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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3497/2012

ATAS/1013/2013 du 10.10.2013 ( LPP ) , REJETE

Recours TF déposé le 20.11.2013, rendu le 18.03.2014, ADMIS, 9C_833/2013
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3497/2012 ATAS/1013/2013

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 10 octobre 2013

3ème Chambre

 

En la cause

Madame B__________, domiciliée à TROINEX, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Eric MAUGUE

demanderesse

contre

CIA CAISSE DE PREVOYANCE DU PERSONNEL ENSEIGNANT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE ET DES FONCTIONNAIRES DE L'ADMINISTRATION DU CANTON DE GENEVE, sise boulevard de Saint-Georges 38, Genève, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Jacques-André SCHNEIDER

défenderesse

 


EN FAIT

1.        Madame B__________ (ci-après l'assurée), née en 1963, a été employée en tant que commise-greffière auprès de X__________ à Genève à 90 % dès le 1er juillet 2004. A ce titre, elle a été affiliée pour la prévoyance professionnelle auprès de la CAISSE DE PREVOYANCE DU PERSONNEL ENSEIGNANT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE ET DES FONCTIONNAIRES DE L'ADMINISTRATION DU CANTON DE GENEVE (ci-après la CIA ou la caisse).

2.        Selon le certificat d'assurance établi par la CIA le 31 juillet 2007, l'avoir de vieillesse LPP de l'assurée s’élevait à 33'346 fr. 25 au 31 décembre 2006 et la pension en cas d'invalidité serait de 1'856 fr. 30 par mois.

3.        L'assurée a été en incapacité de travail dès le 28 mars 2008.

4.        Le 23 mai 2008, elle a démissionné avec effet au 31 août 2008.

5.        En janvier 2009, elle a déposé une demande de prestations auprès de l'OFFICE D'ASSURANCE-INVALIDITE (OAI) en invoquant des troubles psychiques.

6.        Par décision du 6 juillet 2011, l'OAI lui a reconnu le droit à une rente entière d’invalidité dès le 1er juillet 2009, soit six mois après le dépôt de la demande. L’OAI a en effet considéré l'assurée comme totalement invalide depuis mars 2009.

7.        Par courrier du 16 avril 2012, la CIA a indiqué à l'assurée qu'elle reconnaissait l'invalidité dans la même mesure que l'assurance-invalidité et qu'elle lui adresserait prochainement un courrier sur les pensions qui lui seraient versées.

8.        Le 20 avril 2012, l'assurée a sollicité de la CIA que celle-ci lui communique sa position quant au versement d'une pension.

9.        Par courrier du 30 juillet 2012, la CIA lui a répondu qu’elle lui reconnaissait un degré d'invalidité de 100% dès le 1er juillet 2009 et le droit à une pension de 285 fr. 25 et de 57 fr. 05 pour son fils.

Selon un décompte joint, les pensions dues à titre rétroactif pour la période du 1er juillet 2009 au 30 juin 2012 représentaient un total de 12'373 fr. 60 (10'311 fr. 95 pour l'assurée + 2'061 fr. 65 pour son fils).

La CIA a également établi des bordereaux de renseignements sur les pensions versées. Il en ressort que l'assurée avait droit à des pensions de 286 fr. 65 pour elle et de 57 fr. 30 pour son fils. Compte tenu des versements rétroactifs dès juillet 2009, les montants dus à l'assurée s’élevaient à 10'598 fr. 60 pour elle et à 2'118 fr. 95 pour son fils.

10.    Le 16 août 2012, l'assurée s’est étonnée que les prestations de la CIA paraissent limitées à celles de la prévoyance professionnelle obligatoire. Elle a contesté une telle réduction et requis le versement des prestations statutaires dès le 1er juillet 2009.

11.    Par courrier du 17 septembre 2012, la CIA a rappelé qu'elle avait adopté dans ses statuts une notion d'invalidité différant de celle prévue par l'assurance-invalidité. Ainsi, ses statuts prévoyaient que l'invalidité devait survenir au plus tard à l'échéance des rapports de travail ; une invalidité survenue après la fin des rapports de service n'était pas couverte par la prévoyance étendue. En l'espèce, les rapports de travail avaient pris fin au 31 août 2008. Or, l'OAI n’avait reconnu une invalidité totale qu’à compter du 1er mars 2009, date à laquelle l'assurée n'était plus couverte par la prévoyance surobligatoire contre les risques d'invalidé. Par ailleurs, la caisse verserait un montant de 49'836 fr. 90 correspondant à la part surobligatoire de la prestation de sortie au 31 août 2009 (95'330 fr. 60 [prestation de sortie au 31 août 2008] - 45'493 fr. 70 [avoir de vieillesse selon la loi]).

12.    Par courrier du 25 septembre 2012, l'assurée a mis la caisse en demeure de lui verser les prestations surobligatoires.

13.    Le 21 novembre 2012, l'assurée a saisi la Cour de céans d’une demande en paiement à l'encontre de la CIA (ci-après : la défenderesse).

La demanderesse conclut, sous suite de dépens, préalablement, à la production du certificat d'assurance au 1er juillet 2009, et, au fond, au versement d'une rente d'invalidité statutaire.

La demanderesse soutient que sa couverture d'assurance auprès de la défenderesse a pris fin un mois après la dissolution des rapports de travail, soit le 30 septembre 2008.

Si elle admet que son invalidité est survenue plusieurs mois après la fin des rapports de service, elle conteste que la survenance de l'invalidité pendant la période d'assurance soit une condition au versement des prestations statutaires de la défenderesse.

Elle relève pour le surplus que l'existence de liens de connexité temporelle et matérielle n'est pas contestée par la défenderesse, dès lors que celle-ci a déjà admis son obligation de fournir les prestations obligatoires.

La demanderesse rappelle que les institutions de prévoyance qui adoptent une définition de l'invalidité différant de celle qui est prévue par la loi doivent néanmoins interpréter cette notion en fonction du sens retenu dans les autres branches du droit et l'appliquer de manière uniforme. Les dispositions légales en matière de prévoyance professionnelle sont également applicables à la prévoyance étendue à défaut de dispositions réglementaires contraires.

La demanderesse ajoute que les statuts des institutions de prévoyance de droit public doivent être interprétés selon les règles régissant l'interprétation des lois et qu'il n'y a pas lieu d'appliquer le principe de la confiance. Selon elle, en l'espèce, l’interprétation tant littérale que systématique de la disposition statutaire pertinente conduit à admettre que seule la notion d'invalidité est définie de manière autonome ; l'événement assuré, en revanche, ne fait l'objet d'aucune définition dans les statuts. Partant, à défaut de clause réglementaire dérogatoire, c'est la disposition légale qui s'applique en ce qui concerne la nature de l'évènement assuré. Or, selon cette disposition, ont droit à des prestations d'invalidité les personnes invalides à raison de 40 % au moins au sens de l'assurance-invalidité et qui étaient assurées lorsqu'est survenue l'incapacité de travail à l'origine de l'invalidité. La demanderesse en tire la conclusion que l'événement assuré en vertu des statuts de la défenderesse n'est pas la survenance de l'invalidité mais l'incapacité de travail qui en est à l'origine, analyse dont elle estime qu’elle est confirmée par la disposition statutaire qui prévoit qu'en cas de modification du degré d'invalidité par l'assurance-invalidité, la pension est adaptée dans la même proportion. En effet, si l'événement assuré était l'invalidité, une aggravation de celle-ci, postérieure à la dissolution des rapports de travail, ne donnerait pas lieu à une adaptation de la pension.

14.    Invitée à se déterminer, l’intimée, dans sa réponse du 22 janvier 2013, a conclu au rejet de la demande, sous suite de frais.

La défenderesse rappelle qu'en matière de prestations étendues, les institutions de prévoyance sont libres de déterminer à quel moment la qualité d'assuré doit exister et de définir l'invalidité de manière autonome. Une institution peut ainsi limiter les prestations au minimum légal lorsque l'assuré n'est pas invalide à la fin des relations de travail ou dans le délai de couverture prolongée d'un mois. Elle peut également prévoir que le risque assuré est l'invalidité et non l'incapacité de travail.

En l'espèce, les statuts de la défenderesse définissent l'invalidité comme une atteinte durable à la santé physique ou mentale du salarié entraînant une incapacité partielle ou totale de remplir sa fonction ou toute autre fonction analogue au service de l'Etat ou d'une institution externe. Selon la défenderesse, cette clause est claire et ne donne lieu à aucune interprétation. L'invalidité y est définie de manière plus large que dans la loi, puisque la notion d'invalidité de fonction est prise en compte. L'invalidité selon les dispositions statutaires implique en outre une incapacité de travail et une incapacité de gain durables. En revanche, les statuts sont plus restrictifs du point de vue temporel puisque l'assuré doit avoir été en incapacité de travail durant une année au moins. De plus, l'intéressé doit être salarié lors de la survenance de l'invalidité.

La défenderesse allègue que l'emploi des membres du personnel de l'Etat est garanti durant 730 jours en cas de maladie selon les dispositions régissant la fonction publique, de sorte que la condition de l'incapacité de travail durable est toujours remplie en pratique. En l'espèce, au moment où les rapports de travail ont pris fin, soit le 31 août 2008, la demanderesse n'était en incapacité de travail que depuis le 28 mars 2008, ce qui ne représente manifestement pas une incapacité de gain de longue durée au sens des statuts et de l'assurance-invalidité. La condition ayant trait à la qualité de salarié n'est pas non plus remplie puisque les rapports de travail se sont terminés avant la naissance du droit à la rente et qu'il n'existe aucun motif justifiant que l'on s'écarte de la décision de l'assurance-invalidité sur ce point.

15.    Le 14 mars 2013, la demanderesse a répliqué en persistant dans ses conclusions.

Elle relève que la disposition statutaire régissant le début de l'invalidité porte le titre de "définition de l'invalidité". Ce titre ne laisse pas présumer une définition de l'évènement assuré ou une clause d'assurance temporelle.

De plus, la mention de "salarié" dans la disposition topique n'implique pas nécessairement que l'invalidité doive survenir durant les rapports de travail. L'utilisation de ce terme s'explique par le fait qu'il s'agit d'une invalidité de fonction définie par rapport aux activités qui peuvent être réalisées auprès de l'employeur mais n'implique pas que la personne concernée doive rester salariée durant toute la durée de l'incapacité de travail. La demanderesse soutient sur ce point qu'il n'y a pas lieu de confondre la notion d'invalidité et la clause d'assurance. Elle souligne que les dispositions statutaires régissant la clause d'assurance utilisent en l'espèce la notion d'assuré, à l'instar des dispositions légales. La loi recourt en effet à la notion d'assuré dans la description du droit aux prestations d'invalidité, mais cela ne signifie pas pour autant que la personne qui sollicite des prestations doive rester assurée au moment où l'invalidité survient. Partant, selon l'interprétation littérale des statuts, le droit aux prestations réglementaires n'est pas subordonné à la qualité de salarié au moment de la survenance de l'invalidité.

Une interprétation systématique aboutit à la même conclusion. En effet, le règlement prévoit qu'en cas de modification du degré d'invalidité par l'assurance-invalidité, la pension versée par la défenderesse est adaptée dans la même proportion. Or, il serait insensé qu'une institution de prévoyance envisage d'augmenter le montant de ses prestations en cas d'augmentation du taux d'invalidité postérieure à la dissolution des rapports d'assurance mais n'accepte pas de verser ses prestations lorsque l'invalidité initiale survient postérieurement à cette dissolution. En effet, dans un système où le début de l'incapacité de travail à l'origine de l'invalidité détermine le droit aux prestations de la prévoyance professionnelle, il est logique que ces prestations soient versées même si l'invalidité ne survient qu'après la fin des rapports d'assurance et qu'elles soient adaptées en cas de modification ultérieure du degré. En revanche, s'il est nécessaire que l'invalidité survienne pendant les rapports d'assurance pour fonder un droit à des prestations, il semble cohérent qu'une aggravation ultérieure du taux d'invalidité ne donne pas droit à une adaptation de la pension statutaire.

La demanderesse se réfère à la jurisprudence et notamment à un cas où les statuts définissaient l'événement assuré de manière autonome mais ne contenaient pas de clause de révision de la pension. Les statuts de la défenderesse contenant une telle clause d'adaptation, il faut selon la demanderesse en conclure que c'est bien la survenance de l'incapacité de travail à l'origine de l'invalidité qui est déterminante pour l'octroi des prestations étendues.

L'interprétation téléologique le confirme. En effet, le but du statut est d'élargir la notion d'invalidité et non de restreindre l'octroi de prestations de la prévoyance professionnelle étendue. A défaut, l'Etat pourrait décider de l'octroi de prestations d'invalidité statutaires puisqu'il lui suffirait de résilier les rapports de travail avant la fin du délai d'attente afin que l'assuré soit privé des prestations surobligatoires de la défenderesse. En effet, si le traitement des employés de la fonction publique est garanti 730 jours, les périodes de protection contre le licenciement sont identiques à celles qui prévalent en droit privé.

La demanderesse soutient enfin que l'interprétation de la défenderesse pénaliserait l'assuré qui accepte de se soumettre à des mesures de réadaptation en cas d'échec de celles-ci. En effet, un reclassement se déroule généralement après le terme des rapports de travail. Partant, un assuré ne pourrait prétendre à des prestations de la prévoyance professionnelle étendue en cas d'échec des mesures de reclassement.

16.    Dans sa duplique du 30 avril 2013, la défenderesse a également persisté dans ses conclusions.

Elle indique qu'il n'y a pas de certificat de prévoyance au 1er juillet 2009 dès lors que les rapports de prévoyance ont pris fin au 31 août (recte: 30 septembre) 2008.

Elle répète que le texte clair des statuts n'est pas sujet à interprétation. Selon elle, si le règlement avait voulu reprendre la clause d'assurance légale, il aurait copié les termes de la disposition y relative et aurait supprimé la notion de salarié.

La défenderesse rappelle que la faculté pour les institutions de prévoyance de prévoir des définitions de l'invalidité différant de la loi ne leur confère pas un pouvoir discrétionnaire dans l'interprétation des statuts et qu'elles doivent s'en tenir à ce qui est compris dans les autres domaines des assurances sociales. De plus, la disposition légale définissant l'invalidité est applicable à défaut de règlementation contraire. En l'espèce, le risque assuré est défini de manière autonome comme la perte complète de possibilités de gain au service de l'Etat. A la différence de l'assurance-invalidité, il n'est pas nécessaire que la perte de gain porte sur l'ensemble du marché du travail équilibré. Une telle définition fixe la survenance de l'évènement assuré à une date généralement postérieure au début de l'incapacité de travail, en dérogation à la loi. L'institution de prévoyance peut également prévoir que le risque assuré est la survenance de l'invalidité et définir cette notion comme la perte durable de la capacité de gain dans la collectivité publique. Lorsque la clause d'assurance se réfère également à l'incapacité de gain dans une autre fonction exigible dans la collectivité publique, il faut se référer à une occupation analogue à celle exercée jusqu'alors en termes de formation et de qualification. L'institution de prévoyance peut prévoir que les prestations de prévoyance étendue sont limitées au minimum légal lorsque l'assuré n'est pas devenu invalide avant la fin des relations de travail. Elle peut également faire dépendre l'octroi d'une rente complémentaire d'une incapacité de travail qualifiée, soit permanente et constatée pendant l'affiliation, ce qui constitue une solution plus restrictive que celle prévue par la loi. Dans un tel cas, la décision de l'assurance-invalidité n'a pas de force contraignante. En l'espèce, le droit aux prestations statutaires dépend de la survenance non pas d'un début d'incapacité de travail mais bien de l'invalidité avant la fin des rapports de service ou dans le mois qui suit.

17.    Copie de cette écriture a été transmise à la demanderesse le 6 mai 2013.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. b de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ; RSG E 2 05) en vigueur depuis le 1er janvier 2011, la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations relatives à la prévoyance professionnelle opposant institutions de prévoyance, employeurs et ayants droit, y compris en cas de divorce, ainsi qu’aux prétentions en responsabilité (art. 331 à 331e du Code des obligations [CO ; RS 220]; art. 52, 56a, al. 1, et art. 73 de la loi fédérale sur la prévoyance professionnelle, vieillesse, survivants et invalidité du 25 juin 1982 [LPP ; RS 831.40]; art. 142 du Code civil [CC ; RS 210]).

La compétence de la Cour de céans pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        L’ouverture de l’action prévue à l’art. 73 al. 1 LPP n’est soumise, comme telle, à l’observation d’aucun délai (Raymond SPIRA, Le contentieux des assurances sociales fédérales et la procédure cantonale, Recueil de jurisprudence neuchâteloise, 1984).

La demande respecte en outre la forme prévue à l'art. 89B de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA; RSG E 5 10).

Partant, elle est recevable.

3.        La novelle modifiant la LPP (première révision) du 3 octobre 2003, sous réserve de certaines dispositions, est entrée en vigueur le 1er janvier 2005, entraînant la modification de nombreuses dispositions légales dans le domaine de la prévoyance professionnelle.

Elle est applicable en l'espèce, dès lors que les faits juridiquement déterminants, notamment l’octroi d’une rente d’invalidité dès le 1er juillet 2009, se sont déroulés postérieurement à son entrée en vigueur (ATF 130 V 445 consid. 1).

4.        L'objet du litige porte sur le droit de la demanderesse à des prestations de la prévoyance professionnelle étendue.

5.        En premier lieu, il sied de rappeler que pour que l'institution de prévoyance reste tenue à prestations après la dissolution du rapport de prévoyance, il faut non seulement que l'incapacité de travail ait débuté à une époque où l'assuré lui était affilié, mais encore qu'il existe entre cette incapacité de travail et l'invalidité une relation d'étroite connexité. La connexité doit être à la fois matérielle et temporelle (ATF 130 V 270 consid. 4.1).

Il y a connexité matérielle si l'affection à l'origine de l'invalidité est la même que celle qui s'est déjà manifestée durant le rapport de prévoyance (et qui a entraîné une incapacité de travail).

La connexité temporelle implique qu'il ne se soit pas écoulé une longue interruption de l'incapacité de travail; elle est rompue si, pendant une certaine période, l'assuré est à nouveau apte à travailler (ATF 123 V 262 consid. 1c ; ATF 120 V 112 consid. 2c/aa).

En l'espèce, la défenderesse ne conteste pas son obligation de verser les prestations relevant de la prévoyance professionnelle obligatoire et admet ainsi implicitement que les conditions de connexité sont remplies.

6.        Conformément à l'art. 23 let. a LPP, ont droit à des prestations d'invalidité les personnes qui sont invalides à raison de 40 % au moins au sens de l'AI, et qui étaient assurées lorsqu'est survenue l'incapacité de travail dont la cause est à l'origine de l'invalidité.

Selon la jurisprudence, l'événement assuré au sens de l'art. 23 let. a LPP est uniquement la survenance d'une incapacité de travail d'une certaine importance, indépendamment du point de savoir à partir de quel moment et dans quelle mesure un droit à une prestation d'invalidité est né. La qualité d'assuré doit exister au moment de la survenance de l'incapacité de travail, mais pas nécessairement lors de l'apparition ou de l'aggravation de l'invalidité.

Lorsqu'il existe un droit à une prestation d'invalidité fondée sur une incapacité de travail survenue durant la période d'assurance, l'institution de prévoyance concernée est tenue de prendre en charge le cas, même si le degré d'invalidité se modifie après la fin des rapports de prévoyance. Dans ce sens, la perte de la qualité d'assuré ne constitue pas un motif d'extinction du droit aux prestations (ATF 123 V 262 consid. 1a, ATF 118 V 45 consid. 5). Ces principes sont aussi applicables en matière de prévoyance plus étendue, à tout le moins en l'absence de dispositions statuaires ou réglementaires contraires (ATFA non publié B 123/04 du 13 octobre 2005, consid. 2.1).

Cette interprétation littérale est conforme au but de la disposition, qui est de fournir une protection d'assurance aux employés dont les rapports de service se terminent après une longue maladie et qui ne deviennent invalides que plus tard (ATFA non publié B 96/04 du 17 août 2005, consid. 1.1).

7.        Conformément à l'art. 26 al. 1 LPP, les dispositions de la loi fédérale du 19 juin 1959 sur l’assurance-invalidité (LAI ; RS 831.20) s'appliquent par analogie à la naissance du droit aux prestations d'invalidité. Ainsi, si une institution de prévoyance reprend – explicitement ou par renvoi – la définition de l'invalidité dans l'AI, elle est en principe liée, lors de la survenance du fait assuré, par l'estimation de l'invalidité par les organes de cette assurance, sauf si cette estimation apparaît d'emblée insoutenable. Cette force contraignante vaut aussi en ce qui concerne la naissance du droit à la rente et, par conséquent, également pour la détermination du moment à partir duquel la capacité de travail de l'assuré s'est détériorée d'une manière sensible (ATF 123 V 269 consid. 2a; ATFA non publié B 49/05 du 23 janvier 2007, consid. 4.2).

En matière de prévoyance plus étendue, il est loisible aux institutions de prévoyance, en vertu de l'autonomie que leur confère l'art. 49 al. 2 LPP, d'adopter dans leurs statuts ou règlements une notion de l'invalidité différente que dans l'assurance-invalidité. C'est ainsi qu'elles peuvent accorder des prestations à des conditions moins strictes que dans l'assurance-invalidité (ATF 120 V 106 consid. 2d).

Si l'institution de prévoyance adopte une définition de l'invalidité qui ne concorde pas avec celle de l'assurance-invalidité, il lui appartient de statuer librement, selon ses propres règles, sans être liée par l'estimation de cette dernière (ATF non publié 9C_54/2007 du 9 octobre 2008, consid. 3.1). Toutefois, même dans leur sphère de compétences propres, les institutions de prévoyance ne jouissent pas d'un pouvoir discrétionnaire. Si elles définissent, dans leurs statuts ou leurs règlements, l'événement assuré ou l'invalidité de manière autonome, elles doivent, dans l'interprétation de ces notions, prendre en compte le sens retenu dans les autres branches du droit des assurances sociales ou selon les principes généraux du droit. Les institutions de prévoyance sont ainsi libres dans le choix de la notion de l'invalidité et de l'événement assuré, mais elles doivent les appliquer de manière uniforme (ATFA non publié B 57/02 du 19 août 2003, consid. 3.3).

8.        En l’espèce, il y a lieu de se référer au sous-chapitre D "mise à l'invalidité" du chapitre "prestations" des statuts de la défenderesse (articles 28 à 32).

L'art. 28 dispose que l’invalidité est une atteinte durable à la santé physique ou mentale du salarié entraînant une incapacité partielle ou totale de remplir sa fonction ou toute autre fonction analogue au service de l’Etat ou d’une institution externe (al. 1). L’assuré reconnu invalide par l’assurance-invalidité fédérale (AI) l’est également par la Caisse. La pension est allouée à la demande de l’intéressé ou de l’employeur (al. 2). Le degré d’invalidité est celui reconnu par l'AI fédérale (al. 3). Le droit à la pension naît en même temps que le droit à la rente de l’AI (al. 4).

L'art. 28 al. 5 et 6 régit les cas où l'invalidité est décidée par le comité de la défenderesse. L'art. 28 al. 5 prévoit ainsi que le comité se prononce sur l’invalidité au sens de l’alinéa 1 et en détermine le degré, selon une procédure fixée par le règlement général: en cas de refus de rente ou d’octroi d’une rente qui n’est pas entière de la part de l’AI ou encore lorsque le degré d’invalidité demandé est inférieur au minimum requis par 1’AI (let. a); lorsque l’intéressé accepte, en raison de son invalidité, d’être déplacé dans une autre fonction moins rémunérée. La pension est calculée sur la différence entre l’ancien et le nouveau traitement assuré, à taux d’activité identique (let. b). Selon l'art. 28 al. 6, pour les cas découlant de l’application de l’alinéa 5, lettre a), un degré d’invalidité est pris en considération dès 25 %; un degré égal ou supérieur à 70% constitue une invalidité totale. Pour les cas découlant de l’alinéa 5, lettre b), aucun minimum n’est requis. Selon l'art. 28 al. 7, en cas de pension accordée à la suite de la procédure particulière prévue à l’alinéa 5, lettre a), le droit naît à la date d’introduction de la demande. En cas de pension accordée en application de l’alinéa 5, lettre b), le droit prend naissance à la date du changement de fonction.

L'art. 32 des statuts dispose qu'en cas de modification du degré d’invalidité par l’AI, la pension allouée par la caisse est adaptée dans la même proportion (al. 1). Pour les cas écoulant de l’application de l’article 28, alinéa 5, la caisse peut, en tout temps, soumettre le bénéficiaire d’une pension d’invalidité à un nouvel examen médical en vue de revoir le montant des prestations (al. 2). Pendant la durée de l’invalidité, le salarié et l’employeur sont libérés du paiement des cotisations à concurrence du degré d’invalidité (al. 3).

L'art. 4 al. 1 des statuts de la défenderesse dispose que les membres salariés (ci-après : les salariés) sont répartis en deux catégories : les salariés mensualisés (let. a) et les autres (let. b). L'art. 4 al. 5 précise que le règlement général définit les catégories de personnes qui, pour des motifs particuliers, sont admises ou exclues de l'assurance. Aux termes de l'art. 4 al. 6, les retraités et les invalides ont la qualité de membres pensionnés (ci-après : les pensionnés).

L'art. 6 al. 1 du règlement général du 22 février 2009 de la défenderesse, dans sa teneur en force depuis le 7 mai 2001, dispose que toute personne qui quitte le service de son employeur, ou de ses employeurs en cas de multiactivités, perd la qualité de salarié.

9.        Il convient à présent d'examiner si le droit à des prestations surobligatoires est subordonné à la condition que l'invalidité soit survenue avant la fin des rapports de service.

A cet égard, il faut préciser en premier lieu que la défenderesse est une corporation de droit public possédant la personnalité juridique, conformément à l'art. 1 al. 1 de ses statuts. Partant, ses dispositions statutaires doivent être interprétées selon les règles d'interprétation des règles légales (SVR 1997 BVG n° 79 p. 243 consid. 3c), étant rappelé que la loi s'interprète en premier lieu selon sa lettre et qu’il n'y a lieu de déroger au sens littéral d'un texte clair par voie d'interprétation que lorsque des raisons objectives permettent de penser que ce texte ne restitue pas le sens véritable de la disposition en cause. De tels motifs peuvent découler des travaux préparatoires, du but et du sens de la disposition, ainsi que de la systématique de la loi (ATF 129 II 234 consid. 2.4). Si le texte n'est pas absolument clair, si plusieurs interprétations de celui-ci sont possibles, il convient de rechercher quelle est la véritable portée de la norme, en la dégageant de tous les éléments à considérer, soit notamment des travaux préparatoires, du but de la règle, de son esprit, ainsi que des valeurs sur lesquelles elle repose ou encore de sa relation avec d'autres dispositions légales (ATF 130 V 479 consid. 5.2 et les références citées).

La notion d'invalidité figurant dans le règlement de prévoyance de la défenderesse est plus large que celle qui résulte de la LAI, en tant qu'elle est définie comme une atteinte durable à la santé physique ou mentale du salarié entraînant une incapacité partielle ou totale de remplir sa fonction ou toute autre fonction analogue au service de l'Etat ou d'une institution externe. A la différence de l'assurance-invalidité, il n'y a pas lieu de prendre en compte l'activité raisonnablement exigible de l'assuré en se référant à l'ensemble du marché du travail entrant en ligne de compte pour l'intéressé. Il se peut donc que l'assuré soit mis au bénéfice d'une pension d'invalidité selon le règlement de l'institution de prévoyance sans qu'il ne remplisse les conditions fixées dans la LAI (ATF non publié 9C_388/2009 du 10 mai 2010, consid. 4.2).

La demanderesse affirme à cet égard que l'art. 28 des statuts a pour seul but d'étendre la notion d'invalidité en retenant une invalidité de fonction mais ne contient pas de clause d'assurance. Il est vrai que l'alinéa premier de cette disposition porte le titre de définition de l'invalidité. Cela étant, dès lors que cette définition fait expressément référence à une atteinte à la santé durable frappant un salarié, il y a lieu de la comprendre en ce sens que l'invalidité au sens réglementaire – et partant le droit aux prestations surobligatoires – est reconnue seulement si l'atteinte durable touche une personne qui est encore liée par des rapports de service. Le recours au terme "salarié" ne laisse pas de place au doute sur ce point. En effet, ce mot est défini a contrario à l'art. 6 al. 1 du règlement général de la défenderesse comme désignant toute personne qui est encore au service de son ou de ses employeurs. Partant, le libellé des statuts ne peut être interprété autrement qu'au sens où la condition de salarié doit encore être remplie lorsque naît l’invalidité. La lettre de la disposition étant parfaitement claire, il n'y a pas lieu d'y déroger. Par analogie, on rappellera que le Tribunal fédéral, statuant sur la portée d’une clause statutaire prévoyant que l’assuré avait droit à une rente d’invalidité en cas d’incapacité de gain de 25 % survenant avant l’âge de la retraite, qu’une telle disposition devait être interprétée en ce sens que la qualité d’assuré devait subsister au moment de la survenance de l’incapacité de gain (ATFA non publié B 31/03 du 23 janvier 2004, consid. 3.3).

Ainsi, contrairement à ce qu'allègue la demanderesse, l'art. 28 des statuts comprend bien une clause temporelle puisqu'il fait de la qualité de salarié une notion constitutive de la définition de l'invalidité. Cette disposition s'écarte ainsi de la solution de l'art. 23 LPP tant s'agissant de la définition de l’invalidité que de l'événement assuré.

Quant aux arrêts cités par la demanderesse à l'appui de sa demande, ils ne lui sont d’aucun secours. En particulier l’interprétation que le Tribunal fédéral a faite d’une disposition statutaire indiquant que peut prétendre à une rente un assuré qui, en raison d’une maladie ou d’un accident, est devenu invalide pour son activité ou un autre poste exigible et quitte la fonction publique pour ce motif. Dans cet arrêt du 17 mai 2005 (cause B 33/03), notre Haute-Cour a considéré qu’une telle clause s’écartait de l’art. 23 LPP tant s’agissant de l'événement assuré que de la notion d’invalidité, compte tenu notamment du fait que l’invalidité devait être née durant les rapports d’assurance (consid. 4.3.2 et 4.4). Tel est également le cas en l’espèce, l’art. 28 retenant une invalidité de fonction survenue alors que l’intéressé est lié par des rapports de service.

La demanderesse soutient en outre que la prise en charge d’une aggravation de l’invalidité, prévue à l’art. 32 des statuts de la défenderesse, démontre que le statut de salarié n’est pas une condition d’octroi de prestations surobligatoires. Or, en vertu de l'autonomie dont disposent les institutions de prévoyance en matière de prestations surobligatoires conformément à l'art. 49 LPP, celles-ci sont fondées à prévoir une clause d'assurance plus restrictive que la loi tout en prenant en charge l'éventuelle aggravation de l'invalidité après la fin des rapports de prévoyance. Cela ressort au demeurant de l'arrêt cité par la demanderesse pour étayer son raisonnement (il s’agit d’un arrêt dans lequel le Tribunal fédéral a jugé que des statuts qui élargissaient la notion d’invalidité mais ne s’écartaient pas de l’art. 23 LPP s’agissant de l’événement assuré justifiaient l’octroi de prestations réglementaires en cas d’aggravation de l’invalidité, en l’absence de dispositions réglementaires contraires ; ATFA non publié B 57/02 du 19 août 2003, consid. 3.3.2). Or, la défenderesse a précisément prévu des dispositions réglementaires spécifiques en l’espèce, aux termes desquelles une aggravation de l’invalidité doit être prise en charge tout en prévoyant sa propre définition de l’événement assuré. S'il n'est peut-être pas usuel qu'une institution de prévoyance étendue réponde d'une aggravation de l'invalidité postérieure à la fin des rapports d'assurance alors que sa définition de l'événement assuré est plus restrictive que la loi, une telle règlementation n'en est pas moins compatible avec la liberté dont elle jouit dans l'élaboration de ses statuts.

La demanderesse ne peut non plus être suivie lorsqu'elle affirme que la position de la défenderesse se heurte à une interprétation téléologique des statuts, lesquels auraient pour but d'étendre la notion d'invalidité et non de limiter les prestations réglementaires. En effet, comme cela ressort de la jurisprudence citée, il est courant que les institutions de prévoyance définissent plus largement l'invalidité que la LAI tout en adoptant des clauses d'assurance plus strictes que l'art. 23 LPP.

Quant au fait que l'interprétation de la défenderesse reviendrait à permettre à l'Etat-employeur de décider de l'octroi de prestations surobligatoires, il faut souligner que ce risque existe également dans le marché privé de l'emploi, dans les cas où l'événement assuré est l'invalidité et où les rapports de travail peuvent être résiliés avant que ne naisse le droit à une rente de l'assurance-invalidité. De plus, en l'espèce, c'est la demanderesse elle-même qui a démissionné de son poste.

Enfin, l’argument selon lequel l'interprétation que fait la défenderesse de l'art. 28 de ses statuts se répercuterait de manière défavorable sur les assurés entreprenant des mesures d'ordre professionnel qui se soldent par un échec tombe à faux. En effet, l'invalidité est réputée survenue selon l'art. 28 des statuts lorsque le salarié n'est plus à même d'exercer un emploi au service de l'état. La mise en œuvre de mesures de réadaptation hors de la fonction publique n'empêche ainsi pas la survenance d'une invalidité au sens règlementaire. Quant aux salariés acceptant un reclassement à l'intérieur des services de l'état, leur cas est spécifiquement prévu à l'art. 28 al. 5 des statuts, qui permet d'accorder des prestations lorsque le nouveau traitement est inférieur à celui qui était réalisé avant l'invalidité.

10.    Eu égard à ce qui précède, la demande doit être rejetée.

La demanderesse n'obtenant pas gain de cause, elle n'a pas droit à des dépens.

Pour le surplus, la procédure est gratuite (art. 73 al. 2 LPP et art. 89H al. 1 de la loi sur la procédure administrative [LPA ; RSG E 5 10]).


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES
 :

Statuant

A la forme :

1.        Déclare la demande recevable.

Au fond :

2.        La rejette.

3.        Dit que la procédure est gratuite.

4.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF; RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Marie-Catherine SECHAUD

 

La Présidente

 

 

 

 

Karine STECK

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le