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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2892/2006

ATA/333/2009 du 30.06.2009 sur DCRI/515/2008 ( ICC ) , REJETE

Descripteurs : ; DROIT FISCAL ; IMPÔT ; DOMICILE FISCAL(DOUBLE IMPOSITION) ; DOMICILE À L'ÉTRANGER ; DROIT D'ÊTRE ENTENDU
Normes : LPA.20.al1 ; LHID.3.al2 ; LIFD.3.al2 ; CC.23.al1 ; CC.23.al2 ; CC.24.al1
Résumé : Le recourant revendique la création d'un nouveau domicile fiscal à l'étranger contestant ainsi ses avis de taxation 2002, 2003 et 2004 sur le canton de Genève. Recours rejeté, un faisceau d'indices permettant d'admettre que ses liens avec la Suisse sont toujours très forts, compte tenu notamment des nombreuses visites du recourant dans le canton.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2892/2006-ICC ATA/333/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 30 juin 2009

1ère section

dans la cause

 

Monsieur I______
représenté par Monsieur X______, fils du recourant

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

_________


Recours contre la décision de la commission cantonale de recours en matière administrative du 24 novembre 2008 (DCRI/515/2008)


 


EN FAIT

1. De nationalité suisse, Monsieur et Madame I______ ont habité dans le canton de Genève depuis 1985. La villa familiale, propriété du couple, était située à l'adresse ______, 1292 Chambésy.

2. M. I______ était affilié à une assurance-maladie de base en Suisse. Il bénéficiait, en outre, d'une rente AVS/AI et d'une rente LPP. Parallèlement, sa femme exerçait une activité lucrative indépendante à Genève.

3. M. I______ a déclaré le 17 juin 2003 à l'office cantonal de la population (ci-après : OCP) être retourné en Serbie pour des raisons de santé. Il n'habitait plus en Suisse depuis le 1er juillet 2003.

4. Les déclarations fiscales des années 2002 à 2004, dont les taxations ICC font l'objet du présent litige, ont été signées uniquement par Mme I______.

Dans la déclaration d'impôt de l'année 2002, aucune adresse au 31 décembre n'était indiquée tandis que figurait l'adresse « ______, Chambésy » dans les déclarations des années 2003 et 2004.

Sur les trois formules, l'épouse avait indiqué la totalité de ses propres revenus, les rentes perçues par son mari, ainsi que la fortune du couple.

La déclaration fiscale 2004 contenait un décompte de frais médicaux établi par l'assureur-maladie. M. I______ avait consulté à Genève en janvier, février, mars, avril, mai, juin, novembre et décembre 2004, ces frais étant à la charge de l'assurance obligatoire des soins.

5. Du 10 au 25 mars 2003, M. I______ s'est à nouveau domicilié à Genève en indiquant son adresse à Chambésy.

6. Par lettre du 19 mai 2005, l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC) a demandé aux époux I______ de produire notamment des justificatifs des impôts payés en Serbie-Monténégro par le contribuable, pour la période allant du 1er juillet 2003 au 9 mars 2005, afin de procéder à la taxation des contribuables pour l'année 2003.

7. En réponse à ce courrier, Mme I______ a indiqué par lettre du 31 mai 2005, que « tous les impôts de [elle] et [son] mari ont été déclarés en Suisse par la [fiduciaire] jusqu'au 9 mars 2005 ».

8. Toujours en réponse à la lettre de l'AFC du 19 mai 2005, le 16 décembre 2005, les époux I______ ont produit notamment un certificat établi par le ministère des finances de la ville de Belgrade, République de Serbie. Cette pièce indiquait que M. I______ était « reconnu en tant que contribuable, qu'il n'[avait] pas d'obligations de payement parvenues à échéance. Payement pour les années 2002, 2003 et 2004. Le certificat [était] délivré pour la régularisation de son imposition à double ».

9. Par courrier du 7 avril 2006, l'AFC a donné un délai au  28 avril 2006 à M. I______ - prolongé ultérieurement au 6 juin 2006 - pour qu’il lui remette une attestation de la République de Serbie mentionnant les dates exactes de domiciliation en Serbie, ainsi qu'une copie des déclarations fiscales serbes.

10. M. I______ a répondu à l'AFC par courrier du  17 mai 2006 :

Son inscription à l'OCP pour une quinzaine de jours avait été réalisée pour permettre l'achat d'un véhicule, lequel requiert un domicile dans le canton ;

Il avait produit un certificat établi par le ministère des finances de la ville de Belgrade, pour l'année 2005, similaire à celui concernant les années 2002, 2003 et 2004 ;

Les déclarations fiscales serbes ne pouvaient être transmises à l'AFC car la République de Serbie ne « s'attendait pas à ce que ces documents soient partagés avec les autorités suisses ». De plus, « les autorités serbes n'auraient jamais demandé de produire les déclarations fiscales suisses ».

A ce pli était joint une « attestation de domicile permanent » établie par la ville de Belgrade, République de Serbie et « faite à Belgrade, le 31.08.1998 », certifiant que l'intéressé « [avait] son domicile permanent à Belgrade, rue ______ ».

11. Le 13 juillet 2006, l'AFC a notifié aux époux I______ six décisions maintenant respectivement les taxations ICC et IFD des années 2002, 2003 et 2004.

Domicilié à nouveau à Genève depuis le 10 mars 2005, l'absence de l'intéressé était inférieure à deux ans, ainsi elle ne pouvait considérer son départ comme définitif ; par conséquent, il était assujetti sur le canton de Genève d'une manière illimitée pour les trois années litigieuses.

12. Par courrier du 27 juillet 2006, Monsieur X______, fils et mandataire de l’intéressé, a adressé à l'AFC une attestation du 17 juillet 2006 de l'OCP certifiant que M. I______ avait résidé sur le territoire du canton de Genève du 10 au 25 mars 2005, date de son départ pour Belgrade. Il faisait valoir qu'il s'agissait d'un « moyen de preuve nouveau et important ».

13. Le 5 août 2006, M. I______, sous la plume de son fils, a interjeté recours à la commission cantonale de recours en matière d'impôts, devenue depuis la commission de recours en matière administrative (ci-après : la commission), contre les décisions de l'AFC du 13 juillet 2006 concernant l'ICC.

Étant absent depuis 2002, il ne devait être assujetti que d'une manière limitée aux impôts genevois depuis cette époque. Il vivait, en outre, séparé de son épouse.

14. Le 14 août 2006, l'AFC a adressé un courrier à Mme I______ lui demandant de remplir un formulaire afin de déterminer le domicile fiscal principal du couple.

15. L'AFC a répondu le 29 mai 2007 à la commission comme suit :

Le départ de M. I______ étant annoncé pour le 1er juillet 2003, rien ne permettait de contester la déclaration fiscale de l'année 2002 ;

Le domicile fiscal ne pouvait être librement choisi ;

Le fichier de l'OCP faisait apparaître que M. I______ serait revenu vivre en Suisse du 10 au 25 mars 2005 ;

Diverses entités administratives continuaient d'envoyer leurs courriers à l'adresse genevoise de M. I______ ;

Les voitures étaient immatriculées à Genève et l'intéressé avait subi diverses consultations médicales durant la majeure partie de l'année 2004 ;

Les enfants du contribuable étaient domiciliés à Genève, où se situait également la villa familiale détenue en copropriété par son épouse et par lui-même ;

Les attestations établies par les autorités serbes étaient contradictoires et incomplètes.

Ce faisceau d'indices permettait de conclure que le contribuable n'avait pas quitté définitivement Genève pendant la période litigieuse.

