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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3613/2021

ATAS/1004/2022 du 17.11.2022 ( PC ) , ADMIS/RENVOI

En fait
En droit

rÉpublique et

1.1 canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/3613/2021 ATAS/1004/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 17 novembre 2022

5ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée ______, COINTRIN

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

 

A. a. Madame A______ (ci-après : l’intéressée ou la recourante), née en ______ 1950, est bénéficiaire de prestations complémentaires cantonales et fédérales depuis plusieurs années.

b. En date du 18 mars 2021, le service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC ou l’intimé) a adressé une demande de pièces à l’intéressée, afin d’entreprendre la révision périodique de son dossier.

B. a. Après avoir examiné les documents transmis par l’intéressée, le SPC a rendu, en date du 30 juin 2021, une décision de prestations complémentaires suite à un « recalcul des prestations », dont il ressortait que l’intéressée avait reçu un montant excédentaire à celui auquel elle avait droit et devait donc rembourser la différence, par CHF 8'649.- ; le plan de calcul rétroactif pour la période allant du 1er janvier 2016 au 30 juin 2021 était joint en annexe. L’établissement du droit à venir, dès le 1er juillet 2021, était également précisé.

b. Par courrier du 28 juillet 2021, l’intéressée s’est opposée à la décision du 30 juin 2021, demandant des informations supplémentaires sur le motif du remboursement dès lors que sa situation personnelle n’avait jamais changé depuis 2015.

c. Par décision sur opposition du 22 septembre 2021, le SPC a écarté l’opposition et confirmé la décision du 30 juin 2021, au motif qu’après avoir examiné le montant réel de l’épargne en 2015, le SPC avait constaté que l’épargne de l’intéressée était plus élevée que celle qui avait été prise en compte dans les plans de calcul et n’avait, par ailleurs, pas fait l’objet d’une annonce de la part de l’intéressée. Le SPC avait ainsi repris le calcul du droit aux prestations de l’intéressée, dès le 1er juin 2016. En tous les cas, l’obligation de restituer les prestations complémentaires indûment touchées et son étendue dans le temps n’étaient pas subordonnées à une violation de l’obligation de renseigner. En effet, il s’agissait simplement de rétablir l’ordre légal, après la découverte d’un fait nouveau.

C. a. Par acte posté le 21 octobre 2021, l’intéressée a recouru auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre de céans) contre la décision du 22 septembre 2021. Elle a exposé, en substance, qu’elle ignorait qu’elle devait dépenser la totalité de la somme perçue, sans quoi elle devrait restituer le montant non dépensé. Le SPC ne l’avait pas informée de cette situation de telle sorte que le résultat était injuste par rapport aux personnes qui étaient informées et/ou qui avaient profité de cet argent et qui ne devaient donc pas restituer une partie de la somme versée. L’intéressée reconnaissait avoir reçu, au cours des années, les formulaires avec diverses informations, dont notamment l’obligation d’informer le SPC de la réduction ou de l’augmentation de sa fortune mais elle considérait que rien n’était clair dans cette formulation car, de toute manière, une fortune augmente ou diminue d’une année après l’autre. Elle se plaignait donc que les critères exacts, chiffres ou pourcentages qui permettaient de comprendre à partir de quand il fallait annoncer la diminution ou l’augmentation de l’épargne, étaient inexistants. Elle concluait à l’annulation partielle ou totale de la demande de remboursement du SPC.

b. Par réponse du 19 novembre 2021, le SPC a confirmé la position déjà exprimée dans sa décision, tout en précisant que chaque année, la recourante avait reçu différentes communications importantes, lesquelles rendaient notamment attentifs les bénéficiaires de prestations complémentaires sur l’obligation d’annoncer un changement de leur situation ou d’attirer l’attention du SPC en cas de calcul erroné. Dans le cas d’espèce, le montant de la fortune, qui avait été pris en compte, était très inférieur à celui dont elle disposait réellement ; il ne s’agissait donc pas d’une différence de peu d’importance et il était évident que le fait de mettre à jour le montant de l’épargne aurait une conséquence sur la situation de l’intéressée. Enfin, si cette dernière trouvait les formulations du SPC peu claires, il lui était possible, en cas de doute, d’appeler les services du SPC ou de prendre contact avec une assistante sociale, afin d’éclaircir la terminologie employée. Compte tenu de ces éléments, le SPC persistait dans les termes de sa décision.

c. Dans sa réplique du 13 décembre 2021, la recourante a précisé que toutes les démarches qu’elle avait effectuées avaient été menées avec l’aide de son fils, qui avait eu des contacts téléphoniques avec différents employés du SPC. Elle considérait que la demande de remboursement du SPC était injuste en ce sens que ce dernier n’avait pas correctement informé la recourante sur le fait que si les prestations versées n’étaient pas totalement dépensées, elles devraient être remboursées. Elle estimait qu’elle avait été induite en erreur, en pensant pouvoir garder quelques centaines de francs par année, dans le cas où elle devrait l’utiliser pour une maladie, une hospitalisation, ou un achat important. De surcroît, le SPC avait considéré que le montant de la fortune prise en compte était « très inférieur à celui dont elle disposait réellement » et qu’il ne s’agissait donc pas d’une « différence de peu d’importance » qui allait avoir fatalement une conséquence sur la situation de la recourante. Cette dernière se demandait sur quelle base le SPC s’était fondé pour conclure qu’il s’agissait d’un montant très inférieur et qu’il ne s’agissait pas d’une différence de peu d’importance ; elle ajoutait que si elle avait su, elle aurait utilisé cet argent pour acheter des meubles, les siens datant de 2004, et ayant probablement mérité d'être remplacés dans l’intervalle, si le confinement consécutif à la pandémie COVID-19 n’était pas intervenu. Elle persistait dans les conclusions de son recours.

d. La chambre de céans a entendu les parties en comparution personnelle, en date du 22 septembre 2022.

La recourante, qui était accompagnée de son fils venu à l’audience pour l’assister, a expliqué que lorsqu'elle avait pris sa retraite, elle percevait sa pension AVS et avait reçu, en 2014 ou en 2015, une « petite réserve » provenant du remboursement de son deuxième pilier, soit un montant d’environ CHF 54'000.-, qui avait été porté au crédit de son compte bancaire, ouvert dans les livres de l’UBS. Sa rente AVS ne suffisait pas pour faire face à toutes ses dépenses et notamment payer son loyer annuel, qui s’élevait à CHF 17'800.-. Pour cette raison, elle avait déposé une demande de prestations complémentaires, qui lui avait été accordées, sans quoi elle aurait dû vivre sur le montant du deuxième pilier, qui aurait peu à peu « fondu ».

De son côté, la représentante du SPC a rappelé qu’au moment de la décision d'octroi des prestations complémentaires, l'épargne de l’intéressée avait été examinée et s’élevait à un montant d’environ CHF 47'000.- ou CHF 49'000.-. Lorsque quatre ans plus tard, le SPC avait procédé à la révision du dossier, il avait demandé à l’intéressée de lui communiquer une copie des relevés bancaires et c’était après examen desdits relevés que le SPC avait constaté que l’épargne de l’intéressée avait augmenté dans l’intervalle, ce qui avait conduit à la demande de remboursement faisant l’objet de la décision querellée.

Le fils de la recourante considérait qu’il y avait eu un problème de communication car sa mère, qui avait pourtant besoin d'effectuer certains achats, notamment des meubles et un ordinateur, avait laissé cela de côté sans imaginer qu'il pouvait en résulter une modification de ses droits et une demande de remboursement. Si elle l'avait su, elle aurait profité de son argent et l'aurait dépensé pour ces biens qui lui étaient utiles, plutôt que de devoir rembourser ces montants au SPC. Il était regrettable que, faute d’information, la recourante n’ait pas pu anticiper une éventuelle demande de remboursement et dépenser l’argent pour les biens de consommation susmentionnés.

e. Sur ce, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées en fin d’audience.

f. Les autres faits seront cités, en tant que de besoin, dans la partie « en droit » du présent arrêt.

EN DROIT

 

1.             Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05), la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.             Le délai de recours est de trente jours (art. 56 LPGA ; art. 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 [LPA - E 5 10]).

Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, le recours est recevable.

3.             Les dispositions de la LPGA s’appliquent aux prestations complémentaires fédérales à moins que la LPC n’y déroge expressément (art. 1 al. 1 LPC). En matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC).

Le 1er janvier 2021 est entrée en vigueur la modification du 21 juin 2019 de la LPGA.

Sur le plan matériel, sont en principe applicables les règles de droit en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 129 V 1 consid. 1 ; ATF 127 V 467 consid. 1 et les références). En ce qui concerne en revanche la procédure, et à défaut de règles transitoires contraires, le nouveau droit s'applique sans réserve dès le jour de son entrée en vigueur (ATF 117 V 93 consid. 6b ; ATF 112 V 360 consid. 4a ; RAMA 1998 KV 37 p. 316 consid. 3b).

Déposé après le 1er janvier 2021, le recours sera donc traité sous l'angle du nouveau droit de la LPGA (cf. ATAS/360/2021 du 15 avril 2021 consid. 3).

4.             La décision litigieuse porte sur les prestations complémentaires pour la période allant du 1er janvier 2016 au 31 décembre 2020, soit sur une période antérieure à l'entrée en vigueur, le 1er janvier 2021, des modifications des 22 mars, 20 décembre 2019 et 14 octobre 2020. Est également visée par la décision la période allant du 1er janvier au 30 juin 2021. Néanmoins, pour les personnes déjà au bénéfice de prestations complémentaires au 1er janvier 2021, les prestations sont calculées en application de l’ancien droit, au plus tard jusqu’au 31 décembre 2023, si l’application des nouvelles dispositions entraîne leur diminution ou leur suppression. Selon les calculs établis par le SPC, pour le premier semestre 2021, l’ancien droit est plus favorable que le nouveau droit ; dès lors, le présent litige est soumis à l'ancien droit, en l'absence de dispositions transitoires prévoyant une application rétroactive du nouveau droit (arrêt du Tribunal fédéral des assurances U.18/07 du 7 février 2008 consid. 1.2). Les dispositions légales de la LPC seront donc citées, ci-après, dans leur teneur en vigueur jusqu'au 31 décembre 2020.

5.             En l'espèce, le litige porte sur l’obligation de l’intéressée de rembourser le montant de CHF 8’649.- correspondant, selon l’intimé, au trop-perçu pour la période allant du 1er janvier 2016 au 30 juin 2021.

6.              

6.1 En vertu de l’art. 25 LPGA, les prestations indûment touchées doivent être restituées. La restitution ne peut être exigée lorsque l’intéressé était de bonne foi et qu’elle le mettrait dans une situation difficile (al. 1). Le droit de demander la restitution s’éteint trois ans après le moment où l’institution d’assurance a eu connaissance du fait, mais au plus tard cinq ans après le versement de la prestation (al. 2). Si la créance naît d’un acte punissable pour lequel le droit pénal prévoit un délai de prescription plus long, celui-ci est déterminant (al. 3).

Les délais de l’art. 25 al. 2 LPGA sont des délais (relatif et absolu) de péremption, qui doivent être examinés d'office par le juge (ATF 133 V 579 consid. 4 ; ATF 128 V 10 consid. 1).

6.2 Le délai de péremption relatif commence à courir dès le moment où l'administration aurait dû connaître les faits fondant l'obligation de restituer, en faisant preuve de l'attention que l'on pouvait raisonnablement exiger d'elle (ATF 122 V 270 consid. 5a). L'administration doit disposer de tous les éléments qui sont décisifs dans le cas concret et dont la connaissance fonde - quant à son principe et à son étendue - la créance en restitution à l'encontre de la personne tenue à restitution (ATF 111 V 14 consid. 3). Si l'administration dispose d'indices laissant supposer l'existence d'une créance en restitution, mais que les éléments disponibles ne suffisent pas encore à en établir le bien-fondé, elle doit procéder, dans un délai raisonnable, aux investigations nécessaires (ATF 133 V 579 consid. 5.1 non publié). À titre d'exemple, le Tribunal fédéral a considéré dans le cas de la modification des bases de calcul d'une rente par une caisse de compensation à la suite d'un divorce qu'un délai d'un mois pour rassembler les comptes individuels de l'épouse était largement suffisant (SVR 2004 IV N° 41, consid. 4.3). À défaut de mise en œuvre des investigations, le début du délai de péremption doit être fixé au moment où l’administration aurait été en mesure de rendre une décision de restitution si elle avait fait preuve de l'attention que l'on pouvait raisonnablement exiger d'elle. Dans tous les cas, le délai de péremption commence à courir immédiatement s'il s'avère que les prestations en question étaient clairement indues (ATF 133 V 579 consid. 5.1. non publié).

Contrairement à la prescription, la péremption prévue à l’art. 25 al. 2 LPGA ne peut être ni suspendue ni interrompue et lorsque s’accomplit l’acte conservatoire que prescrit la loi, comme la prise d’une décision, le délai se trouve sauvegardé une fois pour toutes (arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 271/04 du 21 mars 2006 consid. 2.5).

6.3 Lorsque la restitution est imputable à une faute de l’administration, on ne saurait considérer comme point de départ du délai le moment où la faute a été commise, mais bien celui auquel l’administration aurait dû, dans un deuxième temps (par exemple à l’occasion d’un contrôle comptable), se rendre compte de son erreur en faisant preuve de l’attention requise (ATF 124 V 380 consid. 1 ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 80/05 du 3 février 2006). Le délai de péremption d'une année commence à courir dans tous les cas aussitôt qu'il s'avère que les prestations en question étaient indues (ATF 133 V 579 consid. 5.1). Cette jurisprudence vise un double but, à savoir obliger l'administration à faire preuve de diligence, d'une part, et protéger l'assuré au cas où celle-ci manquerait à ce devoir de diligence, d'autre part (ATF 124 V 380 consid. 1).

Lorsque l'erreur de l’administration porte sur un élément auquel est attaché un effet de publicité, ladite administration doit se laisser opposer la fiction selon laquelle elle est réputée avoir connaissance d'emblée des circonstances excluant l'allocation des prestations en cause (le point de départ du délai d'une année coïncide alors avec la date du versement de ces prestations). Cette fiction trouve sa justification exclusivement dans l'opposabilité à tout tiers des faits contenus dans les registres publics (principe de la foi publique ; cf. art. 970 al. 3 du Code civil suisse du 10 décembre 1907 [CC - RS 210] pour le registre foncier ; art. 932 al. 2 de la loi fédérale du 30 mars 1911, complétant le Code civil suisse [CO, Code des obligations - RS 220] pour le registre du commerce ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances C 68/01 du 3 juillet 2002 consid. 4).

7.             En l’espèce, ce n’est qu’après avoir examiné l’intégralité des documents qui lui a été transmise au mois de mai 2021 que le SPC a procédé à la révision du dossier et à un nouveau calcul des prestations dues. C’est à cette occasion que le montant du trop-perçu a été établi. Aucun élément ne permet de déduire que l’intimé aurait eu la possibilité de se rendre compte de ces différences auparavant. Par conséquent, le délai relatif de péremption n’est pas échu. S’agissant du délai absolu de cinq ans, qui commence à courir après le versement de la prestation, il couvre la période allant du 30 juin 2016 au 30 juin 2021, cette date correspondant à la décision de restitution à laquelle l’intéressée s’est opposée.

Par ailleurs, aucun indice ne laisse à penser qu’il y aurait lieu d’appliquer une prescription plus longue, fondée sur le droit pénal, le SPC ayant d’ailleurs pris la peine de préciser dans ses écritures que l’obligation de restituer les prestations complémentaires indûment touchées et son étendue dans le temps n’étaient pas subordonnées à une violation de l’obligation de renseigner commise par l’intéressée, mais qu’il s’agissait de rétablir l’ordre légal, après la découverte d’un fait nouveau.

Compte tenu du délai de prescription absolu de cinq ans, la recourante n’est pas tenue de rembourser les prestations versées pour la période allant du 1er janvier au 30 juin 2016.

8.              

8.1 Sur le plan fédéral, les personnes qui ont leur domicile et leur résidence habituelle en Suisse et qui remplissent les conditions personnelles prévues aux art. 4, 6 et 8 LPC ont droit à des prestations complémentaires. Ont ainsi droit aux prestations complémentaires notamment les personnes qui perçoivent une rente de l'assurance-invalidité, conformément à l'art. 4 al. 1 let. c LPC.

Les prestations complémentaires fédérales se composent de la prestation complémentaire annuelle et du remboursement des frais de maladie et d’invalidité (art. 3 al. 1 LPC). L’art. 9 al. 1 LPC dispose que le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants.

Selon l’art. 11 al. 1 LPC, les revenus déterminants comprennent notamment : le produit de la fortune mobilière et immobilière (let. b) ; un quinzième de la fortune nette, un dixième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, dans la mesure où elle dépasse CHF 37'500.- pour les personnes seules ; si le bénéficiaire de prestations complémentaires ou une autre personne comprise dans le calcul de ces prestations est propriétaire d'un immeuble qui sert d'habitation à l'une de ces personnes au moins, seule la valeur de l'immeuble supérieure à CHF 112'500.- entre en considération au titre de la fortune (let. c) ; les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s’est dessaisi (let. g).

8.2 La fortune, au sens de l'art. 11 al. 1 let. b et c LPC, comprend toutes les choses mobilières et immobilières ainsi que les droits personnels et réels qui sont la propriété de l'assuré et qui peuvent être transformés en espèces (par le biais d'une vente ou d'un nantissement par exemple) pour être utilisés (Urs MÜLLER, Bundesgesetz über Ergäzungsleistungen zur Alters-, Hinterlassenen- und Invalidenversicherung, 2006 n. 35, Ralph JÖHL/Patricia USINGER-EGGER, Ergänzungsleistungen zur AHV/IV in Schweizerisches Bundesverwaltungsrecht [SBVR], Band XIV, Soziale Sicherheit, 2016, p. 1844 s n. 163). Ainsi, font notamment partie de la fortune : les gains à la loterie, la valeur de rachat d'une assurance-vie, l'épargne, les actions, les obligations, les successions, les versements en capital d'assurances, l'argent liquide (MÜLLER, op. cit., n. 35).

Quant aux dépenses, l'art. 10 LPC énumère - de manière exhaustive - les dépenses reconnues. Ce montant inclut notamment les frais de nourriture, d'habillement, de soins corporels de consommation d'énergie (électricité, gaz, etc.), de communication, de transport ou de loisirs (arrêt du Tribunal fédéral 9C_945/2011 du 11 juillet 2012 consid. 5.1 et les références).

8.3 Pour le calcul de la prestation complémentaire fédérale annuelle, sont pris en compte en règle générale les revenus déterminants obtenus au cours de l’année civile précédente et l’état de la fortune le 1er janvier de l’année pour laquelle la prestation est servie (art. 23 al. 1 de l'ordonnance sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 15 janvier 1971 [OPC-AVS/AI - RS 831.301]). Pour les assurés dont la fortune et les revenus déterminants à prendre en compte au sens de la LPC peuvent être établis à l'aide d'une taxation fiscale, les organes cantonaux d'exécution sont autorisés à retenir, comme période de calcul, celle sur laquelle se fonde la dernière taxation fiscale, si aucune modification de la situation économique de l'assuré n'est intervenue entre-temps (al. 2). La prestation complémentaire annuelle doit toujours être calculée compte tenu des rentes, pensions et autres prestations périodiques en cours (al. 3).

 

9.              

9.1 Sur le plan cantonal, ont droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes qui remplissent les conditions de l'art. 2 LPCC et dont le revenu annuel déterminant n'atteint pas le revenu minimum cantonal d'aide sociale applicable (art. 4 LPCC).

Le montant annuel de la prestation complémentaire correspond à la part des dépenses reconnues qui excède le revenu annuel déterminant de l'intéressé (art. 15 al. 1 LPCC).

Selon l'art. 5 LPCC, le revenu déterminant est calculé conformément aux règles fixées dans la LPC et ses dispositions d'exécution, moyennant les adaptations suivantes : les prestations complémentaires fédérales sont ajoutées au revenu déterminant (let. a) ; et, en dérogation à l'art. 11 al. 1 let. c LPC, la part de la fortune nette prise en compte dans le calcul du revenu déterminant est de un huitième, respectivement de un cinquième pour les bénéficiaires de rentes de vieillesse, et ce après déduction (let. c) : des franchises prévues par cette disposition (ch. 1) ; du montant des indemnités en capital obtenues à titre de dommages et intérêts en réparation d'un préjudice corporel, y compris l'indemnisation éventuelle du tort moral (ch. 2).

Les dépenses reconnues sont celles énumérées par la loi fédérale et ses dispositions d'exécution à l'exclusion du montant destiné à la couverture des besoins vitaux, remplacé par le montant destiné à garantir le revenu minimum cantonal d'aide sociale défini à l'art. 3 (art. 6 LPCC).

9.2 Selon l'art. 7 LPCC, la fortune comprend la fortune mobilière et immobilière définie par la LPC et ses dispositions d'exécution (al. 1). La fortune est évaluée selon les règles de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08), à l'exception notamment des règles concernant les déductions sociales sur la fortune, prévues aux art. 50 let. e et 58 de ladite loi, qui ne sont pas applicables. Les règles d'évaluation prévues par la LPC et ses dispositions d'exécution sont réservées (al. 2).

9.3 Pour la fixation des prestations complémentaires cantonales, sont déterminantes, les rentes, pensions et autres prestations périodiques de l'année civile en cours (art. 9 let. a LPCC), la fortune au 1er janvier de l'année pour laquelle la prestation est demandée (let. b). En cas de modification importante des ressources ou de la fortune du bénéficiaire, la prestation est fixée conformément à la situation nouvelle (al. 3).

10.         Le juge des assurances sociales fonde sa décision, sauf dispositions contraires de la loi, sur les faits qui, faute d'être établis de manière irréfutable, apparaissent comme les plus vraisemblables, c'est-à-dire qui présentent un degré de vraisemblance prépondérante. Il ne suffit donc pas qu'un fait puisse être considéré seulement comme une hypothèse possible. Parmi tous les éléments de fait allégués ou envisageables, le juge doit, le cas échéant, retenir ceux qui lui paraissent les plus probables (ATF 130 III 321 consid. 3.2 et 3.3 ; ATF 126 V 353 consid. 5b ; ATF 125 V 193 consid. 2 et les références). Aussi n'existe-t-il pas, en droit des assurances sociales, un principe selon lequel l'administration ou le juge devrait statuer, dans le doute, en faveur de l'assuré (ATF 126 V 319 consid. 5a).

11.         En l’espèce, l’intimé considère qu’il s’est produit une modification importante de la fortune de l’intéressée, ce qui implique que la prestation doit être fixée conformément à la situation nouvelle (art. 9 al. 3 aLPCC et LPCC).

La recourante conteste ce fait, expliquant d’une part que si elle avait su qu’elle devrait rembourser une partie des prestations complémentaires, elle n’aurait pas fait d’économies et exposant, d’autre part, que la notion de différence importante n’est pas précisée. Étant précisé qu’en dehors de cette position de principe, la recourante ne conteste pas l’exactitude des chiffres et des calculs effectués par le SPC.

11.1 À teneur des chiffres communiqués par le SPC et joints à la décision querellée, l’épargne prise en compte pour l’année 2016 s’élève à CHF 51’994.90 ; pour l’année 2017 : CHF 57’292.90 ; pour l’année 2018 : CHF 60’411.60 ; pour l’année 2019 : CHF 59’394.10 ; pour l’année 2020 : CHF 57’523.10 et enfin, pour l’année 2021 : CHF 53’711.60.

Lors du calcul qui avait été effectué, dès le 1er avril 2015 selon feuilles de calcul annexées à la décision de prestations complémentaires et de subsides d’assurance-maladie du 11 juin 2015, le montant de l’épargne s’élevait alors à CHF 48'609.50.

C’est le même montant d’épargne de CHF 48’609.50 qui avait été retenu, pour la période débutant le 1er janvier 2016, selon feuille de calcul annexée à décision de révision du montant des prestations du 11 décembre 2015.

11.2 S’agissant des variations de fortune, selon l’art. 25 al. 1 OPC-AVS/AI, la prestation complémentaire annuelle doit être augmentée, réduite ou supprimée notamment :

- lorsque les dépenses reconnues, les revenus déterminants et la fortune subissent une diminution ou une augmentation pour une durée qui sera vraisemblablement longue ; sont déterminants les dépenses nouvelles et les revenus nouveaux et durables, convertis sur une année, ainsi que la fortune existant à la date à laquelle le changement intervient ; on peut renoncer à adapter la prestation complémentaire annuelle, lorsque la modification est inférieure à CHF 120.- par an (let. c) ;

- lors d’un contrôle périodique, si l’on constate un changement des dépenses reconnues, des revenus déterminants et de la fortune ; on pourra renoncer à rectifier la prestation complémentaire annuelle, lorsque la modification est inférieure à CHF 120.- par an (let. d).

L'art. 25 OPC-AVS/AI permet d'adapter une décision de prestations complémentaires à des modifications postérieures de la situation personnelle et économique de l'ayant droit en raison d'un changement de circonstances. L'al. 1 de cette disposition règle la modification (augmentation, réduction ou suppression) de la prestation complémentaire annuelle (en cours d'année civile) et concerne la situation d'une révision de prestations durables au sens de l'art. 17 al. 2 LPGA (arrêt du Tribunal fédéral 9C_328/2014 du 6 août 2014 consid. 5.2 et les références).

Lorsque les conditions de l'art. 25 al. 1 OPC-AVS/AI sont réalisées, un réexamen du droit aux prestations complémentaires est possible en tout temps. Une exception à cette règle figure toutefois à l'art. 25 al. 3 OPC-AVS/AI qui prévoit qu'un nouveau calcul de la prestation complémentaire annuelle suite à une diminution de la fortune ne peut être effectué qu’une fois par an. Le but de cette disposition est d'empêcher qu'une prestation complémentaire doive être recalculée plusieurs fois par année lorsque la fortune diminue (Michel VALTERIO, Commentaire de la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l'AVS et à l'AI, 2015, n. 176 ad art. 21 LPC et la référence ; ATAS/485/2018 du 4 juin 2018 consid. 5).

11.3 Le SPC semble avoir considéré que la variation de la fortune de la recourante concernait une durée qui était vraisemblablement longue. On observe toutefois qu’il n’y a pas eu d’augmentation linéaire de la fortune de la recourante, entre 2016 et 2021, mais que l’épargne a progressé depuis 2016, jusqu’à atteindre un pic de CHF 60’411.60, en 2018, avant d’amorcer une descente, pour aboutir à un montant de CHF 53’711.60 au début de l’année 2021.

Néanmoins, si l’on calcule la moyenne de l’épargne pendant les années 2016 à 2021, on aboutit au montant de CHF 56'721.-, ce qui représente environ 16 % de plus que l’épargne sur laquelle le SPC s’était fondé pour calculer les prestations complémentaires.

On peut à cet égard se référer aux Directives concernant les prestations complémentaires à l’AVS et à l’AI, état au 1er janvier 2021, éditées par l’office fédéral des assurances sociales, qui prévoient au chiffre 3533.08 « Consommation excessive » qu’il y a consommation excessive de la fortune si l’assuré dépense, durant la période considérée, plus que 10 % de sa fortune par année. Si la fortune est inférieure à CHF 100 000.-, la limite est de CHF 10 000.- par année.

Par analogie, on peut considérer qu’une augmentation de la fortune supérieure à 10 % par année doit être considérée comme importante.

11.4 Compte tenu de ces éléments, le SPC était en droit de considérer que la fortune de la recourante avait connu une augmentation importante depuis le début de l’année 2016, ce qui justifiait de procéder à de nouveaux calculs a posteriori et de réclamer le remboursement du trop-perçu à la lumière des chiffres révisés.

On peut toutefois comprendre que la recourante n’était pas consciente du fait que l’augmentation de sa fortune, de 16 %, en moyenne, entre 2016 et 2021, devait entraîner une obligation d’information spontanée du SPC, ce d’autant moins que, comme l’a souligné la recourante dans ses écritures, ses revenus n’avaient pas subi d’augmentation et que ce n’est que par la privation et un sens aigu de l’économie que sa fortune avait augmenté.

11.5 S’agissant du manque d’information dont se plaint la recourante, cette dernière ne peut pas reprocher au SPC de ne pas lui avoir conseillé de dépenser son épargne pour éviter d’être exposée à une demande de remboursement dès lors que la finalité des prestations complémentaires n’est pas de permettre au bénéficiaire d’en tirer profit – en créant de l’épargne - mais, comme cela est précisé à l’art. 2 al. 1 LPC, de couvrir les besoins vitaux des bénéficiaires (prestations complémentaires fédérales) ou, selon l’art. 1 al. 1 LPCC, de bénéficier d'un revenu minimal cantonal d’aide sociale (prestations complémentaires cantonales).

12. Compte tenu de ces éléments, la chambre de céans n’admettra que très partiellement le recours - pour la période allant du 1er janvier 2016 au 30 juin 2016 qui est couverte par la prescription et ne peut donner lieu à une demande de remboursement - et rejettera le recours pour le surplus.

13. Par ailleurs, il sera rappelé à la recourante qu’elle a la possibilité, dans les trente jours qui suivent l’entrée en force du présent arrêt, de déposer une demande de remise de son obligation de rembourser auprès du SPC et ceci pour autant que les conditions cumulatives de la bonne foi et d’une situation (financière) difficile soient réunies (art. 4 de l'ordonnance sur la partie générale du droit des assurances sociales du 11 septembre 2002 [OPGA - RS 830.11]).

14. La recourante, qui obtient très partiellement gain de cause, n'est pas représentée en justice et n'a pas allégué ou démontré avoir déployé des efforts dépassant la mesure de ce que tout un chacun consacre à la gestion courante de ses affaires ; elle n'a, dès lors, pas droit à des dépens.

15. En l’absence de loi spéciale prévoyant des frais judiciaires, la procédure est gratuite (art. 61 let. fbis LPGA).

 

 

 

 


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        L'admet très partiellement.

3.        Renvoie la cause à l’intimé pour nouvelle décision au sens des considérants.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public (art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 - LTF - RS 173.110). Le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Véronique SERAIN

 

Le président

 

 

 

 

Philippe KNUPFER

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le