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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1175/2008

ATA/489/2008 du 23.09.2008 ( DES ) , REJETE

En fait
En droit

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1175/2008-DES ATA/489/2008

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 23 septembre 2008

 

dans la cause

 

Madame Y______
représentée par Me Ghislaine de Marsano-Ernoult, avocate

contre

Docteur D______

et

LE PRÉSIDENT DE LA COMMISSION DU SECRET PROFESSIONNEL


 


EN FAIT

1. Le 17 mars 2008, le Docteur D______, médecin chef de clinique du département de psychiatrie des hôpitaux universitaires de Genève s’est adressé à la commission du secret professionnel (ci-après : la commission). Il demandait la levée du secret médical afin de saisir le Tribunal tutélaire pour une mesure tutélaire urgente concernant l’une de ses patientes, Madame Y______, née le 27 décembre 1952, hospitalisée depuis le 12 mars 2008. Le Dr D______ faisait une description succincte du cas de sa patiente.

Il joignait à ce courrier copie d’une lettre qu’il souhaitait envoyer au Tribunal tutélaire portant la date du 18 mars 2008, exposant la situation de Mme Y______ et les conclusions qu’il en tirait, à savoir une demande de tutelle en urgence, avec la précision que la patiente ne pouvait être entendue valablement par le tribunal.

2. Il résulte d’une note du dossier établie par le Docteur Gérard Niveau, président suppléant de la commission (ci-après : le président), que celui-ci a eu un entretien téléphonique le 20 mars 2008 avec le Dr D______.

Ce dernier souhaitait signaler le cas de façon très rapide au Tribunal tutélaire afin que soient mises en place des mesures de sauvegarde et de protection de la patiente. Cette démarche était très urgente car l’état de la patiente pouvait fluctuer rapidement et les troubles du comportement qui en découlaient étaient de nature à constituer un risque pour la patiente elle-même ainsi que pour son entourage.

Du fait de l’impossibilité de traiter cette demande lors de la séance de la commission du 20 mars 2008, - étant donné que l’un des membres devait se récuser -, et du report de la séance suivante au 3 avril 2008 en raison des vacances de Pâques, le président avait décidé de prononcer la levée du secret professionnel selon la procédure d’extrême urgence afin de permettre au Dr D______ d’effectuer le signalement au Tribunal tutélaire.

3. Par décision du 20 mars 2008 (058/08), le président a informé le Dr D______ qu’il avait décidé de lever son secret professionnel et de l’autoriser à transmettre au Tribunal tutélaire le rapport concernant Mme Y______ annexé à sa demande. En cas de demande d’autres renseignements ou de convocation par le Tribunal tutélaire, une nouvelle demande de levée du secret professionnel devra être adressée à la commission. Cette décision était prise en application de l’article 12 alinéa 4 de la loi sur la santé du 1er septembre 2006 (LS - K 1 03), et déclarée exécutoire nonobstant recours.

La voie et le délai de recours au Tribunal administratif y figuraient.

4. Par courrier du 25 mars 2008, le président a informé la présidente du Tribunal tutélaire qu’il avait pris la décision, le 20 mars 2008, de lever le secret professionnel du Dr D______ concernant Mme Y______ selon la procédure d’extrême urgence.

Ce courrier indiquait comme référence la décision 058/08.

Figuraient la voie et le délai de recours au Tribunal administratif.

5. Ce même 25 mars 2008, le Dr D______ a déposé au Tribunal tutélaire son courrier daté du 18 mars 2008.

6. Le 31 mars 2008, un avocat s’est constitué pour Mme Y______. S’adressant au président de la 2ème chambre du Tribunal tutélaire, l’avocat exposait que Mme Y______ avait été informée que le Dr D______ lui aurait adressé une demande de mise sous tutelle le 18 mars 2008.

7. Le 2 avril 2008, le Tribunal tutélaire a remis dans la case de l’avocat constitué copie des correspondances échangées avec le Dr D______.

8. Le 3 avril 2008, la commission a approuvé la décision du 20 mars 2008, sans commentaires.

9. Par acte du 7 avril 2008, Mme Y______ a saisi le Tribunal administratif, d’un recours dirigé contre la décision de levée du secret professionnel du Dr D______.

Elle avait été informée de l’existence de cette décision par un courrier déposé le 2 avril 2008 dans la case au Palais de justice de son avocat par le Tribunal tutélaire dans le cadre d’une éventuelle procédure tutélaire.

Elle sollicitait un délai pour compléter ses écritures lorsqu’elle aurait pu prendre connaissance du dossier de la commission et du dossier médical.

En annexe, figuraient la lettre du 2 avril 2008 du Tribunal tutélaire, copie de la lettre du 17 mars 2008 du Dr D______ ainsi que copie de la lettre du 25 mars 2008 de la commission au Tribunal tutélaire.

10. Le Dr D______ s’est déterminé le 22 avril 2008.

Mme Y______ présentait une maladie mentale grave pour laquelle elle n’avait aucun traitement et aucun suivi. Par son comportement, elle se mettait, ainsi que les autres, en danger, en raison de son interprétation erronée de la réalité. Mme Y______ n’avait pas la capacité de discernement pour pouvoir le délier du secret professionnel.

11. La commission s’est déterminée le 28 avril 2008, sous la plume de son président. Elle n’avait pas d’observation à présenter et réservait de s’exprimer lorsqu’elle aurait connaissance du complément d’écritures de Mme Y______.

12. Dans le délai imparti par le Tribunal administratif, Mme Y______ a complété son recours.

La décision du 20 mars 2008 avait été prise par le président de la commission alors que la condition requise par l’article 12 alinéa 4 LS, soit l’extrême urgence, n’était pas réalisée. Elle n’était pas suffisamment motivée et donc viciée. Elle a invoqué une violation de son droit d’être entendue, l’article 12 LS ne constituant pas une base légale suffisante pour l’atteinte à la sphère privée que constitue la demande de levée du secret professionnel en cas d’incapacité de discernement.

Dans le cadre de la procédure tutélaire, elle avait assisté à une audience de comparution personnelle le 20 mai 2008. Lors de cette audience, son fils avait relevé qu’il ne lui paraissait pas justifié d’instaurer une mesure de tutelle en faveur de sa mère, déclaration qui allait à l’encontre des propos du Dr D______.

Elle conclut préalablement à être entendue par le Tribunal administratif, à l’audition du Dr D______ et sur le fond, à l’annulation de la décision entreprise du 20 mars 2008.

13. La commission s’est déterminée le 11 juillet 2008.

Concernant la procédure d’extrême urgence à laquelle avait eu recours le Dr D______, la décision du président avait été soumise aux membres de la commission lors de la séance du 3 avril 2008 et avalisée par ceux-ci. Mme Y______ n’avait pas subi de préjudice lié à la procédure d’extrême urgence, puisque la décision prise dans un premier temps par le seul président avait été avalisée par les autres membres.

La condition d’extrême urgence était réalisée en ce sens que la demande du Dr D______, qui ne pouvait pas être traitée le 20 mars en raison de la récusation de l’un des membres de la commission, ne pouvait attendre quatorze jours, soit jusqu’à la séance suivante, et cela en raison de la dégradation rapide de l’état de santé de l’intéressée alléguée par le Dr D______ et du risque que cela représentait tant pour l’intéressée que pour son entourage.

Le grief de la recourante selon lequel la décision était insuffisamment motivée ne résistait pas à l’analyse. Les termes de la rédaction permettaient à la recourante de comprendre les raisons pour lesquelles le président avait pris cette décision.

Enfin, la recourante invoquait une violation de son droit d’être entendue. S’agissant de personnes incapable de discernement, la commission ne pouvait les entendre et la décision ne pouvait leur être valablement notifiée. Lorsque la décision de levée du secret professionnel s’inscrivait dans le cadre d’une procédure tutélaire, la commission avait décidé d’informer la présidente du tribunal en question de sa décision, de manière à ce qu’un futur représentant ou un avocat désigné par le Tribunal tutélaire puisse, le cas échéant, exercer le droit de recours du patient incapable de discernement. En l’espèce, le Dr D______ avait confirmé lors de son entretien téléphonique avec le président que l’incapacité de discernement de Mme Y______, portait, entre autres, sur la levée du secret professionnel. La commission s’était donc conformée à sa pratique.

Elle conclut à la « confirmation de la décision de la commission du 20 mars 2008 levant partiellement le Dr D______ de son secret professionnel ».

14. Le Dr D______ s’est exprimé le 14 juillet 2008.

L’urgence de la demande de levée du secret était liée à celle de la mise sous tutelle. Mme Y______ n’avait pas le discernement pour le délier du secret médical. Le fils de cette dernière avait débuté des démarches dans le but d’obtenir une mise sous tutelle de sa mère et pour des motifs personnels, il n’avait pas persisté dans cette démarche.

Plus le temps passait, plus l’état de santé de Mme Y______ qui ne bénéficiait semblait-il d’aucun traitement, continuerait à s’aggraver, de même que ses troubles du comportement. La médecine serait de plus en plus impuissante face aux troubles sévères qu’elle présentait.

Pour toutes ces raisons, le Dr D______ considérait qu’il était dans l’intérêt de Mme Y______ qu’une mesure d’interdiction soit prise urgemment, raison pour laquelle il avait demandé à être délié du secret professionnel afin de saisir le Tribunal tutélaire.

15. A la demande du Tribunal administratif, le Tribunal tutélaire a transmis son dossier.

Il en résulte les éléments suivants :

Le 20 mai 2008, une audience de comparution personnelle s’est tenue devant le Tribunal tutélaire, Mme Y______ étant assistée de son conseil et accompagnée de son fils.

Celui-ci a déclaré qu’il ne lui paraît pas justifié d’instaurer une mesure de tutelle en faveur de sa mère.

Mme Y______ a déclaré commencer le jour même un cours d’agent d’assurance. Elle n’avait actuellement pas de suivi médical.

Elle a versé aux débats un certificat médical établissant une capacité de travail de 100 % dès le 6 mai 2008.

Le Tribunal tutélaire a laissé la cause en l’état, dans l’attente de la décision du Tribunal administratif concernant la levée du secret médical du Dr D______.

EN DROIT

1. Il convient d’emblée de déterminer la décision dont est recours.

A son acte de recours du 7 avril 2008, la recourante a joint copie du courrier du 25 mars 2008, aux termes duquel le président informait la présidente du Tribunal tutélaire de la levée du secret professionnel du Dr D______ selon la procédure de l’article 12 alinéa 4 LS.

Dans son complément de recours du 29 mai 2008, la recourante conclut à l’annulation de la décision du 20 mars 2008.

Le Tribunal administratif constate qu’il n’y a eu qu’une seule décision, à savoir celle du 20 mars 2008. Mme Y______ étant considérée par le président de la commission comme étant incapable de discernement, cette décision lui a été notifiée par l’intermédiaire du Tribunal tutélaire le 25 mars 2008. Dit courrier vaut donc notification de la décision du 20 mars 2008, mais ne constitue pas une décision au sens de l’article 4 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 (LPA - E 5 10).

La recourante a saisi le Tribunal administratif dès réception du courrier du 2 avril 2008 que lui a adressé le Tribunal tutélaire. A ce moment-là, elle n’avait pas encore connaissance de la décision du 20 mars 2008, dont elle n’a appris l’existence que dans le cadre de la procédure devant le Tribunal administratif.

Dans ces circonstances, il faut admettre qu’en saisissant le Tribunal administratif le 7 avril 2008, Mme Y______ a agi devant l’autorité compétente en temps utile, de sorte que le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 4 LPA ; art. 12 al. 5 LS).

2. La décision du 20 mars 2008 lève le secret professionnel du Dr D______ en l’autorisant à transmettre au Tribunal tutélaire le rapport annexé à sa demande. En d’autres termes, il s’agit d’une levée du secret professionnel partielle limitée à la seule transmission d’un rapport.

Or, le courrier du 25 mars 2008 n’a pas exactement la même teneur que la décision à laquelle il se réfère, si tant est qu’il informe la présidente du Tribunal tutélaire de la levée du secret professionnel du Dr D______ sans autre précision. De plus, il n’apparaît pas que la décision du 20 mars2008, citée en référence, était jointe au courrier du 25 mars 2008.

Ce mode de procédé n’est pas acceptable : en effet, à la lecture du courrier du 25 mars 2008, Mme Y______ ne pouvait savoir que le secret professionnel du Dr D______ était levé dans la seule mesure où il était autorisé à transmettre au Tribunal tutélaire son rapport.

3. Il résulte des précisions qui précèdent que le recours porte sur la levée partielle du secret professionnelle du Dr D______, la recourante faisant dans ce cadre grief au président d’avoir utilisé la procédure dite « d’extrême urgence ».

4. L'article 12 alinéa 4 LS précise : « En cas de requête en levée du secret professionnel présentant un caractère d'extrême urgence, le président peut statuer à titre provisionnel ». Le mémorial du Grand Conseil précise : « Le terme « provisionnel » ne signifie pas provisoire, mais signifie un caractère d'urgence, la décision devant être avalisée par l'ensemble du groupe » (MGC 2005-2006/VI D/28).

5. La première question à résoudre est celle de déterminer si la requête du Dr D______ présentait un caractère d’extrême urgence au sens de la disposition légale précitée.

Une partie de la doctrine analyse la problématique de l’urgence en divisant deux grands groupes, d’une part les situations médicales cliniques ou non-cliniques pour lesquels la réponse au problème juridique qui se pose doit être trouvée le plus rapidement possible et d’autre part, les situations cliniques urgentes pour lesquels la réponse au problème médico-légale posé peut avoir une incidence déterminante sur l’évolution de l’affection du patient.

Entrent dans la première catégorie, par exemple, l’information des représentants légaux d’une mineure hospitalisée en urgence pour une grossesse extra-utérine et dans la seconde, le refus d’hospitalisation de la part d’un patient qui développe un infarctus du myocarde (cf. J.P. RESTELLINI, Aspects médico-légaux de l’urgence, in Médecin Droit médical, D. BERTRAND, T.-W. HARDING, M. MANDOLIA-BERNEY, M. UMMEL, Ed. Médecine et Hygiène 1998, p. 933 ss.).

Pour la recourante, la mesure d’extrême urgence est exclusivement médicale, en ce sens que le recours à cette procédure intervient lorsque les conséquences du retard apporté à la levée du secret professionnel sont vitales. Or, dans sa requête, le Dr D______ n’établissait pas en quoi l’absence de levée immédiate du secret professionnel présenterait un danger imminent vital pour elle-même.

En l’espèce, il apparaît que l’aspect de l’urgence administrative primait, au jour de la demande présentée par le Dr D______, sur celui de l’urgence clinique. Ce médecin estimait nécessaire, voire indispensable, qu’une prise en charge globale de la personne de Mme Y______, intervienne de manière urgente, en raison des troubles du comportement que celle-ci présentait. Le Dr D______ préconisait une mesure tutélaire et non pas une mesure médicale, ce qui tent à établir qu’il n’existait pas d’urgence médicale clinique.

A cet égard, l’on ne saurait reprocher au président d’avoir fait usage d’une procédure que la loi met à sa disposition précisément pour des cas de ce genre. Au surplus, le président a respecté la volonté du législateur en faisant avaliser sa décision par l’ensemble de la commission.

6. La seconde question à trancher est celle de savoir si en tant qu’elle lève partiellement le secret professionnel du Dr D______, la décision respecte le droit au respect de la vie privée de la recourante.

a. Un tel droit est garanti par l’article 13 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101).

La Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101) consacre également ce droit en son article 8. De manière générale, le respect du caractère confidentiel des informations sur la santé constitue un principe essentiel du système juridique de toutes les parties contractantes à la CEDH, au nombre desquelles figure la Suisse. Selon la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, il est capital non seulement pour protéger la vie privée des malades, mais également pour préserver leur confiance dans le corps médical et les services de santé en général. La législation interne doit ménager des garanties appropriées pour empêcher toute communication ou divulgation des données à caractère personnel relatives à la santé qui ne serait pas conforme à l’article 8 CEDH, garantissant le droit au respect de la vie privée et familiale. Ainsi, le devoir de discrétion est unanimement reconnu et farouchement défendu (Arrêt du Tribunal fédéral 4C.111/2006 du 7 novembre 2006, consid. 2.3.1.).

En droit fédéral, le secret médical est garanti par l’article 321 chiffre 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0)

Le droit cantonal genevois, dispose que le secret professionnel a pour but de protéger la sphère privée du patient (art. 87 al. LS). Une personne tenue au secret professionnel peut en être délié par le patient ou, s’il existe de justes motifs, par l’autorité supérieure de levée du secret professionnel (art. 88 al. 1 LS).

Selon la doctrine, la finalité du secret médical n’est pas de protéger la vie privée du patient, mais de sauvegarder la santé de celui-ci. Quant à l’obligation de respecter le secret médical, elle ne protège pas uniquement la santé de l’individu mais elle tient également compte de la santé de la collectivité. Ainsi, ce dernier élément reste un paramètre essentiel et traduit la pesée des intérêts qui intervient entre secret médical et intérêt collectif dans certains domaines où la santé publique peut être mise en danger (cf. J. STROUN, D. BERTRAND, Médecin, Secret médical et Justice in op. cit. p. 115 ss.).

Cela étant, le respect du secret médical trouve ses limites dans les principes généraux du droit administratif, notamment celui de la proportionnalité.

b. En l’espèce, il ressort de la demande du Dr D______ que la recourante présente une maladie mentale grave et que celle-ci a un impact non seulement sur elle-même, - hospitalisée à plusieurs reprises en raison de troubles psychiques dans un établissement approprié - mais également sur des personnes vivant dans son entourage, notamment ses voisins. La recourante soutient le contraire, sans apporter la moindre preuve à ses allégations. Le certificat médical délivré par le Docteur Gabor Szigethi ne fait que constater une capacité de travail à 100 % mais il ne conteste en aucune manière les conclusions cliniques posées par le Dr D______.

Il apparaît que la mesure de levée partielle de secret professionnel du Dr D______ respecte aussi bien le principe même du secret médical tel qu’il a été défini ci-avant, mais également le principe de la proportionnalité. Il n’est pas contesté que la levée partielle du secret professionnel du Dr D______ est strictement limitée à la production au Tribunal tutélaire de son rapport annexé à la demande de levée du secret professionnel présenté à la commission le 17 mars 2008. Pour le surplus, toute autre demande de renseignement ou de convocation par le Tribunal tutélaire doit faire l’objet d’une nouvelle demande de levée du secret professionnel qui devra être adressée et examinée à la commission. Cette limite à la levée du secret professionnel du Dr D______ respecte donc le principe de la proportionnalité. Cette mesure est également conforme au but poursuivi par la LS ainsi qu’à l’institution même du secret médical, qui doit également satisfaire l’intérêt de la collectivité lorsque ses intérêts sont en jeu.

Au vu de ce qui précède, la décision de levée partielle du secret professionnel du Dr D______ ne peut être que confirmée.

7. La recourante estime que la décision n'est pas motivée et que son droit d'être entendue a été violé.

L’obligation de motiver une décision administrative dérive en effet du droit d’être entendu, garanti par l’article 29 alinéa 2 Cst.

Le droit d’être entendu implique notamment l’obligation pour l’autorité de motiver sa décision afin que le justiciable puisse la comprendre, et soit en mesure d’exercer ses droits de recours à bon escient (Arrêts du Tribunal fédéral 4A.225/2007 du 3 octobre 2007 ; 2P.17/2007 du 23 août 2007).

Tant la doctrine que la jurisprudence admettent que la motivation d’une décision administrative ne doit pas nécessairement se trouver dans la décision elle-même ; elle peut par exemple découler d’une correspondance séparée. Il suffit que l’autorité mentionne, au moins brièvement, les motifs qui l’ont guidée et sur lesquels elle a fondé sa décision, de manière à ce que l’intéressé puisse se rendre compte de la portée de celle-ci et l’attaquer en connaissance de cause (Arrêts du Tribunal fédéral 2C_702/2007 du 28 janvier 2008 ; 4A_190/2007 du 10 octobre 2007 ; B. BOVAY, Procédure administrative, 2000 p. 267 et ss ; AUER/MALINVERNI/HOTTELIER, Droit constitutionnel suisse, II, 2000, p. 615).

En l’espèce, la décision du 20 mars précise les motifs pour lesquels le président estime que la transmission de renseignements est nécessaire à la mise en place d’une mesure de protection adaptée et correspond ainsi à un intérêt prépondérant de la recourante. Il y a donc lieu de considérer que la décision attaquée satisfait aux exigences minimales de motivation découlant de l’article 29 alinéa 2 Cst.

8. Quant à la violation du droit d’être entendu de la recourante, elle n’est pas davantage réalisée. En effet, la décision querellée a été prise à titre de mesures provisionnelles. Par la suite, la recourante a pu faire valoir ses griefs dans la procédure de recours devant le tribunal de céans, à l’occasion de laquelle elle a eu accès au dossier de la commission. Ainsi, à supposer qu’elle eût existé, une telle violation a été réparée.

9. La recourante demande enfin à être entendue personnellement et sollicite l’audition du Dr D______.

Le droit d’être entendu stricto sensu n’implique pas une audition personnelle de l’intéressé, celui-ci devant simplement disposer d’une occasion de se déterminer sur des éléments propres à influer sur l’issue de la cause (art. 41 LPA ; Arrêt du Tribunal fédéral 1P.651/2002 du 10 février 2002 consid. 4 point 3 et les arrêts cités).

La recourante s’est exprimée par écrit ; elle a pu compléter son acte de recours, de sorte, le Tribunal administratif renoncera à l’entendre.

Il renoncera également à l’audition du Dr D______, celui-ci s’étant exprimé dans ses courriers des 17 et 18 mars 2008 de manière aussi complète que possible dans les limites du respect de son secret professionnel. Son audition n’apporterait rien de plus.

10. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté et la décision du 20 mars 2008 du président de la commission sera confirmée.

La recourante plaidant au bénéfice de l’assistance juridique, aucun émolument ne sera perçu.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 avril 2008 par Madame Y______ contre la décision du 20 mars 2008 du président de la commission du secret professionnel ;

au fond :

le rejette ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Ghislaine de Marsano-Ernoult, avocate de la recourante, au Docteur D______, au président de la commission du secret professionnel ainsi qu'au Tribunal tutélaire, pour information.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Thélin, Mmes Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges.

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :