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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1476/2004

ATA/596/2004 du 27.07.2004 ( TPE ) , REFUSE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1476/2004-TPE ATA/596/2004

DÉCISION

DE LA

VICE-PRESIDENTE DU TRIBUNAL

ADMINISTRATIF

du 27 juillet 2004

sur effet suspensif

 

dans la cause

S. S.A.
représentée par Me Eric Stampfli, avocat

contre

DEPARTEMENT DE L’AMENAGEMENT, DE L’EQUIPEMENT ET DU LOGEMENT

et

B. S.A.


EN FAIT

1. Par publication parue dans la Feuille d’avis officielle (FAO) du 26 janvier 2004, le département de l'aménagement, de l'équipement et du logement (ci-après : le département) a ouvert une procédure d’appel d’offres publiques pour des travaux en procédure ouverte soumise à l’accord GATT/OMC et à l’accord intercantonal du 25 novembre 1994 sur les marchés publics (AIMP - L 6 05) en vue des travaux de démolition-reconstruction du cycle d’orientation de Cayla. Il s’agissait d’un seul marché divisé en lots.

Le délai initialement fixé pour la remise des offres était fixé au 28 avril 2004. Il résulte du dossier qu’il a été prolongé au 5 mai 2004.

2. Lors de l’ouverture des offres le 5mai 2004 à 10h10 pour le lot 25100-CFC 25 (travaux d’installations sanitaires) les offres variaient entre CHF 1'291'200 et CHF 1'613'892,40. S. S.A. était l’entreprise la moins-disante (CHF 1'291'200) suivie de l’entreprise B. S.A. (CHF 1'309'024,91).

3. L’évaluation des offres a eu lieu le 22 juin 2004. Les critères retenus (par ordre d’importance) étaient le montant et crédibilité du prix, la capacité à respecter les délais d’exécution, les références et expérience et enfin la qualité de la variante proposée par le candidat.

Au terme de cette analyse, B. S.A., dont le montant de l’offre après vérification (sans TVA) s’élevait à CHF 1'186'237.- a totalisé 346.2 points. S. S.A., dont le montant de l’offre après vérification (sans TVA) s’élevait à CHF 1'169'125.-, a obtenu 340 points. Elle occupait la deuxième place sur les quatre candidats.

4. Par lettre-signature du 1er juillet 2004, le département a informé S. S.A. que le marché avait été adjugé à B. S.A.

Dite décision indiquait la voie et le délai de recours de dix jours au Tribunal administratif.

5. Par acte mis à la poste le 12 juillet 2004, S. S.A. a recouru contre cette décision auprès du Tribunal administratif. Elle était l’entreprise la moins-disante. Le prix était un critère d’adjudication qui devait impérativement être utilisé par le pouvoir adjudicateur. Celui-ci avait abusé de son pouvoir d’appréciation dans le cadre de l’évaluation des offres, notamment dans le cadre de l’appréciation du critère décisif du prix au sens des articles 13 lettre f AIMP et 39 du règlement sur la passation des marchés publics en matière de constructions du 19 novembre 1997 (RMPMC – L 6 05.01).

Elle a conclu préalablement à la restitution de l’effet suspensif ainsi qu’il lui soit réservé un délai pour compléter son recours après avoir consulté le dossier du département et, sur le fond, à l’annulation de la décision querellée et à ce que le marché public du cycle d’orientation de Cayla, lot 25100-CFC 25, lui soit attribué. Le tout avec suite de frais et dépens.

6. Invité à se déterminer sur la question de l’effet suspensif, le département s’y est opposé dans ses écritures du 16 juillet 2004.

Le recours n’était pas suffisamment fondé dans la mesure où une entreprise ne pouvait prétendre à l’obtention du marché au seul motif qu’elle avait présenté l’offre la moins-disante. Cette première des deux conditions cumulatives de l’article 17 alinéa 2 AIMP n’étant pas remplie, la requête de restitution de l’effet suspensif ne pouvait être que rejetée. En tout état, l’intérêt public à la réalisation du collège de Cayla primait sur l’intérêt privé de S. S.A. à se voir attribuer le marché.

7. Le 21 juillet 2004, B. S.A. déclarait s’en rapporter à justice concernant la demande de restitution de l’effet suspensif.

1. La décision d'adjudication présentement attaquée est soumise à l'accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994, entré en vigueur pour Genève le 9 décembre 1997 (AIMP - L 6 05) et au règlement sur la passation des marchés publics en matière de constructions du 19 novembre 1997 (le règlement - L 6 05.01).

2. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours semble - prima facie - recevable de ce point de vue (art. 15 AIMP, art. 3 al. 1 et 2 let. a de la loi autorisant le Conseil d'État à adhérer à l'accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 LAIMP - L 6.05.0).

3. Le recours n'a pas d'effet suspensif ex lege (art. 17 al. 1er AIMP).

Toutefois, l'autorité de recours peut, d'office ou sur demande, accorder l'effet suspensif à un recours, pour autant que celui-ci paraisse suffisamment fondé et qu'aucun intérêt public ou privé prépondérant ne s'y oppose (art. 17 al. 2 AIMP), cette formulation s'inspirant de celle de l'article 66 alinéa 2 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10; décision A/503/2004 du 2 juin 2004 et les références citées).

Contrairement à un principe généralement bien établi en droit public, le législateur a refusé d'accorder l'effet suspensif automatique au recours, afin de dissuader le soumissionnaire évincé d'utiliser le recours comme moyen de pression. Dès lors que le législateur a érigé cette exclusion en principe, les exceptions à celui-ci doivent s'interpréter restrictivement (décision B.G. du 19 janvier 2004 et les références citées).

Si l'effet suspensif n'est pas restitué, le contrat peut être conclu dès l'expiration du délai de recours (art. 14 AIMP).

Dans cette hypothèse, l'autorité ne peut examiner le caractère licite ou non de la décision (art. 18 al. 2 AIMP).

4. Selon la jurisprudence, il y a lieu d'effectuer une pesée entre les intérêts publics et privés en jeu. Doivent être en outre prises en considération les chances de succès du recours. Cet examen a pour but de refuser l'effet suspensif aux recours manifestement dépourvus de chances de succès (F. GYGI, L'effet suspensif et les mesures provisionnelles en procédure administrative in RDAF 1976 p. 224; RDAF 1998 I p. 41; décision du Président du Tribunal administratif B.G. du 19 janvier 2004 et les références citées.).

5. Il s'agit donc de déterminer si un intérêt public ou privé prépondérant s'oppose à la restitution de l'effet suspensif.

a. L'intérêt public à la réalisation des travaux du cycle d’orientation de Cayla est certain.

L'intérêt public au respect des principes d'une libre et saine concurrence doit être préservé.

Les dispositions édictées par le GATT et l'AIMP notamment poursuivent ce but.

Ces deux intérêts publics légitimes peuvent entrer en conflit comme en l'espèce, sans que l'un puisse être qualifié de prépondérant (décision A/503/2004 précitée et les références citées).

b. L'intérêt privé de l'adjudicataire au maintien de la décision attaquée est également certain;.

A celui-ci s'oppose l'intérêt privé de la société recourante.

c. L'éventuelle admission du recours n'aurait pas nécessairement pour effet d'attribuer le marché à la recourante, l'autorité saisie ne pouvant statuer en opportunité (art. 16 al. 1 et 2 AIMP).

6. En l'espèce, la société recourante a été placée en deuxième position sur quatre concurrents par le pouvoir adjudicateur.

7. Il reste à examiner si le recours paraît "suffisamment fondé" (art. 17 al. 2 AIMP).

La société recourante soutient être la moins-disante. L’essentiel de son argumentation a trait à la discussion de l’appréciation du critère du prix et du facteur de pondération accordé à chacun des critères d’évaluation.

Compte tenu du classement final de la société recourante et des arguments invoqués, le recours ne paraît pas - prima facie - suffisamment fondé pour obtenir de la juridiction de céans la restitution de l'effet suspensif.

8. La recourante a demandé à compéter son recours après étude du dossier du département. Un deuxième échange d’écritures sera donc ordonné après la réponse du département sur le fond.

9. Le sort des frais de justice sera réservé jusqu'à droit jugé au fond.

 

Par ces motifs

LA VICE-PRESIDENTE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

rejette la demande d’effet suspensif;

réserve le sort des émoluments et indemnité éventuelle jusqu’à droit jugé au fond ;

communique la présente décision, en copie, à Me Eric Stampfli, avocat de la recourante, au département de l’aménagement, de l’équipement et du logement, ainsi qu'à B. S.A.

 

 

La Vice-Présidente du Tribunal Administratif :

 

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cette décision a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :