Aller au contenu principal

Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

1 resultats
A/97/2020

ATAS/573/2022 du 21.06.2022 ( AVS ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/97/2020 ATAS/573/2022

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 21 juin 2022

2ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à VESSY, comparant avec élection de domicile en l'étude de Maître Albert J. GRAF

 

recourante

 

contre

MEDISUISSE, sise Oberer Graben 37, ST. GALLEN

 

intimée

 


 

EN FAIT

1.        Le 29 juillet 2019, la caisse de compensation AVS Medisuisse (ci-après : la caisse ou l’intimée) a reçu de l’administration fiscale cantonale du canton de Genève (ci-après : AFC-GE) une communication portant sur l'année 2017 et indiquant un revenu d’activité indépendante de Madame A______ (ci-après : la cotisante, l’intéressée ou la recourante), médecin née en 1965 et mariée, de CHF 398'900.- et aucun capital investi dans son entreprise, avec la remarque qu'il s'agissait d'une taxation d'office.

2.        Sur cette base, à laquelle s’ajoutaient des cotisations personnelles à hauteur de CHF 42'605.25 pour atteindre un revenu soumis à cotisations arrondi à CHF 441'500.-, la caisse a, par décision du 2 août 2019, fixé pour 2017 les cotisations personnelles AVS de la cotisante à CHF 42'604.80, plus les frais d’administration de CHF 149.20 et la cotisation de l’assurance-maternité genevoise de CHF 181.-, soit au total CHF 42'935.-.

3.        Par écrit d’opposition du 30 août 2019, l’intéressée, faisant valoir « des problèmes familiaux de santé » qui avaient mis les époux en retard pour déposer leur déclaration fiscale et avaient conduit à une taxation d’office qui ne correspondait en rien avec leurs revenus réels, a contesté ladite décision de la caisse du 2 août précédent et a sollicité l’octroi d’un délai au 30 octobre 2019 pour pouvoir communiquer une déclaration conforme à ses revenus pour 2017.

4.        Par pli du 21 novembre 2019, la caisse a fait savoir à la cotisante qu’elle n’avait pas encore reçu sa motivation dans le délai sollicité par son « opposition provisionnelle » et lui a accordé un dernier délai au 30 novembre 2019, avec la précision qu’en l’éventuelle absence de justification d’ici là, elle reprendrait la procédure de recouvrement.

5.        Par courriel du 6 décembre 2019 répondant à une question de la caisse, l’AFC-GE a informé cette dernière qu’aucune réclamation n’avait été déposée à la suite de la taxation d’office 2017 et que celle-ci était entrée en force le 18 juillet 2019.

6.        Par décision sur opposition (« décision de non-entrée en matière ») rendue le 9 décembre 2019, la caisse, résumant plusieurs éléments du déroulement de la procédure telle que décrite ci-dessus et constatant l’absence de « réponse » de l’intéressée dans le délai prolongé jusqu'au 30 novembre 2019, a déclaré de ce fait ne pas pouvoir entrer en matière sur son opposition.

7.        Par acte signé d’un avocat et expédié le 9 janvier 2020 au greffe de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice (ci-après : la chambre des assurances sociales ou la chambre de céans), la cotisante a formé recours contre cette "décision de non-entrée en matière", concluant, « avec suite de frais et dépens », à ce que cette dernière soit déclarée nulle, subsidiairement annulée avec renvoi de la cause à la caisse « pour entrée en matière avec modification conforme au dossier fiscal ». Plus subsidiairement, « la suspension » était « requise jusqu’au terme de la procédure fiscale ».

En effet, premièrement, la décision sur opposition attaquée, incompréhensible, n’était pas du tout motivée et encore moins documentée, « la preuve d’une taxation valable – contestée – [n’étant] même pas rapportée », et cette décision ne mentionnait pas les règles de droit sur lesquelles elle se fondait, d’où sa nullité.

Deuxièmement, la décision de taxation rendue par la caisse ne prenait pas en considération les comptes 2017, « à produire après réception du dossier requis selon Pièces 50 ». Il convenait dès lors de requérir un calcul juste des cotisation AVS conforme aux chiffres réalisés en 2017.

Troisièmement, une taxation légale ne saurait être arbitraire. Les taxations AVS des dix dernières années (dès 2009) étaient requises (« pièces 51 »). Il ressortirait de ces documents que la taxation 2017, surréaliste, était arbitraire et impossible « car plus du double sans aucun fondement mais abus dénoncé de la moyenne décennale ».

Quatrièmement, un contribuable était en droit de faire ouvrir un dossier nonobstant une taxation en force, ce d’autant plus si celle-ci ne correspondait pas à la réalité des chiffres alors même que les principes essentiels de procédure n’avaient pas été respectés. Sur ce point, subsidiairement et indépendamment de la révision, la recourante allait déposer une demande de remise d’impôts pour conformer les chiffres à la réalité, car elle ne pouvait pas être taxée plus lourdement que ses vrais revenus 2017. En l’état, elle n’avait pas été entendue, ni n’avait eu accès à son dossier (« pièces requises 50 »).

8.        Dans sa réponse du 7 février 2020, l'intimée a cité des références de nature juridique et a relevé ce qui suit : "Dans le recours, il est demandé que les cotisations soient déterminées sur la base du revenu réalisé en 2017. Cela, sans fournir d'informations concrètes sur le revenu provenant de l'activité indépendante et sans joindre les pièces justificatives. Le fait que ni dans la procédure d'opposition ni dans le recours des documents ont été produits (même pas une copie de la taxation fiscale) doit être pris en considération dans le cadre de la fixation des dépens".

Cela étant, par courriel du 17 janvier 2020, la caisse avait demandé à l'AFC-GE si les revenus communiqués le 29 juillet 2019 comprenaient seulement la part de la cotisante ou aussi celle de son époux, après avoir relevé que pour les années 2016 et 2017, l'intéressée avait été taxée d'office, un revenu d'activité indépendante de CHF 280'000.- étant communiqué pour 2016 et un de CHF 398'900.- pour 2017. Par courriel du même jour, l'AFC-GE avait répondu que la part d'activité indépendante de la recourante en 2017, année de la première déclaration taxée dans le canton de Genève à la suite du retour des époux depuis le canton de Vaud, se montait à CHF 320'000.-, la différence de CHF 78'900.- correspondant au revenu salarié du mari. Toujours le 17 janvier 2020, elle avait adressé à l'intimée une nouvelle communication indiquant un revenu d’activité indépendante de la cotisante de CHF 320'000.- et un capital investi dans son entreprise de CHF 50'000.- pour l’année 2017, avec la remarque suivante: "Rectification: le montant taxé d'office pour l'activité indépendante est de CHF 320'000.-. Taxation d'office".

Par ailleurs, selon l'extrait de compte individuel (ci-après: CI) – produit –, l'intéressée avait exercé une activité salariée accessoire dans un hôpital pour un salaire de CHF 3'044.- en 2017.

Enfin, étaient produites les communications adressées à la caisse par l'administration cantonale des impôts (ACI) du canton de Vaud pour les années 2009 à 2016, concernant la recourante, qui montraient, notamment, une taxation d'office ("Ermessensveranlagung") en 2009, 2012, 2013, 2014 et 2016, et des revenus d'activité indépendante à hauteur de CHF 121'000.- en 2009, CHF 255'039.- en 2010 (taxation normale), CHF 241'909.- en 2011 (taxation normale), CHF 284'242.- en 2012, CHF 337'447.- en 2013, CHF 346'581.- en 2014, CHF 251'067.- en 2015 (taxation normale) et CHF 280'000.- en 2016.

D'après la caisse, il en ressortait que les revenus taxés d'office n'étaient ni arbitraires ni irréalistes par rapport aux revenus effectivement réalisés en 2010, 2011 et 2015, et, en outre, les décisions de cotisation concernant ces années étaient passées en force, sans opposition.

9.        Par pli du 14 février 2020, la chambre de céans a octroyé à la caisse un délai au 6 mars 2020 pour préciser ses conclusions.

10.    Par écriture du 28 février 2020, l'intimée a transmis à la chambre des assurances sociales une nouvelle décision de cotisation personnelle pour la recourante rendue le même jour, pour 2017, remplaçant celle du 2 août 2019, se fondant sur un revenu de CHF 316'956.- - soit CHF 320'000.- – CHF 3'044.- -, une déduction (de CHF 250.-) de l'intérêt du capital propre investi CHF 50'000.-, plus un ajout des cotisations personnelles de CHF 33'826.35, soit au total un revenu soumis à cotisations (arrondi) de CHF 350'500.-, et fixant pour 2017 les cotisations personnelles AVS de la cotisante à CHF 33'823.20, les frais d’administration à CHF 118.40 et la cotisation de l’assurance-maternité genevoise à CHF 143.80, soit au total CHF 34'085.40.

11.    Un échange de courriers a ensuite eu lieu entre la chambre de céans et la cotisante, celle-là demandant à celle-ci de se déterminer en particulier sur la suite qu'elle entendait donner à la procédure vu cette dernière écriture de l'intimée.

12.    À la suite de prolongations de délai demandées et accordées, la recourante a, par réplique du 24 août 2020, pris acte de la réponse de l'intimée du 7 février 2020.

Elle a allégué des revenus s'élevant à CHF 235'069.- en 2017, montant correspondant au résultat de l'exercice selon ses comptes de pertes et profits du 1er janvier au 31 décembre 2017 – sans mention de la date de l'établissement desdits comptes de pertes et profits –, qu'elle produisait. À teneur de ceux-ci, le chiffre d'affaires se montait à CHF 341'418.45. De ce montant était soustrait celui de CHF 5'360.- au titre d'"ajustement provision débiteurs", ce qui donnait une somme totale des produits de CHF 336'058.45. Les frais généraux s'élevaient au total à CHF 87'465.52. Le résultat avant amortissement était de CHF 237'675.49. De ce montant était soustrait celui de CHF 2'606.30 au total représentant les amortissements, ce qui donnait un résultat de l'exercice de CHF 235'069.19.

Par ailleurs, toujours d'après la cotisante, la taxation d'office était le résultat d'une maladie sérieuse de son époux qui n'avait pas été apte à déposer la déclaration fiscale du couple alors que les comptes étaient établis, et ce sans en aviser son épouse, deux rapports médicaux étant produits à ce sujet dont l'un, daté du 27 septembre 2019, mentionnait des troubles psychiques du mari qui l'auraient conduit à abandonner une grande partie de ses obligations administratives en Suisse. La famille avait de surcroît changé de domicile en 2017 en quittant le canton de Vaud pour celui de Genève, ce qui avait généré des retards et tracas. Ces circonstances malheureuses et extraordinaires méritaient considération.

Une "fiduciaire professionnelle" était désormais mandatée afin que "les taxations de ces dernières années soient corrigées conformément à la réalité financière qui était plus basse".

Compte tenu de ce qui précédait, la recourante sollicitait "la suspension quelques mois jusqu'à droit connu, soit une taxation fiscale 2017 juste". Cas échéant, l'accord de l'intimée était expressément sollicité "car cette situation [concernait] plusieurs exercices annuels jusqu'en 2019, de sorte qu'il [était] judicieux de ne pas multiplier les procédures et l'arbitraire lié aux taxations inexactes".

13.    Par pli du 25 août 2020, la chambre des assurances sociales a informé les parties que, s'agissant de la suite de la procédure, soit un arrêt serait rendu, soit une nouvelle mesure d'instruction serait prise.

14.    Le 3 juin 2021, elle a écrit à l'intéressée que, dans le cadre de l'instruction de son recours, un délai au 18 juin 2021 lui était imparti pour indiquer, pièces à l'appui, dans quelle situation elle se trouvait précisément quant aux impôts de l'année 2017, notamment si une révision ou rectification aurait été opérée par l'AFC-GE ultérieurement à celle produite le 10 (recte: 7) février 2020 par la caisse (pièce CC 8: communication de l'AFC-GE du 17 janvier 2020), cas échéant où en était la procédure tendant à une telle révision ou rectification.

15.    La recourante a demandé et obtenu deux prolongations de délai pour répondre et, le 3 septembre 2021, elle a sollicité la remise en copie de pièces de l'intimée.

En outre, selon elle, en raison notamment du Covid-19, le traitement fiscal du dossier des époux avait pris plus d'une année de retard. La fiduciaire en charge escomptait, "au vu des problèmes et erreurs fiscales consacrées par les taxations d'office arbitraires une reconsidération juste d'ici la fin de l'année".

Dès lors et afin d'éviter des décisions contradictoires, elle requérait une suspension jusqu'au 15 janvier 2022, alors même qu'il n'existait pas d'urgence et que cette requête de suspension avait été déposée le 24 août 2020 et que la caisse ne s'y était pas opposée ni n'avait requis la reprise de la procédure.

16.    Par courrier du 7 septembre 2021, la chambre de céans a, avant de se prononcer sur ladite demande de suspension, imparti à la cotisante un délai au 22 septembre 2021 pour produire tous documents pertinents concernant le traitement fiscal du dossier des époux dont elle faisait état dans ses écritures.

17.    Le 22 septembre 2021, la recourante a répondu que ses comptes avaient été dressés chaque année, mais que leur remise à l'AFC-GE n'avait pas suivi en raison des problèmes de santé de son conjoint. Pour le surplus, il aurait été facile de remettre les comptes annuels de son cabinet médical à l'AVS pour taxation provisoire dans l'attente des taxations fiscales exactes et justes. La fiduciaire B______ allait dès lors adresser tous les exercices annuels à l'AVS pour reconsidérations et rectifications. Elle allait, parallèlement, procéder de la même manière auprès de l'autorité fiscale. Les comptes annuels 2019 et 2020 étaient d'ores et déjà joints.

Compte tenu de ces circonstances et démarches actives, l'intéressée requérait "exceptionnellement une ultime suspension jusqu'à début 2021 (recte: 2022) alors qu'il n'y [avait] pas urgence".

18.    Le 9 novembre 2021, dans l'ultime délai accordé par la chambre des assurances sociales pour produire les documents requis par son courrier du 7 septembre 2021, la recourante a produit la lettre recommandée qu'elle avait adressée, par son conseil, le 4 novembre 2021 à l'AFC-GE et dans laquelle elle lui faisait savoir que la déclaration d'impôts 2020 des époux avait été déposée le 5 octobre 2021 par la fiduciaire et lui demandait l'envoi d'un relevé complet des impôts dus à ce jour de même que les copies des taxations de 2017 à ce jour.

Elle exposait qu'en l'absence de réponse à ce jour, elle ne pouvait pas produire les éléments requis et sollicitait un ultime délai pour transmettre ceux-ci dès leur réception.

19.    Par pli du 12 novembre 2021, la chambre de céans lui a répondu qu'en l'absence de nouvelles de sa part dans un ultime délai au 22 novembre 2021, la cause serait gardée à juger en l'état du dossier.

20.    Le 23 novembre 2021, la cotisante a produit un courrier de son avocat du 15 novembre 2021 envoyé par pli simple à l'AFC-GE et dans lequel elle remerciait celle-ci pour sa lettre du 11 novembre 2021 accompagnée des relevés de comptes 2017 et ajoutait : "Pour ce qui concerne les copies des taxations, vous m'indiquez que le service concerné me répondra prochainement. Vous comprendrez qu'au vu du délai très court à la fin de semaine pour présenter le dossier à la Cour de justice, lesdits documents doivent m'être fournis dans les meilleurs temps".

L'intéressée demandait ce qui suit à la chambre des assurances sociales: "En l'absence de réponse à ce jour, nous ne pouvons produire les éléments requis et sollicitons un nouveau délai supplémentaire au 15 janvier 2021 (recte: 2022). À défaut, nous vous saurions gré de requérir directement la production de ces pièces".

21.    Par lettre recommandée du 25 novembre 2021, distribuée le lendemain, la chambre de céans a répondu notamment en ces termes à la recourante:

"En l'état, il ne ressort prima facie pas du dossier que vous auriez demandé à [l'AFC-GE] d'annuler ou reconsidérer sa taxation d'office pour 2017 ; à cet égard, [l'AFC-GE] a répondu par courriel du 6 décembre 2019 à l'intimée : « Aucune réclamation n'a été déposée suite à la taxation d'office 2017. Celle-ci est entrée en force le 18.07.2019 ». Or, dans vos écritures de recours, vous semblez mettre en doute le caractère définitif et exécutoire de cette taxation, raison pour laquelle vous avez sollicité - et obtenu - plusieurs délais à ce sujet. Depuis la lettre de la chambre de céans du 3 juin 2021, il vous a été demandé d'indiquer, pièces à l'appui, dans quelle situation vous vous trouvez précisément quant aux impôts de l'année 2017, notamment si une révision ou rectification aurait été opérée par [l'AFC-GE] ultérieurement à celle produite le 10 février 2020 par [la caisse] (pièce CC 8), cas échéant où en est la procédure tendant à une telle révision ou rectification. Il s'avère toutefois que vous n'avez même pas produit un écrit prouvant l'existence d'une quelconque contestation ou demande à l'intention de [l'AFC-GE] suite à la taxation d'office pour 2017, ni même toute autre pièce soutenant vos allégations."

Vu ces circonstances, la question se posait si, à tout le moins depuis sa demande de prolongation de délai formulée le 17 juin 2021, l'attitude de la recourante pourrait le cas échéant être de nature dilatoire et constitutive d'un abus de la présente procédure, étant en outre notamment relevé qu'elle paraissait n'avoir demandé à [l'AFC-GE] une copie des taxations de 2017 que le 4 novembre 2021. Les art. 88 et 89H al. 1, 1ère et 2ème phr., de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA-GE - E 5 10) étaient ensuite cités.

La lettre de la chambre des assurances sociales se concluait ainsi:

"Vu ce qui précède, un dernier délai vous est imparti pour présenter toutes pièces pertinents et tous renseignements utiles à l'appui de vos allégations, notamment comme demandé dans le courrier de la chambre de céans du 3 juin 2021, et pour vous déterminer sur l'éventualité du prononcé d'une amende ou d'une mise à votre charge d'un émolument conformément aux art. 88 et 89H al. 1, 1ère et 2ème phr., LPA, ce au lundi 6 décembre 2021 à 14h00, date et heure à laquelle votre éventuelle écriture devra être effectivement être reçue par le greffe, à défaut de quoi il sera statué dans de brefs délais en l'état du dossier."

22.    Par écriture du 6 décembre 2021, reçue le lendemain par la chambre de céans, la recourante, toujours sous la plume de son conseil, a estimé que la lettre de ladite chambre du 25 novembre 2021 était "arbitraire et choquante alors qu'elle [préjugeait] sans motivation", la fixation d'un délai à 14h00 étant selon elle anormale.

Une nouvelle copie des courriers adressés les 4 et 15 novembre 2021 à l'AFC-GE était jointe. La cotisante exposait ensuite:

"Aucune réponse à ce jour alors que vous m'impartissez un délai pour produire une pièce que je n'ai pas reçue.

Tant ma cliente que sa fiduciaire n'ont en effet pas été en mesure de produire les pièces ces derniers mois – période Covid – malgré mes requêtes.

Ce fait n'est pas un crime alors qu'il n'est pas illégal ou dilatoire qu'un justiciable ou un professionnel perde un document.

Le devoir de collaborer de l'administration existe dès lors tout en étant fondé.

N'ayant pas reçu ce document de l'administration fiscale à ce jour, je requiers que votre autorité adresse la production d'office immédiate auprès de l'administration fiscale.

Tous droits et moyens réservés."

23.    Par lettre du 9 décembre 2021, la chambre des assurances sociales a demandé à l'AFC-GE de lui transmettre tous documents utiles concernant la taxation de la recourante pour l'année 2017, à savoir notamment les relevés de comptes et taxations pour cette année-ci ainsi que d'éventuelles contestations et/ou demandes de reconsidération ou de révision.

24.    Le 16 décembre 2021, l'intéressée a transmis à la chambre de céans le courrier que l'AFC-GE lui avait envoyé le 25 novembre 2021 avec les documents joints, dont les bordereaux du 18 juin 2019 de taxation d'office pour l'impôt cantonal et communal (ci-après: ICC) et l'impôt fédéral direct (ci-après: IFD) de 2017. L'IFD 2017 y était fondé sur un revenu imposable de CHF 398'900.-, l'ICC sur un revenu imposable de CHF 394'540.-.

La recourante précisait, par son avocat : "Malgré mes diverses requêtes l'administration fiscale a transmis directement les taxations d'impôts dus à mon mandant qui souffrant n'a pu me les remettre que hier".

25.    Par pli du 3 février 2022, l'AFC-GE a adressé à la chambre des assurances sociales les bordereaux du 18 juin 2019 de taxation d'office pour l'ICC et l'IFD de 2017, avec, pour l'ICC, le bordereau de répartition intercommunale des revenus et de la fortune ainsi que le bordereau de répartition intercantonale de la fortune, et a ajouté qu'il n'y avait aucune demande de contestation ou de révision de ladite taxation.

26.    À la suite de la lettre de la chambre de céans du 3 février 2022 impartissant aux parties un délai pour faire part de leurs éventuelles observations, y compris, s'agissant de la cotisante, concernant la question d'un éventuelle émolument ou amende pour abus de procédure (cf. sur ce dernier point, notamment les courriers des 25 novembre et 20 décembre 2021), la recourante a, par écriture du 22 février 2022, indiqué ce qui suit : il ressortait de la lettre de ladite chambre du 3 février 2022 que le problème évoqué était réel, ce d'autant qu'elle avait changé de domicile en 2017 du canton de Vaud vers celui de Genève; l'AVS s'était basée sur une taxation d'office non valable qui lui avait été notifiée s'agissant d'un banal envoi postal alors qu'elle était en droit d'être taxée sur ses revenus exacts et réels; la taxation d'office avait été prononcée parallèlement dans le canton de Vaud, selon copie jointe; il existait une discrépance totale des chiffres pour l'année 2017, soit CHF 398'900 selon la décision de la caisse du 2 août 2019, CHF 320'000.- d'après la communication de l'AFC-GE du 17 janvier 2020, CHF 235'690.- (recte: CHF 235'069.-) à teneur de ses comptes de pertes et profits du 1er janvier au 31 décembre 2017 produits le 24 août 2020, et CHF 336'000.- selon la décision du 24 juin 2019 d'un office d'impôt d'un district vaudois de "répartition intercantonale/internationale des éléments imposables pour 360 jours en 2017" – qui retenait pour le couple, au titre d'activité indépendante, un montant nul dans le canton de Vaud et un montant de CHF 336'000.- dans celui de Genève, soit au total CHF 336'000.- –; l'AVS étant liée par les décisions fiscales justes, il convenait de retenir le chiffre qui correspondait à la réalité; la recourante devait dès lors obtenir une rectification fiscale pour synchronisation cantonale et correction, ou cas échéant une décision.

27.    Par courrier du 31 mars 2022, la chambre des assurances sociales a imparti un délai à la recourante pour fournir tous les renseignements, accompagnés de toutes pièces utiles, sur les questions de la date d'établissement et l'auteur (avec coordonnées) des comptes de pertes et profits du 1er janvier au 31 décembre 2017 produit le 24 août 2020, ainsi que des motifs pour lesquels ces comptes de pertes et profits n'avaient pas été établis et/ou produits auparavant, notamment avant le prononcé de la décision sur opposition attaquée (du 9 décembre 2019), de même que sur la question de savoir sur quelles bases concrètes et précises se fondaient lesdits comptes de pertes et profits, en particulier pour le chiffre d'affaires et les frais généraux (timesheets, factures, documents comptables, etc.), ces documents étant à produire. Il était précisé qu'en l'absence des renseignements et documents requis ci-dessus, lesdits comptes de pertes et profits pourraient le cas échéant ne pas se voir reconnaître de valeur probante (si tant est qu'ils puissent être pris en considération malgré la taxation fiscale d'office, question qui ferait l'objet de l'arrêt au fond à rendre).

