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Décisions | Chambre des assurances sociales de la Cour de justice Cour de droit public

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A/371/2017

ATAS/534/2017 du 26.06.2017 ( PC ) , REJETE

En fait
En droit

rÉpublique et

canton de genÈve

POUVOIR JUDICIAIRE

 

A/371/2017 ATAS/534/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre des assurances sociales

Arrêt du 26 juin 2017

6ème Chambre

 

En la cause

Madame A______, domiciliée à VERSOIX

 

 

recourante

 

contre

SERVICE DES PRESTATIONS COMPLÉMENTAIRES, sis route de Chêne 54, GENÈVE

intimé

 


EN FAIT

1.        Madame A______ (ci-après : l’assurée), née le ______ 1965, séparée, mère de deux enfants nés en 2002 et 2004, a été mise au bénéfice de prestations complémentaires familiales depuis le 1er août 2015.

2.        Par décision du 25 mai 2016, le Service des prestations complémentaires (ci-après : le SPC) a supprimé le droit aux prestations de l’assurée avec effet au 31 décembre 2015 et lui a réclamé la restitution des prestations versées du 1er janvier au 31 mai 2016 pour un montant de CHF 13'310.- (CHF 1'450.- de subside et CHF 11'860.- de prestations familiales) au motif que la condition du taux de travail minimum n’était plus remplie.

3.        Par décision du même jour, le SPC a alloué à l’assurée CHF 13'785.- de prestations d’aide sociale pour la période du 1er janvier au 31 mai 2016 dont CHF 13'310.- étaient affectés au remboursement d’une dette SPC.

4.        Par décision du même jour, le SPC a refusé d’allouer des prestations complémentaires familiales à l’assurée dès le 1er janvier 2016.

5.        Par décision du 1er juin 2016, le SPC a supprimé les prestations d’aide sociale et subside d’assurance-maladie au 30 juin 2016.

6.        Par courrier du 10 août 2016, l’assurée a annoncé au SPC qu’elle allait commencer le 5 septembre 2016 un emploi à 40 %.

7.        Le 26 août 2016, l’assurée a communiqué au SPC un contrat de travail avec B______  SA comme conductrice d’autocar dès le 22 août 2016 à un taux de seize heures par semaine en moyenne ; il est mentionné que le nombre d’heure est variable et que le salaire annuel total est de CHF 17'950.- et de CHF 1'795.- brut par mois fois dix.

8.        Par décision du 30 août 2016, le SPC a alloué à l’assurée des prestations complémentaires familiales dès le 1er septembre 2016 de CHF 1'290.- par mois ainsi qu’un subside de CHF 290.-.

9.        Par décision du même jour, le SPC a refusé à l’assurée des prestations d’aide sociale et de subside d’assurance valable dès le 1er septembre 2016.

10.    Le 2 septembre 2016, l’assurée a communiqué au SPC un avenant au contrat de travail prévoyant une rémunération de CHF 17'950.- par an (pour 672 heures, 13ème inclus, vacances incluses) et un salaire mensuel brut de CFH 1'495.85 fois douze.

11.    Le 3 octobre 2016, l’assurée a communiqué au SPC son décompte de salaire de septembre 2016 au montant brut de CHF 1'451.40.

12.    Par décision du 13 octobre 2016, le SPC a supprimé le droit de l’assurée aux prestations familiales et au subside d’assurance maladie dès le 31 octobre 2016 au motif que le taux d’activité lucrative de l’assurée était seulement de 35 %.

13.    Le 19 octobre 2016, l’assurée a fait opposition à la décision du SPC du 13 octobre 2016 en faisant valoir qu’elle travaillait 62 heures par mois ce qui représentait un 38 % et qu’en plus elle avait travaillé jusqu’au 31 août 2016 comme patrouilleuse scolaire à 14,15 %.

14.    Par décision du 27 janvier 2017, le SPC a rejeté l’opposition de l’assurée au motif que l’assurée travaillait selon l’avenant au contrat de travail 56 heures par mois pour B______ SA correspondant à un taux de 35 % (un taux de 100 % correspondait à 160 heures par mois) et qu’elle ne travaillait plus comme patrouilleuse scolaire depuis le 31 août 2016, de sorte que le taux minimum légal de 40 % n’était pas atteint.

15.    Le 1er février 2017, l’assurée a recouru à l’encontre de la décision sur opposition du SPC du 27 janvier 2017 auprès de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice en relevant qu’elle effectuait 56 h par mois et, en sus, chaque mois des heures supplémentaires, ce qui lui permettait d’atteindre certains mois un taux d’activité de 40 %, voire plus. Elle a communiqué sa fiche de salaire de décembre 2016 attestant d’un salaire de base de CHF 1'495.85 et de 8 heures supplémentaires en relevant que son taux d’activité atteignait un 40 % durant ce mois.

16.    Le 1er mars 2017, le SPC a conclu au rejet du recours en invitant l’assurée à produire ses fiches de salaire d’octobre, novembre 2016 et janvier 2017.

17.    Le 13 mars 2017, l’assurée a produit une attestation de travail d’B______ SA du 10 mars 2017 selon laquelle l’assurée travaillait au sein de la société à un taux d’activité de 40 % depuis le 22 août 2016, ainsi que ses fiches de salaire d’octobre, novembre 2016 et janvier 2017.

Les fiches de salaires font état des revenus bruts mensuels suivants (sans les allocations enfant) :

Octobre 2016 : CHF 2'011.50

Salaire de base : CHF 1'978.10

1,67 heures de nuit : CHF 33.40

Novembre 2016 : CHF 1'506.85

Salaire de base : CHF 1'495.85

0.55 heures de nuit : CHF 11.--

Décembre 2016 : CHF 1'711.85

Salaire de base : CHF 1495.85

8 heures supplémentaires : CHF 216.--

Janvier 2017 : CHF 1'711.85

Salaire de base : CHF 1'495.85

8 heures supplémentaires : CHF 216.--

18.    Le 31 mars 2017, le SPC a observé que si l’on tenait compte du salaire réalisé de septembre 2016 à janvier 2017, l’assurée avait réalisé 18,22 heures supplémentaires soit 3,644 heures par mois en moyenne, lesquelles additionnées aux 56 heures régulières donnaient une moyenne de 59,644 heures par mois correspondant à un taux de travail de 37,2775 %, taux encore inférieur à celui minimum de 40 %.

19.    Le 10 avril 2017, l’assurée a communiqué sa fiche de salaire de mars 2017 attestant des montants suivants :

Mars 2017 : CHF 1'867.10

Salaire de base : CHF 1'495.85

13,75 heures supplémentaires : CHF 371.25

Cette fiche prenait en compte les heures supplémentaires faites en février 2017 dont le SPC n’avait pas tenu compte.

20.    Le 27 avril 2017, le SPC a observé que même si l’on prenait en compte le salaire de février 2017, soit CHF 1'495.85 de salaire de base et 13,75 heures supplémentaires, le taux d’activité ascendait à 38,33 %.

21.    Le 16 mai 2017, l’assurée a observé que le nombre d’heures supplémentaires qu’elle effectuait augmentait de sorte qu’elle ne savait pas si elle devait produire la prochaine fiche de salaire des deux, trois prochains mois au SPC pour un nouveau calcul ; depuis décembre 2016, elle effectuait au minimum entre 8 et 15 heures supplémentaires par mois.

22.    Sur quoi la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1.        Conformément à l'art. 134 al. 1 let. a ch. 3 de la loi sur l'organisation judiciaire, du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) en vigueur dès le 1er janvier 2011, la chambre des assurances sociales de la Cour de justice connaît en instance unique des contestations prévues à l’art. 56 de la loi fédérale sur la partie générale du droit des assurances sociales, du 6 octobre 2000 (LPGA - RS 830.1) relatives à la loi fédérale sur les prestations complémentaires à l’assurance-vieillesse, survivants et invalidité du 6 octobre 2006 (LPC - RS 831.30). Elle statue aussi, en application de l'art. 134 al. 3 let. a LOJ, sur les contestations prévues à l'art. 43 de la loi cantonale sur les prestations complémentaires cantonales du 25 octobre 1968 (LPCC - J 4 25).

Sa compétence pour juger du cas d’espèce est ainsi établie.

2.        Les dispositions de la LPGA, en vigueur depuis le 1er janvier 2003, s’appliquent aux prestations complémentaires familiales (art. 1A al. 2 let. c LPCC).

3.        En matière de prestations complémentaires familiales, les décisions sur opposition sont sujettes à recours dans un délai de 30 jours auprès de la Chambre des assurances sociales de la Cour de justice (art. 43 LPCC ; voir également les art. 56 al. 1, 58 al. 1 et 60 al. 1 LPGA).

4.        Interjeté en temps utile, le recours est recevable.

5.        L’objet du litige porte sur le droit de la recourante à des prestations familiales au-delà du 31 octobre 2016.

6.        a. Le 1er novembre 2012 est entré en vigueur la nouvelle teneur de l’art. 1er LPCC, lequel stipule désormais, à son alinéa 2, que « les familles avec enfant(s) ont droit à un revenu minimum cantonal d'aide sociale, qui leur est garanti par le versement de prestations complémentaires cantonales pour les familles (ci-après : prestations complémentaires familiales) ». Ces prestations complémentaires familiales visent une catégorie de bénéficiaires de prestations complémentaires cantonales qui ne sont pas des rentiers AVS/AI, mais des familles pauvres dont les parents travaillent. Ajoutées au revenu du travail, ces prestations devaient permettre aux familles pauvres d’assumer les dépenses liées à leurs besoins de base (Mémorial du Grand Conseil du 17 décembre 2009 p. 11).

b. Aux termes de l'art. 36A LPCC, figurant au titre II A de la loi :

« Ont droit aux prestations complémentaires familiales les personnes qui, cumulativement :

a) ont leur domicile et leur résidence habituelle sur le territoire de la République et canton de Genève depuis 5 ans au moins au moment du dépôt de la demande de prestations;

b) vivent en ménage commun avec des enfants de moins de 18 ans, respectivement 25 ans si l'enfant poursuit une formation donnant droit à une allocation de formation professionnelle au sens de l'article 3, alinéa 1, lettre b, de la loi fédérale sur les allocations familiales, du 24 mars 2006 (ci-après : la loi sur les allocations familiales);

c) exercent une activité lucrative salariée;

d) ne font pas l'objet d'une taxation d'office par l'administration fiscale cantonale. Le Conseil d’Etat définit les exceptions;

e) répondent aux autres conditions prévues par la présente loi.

(…)

4 Pour bénéficier des prestations, le taux de l'activité lucrative mentionnée à l'article 36A, alinéa 1, lettre c, doit être, par année, au minimum de :

a) 40 % lorsque le groupe familial comprend une personne adulte;

b) 90 % lorsque le groupe familial comprend deux personnes adultes.

(…) ».

Selon l’art. 11 du règlement relatif aux prestations complémentaires familiales du 27 juin 2012 (RPCFam - J 4 25.04) :

« 1 Le taux d'activité lucrative déterminant, exigé par l'article 36A, alinéa 4, de la loi, est calculé sur une base de 40 heures de travail par semaine.

2 Pour un contrat de travail de durée indéterminée, le taux d'activité en vigueur au moment du dépôt de la demande de prestations est déterminant.

3 Pour un contrat de travail de durée déterminée, lorsque les taux d'activité lucrative prévus à l'article 36A, alinéa 4, de la loi ne sont pas réalisés au moment du dépôt de la demande, le taux d'activité annualisé réalisé au cours des 6 mois qui précèdent la demande de prestations est pris en compte.

4 Le taux d'activité déterminé en vertu de l'alinéa 3 est valable jusqu'à l'échéance fixée dans le contrat de travail en vigueur au moment du dépôt de la demande. Dès l'entrée en vigueur d'un nouveau contrat de travail de durée déterminée, le taux est recalculé en application de l'alinéa 3 ».

7.        Il résulte de l'exposé des motifs du projet de loi introduisant les prestations complémentaires familiales dans le canton de Genève dès le 1er novembre 2012 (PL 10600 modifiant la LPCC du 25 octobre 1968) que « ce projet de loi vise précisément à améliorer la condition économique des familles pauvres. La prestation complémentaire familiale qui leur est destinée, ajoutée au revenu du travail, leur permettra d'assumer les dépenses liées à leurs besoins de base. Grâce au caractère temporaire de cette aide financière et aux mesures d'incitation à l'emploi qu'elle associe, le risque d'enlisement dans le piège de l'aide sociale à long terme et de l'endettement sera largement écarté. En effet, le revenu hypothétique étant pris en compte dans le calcul des prestations, il constitue un encouragement très fort à reprendre un emploi ou augmenter son taux d'activité » (PL 10’600 p. 11/71).

À côté du revenu hypothétique prévu à l’art. 36E al. 2 à 5 LPCC, l’art. 36A al. 4 LPCC s’inscrit dans cette même logique d’incitation à l’emploi puisqu’il subordonne le droit aux prestations complémentaires familiales à un taux d’activité lucrative minimal de 40 % par année lorsque le groupe familial comprend une personne adulte (let. a), respectivement 90 % par année lorsque le groupe familial comprend deux personnes adultes (let. b).

S’agissant de ce taux d’activité minimal, les travaux préparatoires précisent qu’il « s’entend par année ». Il est ajouté que de la sorte, « en cas de contrat de travail à durée déterminée, l’annualisation de la durée du contrat permet de déterminer si la condition du taux d’activité minimal est remplie sur l’année (exemple : un contrat à durée déterminée de 6 mois à plein temps ouvre un droit aux prestations complémentaires familiales, pour une famille monoparentale, car il correspond à taux d’activité annuel de 50 %). Les prestations complémentaires familiales s'adressent à des familles dont la situation est relativement stable. Les personnes dont l'activité salariée est de très courte durée, fractionnée ou très irrégulière peuvent faire appel aux prestations d'aide sociale de l'Hospice général, mieux adaptées pour les personnes en continuels changements de situation économique. Dans un souci d'égalité de traitement, le règlement du Conseil d'Etat précisera que le taux d'activité se fonde sur une semaine de 40 heures de travail » (PL 10'600 p. 31/71).

Lors de la séance du Grand Conseil du 17 décembre 2009, le PL 10'600 a été renvoyé sans débat à la commission des affaires sociales. Cette nouvelle étape du processus législatif ne permet pas d’en apprendre davantage sur la portée de l’art. 36A al. 4 LPC, sinon que le taux d’activité minimal (40 % pour une famille monoparentale, respectivement 90 % si le groupe familial comprend deux adultes) « se fonde sur une semaine de 40 heures et que ce point [serait] précisé ultérieurement dans le règlement d’application » (PL 10’600-A p. 29/117 ; arrêt de la chambre des assurances sociales de la Cour de justice du 26 janvier 2017 -ATAS/60/2017).

Dans l’arrêt précité, la chambre de céans a jugé que l’art. 11 al. 4 RPCF restreignait les droits des bénéficiaires contrairement à la loi et que l’administration ne pouvait annualiser le taux d’activité sur des périodes plus brèves que douze mois.

8.        Selon une jurisprudence constante, le juge des assurances sociales apprécie la légalité des décisions attaquées, en règle générale, d’après l’état de fait existant au moment où la décision litigieuse a été rendue. Les faits survenus postérieurement, et qui ont modifié cette situation, doivent normalement faire l’objet d’une nouvelle décision administrative (ATF 121 V 366 consid. 1b et les références). Les faits survenus postérieurement doivent cependant être pris en considération dans la mesure où ils sont étroitement liés à l’objet du litige et de nature à influencer l’appréciation au moment où la décision attaquée a été rendue (ATF 99 V 102 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral des assurances I 321/04 du 18 juillet 2005 consid. 5).

9.        En l’espèce, la décision litigieuse a été rendue le 27 janvier 2017 de sorte que sont pertinents les revenus et le taux d’activité réalisés par la recourante jusqu’à cette date.

A cet égard, le taux d’activité de 35 % a été réhaussé à 37,3 % par l’intimé dans son écriture du 31 mars 2017 en prenant en compte les heures supplémentaires effectuées par la recourante de septembre 2016 à janvier 2017, taux encore inférieur au seuil légal de 40 % permettant l’octroi de prestations familiales.

Ce calcul n’est pas contestable et n’est pas contesté.

La recourante invoque cependant qu’elle effectue de plus en plus d’heures supplémentaires, de sorte que son taux d’activité atteindrait prochainement un taux de 40 %.

Selon le dernier calcul effectué par l’intimé le 27 avril 2017, le taux d’activité de la recourante, en prenant en compte les heures supplémentaires effectuées de septembre 2016 à février 2017, ascendait à 38,33 %.

Il apparait probable que le taux d’activité de la recourante atteigne, compte tenu des heures supplémentaires effectuées depuis mars 2017, le taux minimal exigé de 40 %, de sorte qu’il convient de renvoyer la cause à l’intimé afin qu’il calcule à nouveau le taux d’activité de la recourante, compte tenu du revenu réalisé par celle-ci au-delà du mois de février 2017.

10.    Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et la cause renvoyée à l’intimé dans le sens des considérants.


PAR CES MOTIFS,
LA CHAMBRE DES ASSURANCES SOCIALES :

Statuant

À la forme :

1.        Déclare le recours recevable.

Au fond :

2.        Le rejette.

3.        Renvoie la cause à l’intimé, dans le sens des considérants.

4.        Dit que la procédure est gratuite.

5.        Informe les parties de ce qu’elles peuvent former recours contre le présent arrêt dans un délai de 30 jours dès sa notification auprès du Tribunal fédéral (Schweizerhofquai 6, 6004 LUCERNE), par la voie du recours en matière de droit public, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral, du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110); le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé au Tribunal fédéral par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi.

 

La greffière

 

 

 

 

Julia BARRY

 

La présidente

 

 

 

 

Valérie MONTANI

Une copie conforme du présent arrêt est notifiée aux parties ainsi qu’à l’Office fédéral des assurances sociales par le greffe le