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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2234/2008

ATA/496/2008 du 23.09.2008 ( CM ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2234/2008-CM ATA/496/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 23 septembre 2008

 

dans la cause

 

C______S.A.

 

 

contre

 

 

 

COMMUNE DE TROINEX

 

 

 

et

 

 

 

M______, appelée en cause


 


EN FAIT

1. Le 27 août 2007, la commune de Troinex (ci-après  : la commune) a fait paraître dans la FAO un appel d'offres portant sur un marché de construction relatif à l'édification d'une salle communale et d'une salle de sports. Différents lots devaient être adjugés dont celui, référencié CFC 241 à 243, relatif aux installations de chauffage. Il était spécifié que la procédure était effectuée en application du règlement cantonal sur la passation des marchés publics de constructions (L 6 05.01), subsidiairement soumise à l'accord OMC sur les marchés publics et à l'accord intercantonal sur les marchés publics.

Selon le dossier d'appel d'offres, les soumissionnaires devaient notamment fournir une liste de références concernant l'exécution de marchés similaires.

2. Par décision du 11 juin 2008, le maire de la commune a informé C______ S.A. (ci-après  : C) que le marché relatif aux installations de chauffage avait été adjugé à M______(ci-après : M______), dont l'offre avait été jugée économiquement la plus avantageuse.

3. Par acte posté le 20 juin 2008, C______ a saisi le Tribunal administratif d'un recours contre cette décision, en invoquant d'une part, le fait que son offre était moins élevée que celle de M______ et que d'autre part, "la classification selon l'expérience et les références exécutées n'est (était) pas justifiée". C______ étant numéro 1 en Europe en vente et installation de systèmes d'énergie, elle était amplement qualifiée pour effectuer ces travaux.

Le recours ne comportait aucune conclusion.

4. Le juge délégué a appelé en cause M______, par pli recommandé du 25 juin 2008, en lui impartissant un délai au 15 juillet 2008 pour se déterminer sur le recours. La commune a été invitée à se prononcer dans le même délai.

5. Le 14 juillet 2008, M______ a relevé que l'autorité adjudicatrice avait reconnu la valeur de l'offre de C______, celle-ci ayant obtenu la note maximale pour le critère du prix. En revanche, M______, qui avait fourni une liste complète de références, comportant en particulier deux sites disposant de chaudières à bois, avait été mieux notée que sa concurrente pour ce critère, ce qui expliquait que son offre ait été considérée comme la plus avantageuse économiquement.

Par ailleurs, elle avait déjà collaboré à maintes reprises avec cette commune avec laquelle elle avait développé des relations de confiance.

Le contrat n'avait toutefois pas encore été conclu, dans l'attente de l'issue du recours.

6. Le 16 juillet 2008, la commune a conclu au rejet du recours ; le groupe d'experts avait considéré que l'offre de M______ était la meilleure, en raison essentiellement des références fournies pour l'installation de chaudières à bois et de conduites à distances, ce que C______ n'avait pas démontré. Le 14 août 2008 à la requête du juge délégué, la commune a complété ses explications et produit des pièces complémentaires, dont la grille d'évaluation. Il en résultait que C______ et M______ avaient obtenu respectivement les notes suivantes  :

 

 

C______ S.A.

M______ S.A.

PONDERATION

Montant et crédibilité du prix

4.00

3.79

50 %

Crédibilité des prix unitaires

4.00

4.00

 

Montant total de l’offre

4.00

3.58

 

Organisation de l’entreprise et méthode de travail pour respecter impérativement les délais

 

3.50

 

3.50

 

15 %

Structure de l’entreprise et qualifications

4.00

4.00

 

Méthode de travail proposée

3.00

3.00

 

Capacité et disponibilité du personnel, du matériel et des équipements

 

4.00

 

4.00

 

15 %

Effectifs

4.00

4.00

 

 

 

 

 

Expérience dans les domaines des objets à réaliser

3.00

4.00

20 %

Expérience / Références

3.00

4.00

 

 

 

 

 

Total (recte : moyenne)des points après pondération

 

3,75 (recte :3.73)

 

3,84 (recte : 3.82)

 

 

 

 

 

 

Elle a en outre produit la liste des références fournies par ces deux sociétés.

Celle de M______ était plus précise et détaillée ; elle comportait deux installations de chaudières à bois, ce qui n'était pas le cas de celle de C______. Cette dernière se bornait à donner un descriptif général de son organisation.

7. Ces explications complémentaires ont été transmises le 19 août 2008 pour information aux deux autres parties.

EN DROIT

1. a. L'accord intercantonal sur les marchés publics du 25 novembre 1994 (AIMP - L 6 05) entré en vigueur pour Genève le 9 décembre 1997 s'applique notamment à la passation des marchés publics en matière de constructions dont la valeur-seuil totale estimée s'élève à CHF 9'575'000.- hors taxes pour les ouvrages (art. 7 AIMP ; annexe 1), la commune étant un pouvoir adjudicateur (art. 8 al. l litt b AIMP).

En l'espèce, la seule valeur des trois lots concernant le chauffage s'élève à plus d'un million de sorte que le prix de l'ensemble de l'ouvrage est certainement plus élevé que la valeur-seuil précitée, mais cette question peut demeurer ouverte en l'espèce.

b. Les modifications du 30 novembre 2006 apportées à la loi autorisant le Conseil d'Etat à adhérer à l'accord intercantonal sur les marchés publics du 12 juin 1997 (LAIMP - L 6.05.0), portant sur l'adhésion à l'AIMP, dans sa version du 15 mars 2001, ne sont entrées en vigueur que le 1er janvier 2008, de même que le règlement sur la passation des marchés publics du 17 décembre 2007 (L 6 05.01) abrogeant l'ancien règlement. Ces nouvelles dispositions ne s'appliquent pas aux procédures en cours au moment de leur entrée en vigueur. Les procédures sont dites "en cours" dès la publication de l'avis d'appel d'offres (art. 62 du règlement).

Or, cette disposition réglementaire est en contradiction avec l’article 22 alinéa 2 AIMP/2001 qui prévoit que "le présent accord s’applique à la passation de marchés qui sont mis en soumission ou adjugés après son entrée en vigueur".

En l’espèce, la publication de l'appel d'offres dans la FAO remonte au 27 août 2007 mais l’adjudication date de juin 2008. La présente cause diffère ainsi de celle jugée le 4 mars 2008 (ATA 95/2008) dans le cadre de laquelle l’ancien droit était applicable. Il sera ainsi fait application du nouveau droit, l’AIMP/2001 primant le texte réglementaire.

c. Le recours contre les décisions d'adjudication doit être interjeté auprès du Tribunal administratif dans un délai de 10 jours dès la notification de celle-ci (art. 15 al. 2 AIMP ; art. 56 al. 1 du règlement ; art. 63 al. l litt b LPA) auprès du Tribunal administratif (art. 56B al. 4 litt c LOJ ; art. 3 LAIMP et 15 AIMP).

d. Le recours est ainsi recevable de ce point de vue.

2. Le recours doit cependant respecter également les conditions posées par l'article 65 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

En l'espèce, l'on comprend du recours fort succinct que C______ se plaint de la décision d'adjudication à M______ et conteste la manière dont les références produites ont été appréciées, même si elle ne prend aucune conclusion formelle. La recevabilité du recours sera donc admise.

3. La grille d'évaluation et les critères de pondération ne prêtent pas le flanc à la critique. L’examen des références produites par la recourante et l'appelée en cause font apparaître que C______ s'est bornée à fournir un descriptif très général de son organisation ainsi qu'une liste d'ouvrages réalisés parmi lesquels ne figure aucune installation de chauffage à bois.

Les références données par M______ sont, de ce point de vue, plus complètes et comportent deux installations de chaudières à bois, ce qui a manifestement incité le groupe d'experts à attribuer à M______ la note de 4 pour ce poste alors que C______ n'obtenait que 3.

En revanche, C______ ayant présenté une offre meilleure marché s'était vu créditer d'un 4, soit le nombre de points maximum pour le poste "montant et crédibilité du prix", M______ ne recevant que 3,79. Le résultat final de M______ après rectification des erreurs de calculs dans la moyenne pondérée étant ainsi de 3,82, son offre était économiquement la plus avantageuse, la seconde étant celle de C______ avec 3,73.

En conséquence, il était conforme à la loi que le marché lui soit adjugé (art. 43 al. 3 du règlement).

4. Le recours sera rejeté.

Un émolument de CHF 1'500.- sera mis à la charge de la recourante. Il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure aux autres parties, faute de conclusion en ce sens (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 20 juin 2008 par C______ S.A. contre la décision d’adjudication de la Commune de Troinex du 11 juin 2008 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 1’500.- ;

dit qu’il ne sera pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF-RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public :

si la valeur estimée du mandat à attribuer n’est pas inférieure aux seuils déterminants de la loi fédérale du 16 décembre 1994 sur les marchés publics ou de l’accord du 21 juin 1999 entre la Confédération suisse et la Communauté européenne sur certains aspects relatifs aux marchés publics ;

s’il soulève une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les articles 113 et suivants LTF ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi 

communique le présent arrêt à C______ S.A, à la Commune de Troinex ainsi qu’à M______, appelée en cause.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Thélin, Mme Hurni, M. Dumartheray, juges et M. Torello, juge suppléant.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :