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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3361/2006

ATA/398/2009 du 25.08.2009 sur DCCR/336/2009 ( ICC ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3361/2006-ICC ATA/398/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 25 août 2009

 

dans la cause

 

Madame F______

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

_________


Recours contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 27 avril 2009 (DCCR/336/2009)


EN FAIT

1. Madame Marie F______ (ci-après : Mme F______ ou la contribuable), célibataire, est contribuable à Genève.

Dans sa déclaration fiscale 2005, elle a annoncé dans la rubrique « enfant(s) à charge ayant moins de 25 ans révolus, né(s) après le 31 décembre 1980 » sa fille C______, née le ______ 1986, précisant que celle-ci était étudiante et avait réalisé des revenus bruts en 2005 à hauteur de CHF 3'860.-.

La contribuable a fait valoir une déduction de CHF 3'550.- à titre d'assurance maladie pour sa fille C______. Elle a indiqué au titre des montants déterminant le calcul du rabais d’impôt, un « montant déterminant de base » celui de CHF 28'576.- (rubrique 100.10) ainsi qu'un montant additionnel pour charges de famille et à sa charge de CHF 6'754.- (rubrique 100.30).

2. Par bordereaux de taxation du 26 juin 2006, l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC) a fixé l'ICC à CHF 17'319,55, sur la base d'un revenu imposable de CHF 86'570.- d'une part et l'IFD à CHF 2'599,50 sur la base d'un revenu imposable de CHF 89'159.-. L'AFC a écarté toutes les déductions relatives aux charges de famille, notamment celle relative aux primes d'assurance maladie (CHF 3'550.-) et aux frais médicaux (CHF 712.-) de C______. De plus, elle a tenu compte pour le rabais d'impôts l'ICC d'un montant déterminant de base de CHF 15'587.-. Concernant l'IFD, l'AFC n'a pas accepté la déduction sociale.

3. Mme F______ a réclamé contre ces deux bordereaux par acte du
3 juillet 2006. Elle a contesté le fait que sa fille ne soit pas considérée comme une charge de famille.

4. Par deux décisions distinctes du 7 août 2006, l'AFC a maintenu ses taxations aussi bien pour l'ICC que pour l'IFD. La taxation ICC reposait sur l'art. 4 de la loi sur l'imposition dans le temps des personnes physiques du 31 août 2000 (LIPP-II - D 3 12) ainsi que sur l'art. 14 al. 5 let. b de la loi sur l'imposition des personnes physiques - détermination du revenu net - calcul de l'impôt et rabais d'impôt - compensation des effets de la progression à froid du 22 septembre 2000 (LIPP-V - D 3 16). C______ n'était ni étudiante ni apprentie au 31 décembre 2005. Par ailleurs, l'art. 14 al. 5 let. c LIPP-V (proches incapables de subvenir entièrement à leurs besoins) ne trouvait pas application en l'espèce.

5. Mme F______ a protesté contre ces deux décisions le 30 août 2006, persistant dans ses précédentes conclusions, à savoir la prise en compte d'une charge de famille pour sa fille C______ ainsi qu'à la déduction des primes d'assurance maladie et des frais médicaux de celle-ci.

6. Statuant le 1er octobre 2008, la commission cantonale de recours de l’impôt fédéral direct devenue depuis le 1er janvier 2009, la commission cantonale de recours en matière administrative (ci-après : la commission) a admis le recours, hormis la déduction des frais médicaux, dont le total ne dépassait pas le 5 % du revenu déterminant.

Dite décision est devenue définitive.

7. Par décision du 27 avril 2009, la commission a rejeté le recours relatif à la taxation cantonale.

La fille de la recourante était majeure, mais n'était plus apprentie ni étudiante à la date déterminante du 31 décembre 2005. Par conséquent, les éléments constitutifs d'une charge de famille, au sens de l'art. 14 al. 5 let. b LIPP-V faisaient défaut.

La recourante n'avait jamais allégué que sa fille, en raison de son âge ou d'une déficience qui lui serait propre, était incapable de subvenir à ses besoins, de gagner sa vie, d'occuper un emploi rémunéré ou d'avoir une activité produisant un gain. Selon la jurisprudence du Tribunal administratif, l'incapacité de travailler au sens de cette disposition légale devait être clairement distinguée de celle de trouver un emploi (ATA/320/2006 du 13 juin 2006). En conséquence, c'était à bon droit que l'AFC avait refusé d'accorder à la recourante une charge de famille.

En conséquence, les primes d'assurance maladie et les frais médicaux payés par la mère pour sa fille n'étaient pas déductibles.

En outre, et pour les mêmes motifs, le barème célibataire était seul applicable au cas d'espèce.

8. La contribuable a saisi le Tribunal administratif d'un recours contre la décision précitée par acte daté du 27 mai 2009 et remis à un office de l'entreprise La Poste le lendemain.

Pendant l'année 2005, sa fille avait été dans l'impossibilité de subvenir entièrement à ses besoins à cause de son statut d'étudiante, jusqu'à la fin de l'année scolaire, soit fin juin 2005. Dès le mois de septembre 2005, elle s'était inscrite à l'office cantonal de l'emploi pour prétendre à des indemnités de chômage et le montant alloué, soit CHF 3'860.- ne pouvait pas permettre à un adulte de subvenir seul à ses besoins. La loi fiscale ayant changé en 2002, elle était particulièrement pénalisante pour les parents de jeunes adultes de 19 à 25 ans, qui terminaient normalement leur cursus scolaire au milieu de l'année et qui par conséquent restaient de fait à la charge de leurs parents puisque ces derniers avaient une obligation d'entretien envers leurs enfants adultes. Les changements de loi de ces dernières années étaient particulièrement défavorables pour les parents de jeunes adultes (suppression des allocations familiale dès le mois qui suit les 18 ans, attribution des subsides de la caisse maladie seulement en fonction du revenu des parents et suppression de la déduction pour charge fiscale). Pour l'année 2005, les seuls frais de sa fille devenue majeure représentaient CHF 10'000.-.

9. Dans sa réponse du 2 juillet 2009, l'AFC a conclu au rejet du recours pour les motifs précédemment exposés. La loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) laissait aux cantons leur autonomie dans la fixation des déductions sociales, des montants exonérés ainsi que des barèmes et des taux. Dès lors, le système prévu à l'art. 14 al. 5 LIPP-V était compatible avec la LHID et expliquait la différence existant entre la taxation ICC et IFD.

10. Le 27 juillet 2009, la commission a déposé son dossier sans observations.

11. Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le litige porte sur l'ICC 2005 et plus particulièrement sur la déductibilité de la charge de famille de la fille de la recourante.

3. En application de la LHID, le législateur genevois a adopté plusieurs lois fiscales sur l'imposition des personnes physiques (LIPP-I à V). Celles-ci sont entrées en vigueur le 1er janvier 2001 et ont eu pour effet de modifier la plupart des dispositions de la loi générale sur les contributions publiques du 9 novembre l887 (LCP - D 3 05).

4. a. En matière de déductions, le législateur genevois a adopté, en application de l'art. 9 LHID, la LIPP-V et la LIPP-II. Les déductions sociales, comme la détermination de l'impôt sur le revenu, sont établies d'après la situation existant à la fin de la période fiscale (art. 1 et art. 4 al. 1 LIPP-II). S'agissant de sa durée, les dispositions cantonales sont identiques aux normes fédérales (art. 209 al. 1 et 2 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 - LIFD - RS 642.11 et art. 63 LHID), de sorte que la date déterminante pour la prise en compte de la taxation annuelle échoit le 31 décembre de chaque année. La caractéristique de ce système, qualifié de postnumerando, dans lequel l'impôt dû pour une année correspond au revenu réalisé durant cette même année, est de fixer une durée déterminée au terme de laquelle la taxation prend nécessairement fin. La conséquence inhérente à ce système est de rendre caduque toute taxation intermédiaire (YERSIN/NOËL, commentaire IFD, ad art. 209, n. 1-6). Il n'en va pas différemment en matière de déductions sociales, qui en vertu de l'art. 4 al. 1 LIPP-II, doivent être déterminées d'après la situation existant à la fin de la période fiscale (ATA/568/2008 du 4 novembre 2008).

b. La méthode de taxation postnumerando ne peut pas prendre suffisamment en compte les spécificités de chaque cas particulier. Cette méthode a toutefois été plébiscitée par le législateur fédéral par souci de simplification, de clarté et d'équité au vu de la diversité des situations pouvant se présenter (art. 209 al. 1 et 2 LIFD, art. 63 LHID). L'assujettissement annuel constitue ainsi la situation ordinaire prévalant tant au niveau fédéral que cantonal, de laquelle il n'y pas lieu de s'écarter. Au demeurant, une solution identique existe également en cas de fréquents changements de domicile en Suisse, qui n'engendrent pas autant de fractionnements inférieurs à une année pour le calcul de l'impôt sur le revenu (YERSIN/NOËL, Commentaire, ad art. 209, n. 5). Partant, c'est à la date du 31 décembre qu'il convient d'apprécier la situation de chaque contribuable.

5. S'agissant du mécanisme de déductions, prévu par l’aLCP, il a été remplacé par un système de rabais d'impôt équivalant à une déduction d'un montant fixe opérée sur l'impôt lui-même (X. OBERSON, Droit fiscal suisse, Bâle ; Genève ; Munich, 2007, p. 156 ; SJ 2001 II pp. 16-18). La question des déductions sociales est régie par l'art. 14 LIPP-V. Selon l'al. 5 let. b de cette disposition, constitue une charge de famille chaque enfant majeur, jusqu'à l'âge de 25 ans révolus, qui est étudiant régulièrement inscrit dans un établissement d'enseignement secondaire ou supérieur, et dont la fortune ne dépasse pas CHF 50'000.-, lorsque celui-ci n'a pas un revenu supérieur à CHF 13'600.- (charge entière) ou CHF 20'400.- (demi-charge), pour celui des parents qui pourvoit à son entretien.

En l'espèce, il n'est pas contesté que la fille de la recourante a terminé sa scolarité au mois de juin 2005 puis qu'elle a bénéficié d'allocations de chômage, jusqu’à la fin de cette année-ci. Dans ces conditions, au 31 décembre 2005, elle n'était ni étudiante ni apprentie de sorte que l'art. 14 al. 5 let. b LIPP-V n'est pas applicable.

6. Selon l’art. 14 al. 5 let. c LIPP-V, à dater de l’année fiscale 2002, constitue une charge de famille pour le proche qui pourvoit à leur entretien, toute personne incapable de subvenir à ses besoins et dont la fortune ne dépasse pas CHF 50'000.- ni le revenu annuel CHF 10'200.- (charge entière) ou supérieur à CHF 20'400.- (demi-charge). La notion « incapable de subvenir entièrement à ses besoins » a été reprise du texte de l’art. 31 al. 3 let. c LCP, lequel prévoyait l’octroi de charges de famille pour les proches nécessiteux.

Par proches nécessiteux, il faut entendre les personnes qui sont incapables de subvenir à leurs besoins, ce qui suppose que la personne à charge n'est pas capable, en raison de son âge ou d'une déficience qui lui est propre, de gagner sa vie, d'occuper un emploi rémunéré ou d'avoir une activité produisant un gain (RDAF 1959 p. 156 ; RDAF 1978 p. 285 ; Revue fiscale 1988 p. 340; ATA/258/1998 du 5 mai 1998 ; ATA du 27 septembre 1989). Le tribunal a eu l’occasion de considérer qu’un obstacle administratif ayant pour effet d’empêcher une personne de trouver un emploi ne permettait pas de considérer cette personne comme un proche nécessiteux (ATA/230/2002 du 7 mai 2002).

Cette jurisprudence a été confirmée par le tribunal de céans dans un arrêt du 13 juin 2006 (ATA/320/2006 du 13 juin 2006), à l’occasion duquel il a été rappelé que l'incapacité de travailler au sens de cette disposition légale devait être clairement distinguée de celle de trouver un emploi.

En l'espèce, la recourante ne prétend pas que sa fille C______ serait dans l'incapacité de travailler de sorte que cette disposition ne trouve pas application en l’occurrence.

7. L'argumentation de la recourante repose essentiellement sur son opposition de principe au système fiscal genevois. Certes - au-delà du schématisme qui caractérise le droit fiscal -, le Tribunal administratif ne peut que constater avec la recourante que la situation des parents ayant un ou des enfants majeurs à charge s'est péjorée au cours de ces dernières années mais cela étant, l'on ne saurait faire grief à l'AFC d'avoir in casu appliqué correctement les dispositions cantonales en vigueur, dont la conformité au droit supérieur a été maintes fois confirmée (cf. not. ATA/320/2006 du 13 juin 2006).

8. Au vu de ce qui précède, le recours sera rejeté. Un émolument de CHF 500.- sera mis à la charge de la recourante qui succombe (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 2 septembre 2006 par Madame F______ contre la décision du 27 avril 2009 de la commission de cantonale de recours en matière administrative ;

au fond :

le rejette ;

dit qu'un émolument de CHF 500.- est mis à la charge de Madame F______ ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame F______, à la commission cantonale de recours en matière administrative ainsi qu'à administration fiscale cantonale.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Dumartheray, juges, M. Bonard, juge suppléant.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :