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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4077/2006

ATA/322/2007 du 19.06.2007 ( FIN ) , REJETE

En fait
En droit
Par ces motifs
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4077/2006-FIN ATA/322/2007

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 19 juin 2007

dans la cause

 

Monsieur F______
représenté par Me Jean-Luc Ducret, avocat

contre

COMMISSION CANTONALE DE RECOURS EN MATIÈRE D'IMPÔTS

et

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE


 


1. Le 12 mai 2004, l’office des faillites (ci-après : l’OF) a publié les conditions d’une vente immobilière aux enchères portant sur la parcelle n°______ du registre foncier de la commune de Collex-Bossy. Sous chiffre 8, page 4 des conditions figure une mention selon laquelle des droits d’enregistrement seront perçus par l’administration fiscale cantonale (ci-après : l’AFC) à hauteur de 3%, en application de la loi sur les droits d’enregistrement du 9 octobre 1969 (LDE – D 3 30) et mis à la charge de l’adjudicataire.

2. La vente a eu lieu le 17 juin 2004.

La parcelle a été attribuée pour un prix de CHF 940'000.- à Madame F______, née B______ et à son époux, Monsieur F______ (ci-après : les consorts F______).

3. Par courrier daté du 22 juin 2004 et parvenu auprès du service de l’enregistrement de l’AFC le lendemain, l’OF a demandé à ce qu’il soit procédé à l’enregistrement de la vente.

4. A teneur du bordereau n° 840/2004 établi le 23 juillet 2004 et notifié à l’OF le montant des droits à valoir sur la vente immobilière s’élevait à CHF 28'200.-.

Agissant seul par lettre datée du 5 septembre 2004 et reçue par le service d’enregistrement le 8, M. F______ a demandé à bénéficier d’une réduction sur le montant des droits d’enregistrement, la transaction « tombant sous la loi entrée en vigueur en mars 2004 ».

5. Par lettre recommandée du 1er novembre 2004, le service de l’enregistrement a rejeté la réclamation au motif que les droits d’enregistrement étaient définitivement acquis à l’Etat et ne pouvaient être restitués en application de l’article 8 alinéa 9 LDE. En cas d’adjudication d’immeuble résultant de folles enchères ou de surenchères (art. 37 LDE), les droits perçus sur la précédente adjudication étaient restitués à la personne qui les avaient acquittés. En cas d’exercice d’un droit de préemption légal (art. 40 LDE), les droits perçus sur le premier acte de vente étaient remboursés à la personne qui les avait acquittés, de même qu’en cas de rescision de vente par décision judiciaire au sens de l’article 181 LDE. Aucune de ces hypothèses n’était réalisée. De surcroît, l’adjudicataire n’avait pas payé une somme supérieure au montant qui lui était réclamé, ne soutenait pas non plus qu’une erreur de calcul ou de taux avait été commise par l’administration, voire que tout ou partie de la taxation constituait manifestement un déni de justice au sens de l’article 181 alinéa 1er lettre a à c LDE.

Il n’appartenait pas à l’AFC de présumer, pour la taxation, d’éventuelles intentions ou situations extrinsèques aux actes et opérations qui étaient soumis aux fins d’enregistrement.

La réclamation était dès lors rejetée, le recourant étant en outre informé qu’il pouvait faire recours dans les 30 jours auprès de la commission cantonale de recours en matière d’impôts (ci-après : la CCRMI).

6. Le 8 novembre 2004, le notaire mandaté par les consorts F______ a annoncé au service de l’enregistrement qu’il entendait recourir auprès de la CCRMI.

7. Il a relancé le 4 mai 2005 ledit service, qui lui a annoncé avoir mis le dossier « en suspens », vu le recours annoncé auprès de la CCRMI. Il ressortait toutefois des renseignements requis du service juridique de l’AFC qu’aucune procédure n’était en cours auprès de cette commission.

8. Par lettre datée du « 14 janvier 2003 » (sic), reçue le 20 mai 2005, le notaire des époux F______ a convenu qu’aucun recours n’avait été déposé. Il demandait toutefois une restitution des droits d’enregistrement en équité.

9. Le 23 mai 2005, l’AFC a répondu à la lettre datée du « 14 janvier 2003 » qu’elle avait reçue le 20 mai 2005. Faute d’avoir été contestée auprès de la CCRMI la décision sur réclamation était devenue définitive.

10. Le 12 juillet 2005, le notaire a requis l’annulation du bordereau de vente immobilière en application de l’article 178 LDE. Le montant réclamé était inexact, ne correspondait pas à celui prévu par l’article 8A LDE, entré en vigueur le 4 mars 2004, selon lequel les droits d’enregistrement étaient réduits de CHF 15'000.- pour les opérations immobilières n’excédant pas CHF 1'000'000.- et ayant pour but le transfert à l’acquéreur d’un immeuble destiné à lui servir de résidence principale.

Le 27 juillet 2005, l’AFC a rendu une nouvelle décision sur réclamation. La réclamation devait être déclarée irrecevable, pour avoir été introduite plus de onze mois après l’enregistrement du procès-verbal d’adjudication. La question de l’application de l’article 182 LDE avait déjà fait l’objet d’une décision du 1er novembre 2004, adressée à M. F______. Or, celle-ci n’avait pas été attaquée en temps utile auprès de la CCRMI et était ainsi devenue définitive.

11. Le 2 septembre 2005, le notaire s’est pourvu devant la CCRMI. Il a réclamé l’application de l’article 8A LDE.

Le 3 mars 2006, l’AFC a répondu au recours. La lettre du notaire du 12 juillet 2005, pour autant qu’elle soit traitée comme une réclamation contre le bordereau du 23 juillet 2004, était manifestement tardive. Même si ce notaire envisageait de poursuivre des discussions avec l’administration compétente, il lui appartenait de préserver les droits de ses mandants en déposant un recours.

12. Le 25 septembre 2006, la CCRMI a rejeté le recours des consorts F______ au motif qu’il était établi que le bordereau litigieux avait été expédié par pli du 23 juillet 2004 et reçu au plus tard le 2 août 2004. Le délai de réclamation de 30 jours venait ainsi à échéance le 1er septembre de la même année et la réclamation interjetée le 12 juillet 2005 était tardive. Il n’y avait pas de cas de force majeure justifiant ce retard.

13. Le 3 novembre 2006, le notaire a déposé un recours intenté au seul nom de M. F______ contre la décision de la CCRMI. Son mandant avait intérêt au recours, dès lors qu’il demandait une réduction des droits d’enregistrement en application de l’article 8A alinéa 1er LDE dans sa teneur depuis le 4 mars 2004. Les consorts F______ avaient reçu le 6 juillet 2005 un bordereau définitif relatif aux frais et charges de l’OF, de sorte que le délai de recours à la CCRMI n’avait commencé à courir qu’à cette date.

14. Le 4 décembre 2006, la CCRMI a exposé que l’acte de réception de sa propre décision avait été signé par la partie recourante le 5 octobre 2006.

15. Le 12 décembre 2006, l’AFC a répondu au recours.

Elle avait procédé à l’enregistrement de la vente de la parcelle n°______ du registre foncier de la commune de Collex-Bossy en établissant un bordereau le 23 juillet 2004. Le 5 septembre 2004, M. F______ avait demandé une restitution des droits perçus, selon lui, à tort. Cette réclamation avait fait l’objet d’une décision le 1er novembre 2004 la rejetant.

Le 8 novembre 2004, le notaire avait indiqué à l’AFC qu’il entendait recourir contre la décision du 1er novembre 2004 mais faute d’une telle démarche, cette dernière était entrée en force. Le 12 juillet 2005, le notaire avait envoyé à l’AFC une copie du bordereau définitive de vente immobilière établie par l’OF en date du 6 juillet 2005. Le 12 du même mois, le notaire avait déposé une nouvelle réclamation déclarée irrecevable au motif qu’elle avait été formulée plus de 11 mois après l’enregistrement du procès-verbal d’adjudication.

La CCRMI avait rejeté le recours déposé par-devant elle pour le même motif.

16. Le 15 décembre 2006, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

 

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Il sied de circonscrire avec précision l’objet du litige. La CCRMI dans sa décision du 25 septembre 2006 a tenu pour établi que le bordereau de taxation n°840/2004 du 23 juillet 2004 avait été régulièrement notifié et que le recourant en a eu connaissance à temps pour le contester utilement le 5 septembre 2004. Il est établi également que sa réclamation a été rejetée par décision de l’autorité intimée du 1er novembre 2004. Dans sa seconde décision, datée du 27 juillet 2005, l’AFC n’a discuté que de la question de la tardiveté de la nouvelle réclamation et la CCRMI en a fait de même dans sa décision du 25 septembre 2006.

3. Il y a donc lieu de déterminer si c’est à juste titre que l’AFC puis la CCRMI ont considéré comme tardive la réclamation déposée le 12 juillet 2005 par le notaire du recourant.

4. a. Les délais de réclamation et de recours fixés par la loi sont des dispositions impératives de droit public. Ils ne sont, en principe, pas susceptibles d'être prolongés (art. 16 al. 1 1ère phrase LPA), restitués ou suspendus, si ce n'est par le législateur lui-même (SJ 1989 p. 418). Ainsi, celui qui n'agit pas dans le délai prescrit est forclos et la décision en cause acquiert force obligatoire (SJ 2000 I 22 et références citées).

b. Les cas de force majeure restent réservés (art. 16 al. 1 2ème phrase LPA). A cet égard, il y a lieu de préciser que tombent sous cette notion les événements extraordinaires et imprévisibles qui surviennent en dehors de la sphère d'activité de l'intéressé et qui s'imposent à lui de l'extérieur de façon irrésistible (SJ précitée).

c. En matière de droit d’enregistrement, les délais de réclamation et de recours sont également de trente jours (art. 178 al. 2 et 6 LDE).

En l’espèce, le recourant n’a manifestement pas agi à temps par-devant la CCRMI à réception de la décision du 1er novembre 2004. Les démarches subséquentes entamées par le notaire ne pouvaient pas faire renaître le délai manqué, comme les autorités inférieures l’ont constaté à juste titre.

Ce seul motif suffit au rejet du recours.

5. Par souci de complétude, il convient de mentionner que le recourant n’a pas demandé la restitution de droits prélevés indûment, dans le délai d’une année à compter de l’enregistrement de l’acte, au sens de l’article 182 alinéa 1er LDE. Il lui aurait fallu alors prouver qu’il avait payé une somme supérieure au montant qui lui était réclamé ou que l’administration avait commis une erreur de calcul ou de taux ou encore que tout ou partie de la taxation constituait manifestement un déni de justice. Quels qu’aient pu être les arguments du recourant à l’encontre de la décision de taxation du 23 juillet 2004, il faut constater qu’il ne peut pas non plus se prévaloir des dispositions exceptionnelles de l’article 182 LDE, faute de s’en être réclamé à temps.

6. Mal fondé, le recours sera rejeté. Son auteur, qui succombe, sera condamné aux frais de la procédure, arrêtés à CHF 1'000.- en application de l’article 87 alinéa 1er LPA.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 novembre 2006 par Monsieur F______ contre la décision de la commission cantonale de recours en matière d'impôts du 25 septembre 2006 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 1'000- ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Jean-Luc Ducret, notaire mandaté par le recourant ainsi qu'à la commission cantonale de recours en matière d'impôts et à l'administration fiscale cantonale.

Siégeants : M. Paychère, président, Mmes Bovy et Hurni, M. Thélin juges, M. Grodecki, juge suppléant.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le président :

 

 

F. Paychère

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :