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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/953/2006

ATA/532/2006 du 03.10.2006 ( LCR ) , ADMIS

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/953/2006-LCR ATA/532/2006

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 3 octobre 2006

1ère section

dans la cause

 

 

 

M. L______

 

 

 

contre

 

 

 

 

 

SERVICE DES AUTOMOBILES ET DE LA NAVIGATION


 


1. M. L______, né le ______ 1965, est domicilié à Thônex.

Par décision du 7 juillet 2004, le service des automobiles et de la navigation (ci-après : SAN) a signifié à M. L______ un retrait de permis d’une durée de trois mois pour toutes les catégories et sous-catégories de véhicules, l’intéressé étant cependant autorisé à conduire des véhicules des catégories spéciales et en particulier de la catégorie D1 pour laquelle le retrait de permis était limité à un mois. Par courrier du 13 septembre 2004, le SAN a ainsi confirmé à M. L______ qu’il pouvait circuler dès le 20 septembre 2004 avec les véhicules de la catégorie D1, la durée du retrait pour les autres catégories de véhicules s’étendant jusqu’au 19 novembre 2004 inclus.

2. Selon un rapport de renseignements établi le 19 novembre 2004 par deux appointés de gendarmerie, M. L______ circulait le 18 novembre 2004 à 16h40 sur la rue de Berne en direction de la rue du Prieuré au volant d’une Peugeot 306 rouge immatriculée plaques GE ______ dont il est détenteur. Les agents ont relevé que la vitesse dans le quartier des Pâquis était limitée à 30 km/h. Ils se trouvaient eux-mêmes dans une voiture de police non banalisée et descendaient la rue de Zurich. Arrivés à l’intersection avec la rue de Berne, ils avaient vu passer devant eux, roulant à vive allure, la Peugeot en question. Son conducteur avait tourné la tête dans leur direction, l’air étonné, avant de partir par la rue de Berne puis vers le quai Wilson. Ils avaient perdu de vue cet automobiliste sur le quai. Le soir même, ils avaient pris contact avec le détenteur du véhicule et le lendemain, l’un des appointés l’avait auditionné en constatant qu’il était bien la veille le conducteur du véhicule incriminé. M. L______ a cependant contesté formellement s’être trouvé au volant de sa voiture la veille puisqu’il l’avait prêtée à son ami, M. S______. Entendu le même jour par le même agent, M. S______ a confirmé que M. L______ lui avait prêté sa voiture, soit une Peugeot 306 rouge immatriculée plaques GE ______, car sa propre voiture était défectueuse, et qu’il l’avait conduite le 18 novembre 2004.

3. Le 24 janvier 2006, le SAN s’est adressé au Parquet de M. le Procureur général pour savoir quelle suite avait été donnée au rapport de gendarmerie précité. Le 2 février 2006, le Ministère public a informé le SAN que la procédure avait été classée en opportunité et sauf récidive.

4. Le 8 février 2006, le SAN a informé M. L______ de ces faits en lui octroyant un délai pour venir consulter le dossier et rédiger des observations avant le prononcé d’une mesure administrative.

5. Par décision du 6 mars 2006, le SAN a retiré le permis de conduire de l’intéressé pour une durée de trois mois, en retenant que le 18 novembre 2004 à 16h40, il avait circulé sur la rue de Berne au volant de sa voiture alors même que l’exécution du retrait de permis d’une durée de trois mois prenait fin le 19 novembre 2004.

6. Par acte posté le 15 mars 2006, M. L______ a saisi le Tribunal administratif d’un recours contre cette décision en répétant qu’il n’était pas au volant le jour en question.

7. Les parties ont été convoquées en audience de comparution personnelle le 24 mai 2006. A cette occasion, le recourant a expliqué qu’il était entrain de déménager car il allait s’installer définitivement en Jordanie. Il s’absentait du 8 au 29 juin 2006 et reviendrait à Genève prendre ses enfants avant de repartir aux alentours du 7 juillet 2006.

Le SAN a requis l’audition des deux agents et de M. S______ en vue d’une confrontation.

8. Cette confrontation a été fixée au 30 juin 2006. Seul l’un des deux appointés était présent. L’autre appointé a fait savoir la veille qu’il ne pourrait assister à l’audience mais son excuse n’a pas été considérée comme étant valable. Son absence a été sanctionnée par le prononcé d’une amende. Confronté à MM. S______ et L______, le gendarme présent a certifié que M. S______ n’était pas au volant le 18 novembre 2004. Ce jour-là, lui-même conduisait le véhicule de police à bord duquel son collègue avait pris place. M. S______ a répété qu’il était alors en plein déménagement et qu’il avait dû se rendre à la police le 19 novembre 2004. Il avait reconnu que, la veille, il avait conduit la Peugeot de son ami L______. Quant à l’agent, il a indiqué que le 18 novembre, il n’y avait qu’une personne à l’intérieur du véhicule. Le recourant a précisé qu’il quitterait définitivement la Suisse pour s’installer en Jordanie au début du mois d’août 2006.

Sur quoi la cause a été gardée à juger.

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Il est établi et non contesté que M. L______, le 18 novembre 2004, n’avait pas le droit de conduire un véhicule de la catégorie B puisqu’il était sous le coup d’un retrait de permis.

Il convient de déterminer, au vu des faits ci-dessus, si le recourant était ou non au volant de la Peugeot dont il est détenteur le 18 novembre 2004 ou si ce véhicule était alors conduit par son ami, M. S______, auquel il l’avait prêté. Seuls les faits établis par le tribunal de céans peuvent être pris en considération, le Ministère public ayant classé en opportunité la procédure pénale dont il était saisi.

Le seul agent auquel le recourant et M. S______ ont été confrontés s’est montré formel en indiquant que le recourant s’était trouvé la veille au volant de la Peugeot lui appartenant. Certes le tribunal de céans accorde généralement une pleine valeur probante aux constatations figurant dans un rapport de police, établi par des agents assermentés (ATA/475/2006 du 28 juin 2005), sauf si des éléments permettent de s’en écarter. En l’espèce, il apparaît pour le moins curieux que le conducteur de la voiture de police puisse se montrer aussi catégorique pour identifier le conducteur d’une voiture roulant à vive allure ; le passager de ladite voiture de police, soit l’autre appointé de gendarmerie, aurait ainsi été mieux à même de procéder à une observation du recourant.

Par ailleurs, sauf à démontrer que M. S______ aurait fait une fausse déclaration, il a reconnu avoir été au volant le jour en question. Enfin, il est douteux que M. L______, titulaire d’un permis pour la catégorie professionnelle, ait pris le risque inconsidéré, à un jour de la fin de l’interdiction qui le frappait, de se voir sanctionner beaucoup plus sévèrement s’il était surpris à conduire sous le coup d’un retrait de permis un véhicule de la catégorie B.

Face aux éléments précités, il convient de s’écarter du rapport de police car il n’est pas établi que M. L______ se soit trouvé le 18 novembre 2004 au volant de sa voiture Peugeot.

La confrontation avec le second agent aurait permis de lever le doute qui subsiste quant à l’identification du recourant mais elle n’est plus possible, M. L______ étant parti définitivement en Jordanie.

3. Le recours sera admis et la décision attaquée annulée. Il ne sera pas mis d’émolument à la charge du SAN.

 

 

* * * * *

 

 

 

 

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 mars 2006 par M. L______ contre la décision du service des automobiles et de la navigation du 6 mars 2006 lui retirant son permis de conduire pour une durée de trois mois ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision prise par le service des automobiles et de la navigation le 6 mars 2006 ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

dit que, conformément aux articles 97 et suivants de la loi fédérale d'organisation judiciaire, le présent arrêt peut être porté, par voie de recours de droit administratif, dans les trente jours dès sa notification, par-devant le Tribunal fédéral ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé en trois exemplaires au moins au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14 ; le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyen de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à M. L______, au service des automobiles et de la navigation ainsi qu’à l'office fédéral des routes à Berne.

Siégeants : M. Paychère, président, Mmes Hurni et Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le président :

 

 

F. Paychère

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :