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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1933/2003

ATA/911/2004 du 23.11.2004 ( TPE ) , REJETE

Recours TF déposé le 18.01.2005, rendu le 18.03.2005, REJETE, 1P.20/2005
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1933/2003-TPE ATA/911/2004

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 23 novembre 2004

dans la cause

 

M. C. T.
représentée par Me Christian Buonomo, avocat

contre

DEPARTEMENT DE L'AMENAGEMENT, DE L'EQUIPEMENT ET DU LOGEMENT


 


1. M. C. T.-V. est propriétaire de la parcelle No 5624 feuille 42 de la commune de Genève-Cité, sur laquelle est édifié un immeuble locatif, à l’adresse 0, rue de C. et 00, rue de C., à l’angle de ces deux rues.

2. Désireuse de rénover deux appartements situés aux 2ème et 5ème étages de cet immeuble, la propriétaire a déposé le 30 novembre 1998, par l’intermédiaire du C. g. i., une demande d’autorisation par voie de procédure accélérée. Selon l’état locatif joint, l’immeuble comportait un restaurant au rez-de-chaussée et au premier étage, des arcades et des bureaux, et ne comptait que 4 appartements, alors vacants, dont les deux précités.

3. Le dossier du département de l’aménagement, de l’équipement et du logement (ci-après : DAEL) contenait le préavis favorable du « service juridique/LDTR » soit de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d’habitation du 25 janvier 1996 (LDTR – L 5 20).

  Vu le coût des travaux – de CHF 125'000.- par appartement –

et les états locatifs actuels (de CHF 9'312.- par an pour l’appartement du 2ème étage et de CHF 9'396.- pour celui du 5ème étage) et futurs.

L’autorisation pouvait être délivrée pour autant que le loyer de chacun de ces deux appartements n’excède pas CHF 14'000.- par an, soit CHF 3'500.- la pièce par an, ce loyer devant être appliqué durant 3 ans dès la remise en location après travaux. Le rendement brut était ainsi de 3,7 %.

Le 27 janvier 1999, le DAEL a délivré l’autorisation requise, les conditions énoncées dans le préavis précité faisant parties intégrantes de l’autorisation, (APA 15'127) qui a été publiée dans la Feuille d’Avis Officielle (ci-après : FAO) le 1er février 1999.

4. Le 23 mars 1999, le C. g. i. a conclu un bail à loyer avec M. M. M. pour un appartement de 4 pièces et demie au 5ème étage de l’immeuble précité, ainsi qu’une cave. Le bail d’une durée de cinq ans prenait effet le 1er mai 1999. Le loyer annuel était fixé à CHF 19'800.- sans les charges.

Au bail étaient jointes des dispositions particulières, dont l’article 2 précisait ce qui suit :

« compte tenu des dispositions LDTR (APA no 15127 du 27 janvier 1999), il est précisé que le loyer annuel net est ramené à CHF 13'992.- (CHF 1'166.- par mois) pour la période du l.05.99 au 30.04.2002 ».

L’avis de fixation du loyer initial remis à la locataire mentionnait l’ancien loyer annuel de CHF 9'396.- pour un 4 pièces et demie.

5. Un autre bail a été signé par le C. g. i. et M. S. Q. le 6 mai 1999, prenant effet le 15 mai 1999 jusqu’au 31 mai 2004, pour l’appartement de 4 pièces et demie sis au deuxième étage, le loyer fixé étant de CHF 19'440.- sans les charges.

Toutefois, à teneur du chiffre 2 des dispositions particulières, le loyer annuel était ramené à CHF 13'992.- du 15 mai 1999 au 31 mai 2002, dans les mêmes termes que ci-dessus.

L’avis de fixation du loyer initial remis à la locataire mentionnait également l’ancien loyer annuel, soit CHF 9'312.- pour un 4 pièces et demie.

6. Par deux avis de confirmation d’échelon datés du 27 mars 2002, le C. g. i. a signifié :

- à M. Q. que son loyer était porté à CHF 19'440.- dès le 1er juin 2002 

- à M. M. que le sien passait à CHF 19'800.- dès le 1er mai 2002.

7. Saisi d’une dénonciation de l’Asloca en date du 18 août 2003 au sujet de M. M., le DAEL a interpellé le C. g. i. le lendemain en le priant de fournir toutes explications utiles concernant ces deux baux – dont copie était requise – car ils s’écartaient des conditions fixées dans l’APA, tant par le montant du loyer que par le nombre de pièces mentionné. Des baux corrigés devaient être adressés aux locataires avec une lettre explicative. Enfin, la bailleresse devait indiquer au DAEL si des travaux avaient été entrepris dans les deux autres appartements de l’immeuble, soit le 4 pièces au 4ème étage et le 2 pièces au 6ème étage.

8. Le 22 août 2003, le C. g. i. a produit les pièces requises. Il ne voyait pas en quoi les baux conclus dérogeaient aux conditions fixées dans l’APA. Les loyers fixés avaient été appliqués pendant trois ans. S’agissant du nombre de pièces, il avait considéré qu’en raison de l’importance du hall d’entrée, il pouvait considérer ces appartements coM. des 4 pièces et demie.

Enfin, seuls des travaux de rafraîchissement des peintures, soit des travaux d’entretien courant, avaient été effectués dans l’appartement du 4ème étage. Ce logement avait été reloué CHF 18'000.- l’an, alors que le loyer précédent s’élevait à CHF 27'228.-

L’appartement du 6ème étage était vacant. Il n’avait pas fait l’objet de travaux.

9. Par lettre signature du 8 septembre 2003, dont copie a été adressé à l’Asloca, conseil des locataires concernés, le DAEL a ordonné à M. T., en application des articles 10 LDTR et 129 lettre e de la loi sur les constructions et installations diverses du 14 avril 1988 (LCI – L 5 05), applicable par renvoi de l’article 44 LDTR, de rétablir, dans un délai de 30 jours, une situation conforme au droit en procédant à la rectification des baux « dans le sens de la fixation d’un loyer initial de CHF 14'000.- par an au maximum pour une durée de trois ans dès la prise d’effet des baux ».

Le DAEL mentionnait que la décision précitée pouvait faire l’objet d’un recours dans les 30 jours auprès du Tribunal administratif.

Il résultait de ce courrier que selon le DAEL, la clause contractuelle particulière précitée détournait le but poursuivi par la LDTR puisqu’elle avait pour effet de retenir coM. loyer de référence, après travaux, un loyer s’inscrivant au-delà des besoins prépondérants de la population ; elle revenait ainsi à « s’attacher non plus à un appartement donné en tant qu’objet protégé par LDTR, mais à un partenaire contractuel » voyant sont loyer annuel ramené à un loyer inférieur à celui fixé par le propriétaire.

Le DAEL prenait par ailleurs acte des explications de la bailleresse concernant les appartements des 4ème et 6ème étages.

10. Par acte déposé au greffe du Tribunal administratif le 9 octobre 2003, M. T. a recouru contre cette décision en concluant à son annulation, aucune violation de la LDTR ne pouvant lui être reprochée.

Le DAEL a conclu au rejet du recours en reprenant son argumentation. Peu importait le montant effectivement perçu au titre de loyer par la bailleresse dès lors que l’avis de fixation de loyer initial après travaux n’était pas conforme à l’APA délivrée.

La recourante a renoncé à répliquer.

11. Le 16 juillet 2004, le juge délégué a écrit au DAEL en le priant de bien vouloir se déterminer sur le maintien ou non de sa décision du 8 septembre 2003, les baux de M. M. et Q. étant venus à échéance respectivement au 30 avril et 31 mai 2002.

Le 10 août 2004, le DAEL a persisté dans sa décision, d’autres cas similaires étant suspendus dans l’attente d’un jugement dans la présente cause car celle-ci posait une question de principe.

12. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

 

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A LOJ et art. 63 al. 1 litt a LPA).

L’ordre du 8 septembre 2003 pris par le DAEL est un ordre de remise en état, au sens des articles 129 litt e et 130 LCI, applicables par renvoi de l’article 44 LDTR relatif aux sanctions et mesures, de sorte que le recours est ouvert au Tribunal administratif. La présente espèce diffère en effet de celle jugée récemment par le tribunal de céans (ATA/104/2004 du 27 janvier 2004), le montant des loyers après travaux n’étant pas contesté par la recourante, de sorte que le renvoi de la cause à la commission cantonale de recours en matière de constructions n’a pas lieu d’être.

2. A titre liminaire, le tribunal de céans rappellera au DAEL que, selon une jurisprudence constante, le dénonciateur – fût-ce l’Asloca – ne peut être partie à la procédure et n’a pas à être informé de l’issue de celle-ci (ATA796/2003 du 17 juin 2003 ; ATA/42/2003 du 21 janvier 2003).

3. L’APA 15'127 délivrée le 27 janvier 1999 n’a fait l’objet d’aucun recours. Elle était d’ailleurs conforme à l’article 9 LDTR et la conditions n° 6 était explicite : le loyer annuel de chacun de ces deux appartements de 4 pièces ne devait pas excéder CHF 14'000.-, soit CHF 3'500.- la pièce par an, pendant trois ans dès la remise en location suite aux travaux.

4. Les deux baux signés par le C. g. i. avec M. M. et M. Q. pour ces deux appartements ne sont pas conformes à l’autorisation délivrée, tant par le nombre de pièces que par le loyer mentionné, même s’il n’est pas allégué par le DAEL que pendant la période de contrôle, les locataires auraient payé un loyer supérieur au loyer maximum.

Le procédé auquel la bailleresse a recouru revient à détourner la LDTR de son but. Celui-ci, énoncé à ses articles 10 à 14, est de maintenir sur le marché des appartements correspondant, par leur genre et leur coût, aux besoins prépondérants de la population. Le législateur a désiré que le montant du loyer soit fixé pour toute la durée de la période de contrôle. Au terme de cette dernière, le loyer fixé par l’autorité doit servir de référence en cas de hausse subséquente.

5. En conséquence, l’ordre de remise en état pris par le DAEL le 8 septembre 2003 ne peut qu’être confirmé.

Il appartiendra à M. T. de rectifier les baux de M.s M. et Q. pour que ceux-ci soient conformes à l’APA précitée, même si la durée du contrôle est venue à expiration respectivement le 30 avril et le 31 mai 2002.

6. Mal fondé, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante.

Vu l’issue du litige, il ne lui sera pas alloué d’indemnité (art. 87 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 9 octobre 2003 par M. C. T. contre la décision du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement du 8 septembre 2003;

au fond :

le rejette ;

dit qu’un émolument de CHF 1'000.- sera mis à la charge de la recourante ;

dit qu’aucune indemnité ne lui sera allouée ;

communique le présent arrêt à Me Christian Buonomo, avocat de la recourante ainsi qu'au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement.

Siégeants : M. Bovy, présidente, M. Paychère, M. Hurni, M. Thélin, M. Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

la vice-présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :