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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/677/2004

ATA/889/2004 du 16.11.2004 ( TPE ) , REJETE

Descripteurs : ZONE; BRUIT; EMISSION; IMMISSION; INSTALLATION; RESTAURANT; ZONE DE BRUIT; 4E ZONE B; POUVOIR D'EXAMEN; AMENAGEMENT DU TERRITOIRE; PROTECTION DE L'ENVIRONNEMENT; AUTORISATION DE CONSTRUIRE; ODEUR
Normes : LPE.7; OPAIR.2 al.5 litt.b; OPE.1; OPE.7; LCI.14; LCI.15
Parties : GOTTRAUX Fabienne et Daniel et autres, KRAUER Liliane Jean-Pierre, GOTTRAUX Daniel, KRAUER Jean-Pierre, MASON Mireille et Christopher, MASON Christopher / DEPARTEMENT DE L'AMENAGEMENT, DE L'EQUIPEMENT ET DU LOGEMENT, COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE DE CONSTRUCTIONS, GLOBAL BRAND'S SA, LUXEMBOURT, SUCC. DE GENEVE
Résumé : Changement d'affectation d'un magasin de fleurs en débit de pizzas à l'emporter - opposition des voisins. L'installation d'un point de vente de pizzas à l'emporter est compatible avec la 4ème zone B protégée pour autant qu'elle ne cause pas d'inconvénients en matière de circulation au sens de l'art.14 al.1 litt.c LCI et qu'elle respecte la législation fédérale en matière de protection de l'environnement (LPE - OPB - OPair). En l'espèce, autorisation admise et recours rejeté.
En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/677/2004-TPE ATA/889/2004

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 16 novembre 2004

dans la cause

Madame Fabienne et Monsieur Daniel GOTTRAUX
Madame Liliane et Monsieur Jean-Pierre KRAUER
Madame Mireille et Monsieur Christopher MASON
représentés par Me Christian Buonomo, avocat

contre

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE DE CONSTRUCTIONS

DEPARTEMENT DE L'AMENAGEMENT, DE L'EQUIPEMENT ET DU LOGEMENT

GLOBAL BRANDS S.A. LUXEMBOURG, SUCCURSALE DE GENEVE
représentée par Me Alain Gros


1. Global Brands S.A., Luxembourg, succursale de Genève (ci-après: Global Brands ou l’intimée) est une succursale de la société Global Brands S. A. dont le siège est à Luxembourg. Son but social est le développement et l’administration de commerces de livraison de Domino’s Pizza et la concession de sous-licences des droits de développement et gestion des commerces de livraison Domino’s Pizza, ainsi que toute activité commerciale s’y rapportant.

2. Par demande d’autorisation de construire en procédure accélérée datée du 20 janvier 2003, Global Brands a requis l’autorisation de transformer un magasin de fleuriste en point de vente de pizzas à l’emporter. Ledit magasin était sis sur les parcelles nos 43 et 1700 de la feuille 2 de la commune d’Onex à l’adresse 143 route de Chancy à Onex.

Les parcelles sont situées en zone 4 B protégée. A l’avant elles donnent sur la route de Chancy et se trouvent dès lors en bordure de la zone 4 B protégée, tandis qu’à l’arrière elles donnent sur le chemin de la Vi-Longe qui traverse le vieux village d’Onex. Les travaux visaient des transformations intérieures et notamment la création d’une chambre froide et d’un four à pizza avec évacuation de fumée. Aucun des plans soumis avec la requête d’autorisation de construire ne mentionnait la présence d’enseignes lumineuses.

3. L’installation des enseignes lumineuses de Domino’s pizza, a fait l’objet d’une demande séparée. La commune d’Onex (ci-après : la commune) a rendu une décision le 12 février 2003 octroyant le droit à l’intimée d’apposer trois enseignes lumineuses sur le bâtiment sis route de Chancy 143. Cette décision n’a fait l’objet d’aucun recours.

4. Au cours de l’instruction de la requête en autorisation de construire, les préavis légaux ont été requis. Ils étaient tous favorables, favorables sous réserve ou sans observation, à l’exception d’un préavis défavorable du service da la protection de la consommation qui faisait notamment référence au type de peintures à utiliser pour les locaux de denrées alimentaires. En particulier ont été délivrés les préavis suivants :

- Le préavis de la commune d’Onex était favorable à condition que l’accès de service se fasse par la route de Chancy et que des cases motos soient créées en lieu et place d’une place de parking voiture sur le domaine public cantonal.

- Le préavis du service sécurité-salubrité était favorable à condition que les cheminées et installations soient conformes aux normes.

- Les préavis de la commission des monuments, de la nature et des sites (ci après : CMNS) et du service des monuments et des sites étaient sans objections.

- L’office cantonal de l’inspection et des relations du travail (ci-après : l’OCIRT) a approuvé les plans déposés, par décision du 30 mai 2003, dans la mesure où le projet prévu était conforme tant à la loi fédérale sur la protection de l’environnement du 7 octobre 1983 (LPE – RS 814.01), qu’à l’ordonnance fédérale sur la protection contre le bruit du 15 décembre 1986 (OPB – RS 814.41) ainsi qu’à l’ordonnance sur la protection de l’air du 16 décembre 1985 (Opair- RS 814.318.142.1). L’OCIRT relevait ainsi que l’établissement ne devait pas provoquer de gêne olfactive ou sonore dans le voisinage.

5. Par décision du 30 mai 2003, publiée dans la FAO le 4 juin 2003, le département de l’aménagement, de l’équipement et du logement (ci-après : DAEL) a délivré l’autorisation requise.

6. Les travaux de transformation de l’arcade ayant débuté avant même l’obtention de l’autorisation précitée, un arrêt de chantier ainsi qu’une amende ont été notifiés à l’intimée, respectivement le 10 février et le 30 mai 2003.

7. Par acte de recours du 4 juillet 2003, Madame Fabienne et Monsieur Daniel Gottraux, domiciliés chemin de la Vi-Longe 4, Madame Evelyne Egger, domiciliée route de Chancy 130, Madame Liliane et Monsieur Jean-Pierre Krauer, domiciliés chemin de la Vi-Longe 1, ainsi que Madame Mireille et Monsieur Christopher Mason, domiciliés route de Chancy 145, (ci-après : les recourants), ont conclu à l’annulation de l’autorisation délivrée et à la condamnation de l’Etat au versement d’une indemnité de procédure. A l’appui de leur recours, ils ont invoqué les nuisances liées à l’exploitation du type d’activité autorisée au sens des articles 14, 15 et 16 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI – L 5 05) ainsi que la LPE et l’OPB. Ils se sont également plaints du fait que l’enseigne ne respectait pas les règles cantonales topiques.

8. Dans ses observations du 6 août 2003, l’intimée a conclu à ce que le recours soit rejeté avec suite de frais, après qu’il soit constaté que Mme Egger n’avait pas qualité pour recourir puisqu’elle est domiciliée de l’autre côté de la route de Chancy et qu’en conséquence elle ne saurait se plaindre de nuisances liées à l’exploitation du point de vente de Domino’s pizza.

En ce qui concernait les nuisances sonores et olfactives, l’intimée a fait valoir que le laboratoire à pizzas était conforme aux exigences de la législation fédérale topique. Pour ce qui avait trait aux nuisances engendrées par la circulation et le stationnement des véhicules, l’intimée a soutenu que tant les clients motorisés que les scooters de livraison empruntaient exclusivement la route de Chancy et non le chemin de la Vi-Longe ce qui n’entraînait aucun inconvénient pour les riverains. La commune ainsi que le service des monuments et des sites ayant rendu un préavis favorable, le DAEL ne pouvait refuser d’accorder l’autorisation en invoquant la clause d’esthétique de l’article 15 LCI. Enfin, l’enseigne ayant fait l’objet d’une autorisation de la commune entrée en force, l’intimée ne pouvait être condamnée à la retirer.

9. Les parties ont été entendues par la commission cantonale de recours en matière de constructions (ci-après : commission ou CCRMC) lors de son audience du 13 novembre 2003. Elles ont persisté dans leurs conclusions. Les recourants ont précisé que dans la mesure où l’exploitation était déjà en activité les nuisances étaient avérées, en particulier du côté de la sortie arrière de l’édifice qui donne sur le chemin de la Vi-Longe près des propriétés des recourants. Etaient également en cause les horaires d’ouverture nocturne qui se prolongeaient jusqu’à minuit tous les soirs. L’intimée a fait valoir que dans les alentours immédiats sur l’axe route de Chancy se trouvaient d’autres commerces de type divers, notamment des stations service. Les scooters de livraison n’empruntaient les chemins arrière que pour les livraisons qui avaient lieu dans les alentours.

10. Par décision du 23 février 2004, la CCRMC a rejeté le recours et confirmé la décision attaquée.

Elle a estimé que le grief relatif à l’enseigne devait être écarté puisque l’autorité de décision était la commune et que sa décision n’avait pas été querellée. Concernant les nuisances provoquées par la circulation et le stationnement des véhicules, la commission a relevé que l’autorisation délivrée était conforme aux préavis requis stipulant que l’entrée de service devait se faire par la route de Chancy et que ces mesures étaient propres à limiter, voire exclure toute nuisance sur le chemin de la Vi-Longe. L’autorité de recours a considéré que les nuisances sonores occasionnées par un établissement tel que celui de l’intimée étaient conformes au degré de sensibilité III accordé aux abords de la route de Chancy par le projet de cadastre du bruit cantonal. Enfin, elle considérait que dans la mesure où les prescriptions posées par l’OCIRT étaient respectées, la fumée d’un four à pizza ne pouvait altérer l’air de l’environnement immédiat. Elle soulignait cependant que la cheminée d’évacuation réalisée par l’intimée ne correspondait pas à celle qui figurait sur les plans approuvés par le DAEL qui étaient conformes aux directives de l’OCIRT. Cela n’impliquait toutefois pas l’annulation de l’autorisation accordée puisque les plans correspondaient à ce qui était requis mais la CCRMC invitait le DAEL à contrôler la conformité de la réalisation avec les plans approuvés et à faire corriger la construction, éventuellement au moyen d’une sanction.

11. A l’exception de Mme Egger, les recourants ont interjeté recours à l’encontre de la décision précitée auprès du Tribunal administratif par acte du 1er avril 2004. Ils soutiennent que le type d’exploitation géré par l’intimée n’est pas conforme à la zone 4B protégée dans laquelle elle est située. Toutes les nuisances invoquées par les recourants proviennent de l’accès dont dispose à l’arrière le bâtiment concerné, qui donne sur le chemin de la Vi-Longe dans le vieux village d’Onex. Les nuisances dues au trafic engendré par l’exploitation (scooters de livraison, camion de ravitaillement, autre trafic engendré par des clients occasionnels) ainsi que celles provenant de l’entreposage des déchets à l’arrière du bâtiment, sont contraires à l’article 14 LCI. Les enseignes lumineuses apposées ne sont pas conformes au caractère architectural du vieux village d’Onex et violent par conséquent l’article 15 LCI. Les nuisances sonores et olfactives engendrées également par ce type d’installation violent également les dispositions topiques de la LPE et de l’OPB et de l’OPair. Ils invoquent encore d’autres problèmes tels la lézarde occasionnée par le camion de livraison sur le mur mitoyen d’un des recourants ou encore le fait que certains clients consomment leurs pizza pratiquement dans leurs jardins. En conséquence les recourants concluent préalablement à ce qu’un transport sur place soit ordonné puis, sur le fond à l’annulation de la décision de la CCRMC et à l’annulation de l’autorisation de construire voire à ce que le dossier soit retourné au DAEL afin qu’une étude ait lieu pour limiter ou réduire les nuisances engendrées par l’exploitation de l’intimée.

12. Dans ses observations sur recours du 6 mai 2004, l’intimée invoque l’irrecevabilité des griefs soulevés par les recourants dans la mesure où ceux-ci ont en fait pour but d’obtenir la protection de droits de nature civile. Pour le surplus elle a repris l’argumentation développée devant la CCRMC. Elle a conclu à ce que le recours soit rejeté dans la mesure où il est recevable et que la décision de la CCRMC soit confirmée.

Le DAEL par son écriture du 11 mai 2004 a également conclu au rejet du recours et à la confirmation de la décision de la commission.

13. Lors du transport sur place du 7 juin 2004, le Tribunal a constaté que les habitations des recourants donnent toutes sur l’arrière de Domino’s pizza : celle des époux Gottraux sur la gauche, celle des époux Mason sur la droite et celle des époux Krauer en face, de l’autre côté du chemin de la Vi-Longe. Les parties admettent que le camion d’approvisionnement décharge actuellement du côté de la route de Chancy qu’empruntent également les scooters de livraison, à l’exclusion du chemin de la Vi-Longe. Ceux-ci stationnent également à l’avant du bâtiment, sur la route de Chancy. La cour arrière n’est plus utilisée comme passage de service, elle abrite exclusivement les containers pour les ordures et des bacs en plastique. Seuls les scooters qui effectuent des livraisons dans le village d’Onex empruntent le chemin de la Vi-Longe. Les recourants se plaignent du fait qu’on entend le bruit de vaisselle jusqu’à 23-24 heures la nuit, que les containers sont pleins et débordent occasionnant des odeurs désagréables et que certains clients venant chercher des pizzas les consomment sous leurs fenêtres, causant ainsi beaucoup de bruit.

14. Par pli du 1er juillet adressé au tribunal, la commune d’Onex a demandé à pouvoir intervenir dans la présente procédure en faisant valoir qu’ « à l’usage, il apparaît clairement que cette exploitation présente un caractère industriel incompatible avec un village protégé ». Tout en estimant que son préavis positif était fondé, elle fait valoir que l’intimée avait utilisé également la sortie donnant sur le chemin de la Vi-Longe pour les livraisons, ce qui n’était pas conforme à son préavis.

La demande d’intervention de la commune d’Onex a été rejetée par pli du 5 juillet 2004 du Tribunal administratif, dès lors qu’elle n’avait pas formé recours en temps utile à l’encontre de l’autorisation querellée.

15. Dans leurs observations après transport sur place, les parties ont persisté dans leurs conclusions.

16. Par pli du 25 août 2004, les recourants ont sollicité l’audition de M. René Longet, maire de la commune d’Onex, à titre de témoin.

17. Le Tribunal relève que la problématique soulevée par la présente cause a fait l’objet de deux pétitions (pétition n° 1469 contre l’usage abusif du domaine public à la route de Chancy et pétition n° 1470 contre diverses nuisances générées par l’implantation d’un commerce à la route de Chancy) adressées au Grand Conseil. Elles ont fait l’objet d’un rapport du 7 septembre 2004 à l’issue duquel la commission des pétitions en charge du dossier a voté le dépôt de la pétition 1469 sur le bureau du Grand Conseil et le renvoi de la pétition 1470 au Conseil d’Etat.

18. Le 9 novembre 2004, l’intimée a transmis au tribunal un courrier émanant de son architecte, aux termes duquel la hauteur de la cheminée de ventilation, récemment réhaussée, est désormais conforme aux prescriptions contenues dans l’autorisation de construire.

19. La cause a été gardée à juger sans que le maire de la commune d’Onex ait été entendu.

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 149 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 – LCI – L 5 05 ; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Les recourants sollicitent l’audition de M. René Longet maire de la commune d’Onex à titre de témoin.

Le droit d’être entendu découlant de l’article 29 alinéa 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. féd. - RS 101) ne comprend pas le droit d’être entendu oralement (cf. ATF 125 I 209 consid. 9b p. 219 ; 122 II 464 consid. 4c p. 469), ni celui d’obtenir l’audition de témoins. En effet, l’autorité peut mettre un terme à l’instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d’une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude que ces dernières ne pourraient l’amener à modifier son opinion (Arrêt du Tribunal fédéral 2A.118/2003 du 13 juillet 2004, consid. 2.1 ;cf. également ATF 125 I 127 consid. 6c/cc in fine p. 135, 417 consid. 7b p. 430; 124 I 208 consid. 4a p. 211/212, 274 consid. 5b p. 285 ; 115 Ia 8 consid. 3a p. 11/12 ; 106 Ia 161 consid. 2b p. 162).

En l’occurrence, la position de la commune d’Onex est déjà connue du Tribunal du fait de sa demande d’intervention dans la présente procédure. Favorable dans un premier temps à l’installation de l’intimée sur son territoire, la commune a changé d’avis en observant l’utilisation que l’intimée faisait du chemin de la Vi-Longe ainsi que les réactions de ses administrés. Pour autant, elle n’a pas désavoué le préavis qu’elle avait accordé.

De plus, les parties ont déjà pu exposer à plusieurs reprises de manière détaillée leurs positions respectives. Enfin, au cours du transport sur place, le Tribunal a pu se faire une idée très précise de la configuration des lieux et a entendu les doléances des recourants in situ. Il estime que les éléments de fait ont été assez instruits pour pouvoir rendre une décision. En conséquence, le dossier étant en état d’être jugé, l’audition de M. Longet n’a pas lieu d’être ordonnée.

3. a. Selon une jurisprudence bien établie, le Tribunal administratif observe en principe une certaine retenue, pour éviter de substituer sa propre appréciation à celle des instances de préavis, pour autant que l'autorité inférieure suive ceux-ci (ATA/92/2003 du 25 février 2003 consid. 4c ; ATA/183/1999 du 23 mars 1999 consid. 8 ; C.-M. du 15 octobre 1996). Toutefois, lorsque l'autorité inférieure s'est écartée desdits préavis, le Tribunal administratif peut revoir librement l'interprétation des notions juridiques indéterminées. Il se considère également libre d'exercer son propre pouvoir d'examen lorsqu'il a procédé lui-même à des mesures d'instruction, à l'instar d'un transport sur place (ATA/172/2004 du 2 mars 2004 consid. 6 ; F. PAYCHÈRE, Pouvoir d'examen et pouvoir de décision du Tribunal administratif, RDAF 2000 I, p. 543 et les autres références citées).

b. Ayant procédé lui-même à un transport sur place, le Tribunal administratif exercera un pouvoir d’examen entier, en se fondant pour ce faire sur les éléments contenus dans le dossier, ainsi que sur les constatations faites à l’occasion du transport sur place du 7 juin 2004.

4. Les recourants invoquent la violation de l’article 14 LCI en raison du trafic engendré par les scooters de livraison ainsi que les camions de livraison de marchandises et la violation des dispositions de la LPE, de l’OPB et de l’OPair du fait de nuisances tant sonores qu’olfactives générées par l’exploitation de l’établissement. Ils se plaignent également de l’apposition d’enseignes qui contreviennent à l’article 15 LCI. Enfin, ils font également valoir un certain nombre de désagréments tels les dommages causés au mur d’un des recourants par le camion de livraison.

5. Ainsi que l’a jugé la CCRMC, tout grief relatif à l’enseigne doit être écarté d’emblée. En effet, d’une part les plans soumis au DAEL ne contenaient aucune indication relative à l’enseigne. Il s’ensuit que l’autorisation querellée ici n’avait nullement trait à l’enseigne. D’autre part, celle-ci a fait l’objet d’une autorisation séparée qui a été accordée par la commune d’Onex en vertu de l’article 5 alinéa 1 LPR et qui est entrée en force puisqu’elle n’a fait l’objet d’aucun recours.

6. a. Il convient de relever que le contrôle du respect des droits de voisinage reste dévolu aux tribunaux civils. La législation genevoise en matière de police des constructions a pour seul but d'assurer la conformité du projet présenté aux prescriptions en matière de constructions et d'aménagements intérieurs et extérieurs des bâtiments et des installations. En revanche, elle n'a pas pour objet de veiller au respect des droits réels. Quant aux procédures de recours prévues aux articles 145 et 149 LCI, elles permettent uniquement de contrôler si les autorisations de construire sollicitées ou délivrées ne sont pas en contradiction avec les dispositions de lois administratives, telles par exemple la LAT ou la LCI (ATA /129/2003 du 11 mars 2003 consid. 12).

b. Au vu de ce qui précède, tout grief relevant des troubles de la possession, tel par exemple la lézarde d’un mur mitoyen, ou l’usage éventuel des parcelles des recourants lors de l’exploitation de l’installation, doivent être déférés au tribunaux civils et n’ont aucun impact au niveau de l’octroi ou du refus de l’autorisation de construire.

7. a. L'installation litigieuse est située en zone de développement 4B protégée, destinée principalement aux maisons d'habitation, comportant en principe plusieurs logements. D'autres activités peuvent également y être autorisées, lorsqu'elles ne sont pas susceptibles de provoquer des nuisances ou des inconvénients graves pour le voisinage ou pour le public, conformément à l'article 19 alinéa 2 LaLAT. La règle rejoint celle de l'article 14 alinéa 1, lettre a, LCI, qui permet au département de refuser une autorisation lorsqu'une construction ou une installation peut être la cause d'inconvénients graves pour les usagers, le voisinage ou le public. Cette dernière disposition ne déploie en principe plus d'effets propres dans les domaines régis par le droit fédéral. Elle conserve toutefois sa pertinence, en matière d'inconvénients afférents à la circulation, notamment en ce qui concerne le stationnement des véhicules ou la mise en danger des piétons, voire du public (ATF 118 Ia 112 S.). Selon la jurisprudence constante du Tribunal administratif, l'article 14 LCI appartient aux normes de protection qui sont destinées à sauvegarder les particularités de chaque zone, en prohibant les inconvénients incompatibles avec le caractère d'une zone déterminée (ATA/92/2003 du 25 février 2003, consid. 4b et les références citées). La notion d'inconvénient grave est une norme juridique indéterminée, qui laisse à l'autorité une liberté d'appréciation qui n'est limitée que par l'excès ou l'abus de pouvoir (ATA B. du 24 juin 1992). Lorsque des difficultés de circulation existent au préalable et qu'une installation nouvelle est de nature à générer un accroissement mineur du trafic routier, le Tribunal administratif a jugé qu'il ne s'agissait pas d'inconvénients graves (ATA/172/2004 du 2 mars 2004, consid 9b et les références citées).

b. Au vu de ce qui précède, l’exploitation d’un débit de pizzas peut tout à fait être admise en zone 4 B protégée. Reste à examiner sous l’angle de l’article 14 LCI let. e si le trafic engendré par cette exploitation constitue un danger ou une gêne durable pour la circulation.

En l’espèce, le préavis de la commune d’Onex est positif, il stipule que l’accès de service doit se faire par la route de Chancy, des cases motos devant être prévues sur le domaine public cantonal en lieu et place d’un parking. L’autorisation délivrée est conforme à ce préavis. Ces prescriptions permettent de limiter les nuisances relatives à l’organisation de la circulation ou au stationnement des véhicules, voire de les éviter sur le chemin de la Vi-Longe parallèle à la route de Chancy, en les déviant sur cette dernière artère qui est notoirement une route à grand trafic. Les mesures préconisées par la commune et reprises par l’autorisation sont propres à éviter des inconvénients graves au sens de l’article 14 LCI.

Il ressort d’ailleurs tant des arguments des recourants que de la lettre de la commune du 1er juillet 2004 que les nuisances liées au trafic dont se plaignent les recourants proviennent du fait que l’intimée, dans un premier temps, ne s’est pas conformée à l’autorisation en se servant de l’accès côté Vi-Longe comme d’une entrée de service pour assurer ses livraisons. Or, ainsi que l’a rappelé à juste titre la CCRMI, le respect des conditions mises à l’octroi d’une autorisation, ne relève pas du droit des constructions mais des prescriptions de police.

Pour le surplus, au cours du transport sur place du 7 juin 2004, les parties ont reconnu que désormais tant l’approvisionnement que les livraisons ainsi que le stationnement des scooters ont lieu du côté de la route de Chancy. Seuls empruntent actuellement le chemin de la Vi-Longe les scooters qui livrent des pizzas dans le village. Dans un village, fût-il protégé, ce ne sont pas quelques scooters de livraison empruntant une voie publique qui peuvent occasionner un danger ou une gêne durable pour la circulation au sens de l’article 14 let. e LCI. Ce grief doit ainsi être rejeté.

8. Les recourants font grief à la CCRMC et au DAEL de ne pas avoir respecté la législation fédérale en ce qui concerne les nuisances olfactives et sonores engendrées par l’exploitation du débit de pizzas.

9. La LPE vise à protéger les hommes des atteintes nuisibles ou incommodantes. Par atteintes, il faut comprendre notamment, selon l’article 7 alinéa 1 LPE, les pollutions atmosphériques et le bruit qui sont dus à l’exploitation d’installations. Les établissements publics se définissent comme des installations fixes au sens de l’article 7 alinéa 7 LPE.

Le débit de pizza qu’exploite l’intimée est un établissement public qui est donc soumis à la LPE, à l’OPB et à l’Opair.

10. a. L'OPB a pour but de protéger contre le bruit nuisible ou incommodant que produit l'exploitation d'installations nouvelles ou existantes. L'ensemble des bruits que provoque l'utilisation, normale et conforme à sa destination, de l'installation en cause sont à prendre en considération, que ceux-ci proviennent de l'intérieur ou de l'extérieur du bâtiment, respectivement du lieu d'exploitation (Arrêt du Tribunal fédéral du 14 janvier 2004, cause 1A.168/2003, consid. 2.1 et les références citées; ATF 123 II 325; B. BOVAY, Autorisation de construire et droit de l'environnement, RDAF 1995, p. 108). Il s'ensuit, par exemple, que le bruit des clients sur la terrasse d'un restaurant, les allées et venues dans la rue, le bruit occasionné par le comportement et la voix de clients à la sortie d'un établissement public, de même que le parcage des véhicules sur une aire immédiate, équivalent à une nuisance de l'installation elle-même (ATA/172/2004 du 2 mars 2004 consid. 8b et les références citées; A.-C. FAVRE, Le bruit des établissements publics, RDAF 2000 I, p. 3; F. BELLANGER, La loi sur la protection de l’environnement, jurisprudence de 1995 à 1999, DEP 2001, p. 36).

b. Le Tribunal fédéral a jugé que l’annexe 6 OPB n’est, en particulier, applicable ni directement, ni même par analogie au bruit des restaurants, des discothèques ou d’autres établissements analogues. Cela étant, les installations qui ne sont pas visées par les différentes annexes de l’OPB sont néanmoins soumises aux règles de droit fédéral sur la limitation des émissions (ATA/172/2004 du 2 mars 2004 consid. 8c et les références citées). Dès lors que les conditions ne sont pas réunies pour appliquer des valeurs limites d’exposition, le juge doit en faire abstraction et se fonder sur son expérience pour apprécier dans chaque cas concret si une atteinte est inadmissible. A ce sujet, il convient de prendre en considération la nature du bruit, l’endroit et la fréquence de ses manifestations, de même que le degré de sensibilité , voire les charges sonores dans la zone où sont produites les immissions en question (JdT 1998 I 459 consid.4 d bb in fine p.468).

c. Au titre de nuisances sonores, les recourants invoquent les bruits liés au trafic engendré par les scooters et le camion de livraison ainsi que par les bruits de vaisselle.

A Genève le cadastre du bruit n’a pas encore été établi. Toutefois, il ressort du projet dudit cadastre produit par l’intimée, que la route de Chancy et ses abords sont placés en degré de sensibilité III, degré permettant l’existence d’activités provoquant certaines nuisances. De plus, la route de Chancy est une route à grand trafic supportant une circulation plus ou moins continue jour et nuit. Le camion de livraison et les scooters devant circuler sur la route de Chancy, on ne peut raisonnablement soutenir que la présence sur ledit axe de quelques scooters et quelques camions supplémentaires puisse avoir une influence néfaste sur le niveau des nuisances subies par l’ensemble du voisinage. Le Tribunal a déjà souligné que la circulation de quelques scooters au chemin de la Vi-Longe ne saurait avoir un impact important sur la circulation, il en est de même au niveau du bruit surtout en tenant compte du degré de sensibilité attribué aux abords de la route de Chancy. Enfin, les bruits de vaisselle ne sauraient à eux seuls constituer une nuisance suffisante et pourraient être le fait de n’importe quel voisin indélicat. Ce grief doit également être écarté.

11. a. Aux termes de l’article 2 alinéa 5 lettre b. Opair si pour un polluant aucune valeur limite n’est fixée, les immissions sont considérées comme excessives lorsque sur la base d’une enquête, il est établi qu’elles incommodent sensiblement une importante partie de la population.

b. En l’espèce, les recourants se plaignent des odeurs émanant du four à pizza ainsi que des caissons à ordures déposés à l’extérieur. Cependant ils n’avancent pas d’argument permettant d’établir qu’ils sont incommodés de façon sensible au sens de la disposition précitée. De plus, eu égard aux émissions polluantes provenant du trafic de la route de Chancy toute proche, on ne peut considérer les immissions provenant d’un four à pizza comme excessives. Enfin, il ressort des plans visés par l’OCIRT que les vérifications ayant trait au respect des dispositions de l’Opair ont été faites, de sorte que les odeurs provenant des cheminées ou de tout autre élément lié à l’exploitation du point de vente ne contreviennent pas aux règles de protection atmosphérique. Par ailleurs, l’intimée a informé le tribunal par courrier du 9 novembre 2004, que des travaux avaient été entrepris afin de mettre la cheminée d’évacuation en conformité avec les plans approuvés par le DAEL dans son autorisation de construire et, partant, avec les consignes de l’OCIRT.

En conséquence, ce grief doit également être écarté.

12. Entièrement mal fondé, le recours est rejeté. Un émolument de CHF 2'000.- sera mis à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement.

Une indemnité de procédure de CHF 1'000.- sera allouée à l’intimée, à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement.

PAR CES MOTIFS,
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er avril 2004 par Madame Fabienne et Monsieur Daniel Gottraux, Madame Liliane et Monsieur Jean-Pierre Krauer, Madame Mireille et Monsieur Christopher Mason contre la décision du département de l'aménagement, de l'équipement et du logement du 23 février 2004;

au fond :

le rejette;

met à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de CHF 2'000.-;

alloue à l’intimée une indemnité de procédure de CHF 1'000.- à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement ;

dit que, conformément aux articles 97 et suivants de la loi fédérale d'organisation judiciaire, le présent arrêt peut être porté, par voie de recours de droit administratif, dans les trente jours dès sa notification, par devant le Tribunal fédéral; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire; il doit être adressé en trois exemplaires au moins au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14; le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyen de preuve, doivent être joints à l'envoi;

communique le présent arrêt à Me Christian Buonomo, avocat des recourants, à Me Alain Gros, avocat de Global Brand S.A. Luxembourg, succursale de Genève, ainsi qu’à la commission cantonale de recours en matière de constructions et au département de l'aménagement, de l'équipement et du logement.

Siégeants : M. Paychère, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

le président :

 

 

F. Paychère

 


Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :