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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2397/2008

ATA/547/2008 du 28.10.2008 ( LCR ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2397/2008-LCR ATA/547/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 28 octobre 2008

1ère section

dans la cause

 

 

Monsieur Z______
représenté par Me Mauro Poggia, avocat

 

contre

 

SERVICE DES AUTOMOBILES ET DE LA NAVIGATION



EN FAIT

1. Monsieur Z______, né en 1951, ressortissant marocain disposant d'un titre de séjour en France, est titulaire d’un permis de conduire depuis 1991.

2. Le 17 novembre 2006, il a été interpellé par la police alors qu’il circulait au volant d’un véhicule automobile.

Selon le rapport de police, il n’avait pas respecté la signalisation lumineuse, à la phase rouge, au carrefour des rues Général-Dufour et Conseil général. Il avait les yeux injectés, titubait et son haleine sentait l’alcool. Il avait refusé le test de l’éthylomètre ainsi que la prise de sang.

Une interdiction de circuler sur le territoire suisse lui a été notifiée le même jour.

3. Invité à se déterminer par le service des automobiles et de la navigation (ci-après : le SAN), M. Z______ a exposé, le 29 novembre 2006, que le soir en question il avait consommé deux bières, soit une avant le repas et l’autre pendant ce dernier. En repartant, il avait constaté qu’un pneu de son véhicule avait crevé et il avait cherché à se garer. C’est à ce moment que deux policiers étaient intervenus et l’avaient emmené au poste de police. Ils l’avaient fait souffler à six reprises dans l’éthylomètre ; le résultat avait été négatif. M. Z______ avait refusé la prise de sang car les conditions d’exécution, le local et le ton employé par les personnes présentes l’avaient paralysé.

4. Le 7 décembre 2006, le SAN a informé M. Z______ que l'interdiction provisoire de circuler en Suisse était levée dès le 12 décembre 2006. Le dossier était mis en suspens dans l’attente du jugement pénal.

5. Par jugement du 17 septembre 2007, le Tribunal de police a reconnu M. Z______ coupable de violation simple des règles de la circulation routière, ainsi que d’opposition ou de dérobade aux mesures visant à déterminer la capacité de conduire. Il était condamné à une peine pécuniaire de 40 jours-amende. Les agents de police, entendus par le tribunal, avaient confirmé que la nécessité d’une prise de sang avait été signalée à M. Z______, du fait qu’il n’avait pas été possible de déterminer son alcoolémie au moyen de l’éthylomètre.

6. M. Z______ ayant fait appel contre ce jugement, la chambre pénale de la Cour de justice l’a rejeté le 3 mars 2008 et il est donc devenu définitif et exécutoire. L’intéressé n’avait pas été condamné pour conduite en état d’ivresse, mais pour opposition ou dérobade à une mesure tendant à établir l’incapacité de conduire.

7. Le 30 mai 2008, le SAN a fait interdiction à M. Z______ de conduire sur le territoire de la Confédération helvétique pour une durée de trois mois, sous déduction de la durée subie, soit du 17 novembre au 12 décembre 2006. Il lui était reproché de ne pas avoir observé une signalisation lumineuse, ainsi que de s’être dérobé à une prise de sang. La mesure prise ne s’écartait pas du minimum légal.

8. Le 2 juillet 2008, M. Z______ a recouru auprès du Tribunal administratif. Le juge administratif n’était pas lié par le jugement du juge pénal ; son attention de n’avait pas été attirée sur son obligation de se soumettre à une prise de sang. De plus, dès lors que le résultat de l’éthylomètre avait établi qu’il n’avait pas consommé d’alcool, il ne comprenait pas l’acharnement des gendarmes à vouloir procéder à une prise de sang. Il conclut à ce que l’interdiction prononcée soit limitée à une durée d’un mois, en se fondant sur l’article 16b de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01), soit pour n’avoir pas respecté un feu rouge.

Le même jour, M. Z______ a indiqué au SAN qu’il entendait, à toutes fins utiles, exécuter la mesure prononcée à son encontre à partir du 2 août 2008, demandant à ce que la prise d’effet de l’interdiction soit reportée à cette date.

Le 3 juillet 2008, le SAN a répondu que le recours au Tribunal administratif entraînait un effet suspensif automatique et que, dès lors, M. Z______ n’avait pas à « déposer son permis de conduire ».

Le 4 septembre 2008, M. Z______ a interpellé le Tribunal administratif. Il avait dû « se soumettre à l’interdiction » dès le 2 août 2008, malgré le recours déposé, et il demandait la restitution de l’effet suspensif. Par décision du 8 septembre 2008, le vice-président du Tribunal administratif a restitué l’effet suspensif.

Le 17 septembre 2008, le SAN a précisé que l’exécution de la mesure d’interdiction prononcée à l’égard de M. Z______ avait été suspendue dès réception du recours.

Le 2 octobre 2008, M. Z______ a écrit au greffe du Tribunal administratif pour relever qu’il apprenait avec étonnement que l’effet suspensif avait été appliqué. Vu qu’il l’ignorait, il s’était soumis à la décision du SAN. Cela était démontré par sa demande de restitution de l’effet suspensif.

9. Le 6 octobre 2008, les parties ont été entendues en audience de comparution personnelle et ont campé sur leur position. Le recourant a déclaré qu’il n’avait pas réagi à réception du courrier du SAN du 3 juillet 2008, car celui-ci ne répondait pas à l’information communiquée le 2 du même mois. De plus, il ne se serait pas opposé à une prise de sang si on lui avait signalé les conséquences d’un tel refus. Il n’était pas en état d’ivresse lorsqu’il avait conduit.

Il était chauffeur et cuisinier pour un couple de personnes âgées et devait, dès lors, pouvoir conduire pour exercer sa profession.

Le SAN a maintenu sa position.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon la jurisprudence, le juge administratif ne peut s’écarter du jugement pénal que s’il est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de faits inconnus du juge pénal ou qu’il n’a pas pris en considération, s’il existe des preuves nouvelles dont l’appréciation conduit à un autre résultat, si l’appréciation à laquelle s’est livré le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés, ou si le juge pénal n’a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation (ATF 119 1b 163 et ss consid. 3).

3. Le conducteur qui s’oppose ou se dérobe intentionnellement à un prélèvement de sang, à un alcootest qui a été ordonné ou dont il fallait supposer qu’il le serait ou encore qui fait en sorte que des mesures de ce genre ne puissent atteindre leur but, à savoir déterminer la capacité de conduire au sens de l’article 91a alinéa 1 LCR, commet une infraction grave, sanctionnée par le retrait obligatoire du permis de conduire (art. 16c al. 1 let. d LCR ; ATA/64/2004 du 20 janvier 2004).

En l'espèce, il ressort du dossier que le Parquet du Procureur général, puis le Tribunal de police et la Cour de justice ont admis que le recourant s'était bel et bien opposé à une prise de sang. Il n'existe pas d'éléments de faits qui n'auraient pas été pris en compte par les juges pénaux successifs, ni de nouveaux éléments pouvant conduire le Tribunal administratif à apprécier différemment la situation. Dans ces circonstances, le tribunal de céans admettra que l'intéressé s'est dérobé à une prise de sang, au sens de l'article 91 alinéa 3 LCR.

4. La dérobade entraîne le retrait obligatoire du permis de conduire ; aussi, l'intéressé n’étant pas titulaire d'un permis de conduire suisse, l’interdiction de circuler sur le territoire de la confédération helvétique d'une durée minimale de trois mois sera confirmée et le recours rejeté. L'autorité ne s'est en effet pas écartée du minimum ci-dessus rappelé.

5. Il n'est pas contesté que M. Z______ a partiellement exécuté la mesure, entre le 17 novembre et le 12 décembre 2006.

En revanche, tel n’a pas été le cas entre le 2 août et le 8 septembre 2008. M. Z______ a certes informé l'autorité, par la plume de son avocat, le 2 juillet 2008, de son intention de ne pas circuler sur le territoire de la Confédération dès le 2 août 2008. Toutefois, le SAN lui a précisé, le 3 juillet 2008, que le dépôt d'un recours aurait automatiquement effet suspensif, ce que le recourant, assisté d’un avocat, aurait dû savoir.

Dans ces circonstances, c'est par inadvertance que le vice-président du Tribunal administratif a restitué l'effet suspensif au recours par ordonnance du 8 septembre 2008, induit en erreur par le fait que la demande de restitution de l'effet suspensif contenait en annexe le courrier adressé par le recourant au SAN le 2 juillet 2008, mais pas la réponse du lendemain de cette autorité.

6. Vu ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de procédure de CHF 400.- sera mis à la charge du recourant, qui succombe (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 juillet 2008 par Monsieur Z______ contre la décision du service des automobiles et de la navigation du 30 mai 2008 lui interdisant de faire usage de son permis de conduire étranger en Suisse pour une durée de trois mois, sans déduction de la durée subie du 17 novembre 2006 au 12 décembre 2006 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 400.- ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt  et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Mauro Poggia, avocat du recourant ainsi qu'au service des automobiles et de la navigation et à l’office fédéral des routes à Berne.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy et Hurni, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

M. Tonossi

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :