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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1048/2014

ATA/323/2018 du 10.04.2018 sur JTAPI/530/2017 ( LCI ) , PARTIELMNT ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1048/2014-LCI ATA/323/2018

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 10 avril 2018

3ème section

 

dans la cause

 

A______
et
Monsieur B______

représentés par Me Dominique Burger, avocate

contre

DÉPARTEMENT DE L'AMÉNAGEMENT, DU LOGEMENT ET DE L'ÉNERGIE - OAC

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 mai 2017 (JTAPI/530/2017)


EN FAIT

1) A______ (ci-après : la société) est propriétaire de quatorze parts de copropriété par étage d’un immeuble d’habitation édifié sur la parcelle n° 1______, feuille 2______, du cadastre de la commune de C______, à l’adresse 5, rue D______.

Monsieur B______ est l’associé gérant-président de la société alors que son fils E______ en est l’associé-gérant, tous deux avec signature individuelle.

2) Le 19 mars 2012, le département de l’aménagement, du logement et de l’énergie (ci-après : DALE ou le département) a délivré à M. B______ – lequel était à l’époque requérant et propriétaire – une autorisation de construire visant à créer de nouveaux appartements dans la toiture de l’immeuble en en transformant les toits et le gabarit.

Au cours de l’instruction de la requête, la commission d’architecture avait émis plusieurs préavis concernant les projets successifs.

3) Le DALE a été informé de l’ouverture du chantier le 2 mai 2012.

4) Le 10 décembre 2013, la commission d’architecture a adressé au DALE un document intitulé « préavis commission d’architecture ».

Elle avait constaté que le bâtiment avait fait l’objet de nouvelles teintes, lesquelles n’avaient pas été autorisées. L’exécution n’était pas conforme aux plans autorisés.

5) Interpellé par le DALE, M. B______ – utilisant un papier à lettre indiquant « A______» signé par un collaborateur - a indiqué, le 14 février 2014, que la personne qui avait suivi l’exécution des travaux ne travaillait plus pour lui. Il demandait à ce que les éléments non conformes à l’autorisation de construire soient précisés, afin qu’il puisse se déterminer.

6) Le 5 mars 2014, le DALE a précisé à « A______» que, contrairement aux plans visés ne varietur, la toiture n’avait pas été réalisée en zinc titane et la corniche de couronnement était saillante et non affleurante. Les teintes de la façade et de la toiture n’avaient pas été soumises à autorisation et ne convenaient pas.

Dans les vingt jours, le détail d’exécution de la corniche et de nouvelles teintes pour la façade et la toiture devaient lui être soumis.

7) Le 26 mars 2014, M. B______ s’est déterminé, toujours en utilisant un papier à lettre « A______», signé par un collaborateur. La couleur de la façade n’était pas visée par la condition n° 2 de l’autorisation de construire délivrée et n’avait en conséquence pas été présentée au département. La modification de cette couleur, qui semblait adaptée pour le constructeur, entraînerait des coûts exorbitants.

S’agissant de l’exécution de la corniche, le choix des matériaux utilisés avait été effectué en suivant les conseils des ingénieurs, lesquels avaient tenu compte des descentes de charge sur les murs porteurs de l’immeuble existant et des normes antisismiques en vigueur. Le concept choisi permettait de respecter l’isolation thermique exigée par la législation.

8) Le 8 avril 2014, A______, agissant par la plume d’une avocate, a saisi le Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) d’un recours contre le courrier du 5 mars 2014, concluant à son annulation quant à la question de la teinte des façades surélevées et de la toiture de l’immeuble.

Ce recours a été enregistré sous le n° de cause A/1048/2014.

9) Le 15 avril 2014, la commission d’architecture a souligné, à l’attention du département, que l’architecte avait annoncé sur les plans autorisés une toiture à la « Mansard » avec un revêtement en zinc titane ; de plus les dimensions des fenêtres avaient été légèrement diminuées en hauteur et le chéneau ainsi que la descente d’eau n’étaient pas intégrés dans le volume. Les façades des étages inférieurs devaient être d’une teinte plus douce, s’harmonisant avec l’architecture de l’immeuble.

10) À la demande des parties, le TAPI a suspendu la procédure A/1048/2014.

11) Par décision du 3 juillet 2014, le département a ordonné à « A______» de remettre le bâtiment dans l’état autorisé, « à savoir une expression de toiture avec un traitement de façade en zinc titane et, d’autre part, l’intégration du chéneau et de la descente d’eaux pluviales à l’intérieur du volume ». Ces travaux devaient être effectués dans un délai de nonante jours. Une amende de CHF 10'000.- était infligée au vu de la gravité objective et subjective de l’infraction commise.

12) Le 5 septembre 2014, A______, propriétaire de l’immeuble, et M. B______, agissant par leur avocate, ont saisi le TAPI d’un recours contre la décision précitée.

A______ n’était pas une entité juridique, mais le service travaux de M. B______. La toiture avait été exécutée conformément à l’autorisation. Certains plans visés ne varietur indiquaient effectivement un revêtement en zinc titane, alors que d’autres parlaient d’une toiture métal peinte. S’il avait été envisagé de mettre une couverture en zinc titane, ce choix était apparu inadéquat lors de la réalisation des travaux car il aurait entraîné des trop fortes contraintes en termes de poids. Une solution permettant de répondre aux exigences de protection contre les tremblements de terre avait été mise en place avec l’aide d’un ingénieur, et cela en respectant les exigences d’isolation thermique prévues par la législation. C’était aussi pour ces motifs que le chéneau et les descentes avaient été édifiés à l’extérieur.

La modification des chéneaux exigée était disproportionnée au vu des coûts qu’elle entraînerait et des nuisances que cela impliquerait pour les locataires. Cette modification de détail n’était pas prépondérante ; si elle l’était, elle pouvait être autorisée, cas échéant, par le biais du dépôt d’une autorisation complémentaire.

L’amende était injustifiée, disproportionnée, et d’un montant exorbitant.

13) Après avoir reçu les observations du DALE au sujet des deux recours, entendu les parties en audience de comparution personnelle, reçu un nouveau préavis de la commission d’architecture aux termes duquel elle était d’accord avec une teinte grise patinée mais demandait une variante dans laquelle le chéneau était intégré à l’intérieur des panneaux de façades, à la place de l’isolation, le TAPI a de nouveau suspendu la procédure à la demande conjointe des parties.

À la demande du DALE, la procédure a été reprise le 22 septembre 2016. Les recourants ont déposé des observations complémentaires les 4 et
16 novembre 2016, auxquelles le DALE a répondu le 23 janvier 2017.

Les recourants se sont encore déterminés le 16 février 2017, le DALE produisant des observations finales le 14 mars 2017.

Le contenu de ces échanges d’écriture sera, en tant que de besoin, repris ultérieurement.

14) Par jugement du 17 mai 2017, le TAPI a rejeté les recours, et mis à la charge des recourants, pris conjointement et solidairement, un émolument de
CHF 5'000.-.

Les plans autorisés indiquaient que la façade du dernier étage, sur la surélévation, devait être exécutée en zinc titane et que le chéneau, de même que la descente d’eaux pluviales, devaient être intégrés dans cette structure. En ne le faisant pas, les recourants avaient violé l’autorisation délivrée. Ces modifications par rapport aux plans autorisés n’étaient pas mineures ; compte tenu de la position défavorable de la commission d’architecture, le dépôt d’une demande d’autorisation complémentaire était inutile car il était vain d’espérer de faire admettre que les modifications en cause étaient conformes au droit.

S’il n’était pas contesté que les coûts de remise en état seraient importants, le fait d’y renoncer constituerait une prime à l’illégalité. Dès lors, cet ordre de remise en état devait être confirmé.

Il en était de même du montant de l’amende compte tenu de la gravité des faits reprochés, le montant maximum possible étant de CHF 150’000.- dans ces circonstances. Les recourants avaient sciemment fait procéder à des travaux différents de ceux autorisés, alors même qu’ils étaient des professionnels de l’immobilier.

15) Le 15 juillet 2017, M. B______ et A______ ont saisi la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) d’un recours contre le jugement précité, concluant à l’annulation tant du jugement que des décisions initiales, subsidiairement à ce que la cause soit renvoyée au TAPI afin que ce dernier instruise la question de l’isolation de la toiture.

Aucune condition de l’autorisation de construire délivrée n’imposait aux recourants de soumettre la couleur de la façade de l’immeuble.

La mention « zinc titane » figurait sur l’un des plans autorisés, alors que les autres mentionnaient une toiture métal peinte ; en conséquence, l’exigence de ce revêtement n’était pas une condition de l’autorisation de construire et les recourants pouvaient parfaitement en choisir un autre.

Quant à l’expression de la surélévation, la commission d’architecture avait demandé tant de respecter une toiture à la « Mansard » qu’une expression contemporaine, ce qui était contradictoire. Dans une toiture à la « Mansard », les chéneaux n’étaient pas intégrés dans le toit contrairement à ce qui était exigé d’eux.

Le rétablissement de la situation voulu par le département entraînait des coûts disproportionnés alors même que les choix effectués étaient cohérents et adaptés.

Si les travaux requis devaient être exécutés, ils dureraient entre six et huit mois, nécessiteraient la pose d’un échafaudage complet, poseraient des problèmes complexes de droit civil dès lors que les appartements étaient occupés soit par des nouveaux propriétaires soit par des locataires et que leurs coûts seraient importants.

L’amende administrative était excessive.

De plus, le TAPI n’avait pas instruit les aspects de l’isolation alors même que l’audition de témoins avait été demandée à ce sujet.

16) Le 25 août 2017, le département a conclu au rejet du recours.

S’agissant de la couleur de la façade, l’avis d’ouverture de chantier rappelait que les matériaux de couverture et de façade devaient être soumis au département. La couleur d’un bâtiment était soumise à autorisation en application de la législation.

S’agissant du revêtement de la façade, le zinc titane était mentionné dans un des plans. Les autres plans n’indiquaient pas « toiture métal peinte » mais « toiture métal/pente : 5% ». Cette indication n’était pas contradictoire entre les plans, dès lors que le zinc titane était un métal.

L’intégration des chéneaux et des descentes dans la surélévation de toiture ressortait de l’autorisation de construire délivrée. Il n’avait pas été envisagé de réaliser une véritable toiture à la « Mansard » mais bien une adaptation vers un style contemporain.

Dans ces circonstances, le fait d’ordonner le rétablissement de la situation légale respectait le principe de la proportionnalité ; il en était de même de l’amende infligée.

17) Le 4 septembre 2017, les recourants se sont déterminés. Ils avaient déposé une demande d’autorisation de construire par l’intermédiaire d’un architecte avec lequel ils s’étaient trouvés en litige. Les éventuelles divergences entre l’autorisation délivrée et celle réalisée n’étaient en aucun cas volontaires mais s’étaient fondées sur les recommandations des experts consultés lors de la construction. Diverses variantes avaient été étudiées, ce qui avait entraîné la suspension des recours devant le TAPI pour être in fine écartées.

18) Le 14 novembre 2017, le juge délégué a procédé à un transport sur place, en présence des parties.

D’entrée de cause, ces dernières ont convenu que la couleur des étages inférieurs n’avait plus à être modifiée, la teinte initiale ayant été adoucie par le temps.

S’agissant de la couleur de la surélévation, une modification était nécessaire, laquelle pouvait être réalisée par de la peinture plutôt qu’en remplaçant la couverture existante par du zinc titane, ce que les recourants étaient d’accord de réaliser.

Il n’était pas demandé de modifier la taille des fenêtres.

Restaient donc litigieuses la question des chéneaux et descentes, ainsi que celle de l’amende.

Il a été constaté que l’immeuble 3, rue D______ avait des chéneaux et des descentes extérieurs, sa toiture était du genre « Heimatstil ». L’immeuble 7, rue D______ avait aussi un chéneau et une descente extérieurs, comme l’immeuble 11, rue D______.

Il en allait de même des bâtiments 2, rue D______ et 4 à 12, rue F______. Les immeubles 4 et 6, rue D______, plus contemporains, n’avaient pas de chéneaux ni de descentes extérieurs. Les immeubles 4 à 12, rue F______ avaient des avant-toits, alors que celui de l’immeuble 5, rue D______ avait été retiré dans le cadre de la surélévation. M. B______ a précisé que, si la surélévation devait être repeinte de couleur gris zinc titane, il en serait de même de la descente et du chéneau, ce qui diminuerait leur impact visuel.

19) Le 18 décembre 2017, les recourants ont maintenu leurs conclusions, insistant sur le fait que, selon les pièces produites, l’intégration des chéneaux dans la toiture serait la cause d’un pont thermique entraînant un risque élevé de condensation à l’intérieur des appartements existants.

20) Le même jour, le département a confirmé être d’accord avec le maintien de la situation actuelle concernant la taille des fenêtres réalisées, la teinte utilisée pour la façade d’origine et le maintien des matériaux utilisés sur la surélévation pour autant qu’ils soient peints.

En revanche, s’agissant des chéneaux, la remise en état était maintenue. Dans une toiture à la « Mansard », un tel chéneau ne se trouvait pas en haut de la toiture mais bien à sa base, soit au niveau de la corniche d’origine. Si des toitures à la « Mansard » pouvaient avoir des chéneaux apparents, c’était à cet endroit, et pas au-dessus de l’étage surélevé. Cet élément n’était pas touché par la présence de chéneaux et de descentes extérieurs sur les bâtiments voisins, lesquels étaient d’un autre style architectural.

À cette détermination était jointe une consultation de l’architecte cantonal maintenant la position antérieure de la commission d’architecture.

21) Sur quoi, la cause a été gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du
12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Selon l’art. 1 al. 1 de la loi sur les constructions et les installations diverses du 14 avril 1988 (LCI - L 5 05), sur tout le territoire du canton nul ne peut, sans y avoir été autorisé, notamment : élever en tout ou partie une construction ou une installation, notamment un bâtiment locatif, industriel ou agricole, une villa, un garage, un hangar, un poulailler, un mur, une clôture ou un portail (let. a) ; modifier même partiellement le volume, l’architecture, la couleur, l’implantation, la distribution ou la destination d’une construction ou d’une installation (let. b) ; démolir, supprimer ou rebâtir une construction ou une installation (let. c) ; modifier la configuration du terrain (let. d).

3) a. Lorsque l’état d’une construction, d’une installation ou d’une autre chose n’est pas conforme aux autorisations délivrées en application de LCI et de ses dispositions d’exécutions, le département peut notamment en ordonner la remise en état, la réparation, la modification, la suppression ou la démolition (art. 129 let. e et 130 LCI).

b. Les propriétaires ou leurs mandataires, les entrepreneurs et les usagers sont tenus de se conformer aux mesures ordonnées par le DALE en application des art. 129 et 130 LCI (art. 131 LCI). Le département notifie aux intéressés, par lettre recommandée, les mesures qu’il ordonne. Il fixe un délai pour leur exécution, à moins qu’il n’invoque l’urgence (art. 132 al. 1 LCI).

De jurisprudence constante, pour être valable, un ordre de mise en conformité doit respecter cinq conditions cumulatives :

-         l'ordre doit être dirigé contre le perturbateur ;

-         les installations en cause ne doivent pas avoir été autorisées en vertu du droit en vigueur au moment de leur réalisation ;

-         un délai de plus de trente ans ne doit pas s'être écoulé depuis l'exécution des travaux litigieux ;

-         l'autorité ne doit pas avoir créé chez l'administré concerné, que ce soit par des promesses, par des infractions, des assurances ou encore un comportement des conditions telles qu'elle serait liée par la bonne foi ;

-         l'intérêt public au rétablissement d'une situation conforme au droit doit l'emporter sur l'intérêt privé de l'intéressé au maintien des installations litigieuses (ATA/1411/2017 du 17 octobre 2017 consid. 4a et les références citées).

c. Le principe de la proportionnalité, garanti par l’art. 5 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), exige qu’une mesure restrictive soit apte à produire les résultats escomptés et que ceux-ci ne puissent pas être atteints par une mesure moins incisive. En outre, il interdit toute limitation allant au-delà du but visé et exige un rapport raisonnable entre celui-ci et les intérêts publics ou privés compromis (ATF 126 I 219 consid. 2c et les références citées).

Un ordre de démolir une construction ou un ouvrage édifié sans permis de construire et pour lequel une autorisation ne pouvait être accordée, n'est pas contraire au principe de la proportionnalité. Celui qui place l'autorité devant un fait accompli doit s'attendre à ce qu'elle se préoccupe davantage de rétablir une situation conforme au droit, que des inconvénients qui en découlent pour le constructeur (ATF 108 Ia 216 consid. 4 ; ATA/1411/2017 précité consid. 5b).

L'autorité renonce toutefois à un ordre de remise en état si les dérogations à la règle sont mineures, si l'intérêt public lésé n'est pas de nature à justifier le dommage que la démolition causerait au maître de l'ouvrage ou encore s'il y a des chances sérieuses de faire reconnaître la construction comme conforme au droit qui aurait changé dans l'intervalle. Même un constructeur qui n'est pas de bonne foi peut invoquer le principe de la proportionnalité (arrêt du Tribunal fédéral 1C_114/2011 du 8 juin 2011 consid. 4.1 et les références citées ; ATA/1411/2017 précité consid. 5b et les références citées).

4) a. En l’espèce, il est établi que les recourants n’ont pas respecté l’autorisation de construire en ne soumettant pas les couleurs du projet à l’autorité et en n’incorporant pas les chéneaux et la descente des eaux pluviales à l’intérieur de la structure de la surélévation.

b. S’agissant des couleurs, il sera donné acte au département de ce qu’il n’exige plus la modification de celle des étages inférieurs et il sera donné acte au recourant de son accord de repeindre la surélévation par une peinture de teinte « gris zinc titane ».

c. L’autorité demande que les descentes d’eaux pluviales et les chéneaux soient intégrés dans le volume de la surélévation, en se fondant sur la position de la commission d’architecture, appuyée par celle de l’architecte cantonal.

Toutefois, lors du transport sur place, la chambre administrative a constaté que de nombreux immeubles édifiés dans le voisinage du bâtiment litigieux disposaient de chéneaux et de descentes qui n’étaient pas intégrées dans le corps du bâtiment.

Les explications des recourants aux termes desquelles la modification demandée affaiblirait l’efficacité énergétique du bâtiment par la création d’un pont de froid sont convaincantes et n’apparaissent pas être contestées par l’autorité, cette dernière ne mettant en avant que des aspects esthétiques.

À ces éléments s’ajoutent le coût des travaux – qui n’est à lui seul pas déterminant dès lors qu’il viserait à rétablir une situation conforme au droit – ainsi que les nuisances que ce chantier avait entraînées aussi bien pour les propriétaires des étages inférieurs que pour les locataires des appartements directement concernés par lesdites interventions, nuisances qui seraient renouvelées en cas de remise en état.

Dans ces circonstances, la chambre administrative admettra que la remise en état demandée, soit l’intégration des chéneaux et des descentes d’eau pluviale dans le volume de la surélévation, ne respecte pas le principe de la proportionnalité. La mesure que les recourants ont d’ores et déjà accepté d’exécuter, soit de peindre l’ensemble de la surélévation – y compris les chéneaux et les descentes – en gris zinc titane, si elle n’est certes pas totalement satisfaisante d’un point de vue esthétique, doit être préférée.

Dans cette mesure, le recours sera partiellement admis.

5) a. Est passible d'une amende administrative de CHF 100.- à CHF 150'000.- tout contrevenant à la LCI, à ses règlements d'application ainsi qu'aux ordres du DALE (art. 137 al. 1 LCI). Toutefois, lorsqu'une construction, une installation ou tout autre ouvrage a été entrepris sans autorisation mais que les travaux sont conformes aux prescriptions légales, le montant maximum de l'amende est de CHF 20'000.- (art. 137 al. 2 LCI). Il est tenu compte, dans la fixation du montant de l'amende, du degré de gravité de l'infraction (art. 137 al. 3 in initio LCI). Si l’infraction a été commise dans la gestion d’une personne morale, d’une société en commandite, d’une société en nom collectif ou d’une entreprise à raison individuelle, les sanctions sont applicables aux personnes qui ont agi ou auraient dû agir en son nom, la personne morale, la société ou le propriétaire de l’entreprise individuelle répondant solidairement des amendes. Les sanctions sont applicables directement aux sociétés ou entreprises précitées lorsqu’il n’apparaît pas de prime abord quelles sont les personnes responsables (art. 137 al. 4 LCI).

