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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4173/2018

ATA/355/2019 du 02.04.2019 ( AIDSO ) , IRRECEVABLE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4173/2018-AIDSO ATA/355/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 2 avril 2019

1ère section

 

dans la cause

 

Madame A______
représentée par Me Sandy Zaech, avocate

contre

HOSPICE GÉNÉRAL

 



EN FAIT

1. Madame A______, née le ______ 1987, a obtenu des prestations d’aide financière de l’Hospice général (ci-après : l’hospice) du 1er décembre 2005 au 31 juillet 2006, du 1er juin 2011 au 31 juillet 2011, puis à compter du 1er octobre 2011.

2. Le 30 juillet 2018, elle a reçu un courrier recommandé de l’hospice dont la teneur était la suivante :

« Concerne : décision de fin de prestations d’aide financière dès le 01.08.2018 avec demande de restitution 

Madame,

Nous donnons suite aux résultats de l’enquête du service des enquêtes de l’Hospice général et vous informons qu’en application de l’art. 35 de la loi sur l’insertion et l'aide sociale individuelle du 22 mars 2007 (LIASI - J 4 04), l’Hospice général a décidé de mettre un terme aux prestations d’aide financière qu’il vous accorde dès le 01.08.2018 pour les motifs suivants ».

Suivaient un bref rappel des faits ainsi que les résultats d’une enquête effectuée par l’hospice, notamment la découverte de divers versements et retraits sur un compte épargne non annoncé. L’intéressée avait caché des informations importantes à l’hospice. Celui-ci sollicitait divers documents complémentaires.

« Nous présumons dès lors que ces moyens de subsistance demeurent.

Par conséquent, l’Hospice général met un terme dès le 01.08.2018 à l’aide financière qu’il vous accorde.

Nous vous laissons un délai au 31.08.2018 pour nous transmettre l’ensemble des documents susmentionnés, faute de quoi nous vous demanderons le remboursement de tous les mois d’aide sociale qui vous ont été accordés.

Dès réception des documents demandés, nous calculerons le montant des sommes que vous avez indûment perçues et vous adresserons une décision de demande de restitution ».

Suivaient l’information que le subside partiel d’assurance-maladie était maintenu jusqu’au 31 décembre de l’année en cours ainsi que les voies de recours, et la mention que la décision était exécutoire nonobstant opposition.

3. Le 8 août 2018, Mme A______ a sollicité « la clôture de son dossier » auprès des services du centre d’action sociale de Meyrin (ci-après : CAS de Meyrin). Elle a annulé le rendez-vous prévu avec la gestionnaire du dossier, a sollicité de pouvoir consulter son dossier, a demandé la restitution des documents originaux et fait interdiction à l’hospice de communiquer avec quelque intervenant extérieur, notamment son bailleur. Le traitement de son dossier par l’hospice avait fait l’objet de graves manquements.

4. Le 30 août 2018, Mme A______ a fait opposition auprès de l’hospice contre la décision du 1er août 2018. Elle réfutait la totalité des accusations portées à son encontre par le document et détaillait sa position. Toute demande de remboursement des prestations d’aide antérieure recevrait une opposition systématique et se terminerait certainement par un acte de défaut de biens.

5. S’en est suivi un échange de correspondance.

6. Par décision sur opposition du 25 octobre 2018, le directeur général de l’hospice a déclaré l’opposition recevable et l’a rejetée.

Il s’interrogeait sur l’existence d’un intérêt juridique à agir, l’opposition semblant dirigée non contre la fin des prestations, mais contre le reproche que l’hospice lui adressait d’avoir violé son obligation de renseigner. La question de la recevabilité de l’opposition pouvait souffrir de rester indécise dès lors qu’en tous les cas elle devait être rejetée.

L’intéressée avait violé de manière grave et réitérée son obligation de renseigner en cachant des éléments indispensables pour pouvoir déterminer le montant de son droit à des prestations d’aide financière.

7. Par acte du 28 novembre 2018, Mme A______ a interjeté recours devant la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision sur opposition précitée.

Son intérêt juridique était patent, même si elle ne contestait pas la fin de son droit aux prestations. Si elle n’entendait plus bénéficier de l’aide sociale, elle ne souhaitait pas pour autant, sur la base de la décision attaquée, qu’il lui soit demandé de rembourser un quelconque montant pour l’aide perçue jusqu’à cette date.

La question de l’intérêt à agir aurait pu se poser si la direction de l’hospice renonçait à tout remboursement, ce qui n’apparaissait pas être le cas à la lecture de la décision initiale.

Suivaient des arguments en lien avec la contestation, par la recourante, de son obligation de rembourser. Elle sollicitait l’audition de deux témoins à même de prouver le bien-fondé de sa position.

8. L’hospice a conclu au rejet du recours s’il devait être déclaré recevable à la forme.

9. Dans sa réplique, l’intéressée a persisté dans ses conclusions.

10. Sur ce, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable de ces points de vue (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. a. La juridiction administrative applique le droit d’office et ne peut aller au-delà des conclusions des parties, sans pour autant être liée par les motifs invoqués (art. 69 al. 1 LPA).

b. L’objet du litige est principalement défini par l’objet du recours (ou objet de la contestation), les conclusions du recourant et, accessoirement, par les griefs ou motifs qu’il invoque. L’objet du litige correspond objectivement à l’objet de la décision attaquée, qui délimite son cadre matériel admissible (ATF 136 V 362 consid. 3.4 et 4.2 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_581/2010 du 28 mars 2011 consid. 1.5 ; ATA/1364/2018 du 18 décembre 2018 consid. 4b). La contestation ne peut excéder l’objet de la décision attaquée, c’est-à-dire les prétentions ou les rapports juridiques sur lesquels l’autorité inférieure s’est prononcée ou aurait dû se prononcer. L’objet d’une procédure administrative ne peut donc pas s’étendre ou qualitativement se modifier au fil des instances, mais peut tout au plus se réduire dans la mesure où certains éléments de la décision attaquée ne sont plus contestés. Ainsi, si un recourant est libre de contester tout ou partie de la décision attaquée, il ne peut pas prendre, dans son mémoire de recours, des conclusions qui sortent du cadre des questions traitées dans la procédure antérieure (ATA/1330/2018 du 11 décembre 2018 consid. 4).

Un recours ne peut être en principe dirigé que contre le dispositif de la décision (ATF 140 I 114 consid. 2.4.2). Toutefois, les éléments des considérants auxquels le dispositif renvoie peuvent aussi faire l’objet d’un recours (ATAF/2009/46 consid. 2). Par contre, le recourant qui n’attaque que la motivation d’une décision n’aura pas la qualité pour agir faute d’intérêt à la modification du dispositif de celle-ci (ATF 115 V 416 consid. 3 a, Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2ème édition, p. 431, n° 1'264).

c. Un recours, devenu sans objet, doit être simplement radié du rôle (ATF 125 V 373 consid. 1 ; 118 Ib 1 consid. 2 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_76/2009 du 30 avril 2009 consid. 2) ou déclaré irrecevable (ATF 123 II 285 consid. 4 ; arrêt du Tribunal fédéral 1C_69/2007 du 11 juin 2007 consid. 2.3).

3. En l’espèce, la décision querellée ne porte que sur la fin des prestations d’aide sociale au 1er août 2018. Certes, l’intitulé de la correspondance du 30 juillet 2018 mentionne qu’une demande de restitution est formulée. Toutefois, il ressort du contenu de la correspondance et de la formulation de la décision de l’hospice du 30 juillet 2018 que le dispositif de celle-ci ne concerne que la fin des prestations d’aide financière au 1er août 2018. Or, la recourante a expressément, par courrier du 8 août 2018, demandé la clôture de son dossier, abondant, ce faisant, dans le sens des conclusions prises par l’hospice dans sa décision du 30 juillet 2018.

Les violations des devoirs du bénéficiaire, reprochées à la recourante, ne servent qu’à motiver la décision de fin des prestations. L’intéressée ne peut toutefois pas recourir contre la seule motivation de la décision. S’agissant de la demande de remboursement, évoquée dans la décision querellée, celle-ci est annoncée par l’autorité intimée au cas où l’autorité ne devait pas obtenir, dans le délai fixé au 31 août 2018, les documents sollicités dans la même correspondance. Même si, estimant sa position bien-fondée, l’hospice indique dans la phrase qui suit que, dès réception des documents demandés, le montant des sommes indûment perçues sera calculé, comme s’il n’existait pas d’hypothèse où aucune demande de remboursement ne serait formulée, il mentionne qu’une décision de restitution sera adressée ultérieurement.

Le dispositif de la décision sur opposition ne porte d’ailleurs que sur l’arrêt des prestations au 1er août 2018, ce que les derniers considérants de la décision mentionnent.

En conséquence, dès lors que la décision querellée ne porte que sur la fin du droit aux prestations et que la recourante ne conteste pas cette fin, mais a abondé dans le sens de la décision de l’hospice, le litige n’a plus d’objet.

Autre sera la question du bien-fondé d’une demande de restitution, voire du montant de celle-ci, qui devra être analysée ultérieurement, dans le cadre de la procédure de demande en restitution.

Le litige n’a plus d’objet depuis le 8 août 2018. Le recours est en conséquence irrecevable.

4. Vu la matière, aucun émolument ne sera perçu (art. 87 al. 1 LPA ; art. 11 du règlement sur les frais, émoluments et indemnités en procédure administrative du 30 juillet 1986 - RFPA - E 5 10.03). Vu l’issue de la procédure, aucune indemnité ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

déclare irrecevable le recours interjeté le 28 novembre 2018 par Madame A______ contre la décision du directeur de l’Hospice général du 25 octobre 2018 ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument, ni alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Sandy Zaech, avocate de la recourante ainsi qu'à l'Hospice général.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, Mme Krauskopf, M. Pagan, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

 


 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

 

Genève, le 

 

 

 

 

la greffière :