28.    Par écriture du 16 mai 2022, soit dans le délai imparti et prolongé, la cotisante a répondu ce qui suit : l'auteur des comptes 2017 dressés en 2018 était son mari, qui avait commis une erreur en ne les transmettant pas à la caisse (des certificats médicaux étant disponibles à ce titre), étant rappelées les taxations excessives aussi bien dans le canton de Genève que dans celui de Vaud; ces comptes 2017 reflétaient fidèlement les revenus et charges "alors qu'ils se [basaient] sur les extraits bancaires"; les époux avaient depuis lors mandaté le cabinet fiscal et comptable B______, pour régulariser dans les deux cantons toute leur situation fiscale dont dépendait ensuite l'AVS.

29.    Le 17 mai 2022, cette dernière écriture a été transmise pour information à l'intimée, par la chambre de céans, qui a dès lors gardé la cause à juger.

 

EN DROIT

1.        Conformément aux art. 134 al. 1 let. a ch. 1, 2, 7 et 8 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) et 20 de la loi instituant une assurance en cas de maternité et d'adoption du 21 avril 2005 (LAMat - J 5 07), la chambre des assurances sociales connaît, en instance unique, des contestations prévues à l'art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS - RS 831.10), à la loi fédérale sur l’assurance-invalidité du 19 juin 1959 (LAI - 831.20), à la loi fédérale sur les allocations pour perte de gain en cas de service et de maternité du 25 septembre 1952 (loi sur les allocations pour perte de gain, LAPG - RS 834.1), à la loi fédérale sur les allocations familiales du 24 mars 2006 (loi sur les allocations familiales, LAFam - RS 836.2), à la loi fédérale sur l'assurance-chômage obligatoire et l'indemnité en cas d'insolvabilité du 25 juin 1982 (loi sur l’assurance-chômage, LACI - RS 837.0), ainsi qu’à la LAMat.

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Interjeté dans la forme et le délai prévus par la loi, l'acte de recours est recevable (art. 56 ss LPGA et 62 ss LPA).

3.        L’art. 53 al. 3 LPGA dispose que jusqu’à l’envoi de son préavis à l’autorité de recours, l’assureur peut reconsidérer une décision ou une décision sur opposition contre laquelle un recours a été formé. Il reprend ainsi le contenu de l’art. 58 al. 1 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 1968 (PA - RS 172.021), à teneur duquel l’autorité inférieure peut, jusqu’à l’envoi de sa réponse, procéder à un nouvel examen de la décision attaquée. Doivent en outre être pris en compte, par renvoi de l’art. 55 al. 1 LPGA, les al. 2 et 3 dudit art. 58 PA (arrêt du Tribunal fédéral 8C_1036/2012 du 21 mai 2013 consid. 3.3 ; Ueli KIESER, ATSG-Kommentar, 2020, n. 93 ad art. 53 LPGA ; August MÄCHLER, in Christoph AUER/Markus MÜLLER/Benjamin SCHINDLER [éd.], VwVG Kommentar, 2019, n. 2 et 27 ad art. 58 PA). Aux termes de l’al. 2 de l’art. 58 PA, l’autorité inférieure notifie sans délai une nouvelle décision aux parties et en donne connaissance à l’autorité de recours. Selon l’al. 3, l’autorité de recours continue à traiter le recours, dans la mesure où la nouvelle décision de l’autorité inférieure ne l’a pas rendu sans objet ; l’art. 57 PA est applicable lorsque la nouvelle décision repose sur un état de fait notablement modifié ou crée une situation juridique sensiblement différente. L’art. 67 al. 2 LPA, qui serait applicable par renvoi de l’art. 89A LPA et qui traite de la même problématique, ne saurait quant à lui être appliqué de manière contraire à l’art. 53 al. 3 LPGA (ATAS/393/2021 du 29 avril 2021 consid. 3b et les références citées).

Si la nouvelle décision rendue pendente lite par l'assureur fait entièrement droit aux conclusions du recourant, en d'autres termes donne entière satisfaction à celui-ci, le recours devient sans objet et la cause doit être radiée du rôle, la décision y afférente de l’autorité de recours devant au surplus statuer sur les frais et dépens en tenant compte de l’intervention des deux parties. Dans le cas contraire, la procédure se poursuit à propos de ce qui reste litigieux, sans qu’il soit nécessaire de recourir contre la nouvelle décision (ATF 127 V 228 consid. 2b/bb ; ATF 113 V 237 ; ATF 107 V 250 ; arrêts du Tribunal fédéral 9C_22/2019 du 7 mai 2019 consid. 3.1, 8C_1036/2012 précité consid. 3.3, 8C_18/2009 du 31 juillet 2009 consid. 3 et I 278/02 du 24 juin 2002 consid. 2 ; ATAS/393/2021 précité consid. 3c; ATAS/173/2021 précité consid. 7b).

Au sens des art. 53 al. 3 LPGA et 58 al. 1 PA, l’autorité intimée peut rendre une nouvelle décision après sa première réponse – ou premier préavis –, mais dans le cadre d’un échange d’écritures prévu par le droit de procédure ou ordonné par la chambre des assurances sociales (ATAS/393/2021 précité consid. 3d et f et les références citées).

4.        Le litige porte uniquement sur le bien-fondé du montant du revenu d'activité indépendante de la recourante réalisé en 2017, tel que retenu par l'intimée dans sa décision sur opposition rendue le 9 décembre 2019, mais corrigé par nouvelle décision de cotisation personnelle du 28 février 2020. Il est précisé que cette dernière a été rendue dans le délai de préavis – ou de réponse – au sens précité, a remplacé ladite décision sur opposition et constitue le nouvel objet du litige.

5.         

5.1 Aux termes de l'art. 4 al. 1 LAVS, les cotisations des assurés qui exercent une activité lucrative sont calculées en pourcent du revenu provenant de l'exercice de l'activité dépendante et indépendante.

Les art. 8 à 9bis LAVS règlent les cotisations perçues sur le revenu provenant d'une activité indépendante.

En particulier, en vertu de l'art. 9 LAVS, le revenu provenant d'une activité indépendante comprend tout revenu du travail autre que la rémunération pour un travail accompli dans une situation dépendante (al. 1). Pour déterminer le revenu provenant d’une activité indépendante sont déduits du revenu brut, entre autres, les frais généraux nécessaires à l’acquisition du revenu brut (let. a) et les amortissements et les réserves d’amortissement autorisés par l’usage commercial et correspondant à la perte de valeur subie (let. b; al. 2) Le revenu provenant d'une activité indépendante et le capital propre engagé dans l'entreprise sont déterminés par les autorités fiscales cantonales et communiqués aux caisses de compensation (al. 3). Les caisses de compensation ajoutent au revenu communiqué par les autorités fiscales les déductions admissibles selon le droit fiscal des cotisations dues en vertu de l'art. 8 LAVS, de l'art. 3 al. 1 LAI et de l'art. 27 al. 2 LAPG. Elles reconstituent à 100 % le revenu communiqué en fonction des taux de cotisation applicables (al. 4).

5.2 Selon l'art. 22 du règlement sur l'assurance-vieillesse et survivants du 31 octobre 1947 (RAVS - RS 831.101) - concernant les cotisations perçues sur le revenu provenant d'une activité indépendante (art. 17 ss RAVS) -, les cotisations sont fixées pour chaque année de cotisation. L'année de cotisation correspond à l'année civile (al. 1). Les cotisations se calculent sur la base du revenu découlant du résultat de l'exercice commercial clos au cours de l'année de cotisation et du capital propre investi dans l'entreprise à la fin de l'exercice commercial (al. 2).

À teneur de l'art. 23 RAVS, portant sur la « détermination du revenu et du capital propre », pour établir le revenu déterminant, les autorités fiscales cantonales se fondent sur la taxation passée en force de l'IFD. Elles tirent le capital propre engagé dans l'entreprise de la taxation passée en force de l'impôt cantonal (ICC) adaptée aux valeurs de répartition intercantonales (al. 1). En l'absence d'une taxation passée en force de l'IFD, les données fiscales déterminantes sont tirées de la taxation passée en force de l'impôt cantonal sur le revenu ou, à défaut, de la déclaration vérifiée relative à l'IFD (al. 2). Si l'autorité fiscale procède à une taxation fiscale consécutive à une procédure en soustraction d'impôts, les al. 1 et 2 sont applicables par analogie (al. 3). Les caisses de compensation sont liées par les données des autorités fiscales cantonales (al. 4).

L'art. 25 al. 1 RAVS prévoit que les caisses de compensation fixent les cotisations dues pour l'année de cotisation dans une décision de cotisation et établissent le solde entre les cotisations dues et les acomptes versés.

Aux termes de l'art. 27 RAVS, pour toutes les personnes exerçant une activité indépendante qui leur sont affiliées, les caisses de compensation demandent aux autorités fiscales cantonales de leur communiquer les indications nécessaires au calcul des cotisations. L'Office fédéral des assurances sociales (ci-après: OFAS) édicte des directives sur les indications requises et la procédure de communication (al. 1). Les autorités fiscales cantonales transmettront les indications au fur et à mesure aux caisses de compensation pour chaque année fiscale (al. 2). Si elle n'a reçu aucune demande de communication pour une personne exerçant une activité indépendante dont elle peut établir le revenu conformément à l'art. 23 RAVS, l'autorité fiscale cantonale communiquera spontanément les indications nécessaires à la caisse de compensation cantonale. Le cas échéant, celle-ci les transmettra à la caisse de compensation compétente (al. 3).

5.3 Le Tribunal fédéral a jugé à plusieurs reprises, concernant la détermination du revenu et du capital propre engagé dans une entreprise au regard des taxations fiscales passées en force selon l’art. 23 RAVS, que les données fiscales lient les caisses de compensation, mais que le caractère obligatoire des données fiscales que prévoit l’art. 23 al. 4 RAVS ne concerne que la fixation desdits revenu et capital propre – soit le point de savoir s'il existe un revenu provenant d'une activité lucrative et, le cas échéant, si celui-ci résulte d'une activité lucrative indépendante ou dépendante – et n’englobe pas la question de savoir si et dans quelle mesure ceux-ci sont soumis à cotisation, question qu’il incombe aux caisses de compensation d’examiner au regard du droit de l’AVS sans être liées par les communications fiscales, étant toutefois précisé qu’elles doivent en général se fier à ces dernières et ne procéder à leurs propres investigations que lorsqu’il y a des doutes sérieux quant à l’exactitude des données contenues dans les communications fiscales (ATF 147 V 114 consid. 3.4.2; ATF 145 V 50 consid. 3.3; ATF 134 V 250 consid. 3.3 ; 121 V 80 consid. 2c ; ATF 114 V 72 consid. 2 ; ATF 111 V 289 consid. 3 ; ATF 102 V 27 consid. 3b; arrêts du Tribunal fédéral 9C_77/2020 du 25 mars 2021 consid. 5.2 et 9C_162/2014 du 31 juillet 2014 consid. 3.1; ATAS/820/2021 du 18 août 2021 consid. 5c). Les caisses de compensation ne sont liées, entre autres, ni par les communications indiquant des éléments de revenu qui, en vertu de la LAVS, ne font pas partie du revenu provenant d’une activité indépendante, ni par les indications concernant la date à partir de laquelle l’activité indépendante a commencé dans la période de calcul ni quant à savoir si l’assuré est ou non une personne exerçant une activité lucrative ou un non actif, par une communication fiscale matériellement inexacte en raison d’une erreur de transmission (directives de l'OFAS sur les cotisations des travailleurs indépendants et des personnes sans activité lucrative dans l’AVS, AI et APG [ci-après : DIN], ch. 1236, dans sa version tant au 1er janvier 2020 qu'au 1er janvier 2022). De plus, sur les questions liant en principe les caisses de compensation, ces dernières doivent néanmoins s’écarter des données résultant de la taxation fiscale lorsque celles-ci contiennent des erreurs manifestes susceptibles d’être corrigées aisément ou lorsqu’il s’agit d’apprécier des faits non pertinents d’un point de vue fiscal mais décisifs au regard du droit des assurances sociales (ATF 111 V 289 consid. 3 ; 110 V 369 consid. 2a ; 102 V 27 consid. 3a ; ATAS/820/2021 précité consid. 5c; ATAS/903/2015 du 24 novembre 2015 consid. 8b). Un examen autonome des facteurs d’imposition sur lesquels se fonde la décision de cotisations reste exceptionnellement possible lorsque le montant de l’impôt fixé dans la décision de taxation est peu élevé et que l’absence d’une valeur litigieuse suffisante enlève tout motif d’entamer une procédure fiscale, a fortiori lorsqu’aucun impôt n’est dû (arrêt du Tribunal fédéral 9C_441/2015 du 19 février 2016 consid. 6.5 et la jurisprudence citée; ATAS/820/2021 précité consid. 5c).

