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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/234/2005

ATA/416/2005 du 07.06.2005 ( JPT ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/234/2005-JPT ATA/416/2005

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 7 juin 2005

2ème section

dans la cause

 

Monsieur G__________
représenté par Me Denis Mathey, avocat

contre

DéPARTEMENT DE JUSTICE, POLICE ET SéCURITé


 


1. Par arrêté du 11 avril 1997, le département de justice et police et des transports, devenu depuis lors le département de justice, police et sécurité (ci-après : le département) a autorisé Monsieur G__________, né en 1958, de nationalité espagnole, à exploiter un service de taxis comprenant un véhicule avec autorisation de stationnement sur la voie publique.

Suite à l’entrée en vigueur le 1er juin 1999 de la loi du 26 mars 1999 sur les services de taxis (LTaxis - H 1 30), M. G__________ a obtenu, le 9 mai 2000, l’autorisation d’exploiter parallèlement un service de taxis sans permis de stationnement.

2. Le 12 novembre 2004, le service des autorisations et patentes du département a demandé à l’office des poursuites le détail éventuel des poursuites dirigées à l’encontre de M. G__________, y compris les actes de défaut de biens et les créances archivées.

3. Selon relevé du 25 novembre 2004 de l’office des poursuites, 19 poursuites étaient en cours totalisant la somme de CHF 66'582.- et 6 actes de défaut de biens représentant CHF 148'868,85.

4. Par arrêté du 16 décembre 2004, le département a révoqué les autorisations dont était bénéficiaire M. G__________, de même que la carte professionnelle de chauffeur de taxi, cette dernière étant remplacée par une carte professionnelle de chauffeur indépendant sans employé. Référence était faite aux articles 6 alinéa 2 lettre b et 18 lettre c LTaxis.

Dit courrier adressé par lettre signature (LSI) à son destinataire a été retourné à l’expéditeur le 27 décembre 2004 avec la mention « non réclamé ». Il a été réexpédié à M. G__________ par courrier B le 4 janvier 2005.

5. M. G__________ a saisi le Tribunal administratif d’un recours contre la décision précitée, par acte déposé au greffe le 25 janvier 2005.

Il avait pris connaissance de la décision par l’intermédiaire de son épouse le 6 janvier 2005.

Il n’a pas contesté ne pas remplir la condition de solvabilité exigée par la LTaxis, mais expliqué que sa situation financière était le résultat des déboires que lui-même et son épouse avaient connu en tant que exploitants d’une station service à C_______ pour le compte de l’entreprise S_______ (Switzerland). Des procédures judiciaires étaient en cours, notamment une procédure devant les Prud’hommes.

Il a sollicité la suspension de la procédure administrative comme dépendant d’une procédure civile et, sur le fond, à l’annulation de la décision querellée, au motif que sa situation exceptionnelle devait lui permettre de bénéficier d’une dérogation au sens de l’article 36 alinéa 5 LTaxis.

6. Le 11 février 2005, le département s’est opposé à la suspension de la procédure administrative, l’issue définitive de la procédure civile n’étant pas déterminante s’agissant du fait - établi - que M. G__________ se trouvait en état d’insolvabilité générale et durable.

7. Dans ses observations du 26 avril 2005, le département s’est prononcé sur le fond du litige.

Le recours était tardif ayant été déposé au-delà du délai de trente jours venant à expiration le samedi 22 janvier 2005 (sic).

S’agissant de l’insolvabilité de M. G__________, le dernier relevé du 24 février 2005 de l’office des poursuites faisait apparaître de nouvelles poursuites en 2005. Leur nombre avait passé à 23 pour un montant total de CHF 66'726,10. Conformément à la jurisprudence du Tribunal administratif, l’origine des dettes ayant donné lieu aux poursuites était sans pertinence. L’exigence de solvabilité exigée par la LTaxis n’était donc pas remplie en l’espèce. La décision respectait le principe de la proportionnalité puisqu’elle laissait à M. G__________ la possibilité de continuer à exercer la professeur de chauffeur de taxi indépendant mais sans employé et d’obtenir ainsi un revenu régulier.

8. Il résulte de la recherche effectuée par le Tribunal administratif auprès de l’entreprise La Poste que l’arrêté du 16 décembre 2004 a été expédié le jour même. La tentative de notification a eu lieu le 17 décembre 2004 et, vu l’échec de cette démarche, le destinataire a été avisé le 17 décembre 2004 que le délai de garde venait à échéance le 24 décembre 2004. Les 25 et 26 décembre 2004 étant fériés, la LSI a été retournée à l’expéditeur le 27 décembre 2004.

 

EN DROIT

1. Interjeté devant la juridiction compétente, le recours est à cet égard recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ).

2. Il y a lieu d’examiner la question de la recevabilité du recours, déposé au greffe du Tribunal administratif le 25 janvier 2005, alors que le décision entreprise date du 16 décembre 2004 et a été expédiée le même jour.

3. Le délai ordinaire de recours est de trente jours (art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

a. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d'être prolongés (art. 16 al. 1 1ère phrase LPA), restitués ou suspendus, si ce n'est par le législateur lui-même (SJ 1989 p. 418). Ainsi, celui qui n'agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (SJ 2000 I 22 et références citées).

b. Les cas de force majeure restent réservés (art. 16 al. 1 2ème phrase LPA). A cet égard, il y a lieu de préciser que tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de l'extérieur de façon irrésistible (SJ précitée)

4. a. Selon la jurisprudence relative à l'article 169 alinéa 1 lettre d de l'ancienne ordonnance sur les postes (OSP), un envoi recommandé qui n'a pas pu être distribué est réputé notifié le dernier jour du délai de garde de sept jours suivant la remise de l'avis d'arrivée dans la boîte aux lettres ou la case postale de son destinataire (ATF 123 III 492 consid. 1 p. 493; 119 V 89 consid. 4b/aa p. 94 et les arrêts cités). Encore faut-il que celui-ci doive s'attendre, avec une certaine probabilité, à recevoir une communication des autorités (ATF 119 V 89 consid. 4b/aa p. 94). Lorsque le recourant a choisi de retenir les envois qui lui sont adressés en "poste restante", le délai de garde est d'un mois (art. 166 al. 2 let. a OSP). En pareil cas, selon la jurisprudence, l'acte est réputé notifié le dernier jour du délai de garde de sept jours et non point le dernier jour du délai de garde d'un mois (ATF 113 Ib 87 consid. 2b pp. 89, 90; question laissée ouverte à l'ATF 116 III V consid. 2c p. 102), parce que la poste restante n'est pas un mode de distribution du courrier et que les actes judiciaires ne peuvent être adressés poste restante (art. 72 al. 2 et 166 al. 1 OSP).

b. Le Tribunal fédéral a confirmé cette jurisprudence après l'abrogation de l'OSP, à la suite de l'entrée en vigueur, le 1er janvier 1998, du nouveau régime de la poste, issu de la loi fédérale sur la poste du 30 avril 1997 (LPO - RS 783.0; art. 13 de l'ordonnance sur la poste du 29 octobre 1997 - OPO) en relevant que les règles de l'ancienne OSP relative au dépôt "poste restante" sont restées les mêmes, selon les nouvelles prescriptions de service de la Poste. Les actes de poursuite et les actes judiciaires ne peuvent être adressés par cette voie; les recommandés font l'objet d'un avis de retrait et le délai de garde est d'un mois (Prescription B 21 alinéa 651; ATF A. du 24 juillet 2000).

5. a. Un envoi est réputé notifié à la date à laquelle son destinataire le reçoit effectivement. Lorsque ce dernier ne peut pas être atteint et qu’une invitation à retirer l’envoi est déposée dans sa boîte aux lettres ou dans sa case postale, la date du retrait de l’envoi est déterminante. Toutefois, si l’envoi n’est pas retiré dans le délai de garde de 7 jours, il est réputé avoir été communiqué le dernier jour de ce délai (ATF 123 III 493, 119 II 149 consid. 2, 119 V 94 consid. 4b/aa et les références).

b. Depuis l’ATF 85 IV 115, la règle de la fiction de la notification à l’échéance du délai de garde a été constamment confirmée par les tribunaux fédéraux (ATF 123 III 492 ; 119 V 94 consid. 4b, 117 V 132 consid. 4a et les références citées). Les actes de procédure étant soumis à réception, il s’est agi d’éviter qu’un justiciable repousse à son gré le début d’un délai de recours en prenant connaissance quand il lui plaît d’un acte de procédure (cf. R. JEANPRETRE, L’expédition et la réception des actes de procédure et des actes juridiques, in RSJ, 69/1973, p. 349 ss). Ainsi, dans un arrêt récent (ATF 127 I 31), le Tribunal fédéral a jugé qu’il n’y a pas de formalisme excessif à considérer que la fiction de la notification à l’échéance du délai de garde de sept jours est également applicable lorsque la poste, de sa propre initiative accorde un délai de retrait plus long et que l'envoi n'est retiré que le dernier jour de ce délai (consid. 2b).

La règle de la fiction de la notification se veut ainsi d’être autonome de la durée du délai de retrait effective d’un envoi recommandé. En regard de la sécurité du droit et de l’égalité de traitement, on ne voit pas qu’il puisse en aller différemment lorsque la poste prolonge de son propre chef le délai de garde, en dérogation à la réglementation prévue dans ses conditions générales. Cela reviendrait à laisser subsister un élément aléatoire dans la détermination de la date de notification, ce que la règle de la fiction de la notification a justement pour but de prévenir. Pour la computation des délais de recours, il y a lieu de s’en tenir dans tous les cas à la fiction de la notification à l’échéance du délai de garde tel qu’il est fixé dans les conditions générales de la poste (ATF U 216/00 du 31 mai 2001).

c. En l’espèce, la décision querellée a été envoyée par LSI le 16 décembre 2004. Le 17 décembre 2004, le recourant a été avisé que le délai de garde de sept jours venait à échéance le 24 décembre 2004.

Le délai de recours a donc commencé à courir à l’expiration du délai de garde de 7 jours, soit le 25 décembre 2005. Il est arrivé à échéance le dimanche 23 janvier 2005 et reporté utilement au lundi 24 janvier 2005 en application de l’article 17 alinéa 3 LPA.

Partant, le recours déposé le 25 janvier 2005 est tardif.

6. Le recourant ne fait pas valoir de motif particulier selon lequel il aurait été incapable de prendre connaissance de la décision attaquée ou de désigner un représentant pour ce faire. Il allègue simplement qu’il en a eu connaissance par l’intermédiaire de son épouse le 6 janvier 2005.

7. Il s’ensuit que le recours ne peut être déclaré qu’irrecevable.

8. Vu l’issue du litige, un émolument de CHF 300.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

déclare irrecevable le recours interjeté le 25 janvier 2005 par Monsieur G__________ contre la décision du département de justice, police et sécurité du 16 décembre 2004 ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 300.-;

communique le présent arrêt à Me Denis Mathey, avocat du recourant ainsi qu'au département de justice, police et sécurité.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, MM. Paychère, Thélin, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

la vice-présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :