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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1060/2017

ATA/441/2017 du 19.04.2017 sur JTAPI/324/2017 ( MC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1060/2017-MC ATA/441/2017

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 19 avril 2017

2ème section

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Rayan Houdrouge, avocat

contre

COMMISSAIRE DE POLICE

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 mars 2017 (JTAPI/324/2017)


EN FAIT

1. Par décision exécutoire nonobstant recours du 5 décembre 2016, dûment notifiée, l’office cantonal de la population et des migrations (ci-après : OCPM) a prononcé le renvoi de Suisse de Monsieur A______, né le ______ 1979, ressortissant algérien, dépourvu de document d’identité. Il a chargé la police genevoise de procéder à l’exécution de cette mesure dès la mise en liberté de l’intéressé, détenu pour les besoins de la justice pénale.

Cette décision n’a pas fait l’objet de recours.

2. Par jugement du 22 décembre 2016, le Tribunal de police a condamné M. A______ à une peine privative de liberté de deux ans, sous déduction de septante-six jours de détention avant jugement, avec sursis pendant trois ans, pour vol (art. 139 du code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0), tentative de vol (art. 22 et art. 139 CP), mise en danger de la vie d’autrui
(art. 129 CP), violence ou menace envers les autorités et les fonctionnaires (art. 285 CP) et entrée et séjour en Suisse illégaux (art. 115 al. 1 let. a et b de la loi fédérale sur les étrangers du 16 décembre 2005 - LEtr - RS 142.20). Il a en outre ordonné son expulsion de Suisse pour une durée de cinq ans.

Ce jugement a été confirmé le 20 mars 2017 par arrêt de la chambre pénale d’appel et de révision de la Cour de justice (ci-après : CPAR).

3. Le 24 mars 2017, M. A______ a été libéré par les autorités pénales compétentes et remis aux autorités administratives en vue de l’exécution de son renvoi.

4. Le même jour, le commissaire de police a ordonné la mise en détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois en application des art. 75 al. 1 let. h et 76 al. 1 let. b ch. 1 LEtr. Les démarches étaient en cours auprès des autorités algériennes en vue de la délivrance d’un laissez-passer.

Lors de son audition, l’intéressé a déclaré qu’il n’était pas d’accord de retourner en Algérie.

5. Le 27 mars 2017, M. A______ a comparu devant le Tribunal administratif de première instance (ci-après : le TAPI) dans le cadre du contrôle de la légalité et de l’adéquation de la mise en détention administrative. Il a confirmé son refus de retourner en Algérie, où il avait eu « des problèmes ». Il souhaitait se rendre en France où résidait sa tante. Il concluait à sa mise en liberté immédiate, subsidiairement à ce que la détention soit remplacée par une mesure moins incisive.

6. Par jugement du 27 mars 2017, notifié le jour même aux parties, le TAPI a confirmé l’ordre de mise en détention administrative de M. A______ pour une durée de trois mois, jusqu’au 24 juin 2017.

Il faisait l’objet d’une décision de renvoi et d’une expulsion judiciaire et avait été condamné pour des crimes au sens de l’art. 10 al. 2 CP. L’assurance de son départ de Suisse répondait à un intérêt public certain et aucune autre mesure moins incisive n’était envisageable, vu l’absence de document d’identité, le refus réitéré de retourner volontairement en Algérie et le fait qu’il ne démontrait pas être légitimé à se rendre dans un autre État que son pays d’origine. Les démarches en vue de l’exécution du renvoi, entamées en janvier 2017, étaient en cours, les autorités compétentes demeurant dans l’attente de la délivrance d’un laissez-passer par la représentation algérienne en Suisse. La durée de détention administrative respectait le principe de la proportionnalité. Enfin rien n’indiquait concrètement que l’exécution du renvoi serait impossible, illicite ou ne pourrait être raisonnablement exigée.

7. Le 7 avril 2017, M. A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement. Dans son acte, reçu le 10 avril 2017, il concluait à l’annulation dudit jugement et à ce que la durée de l’ordre de mise en détention administrative soit limitée à un mois. Il n’avait pas à pâtir du temps mis par les autorités algériennes à délivrer un laissez-passer et l’organisation d’un vol pour l’Algérie ne devait prendre tout au plus un mois. Une détention administrative de trois mois était ainsi disproportionnée.

8. Le 11 avril 2017, le TAPI a transmis son dossier, sans observations.

9. Le 18 avril 2017, le commissaire de police a conclu au rejet du recours.

10. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté le 7 avril 2017 contre le jugement du TAPI prononcé et valablement notifié au recourant le 27 mars 2017, le recours l'a été en temps utile auprès de la juridiction compétente (art. 132 al. 2 de la loi sur l’organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 10 al. 1 de la loi d’application de la LEtr du 16 juin 1988 - LaLEtr - F 2 10 ; art. 17 et 62 al. 1 let. b de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Selon l’art. 10 al. 2 LaLEtr, la chambre administrative doit statuer dans les dix jours qui suivent sa saisine. Ayant reçu le recours le 10 avril 2017 et statuant ce jour, elle respecte ce délai.

3. La chambre administrative est compétente pour apprécier l’opportunité des décisions portées devant elle (art. 10 al. 2 LaLEtr). Elle peut confirmer, réformer ou annuler la décision attaquée ; cas échéant, elle ordonne la mise en liberté de l’étranger (art. 10 al. 3 LaLEtr).

4. La détention administrative porte une atteinte grave à la liberté personnelle et ne peut être ordonnée que dans le respect de l'art. 5 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH - RS 0.101 ; ATF 135 II 105 consid. 2.2.1 p. 107) et de l'art. 31 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), ce qui suppose en premier lieu qu'elle repose sur une base légale. Le respect de la légalité implique ainsi que la mise en détention administrative ne soit prononcée que si les motifs prévus dans la loi sont concrètement réalisés (arrêt du Tribunal fédéral 2C_478/2012 du 14 juin 2012, consid. 2.1).

5. L’étranger faisant l’objet d’une décision de première instance de renvoi ou d’expulsion administrative ou judiciaire peut être placé en détention administrative en vue de l’exécution de celle-ci s’il a été condamné pour crime (art. 75 al. 1 let. h et 76 al. 1 let. b ch. 1 LEtr).

6. En l’espèce, le recourant fait l’objet d’une décision cantonale de renvoi de Suisse, définitive et exécutoire ainsi que d’une décision judiciaire d’expulsion.

Il a été condamné pour vol, tentative de vol et mise en danger de la vie d’autrui, soit des crimes au sens de l'art. 10 al. 2 CP.

Le recourant remplit en conséquence les conditions d’une mise en détention administrative au sens des art. 75 al. 1 let. h et 76 al. 1 let. b ch. 1 LEtr. L’ordre de mise en détention repose ainsi sur une base légale. Le recourant ne met du reste pas en question la réalisation des conditions de la mise en détention administrative.

7. a. La détention administrative doit respecter le principe de la proportionnalité, garanti par l'art. 36 Cst., qui se compose des règles d'aptitude – exigeant que le moyen choisi soit propre à atteindre le but fixé –, de nécessité – qui impose qu'entre plusieurs moyens adaptés, on choisisse celui qui porte l'atteinte la moins grave aux intérêts privés – et de proportionnalité au sens étroit – qui met en balance les effets de la mesure choisie sur la situation de l'administré et le résultat escompté du point de vue de l'intérêt public (ATF 125 I 474 consid. 3 et les arrêts cités ; arrêt du Tribunal fédéral 1P.269/2001 du 7 juin 2001 consid. 2c ; ATA/189/2015 du 18 février 2015 consid. 7a).

À teneur de l’art. 76 al. 4 LEtr, les démarches nécessaires à l'exécution du renvoi ou de l'expulsion doivent être entreprises sans tarder.

Aux termes de l’art. 79 LEtr, la détention en phase préparatoire et la détention en vue du renvoi ou de l’expulsion visées aux art. 75 à 77 ainsi que la détention pour insoumission visée à l’art. 78 ne peuvent excéder six mois au total (al. 1) ; la durée maximale de la détention peut, avec l’accord de l’autorité judiciaire cantonale, être prolongée de douze mois au plus et, pour les mineurs âgés de 15 à 18 ans, de six mois au plus, dans les cas suivants : a. la personne concernée ne coopère pas avec l’autorité compétente ; b. l’obtention des documents nécessaires au départ auprès d’un État qui ne fait pas partie des États Schengen prend du retard (al. 2).

b. À teneur de l’art. 80 al. 6 let. a LEtr, la détention est levée si le motif de la détention n'existe plus ou l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avère impossible pour des raisons juridiques ou matérielles, une telle impossibilité supposant en tout état de cause notamment que l'étranger ne puisse pas sur une base volontaire quitter la Suisse et rejoindre son État d'origine, de provenance ou un État tiers (arrêt du Tribunal administratif fédéral E-6668/2012 du 22 août 2013 consid. 6.7.1).

8. Le recourant fait formellement grief à l’intimé d’avoir violé le principe de la proportionnalité car le laissez-passer indispensable pour voyager n’avait toujours pas été délivré et qu’il n’avait pas à être prétérité par cette lenteur.

Force est toutefois de constater que les autorités suisses compétentes ont entrepris en temps utile les démarches nécessaires auprès des autorités algériennes compétentes en vue de l’obtention du laissez-passer pour le recourant, ce que ce dernier ne conteste pas. Le principe de célérité a donc été respecté. Le fait qu’il s’écoule plusieurs semaines entre la saisine des autorités étrangères et la délivrance du document sollicité n’est en lui-même pas insolite et au vu de l’ensemble des circonstances du cas d’espèce, le TAPI a retenu à juste titre que la durée de la détention administrative respectait le principe de la proportionnalité, aucune autre mesure moins incisive étant envisageable.

Enfin, aucun élément du dossier ne permet de retenir que l'exécution du renvoi ou de l'expulsion s'avèrerait impossible pour des raisons juridiques ou matérielles.

9. Au vu ce qui précède, le recours, infondé, sera rejeté.

10. Vu la nature du litige, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 87 al. 1 LPA et 12 al. 1 al. 1 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu son issue, aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *


 

 

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 avril 2017 par Monsieur A______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 27 mars 2017 ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Rayan Houdrouge, avocat du recourant, au Tribunal administratif de première instance, au commissaire de police, à l'office cantonal de la population et des migrations, au secrétariat d'État aux migrations, ainsi qu'à la maison d'arrêt de Favra pour information.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

Au nom de la chambre administrative :

le greffier-juriste :

 

 

F. Scheffre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :