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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2673/2011

ATA/47/2012 du 24.01.2012 ( FORMA ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2673/2011-FORMA ATA/47/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 24 janvier 2012

1ère section

dans la cause

 

Madame K______
représentée par ses parents, Madame et Monsieur K______

contre

 

DÉPARTEMENT DE L’INSTRUCTION PUBLIQUE



EN FAIT

Madame K______, née le ______ 1993, a suivi sa scolarité obligatoire secondaire au cycle d’orientation de X______.

A l’issue de sa 9ème année lors de l’année scolaire 2008-2009, elle a été promue par tolérance.

Ne remplissant toutefois pas les critères d’admission à l’école de culture générale (ci-après : l’ECG), elle a suivi en 2009-2010, au sein de l’école Z______, une année de transition préparatoire à l’ECG, au terme de laquelle elle remplissait les conditions lui permettant de poursuivre sa scolarité au sein de cette école.

A la rentrée 2010, Mme K______ a ainsi pu rejoindre l’ECG.

Le 2 novembre 2010, son bulletin scolaire indicatif et intermédiaire présentait une situation d’échec.

Elle totalisait cinq moyennes insuffisantes, une somme des écarts négatifs à la moyenne de 3,7 ; sa moyenne générale s’élevait à 3,5.

Son responsable de groupe relevait par ailleurs ce qui suit :

« K______ est pour l’instant très loin des objectifs et des exigences de l’école ! La réussite de cette année passe obligatoirement par une remise en question de sa manière de travailler en classe et à la maison. Je ne doute pas des capacités de K______ à réussir, mais elle doit absolument s’en donner les moyens grâce à un travail sérieux et régulier ».

A l’issue de la première période, soit en janvier 2011, Mme K______ était toujours non promue.

Elle totalisait six moyennes insuffisantes et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 3,9. Sa moyenne générale s’élevait à 3,7.

En outre, elle présentait vingt absences motivées, quatre arrivées tardives, six devoirs non faits, un oubli et deux renvois.

Sous la rubrique « observations », il était mentionné ce qui suit :

« K______ est pour l’instant très loin de la promotion ! Elle doit changer radicalement de méthode de travail pour se donner les moyens de réussir. Je suis convaincu qu’elle a les capacités d’inverser la tendance. K______ doit aussi réfléchir à son attitude en classe et réaliser que les bavardages nuisent à ses apprentissages ».

Par pli du 21 janvier 2011, la doyenne de l’ECG a informé les parents de Mme K______ de la situation d’échec de cette dernière. Il était indispensable qu’elle fournisse un sérieux effort pour compenser ses notes insuffisantes. Un travail régulier en classe comme à la maison était nécessaire pour assurer la promotion à la fin d’année. Il était rappelé que l’école offrait aux élèves une infrastructure d’aide et de soutien, notamment des dépannages.

Le courrier contenait en outre la « remarque importante » suivante :

« Le redoublement d’une année scolaire n’est pas une mesure automatique à l’Ecole de culture générale. En effet, cette mesure n’est octroyée qu’aux élèves ayant démontré, durant toute l’année, une attitude générale positive prouvant ainsi leur motivation pour une poursuite des études dans notre école.

Sont notamment pris en compte : l’assiduité aux cours (absences non motivées), l’application scolaire (travail et attitude en classe, devoirs) et le comportement ».

A l’issue de l’année scolaire, Mme K______ s’est derechef trouvée en situation de non-promotion.

Elle totalisait six moyennes insuffisantes et une somme des écarts négatifs à la moyenne de 4,9. Sa moyenne générale s’élevait à 3,6.

En outre, elle cumulait désormais trente-cinq absences motivées, sept absences non motivées, huit arrivées tardives, seize devoirs non faits, trois oublis et cinq renvois.

Mme K______ a sollicité l’autorisation de redoubler son année, dans un courrier daté du 19 juin 2011, pour « accomplir toutes les choses qu’[elle n’avait] pas atteinte cette année » (sic). Ayant envie depuis son enfance de passer son certificat fédéral de capacité dans le domaine de la santé, elle promettait « d’avoir un bon comportement et des bulletins corrects ».

Le 21 juin 2011, l’ECG a adressé à Mme K______ son bulletin scolaire constatant son échec et contenant la mention « Non admise à redoubler – Doit quitter ».

Par prononcé du 30 juin 2011, l’ECG a refusé d’autoriser Mme K______ à redoubler sa première année.

Le conseil de classe, puis le conseil de direction, avaient examiné attentivement son dossier scolaire. Il n’était pas possible de donner une réponse favorable à la demande de redoublement. Les résultats de Mme K______ étaient très faibles dans de nombreuses disciplines. Les enseignants avaient souligné son manque de travail et son attitude souvent dérangeante en classe. Elle n’avait pas su s’impliquer cette année et ne semblait pas motivée par ses études à l’ECG.

Les voie et délai de recours auprès de la direction générale de l’enseignement postobligatoire (ci-après : la DGPO) étaient indiqués.

Début juillet 2011, Mme K______ a recouru auprès de la DGPO, sollicitant d’être autorisée à redoubler.

Elle avait eu un début d’année difficile, suite à une opération des ligaments croisés en août 2010. Elle avait énormément souffert et n’avait donc pu se consacrer correctement à ses études ; elle n’avait réussi à rattraper ses retards. Elle avait alors été très démotivée. Elle souhaitait activement refaire sa première année pour pouvoir combler son manque de connaissance et poursuivre ses études. Son comportement et ses bulletins seraient à l’avenir irréprochables.

Dans sa décision du 25 août 2011, la DGPO a rejeté le recours de Mme K______.

Elle n’avait pas suivi les cours de manière régulière, ayant cumulé, sur l’année, quarante-deux heures d’absence, dont sept non motivées. Son attitude en classe n’était également pas adéquate. En plus d’être extrêmement bavarde, ses enseignants avaient relevé chez elle un manque de travail et de concentration. Il était probable que l’opération médicale subie en août 2010 ait pu avoir une influence sur son moral. Par la suite toutefois, aucune amélioration des résultats n’était survenue. Ceux-ci avaient même, pour une grande partie, connu une baisse. Des lacunes et un manque d’intérêt constituaient un obstacle réel pour la suite de sa scolarité. Les résultats obtenus et les commentaires des maîtres démontraient clairement qu’elle n’avait pas atteint les buts assignés à la filière de culture générale. Le pronostic de réussite semblait faible.

Ce prononcé contenait l’indication des voie et délai de recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative).

Par acte du 2 septembre 2011 posté le même jour, Mme K______, représentée par ses parents, a saisi la chambre administrative d’un recours contre cette décision. Elle conclut à ce qu’il lui soit donné « une seconde chance ».

Ses absences étaient motivées par le fait qu’elle avait dû se rendre à de nombreux rendez-vous médicaux, suite à une opération des ligaments croisés du genou ayant connu par la suite des complications. Nonobstant le fait qu’elle avait porté une attelle pendant deux mois puis des béquilles pendant trois mois, elle avait participé à tous ses cours.

Le nombre de ses notes en dessous de la moyenne était passé de huit à la fin de la première période à six en fin d’année. Un effort avait donc été fait, étant rappelé qu’elle avait énormément souffert suite à son opération (douleurs et difficulté dans sa mobilité).

Ses parents n’avaient eu aucune nouvelle avant la fin de l’année. Ils pensaient donc que « tout allait bien ».

Dans ses observations du 12 octobre 2011, la DGPO a conclu au rejet du recours, persistant dans les termes de sa décision.

Mme K______ a répliqué le 21 octobre 2011.

Elle contestait les absences non motivées lui étant reprochées lors du second semestre. Elle avait à chaque fois transmis un certificat médical, parfois en retard, mais l’école avait refusé de les enregistrer. Ses enseignants n’avaient pas respecté leur engagement de prendre contact téléphoniquement avec ses parents en cas de difficultés. Chaque enfant pouvait avoir une année scolaire un peu difficile et se remettre en question pour pouvoir la refaire et avoir un bon niveau par la suite.

Les parties ont été informées que la cause était gardée à juger par avis du 27 octobre 2011.

EN DROIT

1. La recourante est devenue majeure le 7 décembre dernier, soit en cours de procédure. Le présent arrêt lui sera donc directement notifié.

2. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est à cet égard recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 (LOJ - E 2 05) et 30 du règlement de l'enseignement secondaire du 14 octobre 1998 - RES - C 1 10.24 ; 62 al. 1 de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

3. Il convient préalablement d’examiner la recevabilité du recours au regard de l’art. 65 LPA.

Selon l’art. 65 al. 1 LPA, l’acte de recours contient, sous peine d’irrecevabilité, la désignation de la décision attaquée et les conclusions du recourant. En outre, il doit contenir l’exposé des motifs ainsi que l’indication des moyens de preuve. Les pièces dont dispose le recourant doivent être jointes. La jurisprudence relative à cette disposition a été récemment rappelée à l’ATA/596/2011 du 20 septembre 2011, consid. 2 ss, auquel on peut donc se référer. En bref, le fait que des conclusions formelles ne ressortent pas expressément de l’acte de recours n’est pas en soi un motif d’irrecevabilité, pourvu que la chambre et la partie adverse puissent comprendre avec certitude les fins du recourant.

En l’espèce, la recourante, qui comparaît en personne, n’a pas pris de conclusions formelles, se limitant à demander à la chambre de céans qu’elle lui donne « une deuxième chance ». Son acte de recours se résume en effet à une lettre rappelant de façon toute générale l’objet du présent litige. Elle n’a par ailleurs produit aucune pièce si ce n’est la décision attaquée. Cela étant, l’on peut déduire des termes utilisés que la recourante conclut à l’annulation de la décision attaquée, estimant qu’un redoublement doit lui être autorisé. Dans ces circonstances, il convient d’entrer en matière.

4. La chambre applique le droit d'office. Elle ne peut pas aller au-delà des conclusions des parties, sans toutefois être liée par les motifs invoqués (cf. art. 69 LPA) ni par l'argumentation juridique développée dans la décision entreprise (P. MOOR/E. POLTIER, Droit administratif, vol. II, 2011, p. 300 ss.). Le recours peut être formé pour violation du droit y compris l’excès et l’abus du pouvoir d’appréciation, ainsi que pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (art. 61 al. 1 LPA). La chambre n’a toutefois pas compétence pour apprécier l’opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA) et non réalisée en l’espèce.

5. La recourante fait valoir, en substance, que l’autorité intimée aurait dû l’autoriser à répéter sa première année, se plaignant de ce que l’opération médicale subie en août 2010 n’aurait pas été suffisamment prise en considération.

a. Selon l’art. 44A de la loi sur l’instruction publique du 6 novembre 1940 (LIP – C 1 10), l’ECG appartient à l’enseignement secondaire pour la scolarité secondaire II. Ce degré assure un enseignement général et professionnel. Dans la continuité des objectifs du degré secondaire I, il permet aux élèves d'approfondir et d'élargir les savoirs et les compétences acquis pendant la scolarité obligatoire. Il dispense une formation de culture générale solide et complète, doublée, dans les écoles professionnelles, d'une formation théorique et pratique spécialisée. Les certificats délivrés au degré secondaire II garantissent l'accès aux filières de formation du degré tertiaire ou à la vie professionnelle. Le degré secondaire II prend des mesures facilitant, cas échéant, le changement de filières en cours de formation et l'accès aux formations tertiaires ne relevant pas des hautes écoles (art. 44 al. 2 LIP).

b. L’art. 47 al. 1 LIP délègue au Conseil d’Etat le pouvoir d’établir les conditions d’admission, de promotion et d’obtention des titres. Sur cette base, le Conseil d’Etat a adopté le RES. A teneur de l’art. 22 RES, l’orientation des élèves constitue une part importante de la mission de l’école ; dans cette optique, la direction d’un établissement, sur proposition de la conférence des maîtres ou maîtresses de la classe ou du groupe ou, dans des cas exceptionnels, de sa propre initiative, peut autoriser un élève non promu à répéter l’année. Il est tenu compte des circonstances qui ont entraîné l’échec, de la fréquentation régulière des cours et du comportement adopté par l’élève durant l’année.

c. Dans ce cadre, l’autorité scolaire bénéficie d’un très large pouvoir d’appréciation (ATA/634/2001 du 9 octobre 2001, consid. 10), dont la chambre ne censure que l’abus ou l’excès (cf. consid. 4 supra). Ainsi, alors même que l'autorité resterait dans le cadre de ses pouvoirs, quelques principes juridiques les restreignent, dont la violation constitue un abus de ce pouvoir : elle doit exercer sa liberté conformément au droit. Elle doit respecter le but dans lequel un tel pouvoir lui a été conféré, procéder à un examen complet de toutes les circonstances pertinentes, user de critères transparents et objectifs, ne pas commettre d'inégalité de traitement et appliquer le principe de proportionnalité (P. MOOR, Droit administratif, vol. I : Les fondements généraux, 1994, p. 376 ss et les références citées).

En l’espèce, il ressort de la décision attaquée que la recourante n’a pas suivi les cours de manière régulière, ayant cumulé, sur l’année, quarante-deux heures d’absence, dont sept non motivées. Son attitude en classe n’était également pas adéquate. En plus d’être extrêmement bavarde, ses enseignants avaient relevé chez elle un manque de travail et de concentration. Il était probable que l’opération médicale subie en août 2010 ait pu avoir une influence sur son moral. Par la suite toutefois, aucune amélioration des résultats n’était survenue. Ceux-ci avaient même, pour une grande partie, connu une baisse. Des lacunes et un manque d’intérêt constituaient un obstacle réel pour la suite de sa scolarité. Les résultats obtenus et les commentaires des maîtres démontraient clairement qu’elle n’avait pas atteint les buts assignés à la filière de culture générale. Le pronostic de réussite semblait faible.

Ces motifs sont pertinents et relèvent tous de l’art. 22 RES. Certes, il n’est pas en soi déterminant que la recourante ait manqué quarante-heures de cours durant l’année, dès lors que ce nombre peut certainement s’expliquer par l’opération médicale subie en août 2010 (dont il est toutefois surprenant qu’elle n’ait pas fait état dans sa demande initiale du 19 juin 2011) et que seules sept d’entre elles seraient non motivées. Il n’en reste pas moins que le comportement adopté (manque de motivation, arrivées tardives, nombreux devoirs non faits, oublis et renvois) - de surcroît marqué par une péjoration lors du second semestre, alors que la recourante (comme ses parents, à qui en outre les bulletins scolaires ont été soumis pour signature) avait été expressément rendue attentive à la nécessité d’en changer en milieu d’année -, couplé à l’ampleur de l’échec et de ses lacunes, permettait à l’autorité intimée de refuser de l’autoriser à répéter son année sans mésuser de son pouvoir d’appréciation. Cela étant, force est de constater que l’opération médicale et ses conséquences ne sauraient prévaloir au point de reléguer au second plan ces éléments. En tout état, il n’est pas allégué sérieusement, ni plus démontré, que la conférence des maîtres ou son responsable de groupe aurait à tort refusé de proposer à la direction de l’autoriser à répéter son année ou encore qu’elle se serait trouvée dans un cas exceptionnel ayant commandé à la direction de le faire spontanément. Subséquemment, la décision attaquée, qui repose sur des motifs clairement identifiés et objectifs, ne viole pas l’art. 22 RES. Le moyen, infondé, doit donc être rejeté.

6. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de procédure de CHF 400.- sera mis à la charge de la recourante, qui succombe (art. 87 LPA).



* * * * *

 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 septembre 2011 par Madame K______ contre la décision de la direction générale de l’enseignement secondaire du 25 août 2011 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de la recourante un émolument de CHF 400.- ;

dit que, conformément aux art. 113 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours constitutionnel subsidiaire; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame C______ K______ et Monsieur M______K______, représentant leur fille, Madame K______, ainsi qu’au département de l’instruction publique, de la culture et du sport.

Siégeants : M. Thélin, président, M. Verniory, juge, M. Jordan, juge suppléant.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

C. Derpich

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

la greffière :