieures et inter-épineuses étaient régulières. En flexion et en extension, pas d’anomalie identifiée, en particulier pas de signe d’instabilité. Probable atteinte dégénérative des articulaires postérieures en L3-L4. Stérilet.

70.    Le 14 décembre 2017, l’OAI a proposé comme experts les docteurs W______ et X______.

71.    Le 21 décembre 2017, la recourante a proposé la doctoresse Y_____.

72.    Le 9 janvier 2018, la recourante a communiqué un rapport du 18 décembre 2017 du Dr M______ attestant que l’assurée présentait un Failed Back Surgery Syndrome avec une pseudarthrose au niveau du montage métallique qui pouvait faire l’objet d’une nouvelle révision chirurgicale, avec remplacement du matériel d’ostéosynthèse et une nouvelle greffe postérieure et intradiscale L4-S1. Cette opération devrait se faire avant de pouvoir discuter d’une éventuelle implantation de stimulateur médullaire pour ses radiculalgies persistantes.

73.    Le 26 janvier 2018, la recourante a indiqué qu’elle devait subir une intervention chirurgicale aux HUG le 8 mars 2018.

74.    Le 9 février 2018, la chambre de céans a informé les parties qu’elle entendait confier une expertise bidisciplinaire aux Professeurs V______, FMH rhumatologie, et Z_____, FMH neurochirurgie, et leur a communiqué le projet de mission d’expertise. Un délai leur a été imparti pour qu’elles se prononcent sur une éventuelle récusation des experts ainsi que sur les questions libellées dans la mission d’expertise.

75.    Le 19 février 2018, les parties ont indiqué qu’elles n’avaient pas de motif de récusation à l’encontre des experts et la recourante a requis un ajout au point II B de la mission d’expertise.

76.    Le Prof. Z_____ ayant renoncé à effectuer l’expertise, la chambre de céans a proposé aux parties le 30 mai 2018 de désigner le docteur Y____, chef de clinique adjoint au sein du service de neurochirurgie du Centre Hospitalier Universitaire de Lausanne (ci-après : CHUV), expert que les parties ont accepté.

77.    Par ordonnance du 12 juin 2018, la chambre de céans a confié une expertise bidisciplinaire aux Drs Y____ et V______, en considérant ce qui suit : l’intimé a calculé le degré d’invalidité de la recourante en se fondant sur une capacité de travail de celle-ci de 50 % dans une activité adaptée, en faisant référence à une appréciation téléphonique de la Dre E______ d’octobre 2015 (avis du SMR du 9 octobre 2015). Or, cette appréciation, uniquement résumée par le SMR, ne tient pas compte de l’avis subséquent de la Dre E______ du 5 décembre 2016 attestant qu’en février 2015, l’évolution était partiellement favorable mais que l’état douloureux chronique persistant et évoluant depuis 2014 ne permettait pas d’envisager un retour dans le monde professionnel ; l’appréciation de l’intimé ne tient pas non plus compte de celle du spécialiste en neurochirurgie, le Dr M______, du 28 février 2017, attestant d’un syndrome du dos rebelle à la chirurgie (Failed Back Surgery Syndrom) et de douleurs extrêmement invalidantes avec une incapacité fonctionnelle sévère et une incapacité de travail totale, même dans une activité adaptée, en tous les cas dès le 1er janvier 2016 ; les avis des médecins traitants vont ainsi clairement à l’encontre de l’évaluation de la capacité de travail de la recourante à laquelle a procédé l’intimé. En outre, les conclusions du rapport de stage effectué par la recourante en 2016 vont dans le même sens que celle des médecins-traitants, en constatant que les douleurs de la recourante l’empêchaient de reprendre une activité dans l’économie traditionnelle ou même dans un milieu protégé.