16. En date du 25 juin 2007, M. I______ a répliqué :

L'adresse à Genève était une adresse de notification, en raison de vols perpétrés dans sa boîte aux lettres à Belgrade. L'assurance-vieillesse et survivants (ci-après : AVS), l’assurance-invalidité (ci-après : AI) et la prévoyance professionnelle vieillesse, survivants et invalidité (ci-après : LPP) avaient ainsi accepté de lui acheminer son courrier à son adresse de notification à Genève ;

Les visites médicales étaient dues à un accident de la circulation survenu en 2003, lors d'une visite à Genève, nécessitant plusieurs opérations du coude. Il avait alors été hospitalisé dans un établissement clinique, ce qui n'était pas constitutif d'un domicile. En outre, étant rentier AVS/AI, il devait subir des évaluations par des médecins suisses ;

Les véhicules mentionnés par l'AFC étaient un scooter acheté pour son fils, dont le permis était resté à son nom, élément qui serait rectifié dans l'année lors d'une de ses visites à Genève et une Audi S4, possession de son fils également, acquise en Serbie, raison pour laquelle celle-ci était enregistrée à son nom ;

La maison de Chambésy était un investissement immobilier et non une villa familiale, le compte bancaire suisse de M. I______ permettait le paiement de ce bien immobilier ;

Ses enfants étant tous majeurs, le lien affectif ne constituait plus un argument pour admettre le domicile en Suisse, celui-ci devant être considéré comme moins tenu à partir de la majorité des enfants. Par ailleurs, sa situation était comparable à celle du père de famille qui vivait dans un pays et dont les enfants étudiaient dans un autre, le père ne payant pas d'impôt dans l'Etat qui recevait les enfants en formation ;

Il déplorait la mauvaise interprétation de l'AFC dans son appréciation des pièces émanant des autorités serbes ;

Une quittance de l'Ambassade suisse en Serbie, émise le 27 février 2007, témoignait d'une demande de renouvellement du passeport et de la pièce d'identité suisse.

17. Par courrier du 4 juillet 2007, l'AFC a persisté dans ses conclusions.

18. La commission a rejeté le recours en date du 24 novembre 2008. Cette décision a été envoyée à M. I______ le 5 décembre 2008 et notifiée le 12 décembre 2008 à son fils.

Les éléments constituant le faisceau d'indices permettant de conclure à l’assujettissement illimité de M. I______ dans le canton de Genève y étaient rappelés.

19. Le 11 janvier 2009, M. I______ a interjeté recours au Tribunal administratif contre ladite décision.

Il vivait séparé de son épouse, laquelle habitait depuis 2002 chez son père à Novi Beograd.

Son passeport et sa pièce d'identité serbes, ainsi qu'une attestation de domicile permanent émanant du ministère de l'intérieur serbe confirmaient qu'il était domicilié à Belgrade. Le droit serbe permettait un domicile permanent en Serbie même si la personne concernée était installée à l'étranger. Dans ce cas, le contribuable vivait à l'étranger de manière temporaire et, une fois qu'il n'était plus à l'étranger, il était à nouveau automatiquement domicilié en Serbie de façon définitive.

Il n'avait pas gardé copie de ses déclarations fiscales serbes et contestait devoir produire de tels documents.

L'AFC ne l'avait pas informé des preuves qu'il pouvait fournir, telles que notes de téléphone, contrat de bail, etc. S'il avait été au courant de cette possibilité, il aurait gardé les papiers pertinents et les lui aurait remis.

20. Le 30 avril 2009, l'AFC a transmis sa réponse au Tribunal administratif. Il existait un faisceau d'indices suffisants pour présumer que le recourant avait ses centres d'intérêts vitaux dans le canton avec pour conséquences un assujettissement illimité pour les périodes en cause.

21. La commission a persisté dans sa décision le 13 mai 2009.

22. Par deux lettres du 12 juin 2009, M. I______ a transmis plusieurs nouvelles pièces au Tribunal administratif :

Un certificat établi par le ministère des finances de la République de Serbie disant que « d’après les données comptables de [la] succursale le contribuable […], n’a pas d’exigibilités non réglées relatives aux comptes des recettes publiques. Le certificat est délivré […] pour éviter la double imposition […] » ;

Un acte judiciaire du 31 novembre 2004 émanant d’une autorité de première instance de Belgrade, constatant la succession de la mère de M. I______ dont il héritait avec sa sœur de l’appartement sis à ______, Belgrade. Ce document établissait que M. I______ était résident en Suisse, à Genève ;

Un certain nombre de quittances datant des années litigieuses établies au nom de la mère de M. I______ décédée en 1996 ;

Un certificat de résidence de la République de Serbie certifiant que M. I______ avait la qualité de résident pendant les années litigieuses.

Il développait pour le surplus, son argumentation antérieure.

Copie de ces documents a été transmise à l'AFC, pour information.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le recourant estime que les autorités n'ont pas tenu compte de ses moyens de preuve et partant, son droit d'être entendu serait violé.

a. Selon l’art. 20 al. 1 LPA, l’autorité réunit les renseignements et procède aux enquêtes nécessaires pour fonder sa décision ; elle apprécie les moyens de preuve des parties.

L’autorité ne doit et ne peut rechercher que les informations nécessaires à sa décision. En outre, les parties ont le devoir de collaborer à la recherche des preuves (B. KNAPP, Précis de droit administratif, 4ème éd. Bâle, 1991,  n. 2018-2021 p. 419). En matière fiscale, l’autorité doit, en principe apporter la preuve des éléments imposables alors que le contribuable doit établir les faits permettant de diminuer ou de supprimer sa dette fiscale. Si des indices précis rendent vraisemblable l’existence des conditions fondant l’obligation fiscale, l'autorité peut sans arbitraire exiger du contribuable qu’il apporte la preuve du contraire (ATF 121 II 257 consid. 4c p. 266 ; arrêt du 14 mars 1995, publié in Revue fiscale 1995, p. 348 consid. 2d p. 351 ; Archives 62 p. 720 consid. 5b p. 729 ; 55 p. 624 consid. 3a p. 627 ; 39 p. 284 consid. 3c p. 288 ; W. RYSER/B. ROLLI, Précis de droit fiscal suisse, 3ème éd. Berne 1994 pp. 58-59 ; E. KÄNZIG/U. R. BEHNISCH, Die direkte Bundessteuer, IIIème partie, 2ème éd. n. 20 ad. art. 88).

b. Une décision entreprise pour violation du droit d’être entendu n’est pas nulle, mais annulable (Arrêt du Tribunal fédéral 2P.207/2001 du 12 novembre 2001 consid. 5a et les arrêts cités ; ATA/452/2008 du 2 septembre 2008 consid. 2b).

La réparation d'un vice de procédure en instance de recours et, notamment, du droit d'être entendu, n'est possible que lorsque l'autorité dispose du même pouvoir d'examen que l'autorité inférieure (ATA/452/2008 du 2 septembre 2008 consid. 2b ;  ATA/430/2008 du 27 août 2008 consid. 2 ; P. MOOR, Droit administratif, Les actes administratifs et leur contrôle, vol. 2, 2e éd., Berne 2002, ch. 2.2.7.4 p. 283). Elle dépend toutefois de la gravité et de l'étendue de l'atteinte portée au droit d'être entendu et doit rester l'exception (ATF 126 I 68 consid. 2 p. 72 et les arrêts cités ; Arrêt du Tribunal fédéral 1C.63/2008 du 25 août 2008 consid. 2.1) ; elle peut cependant se justifier en présence d'un vice grave lorsque le renvoi constituerait une vaine formalité et aboutirait à un allongement inutile de la procédure (ATF 133 I 201 consid. 2.2 p. 204). En outre, la possibilité de recourir doit être propre à effacer les conséquences de cette violation. Autrement dit, la partie lésée doit avoir le loisir de faire valoir ses arguments en cours de procédure contentieuse aussi efficacement qu’elle aurait dû pouvoir le faire avant le prononcé de la décision litigieuse (ATA/452/2008 du 2 septembre 2008 consid. 2b).

En l'espèce, le Tribunal administratif dispose du même pouvoir de cognition que la commission et que l'AFC. En conséquence, l’éventuelle violation du droit d'être entendu alléguée par le recourant peut être réparée par le Tribunal administratif. Ce dernier a largement accordé au recourant la possibilité de se déterminer et de produire les documents qu'il estimait nécessaires.

Partant, le grief de la violation du droit d’être entendu sera écarté.

3. La convention entre le Conseil fédéral suisse et le Conseil des Ministres de Serbie-et-Monténégro en vue d’éviter les doubles impositions en matière d’impôts sur le revenu et sur la fortune du 13 avril 2005, entrée en vigueur le 5 mai 2006 (RS 0.672.968.21) étant postérieure aux années litigieuses, elle ne s’applique pas à la présente espèce.

4. a. L'art. 3 al. 2 de la loi fédérale sur l’harmonisation des impôts directs des cantons et des communes du 14 décembre 1990 (LHID - RS 642.14) prévoit qu'une personne a son domicile dans le canton, au regard du droit fiscal, lorsqu’elle y réside avec l’intention de s’y établir durablement ou lorsqu’elle y a un domicile légal spécial en vertu du droit fédéral, notion reprise par l'art. 3 al. 2 de la loi fédérale sur l’impôt fédéral direct du 14 décembre 1990 (LIFD - 642.11). La notion de domicile en droit fiscal rejoint donc celle du droit civil à l'art. 23 al. 1er Code civil suisse du 10 décembre 1907 (CC - RS 210) (ATF 131 V 59 consid. 5.7 p. 64 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2A.475/2003 du 26 juillet 2004 ; W. RYSER/B. ROLLI, op. cit., p. 31 ; J.-M. RIVIER, Droit fiscal suisse, 2ème éd., Lausanne 1998, note 2b p. 311).

b. Ainsi, le domicile fiscal correspond en principe au domicile civil, c’est-à-dire le lieu où la personne réside avec l’intention de s’établir (art. 23 al. 1 CC), ou le lieu où se situe le centre de ses intérêts personnels et professionnels (ATF 134 V 236 consid. 2.1 p. 239 ; 131 V 59 consid. 5.7 p. 64 ; ATA/593/2006 du 14 novembre 2006 consid. 6b). Il n’est pas nécessaire à cet égard qu’elle ait l’intention d’y demeurer pour toujours ou pour une durée indéterminée. Il suffit qu’elle veuille faire d’un endroit déterminé le centre de ses relations personnelles et économiques et qu’elle lui confère ainsi une certaine stabilité. Le lieu où une personne a déposé ses papiers ou exerce ses droits politiques n’a pas de portée déterminante (ATF 132 I 29 consid. 4.1 p. 36 ; 131 I 145 consid. 4.2 p. 150). Ces circonstances extérieures peuvent toutefois constituer des indices à l’appui du domicile fiscal lorsqu’ils sont confirmés par ailleurs par le comportement de la personne (ATA/272/2003 du 6 mai 2003 consid. 4b).

c. Pour déterminer le domicile fiscal d’une personne qui alterne les séjours à deux endroits différents, notamment lorsque le lieu où elle exerce son activité ne coïncide pas avec le lieu où elle réside, il faut examiner avec lequel de ces endroits ses relations sont les plus étroites (ATF 132 I 29 consid. 4.2 p. 36 ; 131 I 145 consid. 4.1 p. 149). Le centre des intérêts vitaux se détermine d’après l’ensemble des événements objectifs extérieurs permettant de reconnaître ces intérêts, et non simplement d’après les souhaits exprimés par la personne concernée (ATF 123 I 289 consid. 2 p. 294 ; ATA/593/2006 du 14 novembre 2006 consid. 6c).

d. Nul ne peut avoir plusieurs domiciles (art. 23 al. 2 CC). Toute personne conserve en effet son domicile aussi longtemps qu’elle ne s’en est pas créé un nouveau (art. 24 al. 1 CC). Le fardeau de la preuve lui incombe et elle doit ainsi établir non seulement qu’elle a rompu ses liens avec son précédent domicile, mais aussi qu’elle en a créé un nouveau (ATA/593/2006 du 14 novembre 2006 consid. 6d).

e. Par ailleurs, les rapports familiaux créent d’expérience, plus que tout autre contact, des relations particulières avec le lieu où ils s’exercent. Des rapports familiaux particulièrement étroits et d’autres relations – tels notamment un cercle assez important d’amis ou de connaissances, des relations sociales spécialement développées, le fait que le contribuable y possède sa propre maison ou son propre appartement - peuvent donner un poids prépondérant au lieu de séjour en fin de semaine. Ainsi, la jurisprudence admet que de jeunes célibataires ayant quitté pour la première fois, et depuis peu de temps, le foyer familial y conservent leur domicile fiscal, notamment lorsqu’ils y rentrent pendant la part la plus importante de leur temps libre et avec une grande régularité (ATF 111 Ia 41 consid. 3 p. 43 ; RDAF 1998 II 67 consid. 2c p. 70).

Le recourant affirme s'être installé en Serbie durant l'année 2002 alors qu’il n’a effectué son changement de domicile auprès de l'OCP que pour le 1er juillet 2003. Dès lors, force est d’admettre que le recourant était domicilié à Genève durant toute l'année 2002. Son recours sera rejeté sur ce point.

Pour les années 2003 et 2004, les éléments en faveur d'un domicile à Genève sont les suivants :

Absence de documents officiels serbes démontrant le paiement d'impôts dans ce pays ;

Villa familiale à Chambésy ;

Liens affectifs du fait de ses enfants majeurs à Genève ;

Soins médicaux à Genève en 2004 ;

Véhicules immatriculés à Genève ;

Acte judiciaire du 30 novembre 2004 établissant la succession de la mère du recourant et indiquant que ce dernier est domicilié à « Genève, Suisse ».

5. Il conteste la pertinence de ces indices et affirme s'être constitué un domicile fiscal en Serbie pour les années 2003 et 2004, pour les motifs suivants :

a. Il produit divers documents officiels émanant de la République de Serbie attestant qu’« il n'a pas d'obligations de payement parvenues à échéance. Payement pour les années 2002, 2003 et 2004 ». Un document similaire a, par ailleurs, été produit pour l'année 2005. Il estime que ces pièces constituent une preuve de son imposition en Serbie.

Cependant, ces documents se limitent à attester que la république de Serbie ne lui réclame pas d'arriérés d'impôts. Ils ne prouvent pas que celui-ci ait effectivement payé des impôts pendant la période concernée en Serbie. Bien au contraire, malgré les nombreuses demandes des autorités helvétiques, le recourant n'a jamais produit de justificatif d'un tel paiement.

Dès lors qu'aucun document fiscal clair émanant des autorités de la République de Serbie ne démontre que le recourant a effectivement été l'objet d'une imposition sur ses revenus et fortune, ces pièces n'établissent pas l'existence d'un domicile fiscal en Serbie.

b. Pour le recourant, la maison de Chambésy était un investissement immobilier et non la villa familiale du couple. Le compte bancaire à l'UBS permettait, par ailleurs, le paiement des frais du bien.

Un bien d'investissement permet à son propriétaire de réaliser un revenu. Or, il n'a jamais été avancé par le recourant que ce dernier recevait le produit d'un loyer par quiconque habitant la villa. Celle-ci était occupée par son épouse et ses enfants, lui-même y recevant son courrier. Au vu de ces éléments, on ne peut admettre qu'à l'époque ce bâtiment était un bien d'investissement.

c. Le recourant estime qu'il ne faut pas tenir compte du lien affectif qu'il a avec ses enfants pour déterminer son domicile, les enfants étant désormais tous majeurs.

S'il est exact que l'âge des enfants peut jouer un rôle dans l'appréciation du poids de cet indice, cela ne saurait l'invalider totalement.

d. C’est un accident de la circulation survenu lors d'une visite à Genève qui aurait occasionné diverses consultations reçues en 2004. Le recourant estime que celles-ci ne pouvaient constituer un domicile en application de l'art. 26 CC qui exclut le domicile pour les cas de séjour en hôpital.

Le recourant perd de vue que ce n'est pas l'éventuelle hospitalisation à Genève - au demeurant non démontrée - qui constitue un indice en faveur d'un domicile en Suisse. Ce sont les nombreuses consultations étalées dans le temps qui prouvent la réalité de sa présence physique à Genève. D'autre part, le fait qu'il ne soit pas allé se faire soigner en Serbie relativise l'importance du lien qu'il soutient avoir avec ce pays.

e. Les documents de légitimation serbes, ainsi qu'une attestation de domicile permanent datée du 31 août 1998 émanant du ministère de l'intérieur serbe confirmeraient que le recourant était domicilié à Belgrade. Le droit serbe, selon ce dernier, prévoyait un domicile permanent en Serbie quand bien même la personne concernée était installée à l'étranger. Par conséquent, le contribuable vivait à l'étranger de manière temporaire et, une fois qu'il était retourné en Serbie il y était automatiquement domicilié de façon définitive.

Le droit serbe ne s'appliquant pas au présent litige, et l'attestation produite datant d'une époque où il n'est pas contesté que le recourant était domicilié à Genève, ce dernier ne peut en tirer aucun bénéfice.

f. Le recourant admet que des véhicules étaient immatriculés à son nom en Suisse pendant la période litigieuse, situation qu'il explique en indiquant qu'il n'en était pas réellement le propriétaire.

Cette affirmation n'est pas propre, face à la réalité des faits, à amoindrir le poids de cet indice.

Le fait que le recourant se soit domicilié à nouveau à Genève pour effectuer des démarches en rapport avec un véhicule, tend au contraire à démontrer l'effectivité des liens entre M. I______ et le canton de Genève.

g. L'adresse à Genève constituerait, selon le recourant, une adresse de notification étant donné que le risque de vol des boîtes aux lettres en Serbie mettait en danger la vie des rentiers suisses établis dans ce pays. Par ailleurs, l'autorité de l'AVS/AI avait accepté d'acheminer le courrier en Suisse à l'adresse de notification.

A nouveau, cet argument n'est pas propre à remettre en question l'appréciation de la situation. Le fait que l’intéressé ait décidé de recevoir en Suisse des courriers aussi importants que ceux de ses rentes témoigne d’un lien fort entre celui-ci et le canton de Genève.

6. En conclusion, le recourant ne s'est pas constitué de nouveau domicile en Serbie, et est resté domicilié à Genève. Dès lors, le recours sera rejeté et les décisions rendues tant par l'AFC pour les années 2002, 2003, 2004 que par la commission seront confirmées.

7. Un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge du recourant qui succombe (art. 87 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 11 janvier 2009 par Monsieur I______ contre la décision DCRI/515/2008 de la commission cantonale de recours en matière d'impôts du 24 novembre 2008 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 1’500.- ;

dit que, conformément aux art. 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur X______, représentant son père, Monsieur I______, à la commission cantonale de recours en matière administrative ainsi qu'à l'administration fiscale cantonale.

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy et Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. :

 

 

 

M. Tonossi

 

le vice-président :

 

 

 

Ph. Thélin

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :