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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/238/2008

ATAS/10/2009 (2) du 13.01.2009 ( PC ) , ADMIS

Recours TF déposé le 18.02.2009, rendu le 26.11.2009, REJETE, 9C_150/2009
Descripteurs : ; PC ; PRESTATION COMPLÉMENTAIRE ; REVENU HYPOTHÉTIQUE ; DESSAISISSEMENT DE FORTUNE ; CONJOINT ; RÉVISION(DÉCISION) ; RECHERCHE D'EMPLOI ; ÂGE
Normes : LPC3c
Résumé : L'on ne peut considérer que l'épouse du recourant, âgée de 52 ans, s'est abstenue de d'exercer une activité lucrative ou d'étendre une telle activité, preuve en est ses nombreuses recherches d'emploi (restées vaines). Partant, l'on ne saurait conclure que le recourant a, par l'intermédiaire de son épouse, renoncé à des gains ou qu'il s'est dessaisi d'une part de ses ressources. Le Service des prestations complémentaires n'avait donc pas à tenir compte d'un gain potentiel pour cette dernière.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/238/2008 ATAS/10/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL CANTONAL DES

ASSURANCES SOCIALES

Chambre 2

du 13 janvier 2009

 

En la cause

 

Monsieur R_________, domicilié à GENÈVE, comparant par Maître Sarah BRAUNSCHMIDT, en l’Étude de qui il élit domicile

recourant

 

contre

 

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis 54, route de Chêne, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

Monsieur R_________ (ci-après l’assuré ou le recourant), né en 1937, marié, est au bénéfice de prestations complémentaires suite à une demande déposée en 1995 auprès du SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES (anciennement Office cantonal des personnes âgées ; ci-après SPC). Depuis 2003, le SPC payait directement le loyer du recourant à la régie immobilière, le solde des prestations complémentaires étant versé sur son compte bancaire.

Dans le calcul des prestations complémentaires effectué jusqu’à la fin de l’année 2006, le SPC a, outre la rente perçue par l’assuré, pris en compte le gain de l’activité lucrative de son épouse, soit 12'031 fr. par année, à raison de 7'020 fr. 70 au vu des règles applicables en la matière. Les prestations mensuelles fédérales s’élevaient alors à 1'419 fr. et les prestations mensuelles cantonales à 1'024 fr.

Par décision du 29 mars 2007, annulant et remplaçant la précédente, le SPC a constaté que l’assuré n’avait plus droit aux prestations fédérales, et que son droit aux prestations cantonales s’élevait à 950 fr. par mois à partir du 1er avril 2007. Dans le nouveau calcul était pris en compte, outre le gain généré par l’activité lucrative de son épouse et la récente majoration du loyer de son logement, un gain potentiel exigible de son épouse estimé à 27'825 fr. selon les normes de la convention collective de travail du secteur du nettoyage. Cette décision est entrée en force, et le SPC a cessé de verser le montant du loyer à la régie, ce dont ni la régie ni l’assuré n’ont été informés.

Par lettre du 5 septembre 2007, la régie a mis le SPC en demeure de lui verser les arriérés de loyer à hauteur de 2'792 fr. 60, faute de quoi le contrat de bail de l’assuré serait résilié.

Par lettre du 19 octobre 2007 intitulée « Recours », l’assuré, qui venait d’apprendre que le loyer de son logement n’était plus payé alors que des garanties annuelles lui avaient été fournies, a interpellé le SPC pour obtenir des explications.

Par lettre du 22 octobre 2007, l’assuré a en outre sollicité l’octroi de prestations d’assistance pour lui-même et son épouse, laquelle était depuis deux semaines incapable de travailler pour cause de maladie.

Par avis du 30 octobre 2007 adressé à l’assuré, la régie immobilière a déclaré résilier son contrat de bail avec effets au 30 novembre suivant, motif pris du non-paiement du loyer en dépit de la mise en demeure du 5 septembre précédent.

Par décision du 30 octobre 2007, le SPC, constatant que le recourant n’en remplissait pas les conditions, lui a refusé l’octroi de prestations d’assistance. Il l’a en outre informé du fait qu’il n’était en mesure de régler ni l’arriéré de loyer ni le loyer courant, et que la régie en avait été avisée, de sorte qu’il convenait, pour éviter l’évacuation de son logement, que le recourant conclue un arrangement avec elle. D’autre part, pour tenir compte de l’augmentation du loyer depuis le 1er avril 2007, le SPC lui a accordé des prestations complémentaires cantonales de 966 fr. par mois à compter du 1er novembre 2007, le montant dû rétroactivement étant retenu en remboursement de la créance en restitution qui existait en sa faveur.

Le recourant s’est opposé à cette décision le 8 novembre 2007. Il concluait à ce que la prise en compte d’un gain potentiel soit supprimée. Il rappelait notamment que son épouse, âgée de 52 ans, était inscrite à l’Office cantonal de l’emploi où elle devait justifier chaque mois de recherches d’emploi, qui n’avaient pas encore abouti.

Par lettre adressée le 4 décembre 2007 par la caisse de chômage COMEDIA à l’épouse du recourant, le droit de celle-ci à une indemnité de chômage a été refusé au motif que son contrat de travail n’avait pas été résilié et qu’elle ne subissait dès lors pas de perte à prendre en considération.

Par décision du 3 janvier 2008, le SPC a rejeté l’opposition faite à sa décision du 30 octobre 2007. Il faisait en particulier valoir que l’épouse du recourant travaillait à temps partiel alors qu’elle pouvait, au vu de son âge, de son état de santé et du poste qu’elle occupait, travailler à temps complet. Le gain potentiel retenu en conséquence avait déjà été fixé dans une décision rendue le 29 mars 2007 qui, en l’absence d’opposition, était entrée en force, de sorte que le droit de le mettre en cause était prescrit.

Par acte de recours du 7 janvier 2008, l’assuré a notamment fait valoir qu’il ne comprenait pas la décision litigieuse. Il n’était pas au courant de la cessation du paiement du loyer directement en mains de la régie. Le non-paiement du loyer avait plongé son ménage dans de grandes difficultés, et son épouse travaillait autant qu’elle pouvait, compte tenu de son état de santé et du travail fourni par son employeur. Elle avait cherché un travail à temps complet, sans succès. Le recourant concluait notamment à l’octroi de prestations d’assistance.

À l’appui de ses conclusions, il a produit un chargé de pièces constitué par les recherches d’emploi effectuées par son épouse de novembre 2007 à janvier 2008. Leur contenu sera repris plus avant dans la mesure utile.

Dans son complément au recours du 4 février 2008, le recourant a notamment fait valoir les importantes recherches d’emploi effectuées par son épouse, en vain, et que le salaire perçu alors était, de par la volonté de l’employeur qui ne lui fournissait parfois que quelques heures de travail par mois, extrêmement irrégulier. Il concluait par conséquent, avec suite de dépens, à l’annulation de la décision litigieuse, à ce que la cause soit renvoyée au SPC pour calcul des prestations complémentaires et, subsidiairement, à l’octroi de prestations d’assistance.

Dans sa réponse du 11 février 2008, le SPC a repris ses explications. Il fait en substance valoir que la décision du 30 octobre 2007 ne modifie le droit aux prestations complémentaires qu’en raison d’une légère adaptation du montant du loyer, tandis que le gain d’activité potentiel de l’épouse faisait déjà l’objet de la décision précédente. Le gain potentiel exigible de l’épouse du recourant, selon la convention collective de travail applicable dans le secteur du nettoyage, quand bien même l’intéressée n’en bénéficierait pas concrètement, se montait à 39'856 fr. par an, montant duquel le gain généré par l’activité lucrative était déduit.

Sur question du Tribunal de céans, le SPC a, par lettre du 1er avril 2008, précisé ce qui suit : premièrement, aucun avis n’avait été adressé au recourant ou à la régie au sujet du paiement du loyer ; deuxièmement, la créance à l’encontre de celui-ci provenait d’un calcul des prestations complémentaires qui tenait compte d’une baisse de loyer obtenue par jugement du Tribunal des baux et loyers. S’agissant du gain potentiel, il avait, au moment de la mise à jour du loyer, réalisé que l’épouse n’exerçait une activité qu’à temps partiel. Par pli du 2 octobre 2006, il avait donc informé le recourant qu’un gain potentiel pourrait être pris en considération dans un délai de six mois, soit dès le 1er avril 2007, encourageant l’épouse à rechercher un emploi tendant à l’augmentation de son activité lucrative.

À l’audience du 8 avril 2008, le Tribunal a procédé à la comparution personnelle des parties. Elles ont déclaré ce qui suit :

« Me BRAUNSCHMIDT : Sur question j’indique qu’il est exact que la décision du 29 mars 2007 n’a pas été contestée. J’explique que mon client, en raison d’une dette existante qu’il devait rembourser à l’OCPA a cru que la baisse de PC notifiée par cette décision correspondait à son droit aux PC antérieur diminué de sa dette. Cela étant son épouse s’est inscrite au chômage en automne 2007, qui lui a dénié droit aux indemnités journalières selon décision que j’ai produite. Elle a effectué de nombreuses démarches, j’ai également produit les refus.

 

M. R_________ : J’explique que mon épouse travaille depuis 6 ou 7 ans pour X_________. Au fil du temps, le nombre d’heures qu’on lui demande d’effectuer ne cesse de diminuer. Il s’agit en fait d’un travail sur appel qui rend très difficile de trouver une activité complémentaire car les heures de travail sont flexibles. Je produis le contrat de travail de mon épouse, qui date du 4 octobre 2001. Elle a notamment postulé dans tous les EMS pour trouver un travail à temps plein, en vain.

 

Mme MACRIPO (SPC) : Il me semble qu’à ce jour la dette du recourant, qui était de 2'886 fr., est éteinte, mais je vérifierai cette question.

 

M. R_________ : J’ai pris un arrangement de payer pour mes arriérés de loyer, de 3'297 fr.60, et je paye 200. fr. de plus par mois, selon procès-verbal de conciliation ».

À l’audience d’enquêtes du 6 mai 2008, l’épouse du recourant, entendue à titre de renseignements, a déclaré ce qui suit :

« J’explique être arrivée en Suisse en 1975. Je n’ai pas de formation. Dès ce moment, j’ai travaillé en qualité de gouvernante pour l’ambassade d’Éthiopie jusqu’en 1996. Je vivais sur place. En 1996, je me suis mariée, l’ambassade n’était pas d’accord que je prenne un logement avec mon époux en dehors de l’ambassade, j’ai donc quitté mon emploi. Entre 1996 et 2001, j’ai eu différents emplois accessoires, notamment dans l’hôtellerie, la restauration et le nettoyage. En raison de douleurs, je ne peux plus faire ces travaux.

En 2001, j’ai commencé à travailler pour X_________, comme aide-soignante à domicile. J’ai commencé à travailler environ cinq heures à cinq heures et demie par jour. Au décès d’un de nos patients, j’ai travaillé pendant une période plutôt trois heures par jour. Aujourd’hui, je travaille plutôt deux heures par jour, au maximum trois. Mon planning est effectué une fois par semaine, il n’y a pas place à discussion. J’ai demandé à X_________ de travailler davantage, on m’a répondu que si je ne peux pas faire de tâches de nettoyage, on ne peut pas me donner plus d’heures. Je travaille du lundi au vendredi et en principe un week-end sur deux.

J’ai eu connaissance de la lettre adressée à mon mari par l’OCPA, je n’ai moi-même pas reçu de lettre. Je n’ai compris qu’il fallait que je fasse des démarches en recherche d’emploi qu’en automne 2007. J’ai fait de multiples offres d’emploi, notamment dans les EMS, également à Y__________ ; toutes les réponses ont été négatives. J’ai 53 ans. Je produis un certificat médical qui prouve mes problèmes de dos, je souffre en effet de problèmes rhumatismaux et de la colonne lombaire, je suis en traitement à la Clinique Beaulieu. Je me suis également inscrite au chômage. J’ai reçu d’une part une sanction parce que je n’avais pas fait de recherches avant mon inscription, d’autre part une décision niant le droit au chômage au motif que je n’avais pas perdu mon emploi. J’ai fait opposition à ces décisions et, par décision sur opposition du 6 décembre 2007, la caisse a rejeté mon opposition relative au droit à l’indemnité et, par décision sur opposition du 23 janvier 2008, l’OCE a annulé la sanction au motif que je ne pouvais pas être sanctionnée puisque le droit à l’indemnité m’avait été nié. Je n’ai pas fait recours.

J’ai reçu un téléphone de la régie un jour, qui m’a indiqué que nous avions trois mois de loyer en retard. Je lui ai demandé pourquoi elle n’avait pas téléphoné plus tôt. Jusqu’à ce téléphone, j’ignorais que le loyer n’était plus payé. Sur question, mon mari m’a indiqué que lui non plus n’était pas au courant.

 

M. R_________ : J’explique avoir demandé conseil à une sorte d’assistant social qui travaille pour la médecine légale au Centre de sociothérapie La Pâquerette, qui m’avait aidé par le passé, au sujet de la lettre de l’OCPA. C’est lui qui m’a dit que mon épouse devait s’inscrire au chômage et faire des offres d’emploi. Nous avons fait ces démarches immédiatement, d’où la sanction du chômage pour absence de recherche d’emploi préalable.

À peu près au même moment que le téléphone de la régie, nous avons reçu un courrier de celle-ci. Je suis allé immédiatement à l’OCPA, la personne au guichet à laquelle j’ai montré le courrier m’a dit que c’était une erreur, que cela allait être corrigé. Tel n’a pas été le cas, je suis retourné à l’OCPA. À ce moment-là, on m’a fait signer une demande d’assistance pour que le loyer soit payé. Finalement, j’ai reçu la décision litigieuse. »

À l’audience de comparution personnelle des parties du même jour, le SPC a confirmé que la dette du recourant était éteinte et qu’une lettre rédigée dans ce sens lui avait été adressée.

Le certificat médical produit par l’épouse du recourant, établi par le docteur A_________ le 11 avril 2008, atteste que l’intéressée souffre de problèmes rhumatismaux et de la colonne lombaire depuis 1998, qu’elle n’est pas capable de travailler à 100% et qu’elle doit éviter le port de charges lourdes.

À l’issue de l’audience, le SPC a sollicité un délai pour examiner la situation au vu des éléments collectés au cours de l’instruction.

Par pli du 29 mai 2008, le SPC a déclaré maintenir, en l’état, la décision litigieuse. En substance, il considérait que l’augmentation du temps de travail de l’épouse du recourant était exigible. L’épouse se devait également de rechercher un travail dans d’autres métiers que celui d’aide-soignante, d’une part puisqu’elle souffrait de problèmes de santé qui l’empêchaient de travailler à plein temps dans ce domaine et, d’autre part, parce qu’il était exigible d’elle qu’elle recherche un emploi dans des domaines qui ne nécessitent pas de formation particulière ou d’expérience et qui la ménageraient de ses douleurs dorsales, comme ouvrière à l’établi, monteuse à la chaîne en usine ou serveuse.

Dans ses écritures du 10 juillet 2008, le recourant a qualifié d’illusoires les possibilités pour son épouse d’exercer l’une des activités évoquées, et souligné le fait qu’elle travaille à mi-temps en dépit des problèmes rhumatismaux dont elle souffre. Il rappelle que, selon la jurisprudence, il importe de savoir si, concrètement, l’intéressé peut ou non trouver du travail. Son épouse avait fait de nombreuses recherches d’emploi qui toutes s’étaient révélées vaines. Elle avait également suivi un cours aux fins d’améliorer ses recherches d’emploi, sans succès.

À l’appui de son argumentation, le recourant a produit une attestation de travail de X_________, du 8 juillet 2008, qui confirme que son épouse est, depuis le 4 octobre 2001, employée à temps partiel avec un horaire variable, et qu’il ne peut pas lui être donné plus de travail en raison des douleurs aux vertèbres cervicales et au dos dont elle souffre.

Par écriture du 28 août 2008, le SPC a déclaré maintenir sa position. Il considère que les problèmes rhumatismaux établis par certificat médical n’empêchent pas l’épouse du recourant d’exercer une activité salariée sans port de charges. La situation de celle-ci ne diffère pas de celle des autres femmes de son âge qui postulent pour un emploi suite à un licenciement ou pour des raisons financières. Certaines agences de placement sont spécialisées, et le SPC considère qu’elle devrait les solliciter.

Par pli du 2 octobre 2008, le recourant a, dans le délai imparti pour ce faire, notamment produit copie des fiches de salaire de son épouse, relatives à l’année 2007. Il ressort notamment de ces documents que, cette année-là, l’intéressée a effectué 743.5 heures de travail et 15 gardes de nuit, soit une moyenne mensuelle de 62 heures sans les gardes de nuit.

Pour sa part, l’intimé a, par lettre du même jour, exposé qu’il avait calculé le gain d’activité lucrative sur la base des bulletins de salaire que l’épouse du recourant lui avait remis, non sans atermoiements, et que le montant de 12'031 fr. par année ainsi calculé n’avait jamais été contesté. Ce montant, qui aurait dû être fixé à 11'424 fr. 60 (12 x 952.05), était le fruit d’une erreur, dont personne ne s’était aperçu en l’absence de toute contestation. Toutefois, l’erreur constatée n’avait pas d’incidence sur le calcul des prestations, la diminution des gains réels ne faisant qu’accroître la part prise en compte à titre de gain hypothétique, de sorte qu’en toute hypothèse, une correction matérielle ne se justifiait pas.

Faisant suite à une ordonnance du Tribunal de céans, le recourant a, par lettre du 28 novembre 2008, produit les fiches mensuelles du salaire réalisé par son épouse en 2006. Il apparaît que celle-ci a, cette année-là, effectué 1'115 heures de travail, passant de 140 heures par mois en moyenne de janvier à juin à 46 heures par mois de juillet à décembre.

Par plis du 8 décembre 2008, copie de ces documents a été adressée au SPC, et les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

Conformément à l’art. 56V al. 1er let. a ch. 3 de la loi genevoise du 22 novembre 1941 sur l’organisation judiciaire, le Tribunal cantonal des assurances sociales connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale du 6 octobre 2000 sur la partie générale du droit des assurances sociales (LPGA) qui sont relatives à la loi fédérale du 6 octobre 2006 sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité (LPC).

D’autre part, l’art. 43 de la loi genevoise du 25 octobre 1968 sur les prestations cantonales complémentaires à l’assurance-vieillesse et survivants et à l’assurance-invalidité (LPCC) prévoit notamment, conformément à l’art. 56V al. 2 let. a LOJ, que les décisions sur opposition prises en application de la législation cantonale peuvent faire l’objet d’un recours auprès du Tribunal cantonal des assurances sociales.

La compétence du Tribunal de céans pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

À teneur de l’art. 1er al. 1er LPC, les dispositions de la LPGA, entrée en vigueur le 1er janvier 2003, s’appliquent aux prestations complémentaires, à moins que la LPC n’y déroge expressément.

Sur le plan matériel, le point de savoir quel droit s’applique doit être tranché à la lumière du principe selon lequel les règles applicables sont celles en vigueur au moment où les faits juridiquement déterminants se sont produits (ATF 127 V 467 consid. 1, 126 V 136 consid. 4b et les références). Partant, l’examen des décisions rendues respectivement les 30 octobre 2007 et 3 janvier 2008 doit être mené sous l’empire de la LPGA, en vigueur depuis le 1er janvier 2003, les dispositions de la LPC, de son ordonnance du 15 janvier 1971 (OPC) et de toute autre réglementation applicable sur le fond étant celles qui étaient en vigueur le 30 octobre 2007.

Sur ce dernier point, il sied encore de préciser qu’en matière de prestations complémentaires cantonales, la LPC et ses dispositions d’exécution fédérales et cantonales, ainsi que la LPGA et ses dispositions d’exécution, sont applicables par analogie en cas de silence de la législation cantonale (art. 1A LPCC ; art. 1er al. 1er LPC).

Conformément aux art. 60 al. 1er LPGA et 43 LPCC, le recours doit être déposé dans les trente jours suivant la notification de la décision sujette à recours. La décision du 3 janvier ayant été reçue par le recourant le 4 janvier 2008 au plus tôt, le délai de recours a, en vertu des art. 60 al. 2 et 38 al. 1er LPGA, commencé à courir le lendemain de sorte que, compte tenu du fait que le terme devait échoir un dimanche, il a été reporté au lundi 4 février 2008 au plus tôt, conformément à l’art. 38 al. 1 et 3, applicable en vertu de l’art. 60 al. 2 LPGA.

Interjeté dans les forme et délai prévus par la loi, le recours adressé par erreur au SPC et déposé à l’office postal le 7 janvier 2008 conformément à l’art. 39 al. 1er LPGA est donc recevable.

Le litige porte sur le montant de la prestation complémentaire due au recourant à partir du 1er novembre 2007, et plus particulièrement sur la prise en compte, dans le calcul de ce montant, d’un gain potentiel à hauteur de 27'825 fr. en sus du gain généré par l’activité lucrative de son épouse.

À titre liminaire, il convient d’examiner l’argument du SPC selon lequel le gain potentiel retenu avait été fixé par la décision de prestations complémentaires du 29 mars 2007, laquelle était entrée en force, de sorte que ce point ne pouvait plus être remis en cause dans le cadre de l’opposition faite à la décision du 30 octobre suivant.

La révision procédurale et la reconsidération sont réglées à l’art. 53 LPGA. Par analogie avec la révision des décisions rendues par les autorités judiciaires, l’administration est ainsi tenue de procéder à la révision (dite procédurale) d’une décision formellement passée en force lorsque sont découverts des faits nouveaux importants ou de nouveaux moyens de preuve qui ne pouvaient être produits avant et qui sont susceptibles de conduire à une appréciation juridique différente (ATF 127 V 466 consid. 2c et les références citées). Par ailleurs, l’administration peut reconsidérer une décision formellement passée en force de chose jugée sur laquelle aucune autorité judiciaire ne s’est prononcée, à condition qu’elle soit sans nul doute erronée et que sa rectification revête une importance notable. Il n’existe toutefois pas de droit à la reconsidération que l’assuré pourrait déduire en justice (SVR 2004 ALV n. 1 p. 2 consid. 2).

Cela étant, il ne faut pas perdre de vue que ces situations sont à distinguer de la révision au sens de l’art. 17 al. 2 LPGA, qui prévoit que toute prestation durable accordée en vertu d’une décision entrée en force est, d’office ou sur demande, augmentée ou réduite en conséquence, ou encore supprimée si les circonstances dont dépendait son octroi changent notablement. Chaque loi spéciale peut fixer le point de départ de la modification ou encore exclure une révision en s’écartant de la LPGA (LOCHER, Grundriss des Sozialversicherungsrechts, Berne 2003, p. 256 ; KIESER, ATSG-Kommentar : Kommentar zum Bundesgesetz über den Allgemeinen Teil des Sozialversicherungsrechts vom 6. Oktober 2000, Zürich 2003, n. 19 ad art. 17 LPGA).

À cet égard, l’art. 25 al. 1er OPC dispose notamment que la prestation complémentaire annuelle doit être augmentée, réduite ou supprimée lors de chaque changement survenant au sein d’une communauté de personnes comprises dans le calcul de la prestation complémentaire annuelle (let. a) ou lorsque les dépenses reconnues, les revenus déterminants et la fortune subissent une diminution ou une augmentation pour une durée qui sera vraisemblablement longue (let. c, 1ère phrase).

Dans le cas d’espèce, c’est à tort que le SPC a considéré l’acte d’opposition accompli par le recourant le 8 novembre 2007 comme une opposition tardive à la décision du 29 mars précédent, ou comme une demande de révision procédurale ou de reconsidération de cette même décision. La décision du SPC du 30 octobre 2007 a été rendue suite aux lettres que le recourant avait fait parvenir à l’intimé les 19 et 22 octobre précédent. Par ces lettres, le recourant faisait valoir que son épouse était en incapacité de travail depuis deux semaines et que l’ignorance où il se trouvait du fait du non-paiement de son loyer avait plongé son ménage dans une « situation financière impossible ». Quant à l’acte d’opposition du 8 novembre 2007, il ne fait nullement mention des décisions antérieures à celles du 30 octobre, sinon indirectement quand le recourant précise que « le montant de [s]es prestations complémentaires a[vait] beaucoup diminué et ne permet[tait] plus le versement du loyer courant par [l’]office à la régie ». Autrement dit, par ses lettres des 19 et 22 octobre 2007, et bien que la première ait été intitulée « Recours » à tort, le recourant sollicitait en réalité une révision, au sens des art. 17 al. 2 LPGA et 25 OPC, de son droit aux prestations complémentaires, pour l’avenir et en raison de la modification survenue dans sa situation familiale à ce moment-là. Cette requête ne touchait nullement à l’autorité de la chose décidée par le SPC en date du 29 mars 2007, et celui-ci aurait dû procéder à une interprétation objective de cette requête. Il ne pouvait donc pas se contenter de motiver le refus de prester par le fait que la décision du 29 mars 2007 était entrée en force ; il devait au contraire examiner la question de savoir si les circonstances dont dépendait l’octroi de prestations complémentaires avaient changé de façon notable depuis la dernière évaluation de la situation.