L’autorité qui prononce une amende administrative ayant le caractère d’une sanction, prévue par les législations cantonales et de nature pénale (ATA/824/2015 du 11 août 2015 et les références citées), doit également faire application des règles contenues aux art. 47 ss du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0 ; principes applicables à la fixation de la peine ; par renvoi de l’art. 1 let. a de la loi pénale genevoise du 17 novembre 2006 – LPG - E 4 05). Il est ainsi nécessaire que le contrevenant ait commis une faute, fût-ce sous la forme d’une simple négligence. Selon la jurisprudence constante, l’administration doit faire preuve de sévérité afin d’assurer le respect de la loi et jouit d’un large pouvoir d’appréciation pour infliger une amende. La chambre administrative ne la censure qu’en cas d’excès ou d'abus. Enfin, l’amende doit respecter le principe de la proportionnalité (art. 36 al. 3 Cst. ; ATA/824/2015 précité). Il y a lieu de tenir compte de la culpabilité de l’auteur et de prendre en considération, notamment, les antécédents et la situation personnelle de ce dernier (art. 47 al. 1 CP). La culpabilité est déterminée par la gravité de la lésion ou de la mise en danger du bien juridique concerné, par le caractère répréhensible de l’acte, par les motivations et les buts de l’auteur et par la mesure dans laquelle celui-ci aurait pu éviter la mise en danger ou la lésion, compte tenu de sa situation personnelle et des circonstances extérieures (art. 47 al. 2 CP ; ATA/824/2015 précité).

b. En l’espèce, l’amende infligée par l’autorité et confirmée par l’autorité judiciaire de première instance a été fixée à CHF 10’000.-. Au vu du maximum légal admissible, cette somme apparaît, à tout le moins, mesurée : les recourants se sont éloignés de l’autorisation de construire qu’ils avaient sollicitée avec une légèreté étonnante et ils ne peuvent se retrancher derrière les carences de la personne à qui ils avaient confié la réalisation de ces travaux.

Sur ce point, leur recours sera en conséquence rejeté.

6) Au vu de ce qui précède, le recours de A______ et de M. B______ sera partiellement admis.

Le jugement du TAPI du 17 mai 2017 et la décision du 3 juillet 2014 seront confirmés en ce qu’ils infligent aux intéressés une amende administrative de CHF 10'000.-. Les recourants devront non pas poser sur la façade de la surélévation une couverture métallique en zinc titane ni intégrer les chéneaux et la descente des eaux pluviale à l’intérieur du volume, mais peindre cette façade, ces chéneaux et cette descente avec une teinte «  gris zinc titane ». Ils seront annulés dans la mesure où ils leur ordonnent de modifier la couleur des étages inférieurs du bâtiment.

Un émolument de CHF 1’500.- sera mis à la charge conjointe et solidaire des recourants, qui succombent dans une très large mesure (art. 87 al. 1 LPA).

Aucune indemnité de procédure ne leur sera allouée pour le même motif, pas plus qu’au département, qui dispose d'un secteur juridique pour traiter ce type de procédure (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 15 juin 2017 par A______ et par Monsieur B______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 mai 2017 ;

au fond :

l’admet partiellement au sens des considérants;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 17 mai 2017 et la décision du département de l’aménagement, du logement et de l’énergie en tant qu’ils ordonnent aux recourants de traiter la façade de la surélévation en zinc titane et intégrer les chéneaux et la descente des eaux pluviales à l’intérieur du volume ainsi que de modifier la couleur des étages inférieurs ;

dit qu’en lieu et place les recourants devront peindre la façade de la surélévation, les chéneaux et la descente des eaux pluviales avec une peinture de couleur « gris zinc titane » ;

les confirme au surplus ;

met à la charge conjointe et solidaire de A______ et de Monsieur B______ un émolument de CHF 1'500.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

 communique le présent arrêt à Me Dominique Burger, avocate des recourants, au département de l'aménagement, du logement et de l'énergie, ainsi qu’au Tribunal administratif de première instance.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, juge, M. Berardi, juge suppléant.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

la greffière :