78.    Le 19 septembre 2018, le Dr Y____ a rendu son rapport d’expertise, en concluant à des diagnostics de syndrome rachidien et radiculaire dans le cadre d’un failed back surgery syndrome et un syndrome douloureux régional des poignets et coudes ; s’agissant des limitations fonctionnelles, il a relevé ce qui suit : au niveau rachidien l’assurée présentait une atteinte très sévère avec une mobilité réduite (distance doigt-sol > 50 cm) ; elle n’arrivait pas à garder la même position assise et elle devait changer de position continuellement. Dans la vie quotidienne, elle présentait des limitations fonctionnelles très importantes et elle était aidée par le mari et une aide-ménagère. Les sorties de la maison étaient de courte durée, avec nécessité de s’arrêter après 150 mètres de marche ou quinze minutes. La vie sexuelle était aussi atteinte. Toutes ces limitations pouvaient être expliquées par les constatations du PEC-CT. Au niveau des membres supérieurs, l’atteinte était aussi importante. Elle présentait une hypersensibilité au niveau de deux coudes (à droite plus qu’à gauche) qui rendait impossible d’appuyer les membres supérieurs sur chaque type de soutien ; en plus l’assurée était gênée par des douleurs aux poignets pendant les mouvements continus des mains.

L’assurée présentait en conséquence une incapacité de travail totale depuis le 21 septembre 2011.

79.    Le 4 octobre 2018, le Dr V______ a rendu son rapport d’expertise, concluant à des diagnostics de syndrome lombo-vertébral et radiculaire dans le cadre d’un failed back surgery syndrome et syndrome douloureux régional des poignets et coude à droite ; s’agissant des limitations fonctionnelles, il a relevé ce qui suit : Actuellement, l’assurée se trouvait dans un stade post opératoire et il ne pouvait finalement pas examiner la mobilité du rachis. Compte tenu de la non-union constaté dans le SPEC-CT et l’inflammation de la racine L5 à droite, il était très probable qu’il persistait des limitations dans tous les mouvements du rachis lombaire ainsi que la capacité de rester assise ou debout de plus de quinze minutes. Concernant les poignets et les coudes, les limitations fonctionnelles étaient moins sévères. La mobilité était conservée. Elle ne pouvait pas s’appuyer sur le coude droit et était limitée par les mouvements répétitifs des poignets et des mains.

L’assurée présentait une capacité de travail de 50 % dès le 1er octobre 2012 dans une activité adaptée et nulle depuis le 29 août 2014 dans toute activité.

Une appréciation consensuelle avait eu lieu entre les experts le 8 août 2018.

80.    Le 17 octobre 2018, le Dr U______ du SMR a rendu un avis selon lequel, à la lecture des expertises judiciaires, au vu de la mise en évidence de la pseudarthrose vraisemblablement présente depuis la deuxième intervention et de l’évolution post-opératoire défavorable après la troisième opération, avec nécessité d’un traitement d’opiacé, il était d’avis qu’il fallait suivre l’avis du Dr Y____ et retenir une capacité de travail nulle dans toute activité dès le 21 septembre 2011.

81.    Le 6 novembre 2018, la recourante a conclu, au vu de l’expertise judiciaire, à l’octroi d’une rente entière d’invalidité depuis le 1er septembre 2012.

82.    Le 8 novembre 2018, l’intimé a conclu à l’admission partielle du recours en ce sens que la recourante avait droit à une rente entière d’invalidité dès septembre 2012.

83.    Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 2 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - RS 831.20).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        A teneur de l'art. 1 al. 1 LAI, les dispositions de la LPGA s'appliquent à l'assurance-invalidité, à moins que la loi n'y déroge expressément.

Toutefois, les modifications légales contenues dans la LPGA constituent, en règle générale, une version formalisée dans la loi de la jurisprudence relative aux notions correspondantes avant l'entrée en vigueur de la LPGA; il n'en découle aucune modification du point de vue de leur contenu, de sorte que la jurisprudence développée à leur propos peut être reprise et appliquée (ATF 130 V 343 consid. 3).

3.        Le délai de recours est de 30 jours (art. 60 al. 1 LPGA). Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable, en vertu des art. 56ss LPGA.

4.        Le litige porte sur le droit de la recourante à une rente entière d’invalidité au-delà du 31 décembre 2012.

5.        Selon la jurisprudence, une décision par laquelle l'assurance-invalidité accorde une rente d'invalidité avec effet rétroactif et, en même temps, prévoit l'augmentation, la réduction ou la suppression de cette rente, correspond à une décision de révision au sens de l’art. 17 LPGA (ATF 130 V 343 consid. 3.5.2; ATF 125 V 413 consid. 2d et les références; VSI 2001 p. 157 consid. 2). Tout changement important des circonstances propre à influencer le degré d'invalidité, et donc le droit à la rente, peut motiver une révision selon l'article 17 LPGA. La rente peut être révisée non seulement en cas de modification sensible de l'état de santé, mais aussi lorsque celui-ci est resté en soi le même, mais que ses conséquences sur la capacité de gain ont subi un changement important (ATF 130 V 343 consid. 3.5; ATF 113 V 273 consid. 1a; arrêt du Tribunal fédéral 9C_1006/2010 du 22 mars 2011 consid 2.2).

6.        Est réputée invalidité, l'incapacité de gain totale ou partielle présumée permanente ou de longue durée, résultant d'une infirmité congénitale, d'une maladie ou d'un accident (art. 8 al. 1 LPGA et 4 al. 1 LAI). Selon l’art. 7 LPGA, est réputée incapacité de gain toute diminution de l'ensemble ou d'une partie des possibilités de gain de l'assuré sur le marché du travail équilibré qui entre en considération, si cette diminution résulte d'une atteinte à la santé physique ou mentale et qu'elle persiste après les traitements et les mesures de réadaptation exigibles (al 1). Seules les conséquences de l’atteinte à la santé sont prises en compte pour juger de la présence d’une incapacité de gain. De plus, il n’y a incapacité de gain que si celle-ci n’est pas objectivement surmontable (al. 2 en vigueur dès le 1er janvier 2008).

7.        En vertu de l’art. 28 al. 2 LAI, l’assuré a droit à une rente entière s’il est invalide à 70% au moins, à un trois-quarts de rente s'il est invalide à 60% au moins, à une demi-rente s’il est invalide à 50% au moins, ou à un quart de rente s’il est invalide à 40% au moins.

Pour évaluer le taux d'invalidité, le revenu que l'assuré aurait pu obtenir s'il n'était pas invalide est comparé avec celui qu'il pourrait obtenir en exerçant l'activité qui peut raisonnablement être exigée de lui après les traitements et les mesures de réadaptation, sur un marché du travail équilibré (art. 16 LPGA et art. 28a al. 1 LAI).

Il y a lieu de préciser que selon la jurisprudence, la notion d'invalidité, au sens du droit des assurances sociales, est une notion économique et non médicale; ce sont les conséquences économiques objectives de l'incapacité fonctionnelle qu'il importe d'évaluer (ATF 110 V 273 consid. 4a). L’atteinte à la santé n’est donc pas à elle seule déterminante et ne sera prise en considération que dans la mesure où elle entraîne une incapacité de travail ayant des effets sur la capacité de gain de l’assuré (arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 654/00 du 9 avril 2001 consid. 1).

8.        a. Pour pouvoir calculer le degré d’invalidité, l’administration (ou le juge, s’il y a eu un recours) a besoin de documents qu’un médecin, éventuellement d’autres spécialistes, doivent lui fournir. La tâche du médecin consiste à porter un jugement sur l’état de santé et à indiquer dans quelle mesure et pour quelles activités l’assuré est, à ce motif, incapable de travailler. En outre, les données médicales constituent un élément utile pour déterminer quels travaux on peut encore, raisonnablement, exiger de l’assuré (ATF 125 V 256 consid. 4 et les références).

Selon le principe de libre appréciation des preuves, pleinement valable en procédure judiciaire de recours dans le domaine des assurances sociales (cf. art. 61 let. c LPGA), le juge n'est pas lié par des règles formelles, mais doit examiner de manière objective tous les moyens de preuve, quelle qu'en soit la provenance, puis décider si les documents à disposition permettent de porter un jugement valable sur le droit litigieux. En cas de rapports médicaux contradictoires, le juge ne peut trancher l'affaire sans apprécier l'ensemble des preuves et sans indiquer les raisons pour lesquelles il se fonde sur une opinion médicale et non pas sur une autre. L'élément déterminant pour la valeur probante d'un rapport médical n'est ni son origine, ni sa désignation, mais son contenu. A cet égard, il importe que les points litigieux importants aient fait l'objet d'une étude fouillée, que le rapport se fonde sur des examens complets, qu'il prenne également en considération les plaintes exprimées, qu'il ait été établi en pleine connaissance du dossier (anamnèse), que la description des interférences médicales soit claire et enfin que les conclusions de l'expert soient bien motivées (ATF 134 V 231 consid. 5.1; ATF 133 V 450 consid. 11.1.3; ATF 125 V 351 consid. 3).

b. Le juge ne s'écarte pas sans motifs impératifs des conclusions d'une expertise médicale judiciaire, la tâche de l'expert étant précisément de mettre ses connaissances spéciales à la disposition de la justice afin de l'éclairer sur les aspects médicaux d'un état de fait donné. Selon la jurisprudence, peut constituer une raison de s'écarter d'une expertise judiciaire le fait que celle-ci contient des contradictions, ou qu'une surexpertise ordonnée par le tribunal en infirme les conclusions de manière convaincante. En outre, lorsque d'autres spécialistes émettent des opinions contraires aptes à mettre sérieusement en doute la pertinence des déductions de l'expert, on ne peut exclure, selon les cas, une interprétation divergente des conclusions de ce dernier par le juge ou, au besoin, une instruction complémentaire sous la forme d'une nouvelle expertise médicale (ATF 125 V 351 consid. 3b/aa et les références).

9.        Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d’être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c’est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu’un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3; ATF 126 V 353 consid. 5b; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n’existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l’administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l’assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

10.    En vertu des art. 28 al. 1 et 29 al. 1 LAI (dans sa teneur en vigueur depuis le 1er janvier 2008), le droit à la rente prend naissance au plus tôt à la date dès laquelle l’assuré a présenté une incapacité de travail (art. 6 LPGA) d’au moins 40% en moyenne pendant une année sans interruption notable et qu’au terme de cette année, il est invalide (art. 8 LPGA) à 40% au moins, mais au plus tôt à l’échéance d’une période de six mois à compter de la date à laquelle l’assuré a fait valoir son droit aux prestations conformément à l’art. 29 al. 1 LPGA.

11.    Les frais qui découlent de la mise en œuvre d'une expertise judiciaire pluridisciplinaire confiée à un Centre d'observation médicale de l'assurance-invalidité (COMAI) peuvent le cas échéant être mis à la charge de l'assurance-invalidité (cf. ATF 139 V 496 consid. 4.3). En effet, lorsque l'autorité judiciaire de première instance décide de confier la réalisation d'une expertise judiciaire pluridisciplinaire à un COMAI parce qu'elle estime que l'instruction menée par l'autorité administrative est insuffisante (au sens du consid. 4.4.1.4 de l'ATF 137 V 210), elle intervient dans les faits en lieu et place de l'autorité administrative qui aurait dû, en principe, mettre en œuvre cette mesure d'instruction dans le cadre de la procédure administrative. Dans ces conditions, les frais de l'expertise ne constituent pas des frais de justice au sens de l'art. 69 al. 1 bis LAI, mais des frais relatifs à la procédure administrative au sens de l'art. 45 LPGA qui doivent être pris en charge par l'assurance-invalidité (arrêt du Tribunal fédéral 8C_312/2016 du 13 mars 2017 consid. 6.2).

Cette règle, qu'il convient également d'appliquer dans son principe aux expertises judiciaires mono et bidisciplinaires (cf. ATF 139 V 349 consid. 5.4), ne saurait entraîner la mise systématique des frais d'une expertise judiciaire à la charge de l'autorité administrative. Encore faut-il que l'autorité administrative ait procédé à une instruction présentant des lacunes ou des insuffisances caractérisées et que l'expertise judiciaire serve à pallier les manquements commis dans la phase d'instruction administrative. En d'autres mots, il doit exister un lien entre les défauts de l'instruction administrative et la nécessité de mettre en œuvre une expertise judiciaire (ATF 137 V 210 consid. 4.4.2). Tel est notamment le cas lorsque l'autorité administrative a laissé subsister, sans la lever par des explications objectivement fondées, une contradiction manifeste entre les différents points de vue médicaux rapportés au dossier, lorsqu'elle a laissé ouverte une ou plusieurs questions nécessaires à l'appréciation de la situation médicale ou lorsqu'elle a pris en considération une expertise qui ne remplissait manifestement pas les exigences jurisprudentielles relatives à la valeur probante de ce genre de documents (voir par exemple arrêt du Tribunal fédéral 8C_71/2013 du 27 juin 2013 consid. 2). En revanche, lorsque l'autorité administrative a respecté le principe inquisitoire et fondé son opinion sur des éléments objectifs convergents ou sur les conclusions d'une expertise qui répondait aux réquisits jurisprudentiels, la mise à sa charge des frais d'une expertise judiciaire ordonnée par l'autorité judiciaire de première instance, pour quelque motif que ce soit (à la suite par exemple de la production de nouveaux rapports médicaux ou d'une expertise privée), ne saurait se justifier (ATF 139 V 496 précité consid. 4.4; arrêt du Tribunal fédéral 8C_312/2016 du 13 mars 2017 consid. 6.3).

12.    En l’occurrence, l’expertise judiciaire bidisciplinaire répond aux réquisits jurisprudentiels précités pour qu’il lui soit reconnu une pleine valeur probante, ce que les parties admettent.

Selon ses conclusions, la recourante est totalement incapable de travailler dans toute activité depuis le 21 septembre 2011, de sorte que tant la recourante que l’intimé ont conclu à l’octroi d’une rente entière d’invalidité depuis le 1er septembre 2012.

13.    Au vu de ce qui précède, il convient d’admettre le recours, d’annuler les décisions litigieuses et de dire que la recourante a droit à une rente entière d’invalidité depuis le 1er septembre 2012.

14.    Vu l’issue du litige, une indemnité de CHF 4’000.- sera accordée à la recourante à titre de participation à ses frais et dépens (art. 61 let. g LPGA; art. 6 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en matière administrative du 30 juillet 1986 [RFPA - E 5 10.03]), à charge de l’intimé.

Etant donné que, depuis le 1er juillet 2006, la procédure n'est plus gratuite (art. 69 al. 1bis LAI), au vu du sort du recours, il y a lieu de condamner l'intimé au paiement d'un émolument de CHF 500.-.

Enfin, compte tenu du fait qu’une instruction médicale a été nécessaire, l’intimé ayant fondé sa première appréciation sur un avis unique de la médecin traitante de la recourante, de surcroit différent d’un avis subséquent de celle-ci ainsi que des avis d’autres médecins spécialistes, il convient de mettre les frais d’expertise de CHF 7'488.45 à la charge de l’intimé.

 


 

 

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L’admet.

3.        Annule les décisions de l’intimé du 21 novembre 2016.

4.        Dit que la recourante a droit à une rente entière d’invalidité depuis le 1er septembre 2012.

5.        Alloue une indemnité de CHF 4'000.- à la recourante, à charge de l’intimé.

6.        Met les frais d’expertises de CHF 7'488.45 à la charge de l’intimé.

7.        Met un émolument de CHF 500.- à la charge de l’intimé.

8.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

Julia BARRY

 

La présidente

 

 

 

Valérie MONTANI

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le