Il convient par conséquent de procéder à cet examen.

Les art. 2 et 2a let. a LPC, dans leur teneur en vigueur jusqu’au 31 décembre 2007, prévoient qu’ont droit aux prestations complémentaires fédérales les personnes âgées qui perçoivent une rente de vieillesse de l’AVS, si les dépenses reconnues par la loi sont supérieures aux revenus déterminants. Le montant de la prestation complémentaire annuelle correspond alors à la part des dépenses reconnues qui excède les revenus déterminants (art. 3a al. 1er LPC). Ont en outre droit aux prestations complémentaires cantonales les personnes dont le revenu annuel déterminant n’atteint pas le revenu minimum cantonal d’aide sociale applicable (art. 4 LPCC).

Aux termes des art. 3a al. 4 LPC et 5 LPCC, les dépenses reconnues et les revenus déterminants des conjoints faisant ménage commun doivent être additionnés. L’art. 3c al. 1er let. g LPC prévoit en outre que les revenus déterminants comprennent les ressources et parts de fortune dont un ayant droit s’est dessaisi (voir l’art. 5 al. 1er let. j LPCC pour ce qui est des prestations cantonales). Cette disposition est applicable notamment lorsqu’une personne assurée renonce sans obligation juridique à des éléments de fortune, peut prétendre à certains éléments de revenu et de fortune et ne fait pas valoir les droits correspondants, ou renonce à mettre en valeur sa capacité de gain alors qu’on peut exiger d’elle qu’elle exerce une activité lucrative (ATF 121 V 205 consid. 4a, 117 V 289 consid. 2).

De même, il y a lieu de tenir compte, au titre des ressources dont un ayant droit s’est dessaisi, d’un revenu hypothétique de l’épouse de l’assuré qui sollicite des prestations complémentaires si elle s’abstient d’exercer une activité lucrative que l’on est en droit d’exiger d’elle ou d’étendre une telle activité (ATF 117 V 287 consid. 3b ; VSI 2001 p. 127 s. consid. 1b). En effet, la capacité de gain de l’époux doit être utilisée, dans la mesure où il est tenu, selon l’art. 163 du code civil, de contribuer à l’entretien convenable de la famille.

Il appartient à l’administration ou, en cas de recours, au juge des assurances sociales d’examiner si l’on peut exiger de l’intéressée qu’elle exerce une activité lucrative et, le cas échéant, de fixer le salaire qu’elle pourrait en retirer en faisant preuve de bonne volonté. Pour ce faire, il y a lieu d’appliquer à titre préalable les principes du droit de la famille, compte tenu des circonstances du cas d’espèce (ATF 117 V 287 consid. 3c). Les critères décisifs auront notamment trait à l’âge de la personne, à son état de santé, à ses connaissances linguistiques, à sa formation professionnelle, à l’activité exercée jusque là, au marché de l’emploi et, le cas échéant, au temps plus ou moins long pendant lequel elle aura été éloignée de la vie professionnelle (ATF 117 V 287 consid. 3a ; VSI 2001 p. 128 consid. 1b). Le revenu de l’activité lucrative potentielle devra alors, conformément à l’art. 3c al. 1er let. a in fine LPC, être pris en compte à raison des deux tiers seulement (ATF 117 V 287 consid. 3c et la référence). En outre, du revenu hypothétique retenu pour l’épouse du requérant, on opère la déduction annuelle de 1'500 fr. pour les couples en vertu de l’art. 3c al. 1er let. a LPC, le solde étant pris en compte à raison des deux tiers (voir l’art. 5 al. 2 LPCC pour ce qui est des prestations cantonales).

En ce qui concerne le critère de la mise en valeur de la capacité de gain sur le marché de l’emploi, le Tribunal fédéral des assurances a eu l’occasion de préciser qu’il importe de savoir si et à quelles conditions l’intéressée est en mesure de trouver un travail. Il y a donc lieu d’examiner concrètement la situation du marché du travail (ATFA non publiés des 9 juillet 2002, P 18/02 et 8 octobre 2002, P 88/01).

En l’espèce, l’épouse du recourant, sans formation particulière, a cependant acquis, de 1975 à 1996, une importante expérience professionnelle dans le domaine de l’économie domestique en sa qualité de gouvernante à l’ambassade d’Éthiopie. Jusqu’en 2001, elle a ensuite œuvré dans les domaines voisins de l’hôtellerie, de la restauration et du nettoyage. Depuis lors, elle exerce une activité d’aide-soignante.

Âgée de 52 ans au moment de la décision litigieuse, l’épouse du recourant souffre, de l’avis de son employeur et du docteur A_________, de maux qui l’empêchent d’exercer pleinement son activité d’aide-soignante. Il n’en demeure pas moins que son taux d’activité a été brutalement réduit de cent quarante à quarante-six heures par mois entre le premier et le second semestre de 2006, pour se stabiliser, en 2007, aux alentours de septante-cinq heures par mois, en comptant les gardes de nuit, et que son employeur refuse depuis lors de lui fournir davantage de travail.

L’instruction de la cause a également permis d’établir que l’épouse du recourant est disposée à exercer, à plein temps, une activité professionnelle adaptée aux limitations alléguées, soit principalement celles qui sont relatives au port de lourdes charges. À cet égard, si l’activité de serveuse évoquée par l’intimé n’est manifestement pas adaptée aux dites limitations, d’autres activités semblent tout à fait exigibles. Il en va par exemple ainsi de l’activité de gouvernante, que l’intéressée a exercée pendant vingt et un ans, pour autant que les conditions de travail soient conformes au contrat-type applicable dans ce domaine. Quoi qu’il en soit, force est de constater que l’épouse du recourant a, dès le mois de novembre 2007, activement cherché un emploi à plein temps en qualité de femme de chambre, de caissière, d’auxiliaire de crèche, de nettoyeuse et d’aide-soignante auprès de nombreux établissements du canton. Dès lors, si c’est à bon droit que le SPC a considéré qu’une augmentation de son taux d’activité était exigible, ce qui n’est d’ailleurs pas contesté, on ne voit pas ce que l’intéressée pouvait faire de plus pour y parvenir. Autrement dit, il s’impose de constater que l’épouse du recourant ne s’est nullement abstenue d’exercer une activité lucrative ou d’étendre une telle activité, de sorte que l’on ne saurait pas davantage en conclure que le recourant a, par l’intermédiaire de son épouse, renoncé à des gains ou qu’il s’est dessaisi d’une part de ses ressources.

Il découle de là que c’est à tort que le SPC a inclus, dans le calcul des prestations dues au recourant à partir du 1er novembre 2007, un gain potentiel réalisable par son épouse.

En conséquence, son recours devra être admis, et la présente cause renvoyée au SPC pour nouvelle décision.

Pour le surplus, le Tribunal de céans n’a pas à trancher la question de l’octroi de prestations d’assistance, dont il convient de confier l’examen à l’administration, qui se prononcera en tenant compte de la situation exposée plus haut.

Enfin, en vertu des art. 61 let. g LPGA et 87 al. 2 de la loi genevoise du 12 septembre 1985 sur la procédure administrative (LPA), applicable à la présente procédure en vertu de l’art. 89A LPA, le recourant, qui obtient gain de cause, se verra allouer 1'750 fr. à titre de dépens.


PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL CANTONAL DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

Déclare le recours recevable.

Au fond :

L’admet et annule les décisions du Service des prestations complémentaires des 30 octobre 2007 et 3 janvier 2008.

Renvoie la cause à l’intimé pour nouvelle décision au sens des considérants.

Condamne l’intimé à verser au recourant une indemnité de 1'750 fr. à titre de dépens.

Dit que pour ce qui a trait aux prestations complémentaires fédérales, les parties peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Brigitte BABEL

 

La présidente

 

 

 

 

Isabelle DUBOIS

 

Le secrétaire-juriste :

 

Olivier TSCHERRIG

 

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le