La détermination du revenu étant une tâche qui incombe aux autorités fiscales, l'assuré exerçant une activité lucrative indépendante doit donc faire valoir ses droits en matière de taxation - avec les effets que celle-ci peut avoir sur le calcul des cotisations AVS - en premier lieu dans la procédure judiciaire fiscale (ATF 110 V 83 consid. 4; ATF 110 V 368; ATF 106 V 130 consid. 1; ATF 102 V 27 consid. 3a; VSI 1997 p. 26 consid. 2b et la référence; arrêt du Tribunal fédéral des assurances H 17/00 du 5 décembre 2000 consid. 2).

Par ailleurs, les principes concernant la force contraignante des communications fiscales s'appliquent également en cas de taxation d'office. Aussi, les caisses de compensation et le juge des assurances sociales sont-ils liés par la communication fiscale fondée sur une taxation d'office passée en force, bien que celle-ci soit moins précise qu'une taxation établie selon la procédure ordinaire, c'est-à-dire par rapport à des données concrètes (ATF 120 V 271 consid. 2; arrêts du Tribunal fédéral H 210/06 du 22 juin 2007 consid. 3.3 et H 17/00 précité consid. 2; RCC 1988 p. 321 et les références; ATAS/820/2021 précité consid. 5c; ATAS/775/2014 du 25 juin 2014 consid. 6).

Il appartient en principe à la personne intéressée d'alléger et d'établir les faits susceptibles de conduire à une réduction du montant de sa cotisation (arrêt du Tribunal fédéral 9C_819/2011 du 19 janvier 2012 consid. 4).

6.         

6.1 En l'espèce, par écriture du 28 février 2020, l'intimée a transmis à la chambre des assurances sociales une nouvelle décision de cotisation personnelle pour la recourante rendue le même jour, pour 2017, remplaçant celle du 2 août 2019 (confirmée par la décision sur opposition querellée) et se fondant sur un revenu de CHF 316'956.-, une déduction (de CHF 250.-) de l'intérêt du capital propre investi CHF 50'000.-, plus un ajout des cotisations personnelles de CHF 33'826.35, soit au total un revenu soumis à cotisations (arrondi) de CHF 350'500.-.

Dans le cadre de l’art. 53 al. 3 LPGA, l’autorité peut revoir librement sa décision, en faveur du recourant, sans être liée par les conditions restrictives de la reconsidération d’une décision entrée en force (cf. art.53 al.2 LPGA). Si la nouvelle décision rendue pendente lite fait entièrement droit aux conclusions du recourant, en d'autres termes donne entière satisfaction à celui-ci, le recours devient sans objet et la cause doit être radiée du rôle, la décision y afférente de l’autorité de recours devant au surplus statuer sur les frais et dépens en tenant compte de l’intervention des deux parties. Dans le cas contraire, la procédure se poursuit à propos de ce qui reste litigieux, sans qu’il soit nécessaire de recourir contre la nouvelle décision (ATAS/393/2021 du 29 avril 2021 et les références citées).

La cotisante conteste encore, uniquement, ledit nouveau revenu d'activité indépendante en 2017 de CHF 316'956.-, qui est basé sur celui de CHF 320'000.- ("montant taxé d'office pour l'activité indépendante") selon la communication fiscale du 17 janvier 2020, et dont la caisse a à juste titre soustrait le revenu d'activité dépendante de CHF 3'044.- (activité salariée accessoire auprès d'un hôpital).

6.2 Cependant, d'une part, il s'avère que les allégations de la recourante selon lesquelles elle allait déposer une demande de révision ou de rectification auprès de l'AFC-GE à l'encontre de sa taxation d'office pour 2017 ne reposent sur rien, puisqu'aucune demande n'a en réalité été formée à ce jour dans ce sens alors que l'intéressée a disposé d'au moins deux ans et demi (de l'automne 2019 au printemps 2022), durée plus que suffisante pour le faire, malgré les nombreux délais qui lui ont été accordés par la chambre de céans pour le démontrer.

D'autre part, aucun élément de fait, pas même un indice, ressortant des allégations de l'assurée et du dossier n'est susceptible d'apporter des doutes sérieux quant à l'exactitude et la pertinence (en matière de cotisations AVS) des données figurant dans la taxation d'office de 2017 établie le 18 juin 2019 par l'AFC-GE et communiquées, s'agissant des points pertinents, à la caisse dans une version corrigée le 17 janvier 2020.

En effet, les comptes de pertes et profits du 1er janvier au 31 décembre 2017, qui retiennent notamment un chiffre d'affaires de CHF 341'418.45, soit, après "ajustement provision débiteurs", une somme totale des produits de CHF 336'058.45, ainsi que des frais généraux de CHF 87'465.52 et un résultat de l'exercice de CHF 235'069.19, ont été établis à une date inconnue par le mari de l'intéressée et ont été produits seulement le 24 août 2020, et celle-ci n'a présenté, le 16 mai 2022, aucun renseignement ni aucun document concernant la question savoir sur quelles bases concrètes et précises se fondaient lesdits comptes, en particulier pour le chiffre d'affaires et les frais généraux (timesheets, factures, documents comptables, etc.), alors que la chambre de céans avait précisé, dans ses questions du 31 mars 2022, qu'en l'absence des renseignements et documents requis, ces comptes pourraient le cas échéant ne pas se voir reconnaître de valeur probante. Lesdits comptes ne pouvant, dans ces circonstances, se voir reconnaître une valeur supérieure à celle d'une déclaration de partie, les réponses de la recourante du 16 mai 2022 aux questions posées le 31 mars 2022 par la chambre des assurances sociales sont manifestement insuffisantes pour remettre en cause le revenu d'activité indépendante en 2017 de CHF 316'956.- ressortant de la communication fiscale du 17 janvier 2020. Il sied à cet égard de relever que la portée du principe de la maxime inquisitoire est restreinte par le devoir des parties de collaborer à l'instruction de l'affaire (art. 61 let. c LPGA), qui comprend en particulier l'obligation des parties d'apporter, dans la mesure où cela peut être raisonnablement exigé d'elles, les preuves commandées par la nature du litige et des faits invoqués, faute de quoi elles risquent de devoir supporter les conséquences de l'absence de preuves (ATF 125 V 195 consid. 2 et les références ; cf. ATF 130 I 183 consid. 3.2).

Au demeurant, si ces comptes de pertes et profits reposaient sur des informations et documents ayant une vraie valeur probante et étaient ainsi réellement de nature à remettre en cause le montant de revenu d'activité indépendante retenu par l'intimée dans sa nouvelle décision du 28 février 2020 de même que par l'AFC-GE dans sa communication fiscale du 17 janvier 2020, on ne voit pas ce qui aurait empêché l'intéressée et sa fiduciaire de requérir déjà il y a de nombreux mois la révision ou rectification de la taxation d'office.

6.3 Par surabondance, le revenu d'activité indépendante en 2017 de CHF 320'000.- selon la communication fiscale du 17 janvier 2020, corrigé à CHF 316'956.- par l'intimée, n'apparaît pas insolite, exorbitant ou manifestement exagéré au regard des montants communiqués par l'administration fiscale pour les années 2009 à 2016, bien que plus élevé que ceux-ci.

Au surplus, selon les avis de taxation de 2018 établis le 3 février 2020 par l'AFC-GE (taxation normale ou ordinaire) et produits le 16 décembre 2021 par la recourante, l'IFD 2018 du couple était fondé sur un revenu imposable total de CHF 244'900.- et l'"avis de taxation activité indépendante" de l'assurée pour l'IFD 2018 montrait des recettes de CHF 338'387.- au total – contre CHF 336'058.40 selon les comptes des pertes et profits 2017 – moins les amortissements de CHF 2'536.- – contre CHF 2'606.30 – et moins les frais généraux de CHF 42'576.- – contre CHF 87'465.52 –, d'où un bénéfice net de CHF 293'275.-, relativement peu éloigné du revenu d'activité indépendante en 2017 de CHF 320'000.- selon la communication fiscale du 17 janvier 2020, corrigé à CHF 316'956.-.

Enfin, le chiffre d'affaires de CHF 341'418.45, soit, après "ajustement provision débiteurs", une somme totale des produits de CHF 336'058.45, qui résulte des comptes de pertes et profits 2017 et que l'intéressée fait implicitement valoir comme point de départ avant les amortissements et les frais généraux, est inférieur d'environ CHF 100'000.- au revenu d'indépendant indiqué pour le 1er janvier au 31 décembre 2017 dans l'extrait de CI de l'assurée, qui se monte à CHF 441'500.-. Ce dernier montant est, selon ledit extrait de CI, le revenu d'activité indépendante le plus élevé depuis 2004, et il apparaît compatible, après les déductions effectuées en application de l'art. 9 al. 2 LAVS (dont les amortissements et frais généraux), avec le revenu d'activité indépendante CHF 316'956.- retenu par la caisse dans sa nouvelle décision du 28 février 2020.

6.4 En définitive, la nouvelle décision de cotisation personnelle pour la recourante rendue le 28 février 2020 est conforme au droit.

7.        Vu ce qui précède, le recours sera rejeté en tant qu'il est dirigé contre ladite décision du 28 février 2020.

8.        La recourante obtenant partiellement gain de cause par son recours en tant qu'il a été dirigé contre la décision sur opposition du 9 décembre 2019 et étant assistée d’un conseil, une indemnité de dépens, réduite, de CHF 700.- lui sera allouée, à la charge de l’intimée (art. 61 let. g LPGA).

9.        La procédure est – en principe – gratuite (art. 61 let. a aLPGA dans sa version en vigueur avant le 1er janvier 2021, applicable ratione temporis vu l’art. 82a LPGA).

Au regard de l'ensemble des circonstances, quand bien même la recourante a laissé penser pendant plusieurs mois – et de manière regrettable – à la chambre de céans qu'une procédure de révision ou rectification serait introduite devant l'AFC-GE et tranchée par celle-ci d'ici la fin 2021 alors qu'une telle demande de révision ou rectification a en réalité été inexistante, il ne sera pas mis à la charge de l'intéressée une amende pour emploi abusif de procédure au sens de l'art. 88 LPA ou un émolument pour comportement téméraire ou léger en procédure selon l'art. 89H al. 1, 2ème phr, LPA.

***

PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Rejette le recours en tant qu'il est dirigé contre la décision de cotisation personnelle pour la recourante du 28 février 2020, qui a remplacé la décision sur opposition du 9 décembre 2019.

3.        Confirme ladite décision du 28 février 2020.

4.        Alloue une indemnité de dépens de CHF 700.- à la recourante, à la charge de l'intimée.

5.        Dit que la procédure est gratuite.

6.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

Diana ZIERI

 

Le président

 

 

 

Blaise PAGAN

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le