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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2136/2007

ATA/76/2008 du 19.02.2008 ( DCTI ) , ADMIS

Parties : ACQUAROLI Michel / SIGRIST Alexandra, MORENO Karla, BURGER Julian, COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIERE DE CONSTRUCTIONS, DEPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L'INFORMATION, LAEDERACH Jean-Pierre, ROBYR Anne Catherine, LINDER Antonia, KUNZ Olga, DE BATTISTA Régis, NAEF François, NAVAB Sheïda, GAUTHIER Michel
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2136/2007-DCTI ATA/76/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 19 février 2008

dans la cause

 

Monsieur Michel ACQUAROLI
représenté par Me Gérard Brutsch, avocat

contre

Monsieur Julian BURGER

Monsieur Régis DE BATTISTA

Monsieur Michel GAUTHIER

Madame Olga KUNZ

Monsieur Jean-Pierre LAEDERACH

Madame Antonia LINDER

Madame Karla MORENO

Monsieur François NAEF

Madame Scheyda NAVAB

Madame Anne ROBYR

Madame Alexandra SIGRIST

 

et

 

DÉPARTEMENT DES CONSTRUCTIONS ET DES TECHNOLOGIES DE L’INFORMATION

et

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE DE CONSTRUCTIONS


 


EN FAIT

1. Monsieur Michel Acquaroli (ci-après : le propriétaire ou le recourant) est propriétaire de la parcelle n° 526, feuille 30 de la commune de Genève-Plainpalais, à l’adresse 15, rue des Pavillons et qui abrite un immeuble d’habitation de plusieurs logements.

2. Le 25 août 2005, M. Acquaroli a déposé en mains du département de l’aménagement, de l’équipement et du logement, devenu depuis lors le département des constructions et des technologies de l’information (ci-après : le département) une demande d’autorisation en procédure accélérée ayant pour objet la création de deux appartements dans les combles de l’immeuble précité. Cette demande a été enregistrée sous le n° DD/100126-5 et publiée dans la Feuille d’Avis Officielle (ci-après : FAO) du 5 octobre 2005.

Selon le devis général estimatif, le coût des travaux s’élevait à CHF 865'000.-. Les loyers mensuels des appartements ainsi créés seraient de CHF 2'108.04 pour l’appartement de quatre pièces et de CHF 2'635,05 pour celui de cinq pièces.

Ces appartements étaient créés à la place de greniers existants, d’un local buanderie qui n’était plus utilisé et d’un étendage.

3. Par décision du 14 juin 2006, le département a accordé l’autorisation sollicitée, retenant notamment les lettres d’information adressées aux locataires le 21 septembre 2005. La condition n° 7 de l’autorisation précise que le logement de quatre pièces et celui de cinq pièces aménagés dans les combles seront destinés à la location et leur loyer n’excéderont pas CHF 6'325.-/pièce l’an, ceci pendant une durée de cinq ans à dater de leur mise en location. Selon la condition n° 8, tous travaux supplémentaires devront faire l’objet d’une demande complémentaire.

Dite autorisation a été publiée dans la FAO du 19 juin 2006.

4. Par acte du 17 juillet 2006, Mesdames et Messieurs Jean-Pierre Laederach, François Naef, Olga Kunz, Régis de Battista, Scheyda Navab, Anne Robyr, Karla Moreno et Alexandra Sigrist, tous locataires de l’immeuble 15, rue des Pavillons (ci-après : les locataires) ont saisi la commission cantonale de recours en matière de constructions (ci-après : la commission).

Ils s’opposaient à l’autorisation de construire délivrée.

Ils n’avait pas reçu la lettre d’information du 21 septembre 2005 et n’avaient donc pas pu faire valoir leurs observations en temps utile.

Ils relevaient un certain nombre de problèmes concernant l’état de l’immeuble, à savoir le manque de pression d’eau dans les appartements, des problèmes de chauffage et d’isolation, la vétusté des conduites d’évacuation des gaz des poêles de chauffage, ainsi que celle de l’installation électrique, des problèmes de sécurité et l’état de la montée d’escaliers.

Au cours des vingt dernières années, l’immeuble avait passé en mains de plusieurs propriétaires successifs de sorte que les travaux d’entretien n’avaient pas été effectués.

Ils craignaient que le projet d’aménagement des combles ne péjore la situation des appartements existants.

Etait jointe une attestation de chaque locataire confirmant n’avoir jamais reçu de lettre de M. Acquaroli avisant du projet d’aménagement des combles de l’immeuble 15, rue des Pavillons. La copie d’une telle lettre, datée du 21 septembre 2005 et adressée nominativement à chaque locataire de l’immeuble, figurait dans le dossier du département mais chaque locataire déclarait sur l’honneur qu’elle ne lui était jamais parvenue.

5. Parallèlement aux faits précédemment décrits, M. Acquaroli a déposé en mains du département le 26 juillet 2006 une demande d’autorisation en procédure accélérée ayant pour objet des modifications et l’assainissement des sous-sols de l’immeuble précité. Cette demande, enregistrée sous n° APA 26923-5 a été publiée dans la FAO du 13 octobre 2006.

Les travaux projetés avaient pour objet l’assainissement du sous-sol (canalisations, sol, conduites diverses, etc.), le remplacement des séparations des caves et le regroupement de ces derniers dans un local fermé, l’installation d’une buanderie et local chaufferie pour les appartements des combles, le remplacement des introductions eau, gaz, électricité et téléphone, l’agrandissement du dépôt existant et la réfection des murs et des plafonds.

6. Le 10 octobre 2006, le département a délivré l’autorisation sollicitée, publiée dans la FAO du 13 octobre 2006.

La condition n° 6 de l’autorisation précise que les travaux n’auront pas d’incidence sur les loyers des appartements existants, ni sur ceux des appartements projetés dans les combles. Selon la condition n° 7, les conditions nos 6 et 7 de l’autorisation DD 100126 restent inchangées. Quant à la condition n° 8, elle énonce que tous travaux supplémentaires devront faire l’objet d’une demande complémentaire.

7. Par acte du 10 novembre 2006, les locataires Naef, Laederach, Navab, Gauthier, Sigrist, Burger, de Battista et Kunz ont saisi la commission d’un recours contre l’autorisation précitée.

L’APA 26923 était manifestement trop liée au projet DD 100126 de création des combles pour que son contenu puisse faire l’objet d’une appréciation indépendante. Les deux projets, techniquement liés, l’étaient également quant à leur impact sur les locataires des appartements existants. La séparation en deux demandes pour un projet qui formait un tout était une sorte d’artifice de nature à compliquer singulièrement le faire-valoir des droits des locataires et ils souhaitaient que la commission en tienne compte en établissant autant que possible un lien entre les deux causes.

8. Après avoir entendu les parties en audience de comparution personnelle et requis des pièces complémentaires, la commission a joint les deux causes et, par décision du 18 avril 2007, a admis les recours et annulé les deux autorisations de construire querellées.

M. Acquaroli avait échoué dans l’apport de la preuve de l’envoi de la lettre d’information du 21 septembre 2005 aux locataires. Cette violation de l’article 43 alinéa 3 de la loi sur les démolitions, transformations et rénovations de maisons d'habitation du 25 janvier 1996 (LDTR - L 5 20) avait pour conséquence l’annulation de l’autorisation DD 100126-5.

En délivrant deux autorisations de construire liées au même objet, le département avait violé le principe de la coordination tant formelle que matérielle, ce qui conduisait également à leur annulation.

Les plans produits n’étaient pas conformes aux articles 9 et 10b du règlement d'application de la loi sur les constructions et les installations diverses du 27 février 1978 (RALCI - L 5 05 01), en ce qui concernait le conduit de fumées.

Enfin, l’espace destiné au local poubelles avait une largeur de 80 cm et n’était manifestement pas conforme à l’article 61 RALCI.

9. M. Acquaroli a saisi le Tribunal administratif d’un recours contre la décision précitée par acte du 1er juin 2007.

Il a contesté la violation du principe de coordination. La demande concernant l’aménagement des sous-sols avait été déposée en mains du département après l’octroi de la première autorisation. Il ne s’agissait pas d’un « saucissonnage » des travaux, ce d’autant moins que cette demande faisait suite aux griefs des locataire dénoncés par ces derniers au département en août 2006.

La commission avait fait fi de la chronologie concernant la lettre d’information du 21 septembre 2005. Les locataires avaient affirmé n’avoir rien reçu en 2006 alors que la lettre datait de 2005.

Les arguments de la commission concernant le conduit d’évacuation de fumées étaient inacceptables. Les plans produits étaient corrects.

L’article 61 RALCI ne comportait pas une largeur minimum de 80 cm comme tentait de le faire croire la commission.

Il conclut à l’annulation de la décision querellée et à la confirmation des deux autorisations délivrées, avec suite de frais et dépens.

10. Dans sa réponse du 10 juillet 2007, le département a déclaré se rapporter à justice.

11. Les locataires se sont déterminés le 13 juillet 2007.

Les galetas étaient parfaitement utilisables en l’état, seuls trois sur quatorze étaient abandonnés.

Le 14 mai puis le 5 juillet 2007, ils avaient reçu une lettre de la régie Bordier - mandataire du propriétaire - les informant qu’ils avaient à vider les greniers en vue des prochains travaux d’assainissement.

12. Une audience de comparution personnelle s’est tenue le 12 septembre 2007.

Après que chaque partie ait exposé ses arguments, il a été convenu que M. Acquaroli présenterait au département une requête modifiée qui tienne compte des observations des locataires, à savoir  : modification de la surface des caves, notamment dans la largeur ; buanderie plus spacieuse à disposition de tous les locataires de l’immeuble ; local poubelles ; solutions pour entreposer les vélos.

Un délai au 15 octobre 2007 a été imparti à M. Acquaroli pour prendre les mesures nécessaires.

Par courrier du 5 novembre 2007, le recourant a informé le Tribunal administratif qu’un accord était intervenu avec les locataires et qu’un nouveau jeu de plans de sous-sol, du rez-de-chaussée et de la cour avait été établi. La construction d’un abri pour les supports à vélos ainsi que les supports à poubelles était prévue dans la cour.

13. Par courrier du 23 novembre 2007, les locataires ont confirmé au Tribunal administratif que les modifications apportées aux plans initiaux traduisaient leur souhait concernant la cour, l’entreposage de poubelles et le parcage des vélos. Le protocole d’accord qu’ils entendaient cosigner devant le Tribunal administratif devrait leur donner la garantie que les travaux entrepris seraient effectués exactement selon les plans produits.

14. Le 30 novembre 2007, le département a confirmé au Tribunal administratif qu’il n’avait aucune remarque à formuler s’agissant des plans du 1er novembre 2007 concernant le sous-sol, le rez-de-chaussée et la cour de l’immeuble. Il proposait que ceux-ci soient entérinés par le tribunal de céans comme faisant partie intégrante de l’autorisation de construire APA 26923-5.

En revanche, il s’opposait aux conclusions des locataires revenant en définitive à la levée de l’effet suspensif attaché au recours dans la mesure où ils souhaitaient que les travaux soient entrepris immédiatement, tout en maintenant la procédure en cours. En effet, lesdits travaux ne faisaient en l’état l’objet d’aucune autorisation de construire.

15. Le 29 novembre 2007, le Tribunal administratif a appointé une audience de comparution personnelle pour le 16 janvier 2008.

En l’absence des locataires, M. Acquaroli s’est engagé à exécuter les travaux objets des autorisations DD 100126-5 du 14 juin 2006 ainsi que ceux de l’APA 26923-5 du 26 juillet 2006, les plans modifiés du 1er novembre 2007 faisant partie intégrante de cette dernière autorisation.

Lesdits plans ont été visés ne varietur par le juge délégué lors de l’audience.

Le procès-verbal de l’audience a été transmis aux locataires, un délai de 48 heures leur étant imparti pour observations.

16. Le 25 janvier 2008, les locataires ont précisé au Tribunal administratif qu’ils n’avaient pas reçu la convocation du 29 novembre 2007 pour l’audience du 16 janvier 2008.

Par ailleurs, ils ont présenté leurs remarques au sujet du procès-verbal du 16 janvier 2008.

17. Une nouvelle audience de comparution personnelle s’est tenue en présence de toutes les parties le 31 janvier 2008.

M. Acquaroli a persisté dans les engagements pris le 16 janvier 2008 s’agissant de l’exécution des travaux. Il s’est également engagé à mettre à disposition des locataires un local au sous-sol, voire éventuellement un container, pour que ceux-ci puissent stocker leurs affaires pendant la durée des travaux.

Au vu des engagements pris par le recourant, les locataires ont déclaré ne plus s’opposer aux autorisations de construire querellées et retirer leur opposition.

Le département s’est déclaré d’accord avec le rétablissement des autorisations de construire, avec la précision que les plans modifiés du 1er novembre 2007 faisaient partie intégrante de l’APA 26923-5.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le Tribunal administratif qui connaît le droit d’office ne peut se limiter à entériner l’accord auquel sont parvenues les parties.

Il constate que les plans modifiés du 11 novembre 2007 respectent la législation en matière de police des constructions. Ils feront donc partie intégrante de l’APA 26923-5 du 10 octobre 2006.

Quant à la matérialité de l’autorisation DD 100126-5, elle n’est pas discutée en tant que telle par les locataires intimés.

Le recourant s’est engagé à exécuter les travaux, objets des deux autorisations querellées, ce avec quoi les locataires se sont déclarés d’accord.

3. Dès lors, la décision de la commission de recours sera annulée et les deux autorisations de construire rétablies, avec la précision que les plans modifiés du 1er novembre 2007 font partie intégrante de l’APA 26923-5.

Vu l’issue du litige, aucun émolument ne sera perçu, ni aucune indemnité allouée.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 1er juin 2007 par Monsieur Michel Acquaroli contre la décision du 18 avril 2007 de la commission cantonale de recours en matière de constructions ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision du 18 avril 2007 de la commission cantonale de recours en matière de constructions ;

rétablit l’autorisation de construire DD 100126-5 du 14 juin 2006 ;

rétablit l’autorisation de construire APA 26923-5 du 10 octobre 2006, étant précisé que les plans modifiés du 1er novembre 2007 en font partie intégrante ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi  ;

communique le présent arrêt à Me Gérard Brutsch, avocat du recourant, à Monsieur Julian Burger, Madame Alexandra Sigrist, Monsieur Régis de Battista, Monsieur Michel Gauthier, Madame Olga Kunz, Monsieur Jean-Pierre Laederach, Madame Antonia Linder, Madame Karla Moreno, Monsieur François Naef, Madame Scheyda Navab, Madame Anne Robyr et Madame Alexandra Sigrist, soit pour eux à Monsieur Jean-Pierre Laederach, ainsi qu’au département des constructions et des technologies de l’information ainsi qu’à la commission cantonale de recours en matière de constructions.

Siégeants : M. Paychère, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

le président :

 

 

F. Paychère

 

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :