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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3223/2008

ATA/206/2009 du 28.04.2009 ( DI ) , ADMIS

Descripteurs : ; INTÉRÊT ACTUEL
Normes : 24b.LMSI
Résumé : Recours contre une interdiction de pénétrer dans le périmètre de la FanZone (EURO 2008). La retransmission d'un match de football dans le cadre de l'Euro 2008 dans la FanZone créée à l'occasion de l'Euro 2008 peut êter assimilée à une retransmission sportive. L'acte isolé commis par le recourant (coup de pied ou de genou) ne tombe pas sous le coup de la LMSI ou de l'OMSI.
En fait
En droit

 

RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3223/2008-DI ATA/206/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 28 avril 2009

 

dans la cause

 

 

Monsieur U______
représenté par Me Thomas Barth, avocat

 

 

 

contre

 

 

 

DÉPARTEMENT DES INSTITUTIONS

 

 

 

et

 

 

 

OFFICIER DE POLICE


 


EN FAIT

1. Monsieur U______, domicilié à F______ dans le canton de Vaud, exerce la profession de caméraman à titre indépendant. Il effectue parfois des missions pour la Télévision Suisse Romande (ci-après : TSR), comme c’était le cas au moment de l’Eurofoot en juin 2008.

2. Le 15 juin 2008, M. U______ a voulu pénétrer dans la « FanZone » située sur la plaine de Plainpalais sur laquelle se trouvait un écran géant de télévision et le match qui se jouait ce soir-là était retransmis en direct. Aux entrées de ce périmètre, se trouvaient des « stadiers », des agents de sécurité et des policiers. M. U______ portait un sac à dos dans lequel il avait placé des pommes et une bouteille d’eau. Toute personne pénétrant dans le périmètre en question faisait l’objet d’une fouille et il était interdit d’apporter des boissons, des parapluies, etc.

L’agente de sécurité qui a ouvert le sac à dos de M. U______ a informé ce dernier du fait qu’il n’était pas autorisé à pénétrer dans la « FanZone » avec ces aliments mais qu’il devrait acheter de l’eau sur place. L’agente de la sécurité a appelé un collègue. Peu à peu, le ton est monté car l’agent ne voulait pas laisser entrer M. U______ avec sa nourriture et sa bouteille d’eau. Enervé, l’intéressé a alors pris cette bouteille d’eau et en a aspergé l’un des deux agents. Il a insulté l’un et l’autre. Six gendarmes sont intervenus et l’ont menotté. M. U______ s’est débattu et a insulté les policiers, les traitant de « cons, imbéciles et connards ».

M. U______ a contesté avoir été violent, mais trois plaintes ont été déposées contre lui, l’une par Monsieur M______, agent de sécurité, qui a été giclé, insulté puis bousculé par l’intéressé, l’autre par Monsieur B______, gendarme, qui a déposé plainte pour menaces et enfin la troisième, par Monsieur F______, gendarme également, pour opposition aux actes de l’autorité.

Un témoin, Monsieur S______, gendarme, a constaté que M. U______ avait vidé une bouteille d’eau sur un agent de sécurité, qu’il avait insulté les agents présents et qu’il avait tenté de donner un coup de genou à un collègue sur place, soit le sous-brigadier C______.

3. M. U______ a été entendu, le même jour, par des inspecteurs de la police judiciaire, puis par un commissaire de police, et prévenu de voies de faits, injures, violences ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires, subsidiairement opposition aux actes de l’autorité. Il a déclaré qu’il ignorait qu’il était interdit d’entrer dans le périmètre de la « FanZone » avec des denrées alimentaires. Il avait expliqué à l’agente de sécurité qu’il devait travailler pour la TSR jusqu’à minuit, raison pour laquelle il avait apporté ses pommes et sa bouteille d’eau. Le responsable venu sur place avait confirmé l’interdiction d’amener des victuailles dans cette enceinte et c’était à partir de ce moment que tout avait dégénéré. M. U______ a admis avoir proféré des insultes et aspergé l’agent avec le contenu de la bouteille d’eau. Il admettait avoir levé un genou non pas pour donner un coup mais pour que le gendarme recule. Il n’avait jamais voulu frapper les agents.

4. Par décision du 15 juin 2008 prise à 22h38, le commissaire de police a prononcé, à l’encontre de M. U______, une interdiction de pénétrer dans le périmètre de la « FanZone », selon le plan annexé à ladite décision, valable pour une durée de quinze jours, soit jusqu’au 30 juin 2008. Cette dernière pouvait faire l’objet d’un recours dans les trente jours auprès du Tribunal administratif, mais ce recours ne déploierait pas d’effet suspensif. De plus, cette interdiction était assortie de la menace de la peine prévue par l’art. 292 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 (CP - RS 311.0). Elle reposait sur la loi fédérale instituant des mesures visant au maintien de la sûreté intérieure du 21 mars 1997 (LMSI - RS 120) et sur l’ordonnance d’application de cette dernière du 27 juin 2001 (OMSI - RS 120.2) ainsi que sur le règlement cantonal d’application des dispositions de la loi fédérale instituant des mesures visant au maintien de la sûreté intérieure en matière de violence lors de manifestations sportives du 22 novembre 2006 (RMVMS - F 3 18.02). De plus, cette décision spécifiait qu’elle pouvait faire l’objet d’un recours dans les trente jours auprès du département des institutions (ci-après : le département).

5. Par acte posé le 14 juillet 2008, M. U______ a recouru contre cette décision auprès dudit département, sans prendre de conclusions formelles, mais en relevant qu’elle lui paraissait disproportionnée par rapport à la faute commise, car il n’avait fait que "jeter de l’eau sur un agent de sécurité".

Les policiers l’avaient pris pour « Ben Laden » et n’avaient pas géré correctement la situation. Un agent avait tenté de l’étouffer publiquement. Le fait qu’il soit fiché dans Hoogan et FedPol comme étant dangereux pour la sûreté intérieure était grotesque. Comme caméraman, il ne trouvait pas normal que, pour une histoire d’eau, certains de ses futurs contrats puissent être compromis.

A l’appui de son recours, M. U______ a produit un courrier que lui avait adressé l’office fédéral de la police le 20 juin 2008, pour l’informer que « des données vous concernant ont été enregistrées dans le système d’informations Hoogan en vertu de l’art. 24a al. 10 LMSI. Vous serez informé par écrit de l’effacement des données vous concernant ». Etait annexée une copie de l’art. 24a LMSI.

6. Par décision du 7 août 2008, le département a rejeté le recours et mis à la charge de M. U______ un émolument de CHF 250.-. Ce faisant, il a considéré que même si l’interdiction de pénétrer avait été exécutée, il pouvait être renoncé à l’exigence d’un intérêt actuel. Au vu des faits précités, la mesure n’était nullement disproportionnée.

7. Par acte posté le 8 septembre 2008 et adressé au Tribunal administratif, M. U______ a recouru en concluant à l’annulation de la décision du département du 7 août 2008 et au fait que le tribunal de céans devait inviter l’office fédéral de la police à procéder à la radiation des inscriptions relatives aux données "le concernant, enregistrées dans le système d’informations Hoogan", suite à la décision du département des institutions du 7 août 2008, "désormais annulée".

8. Le 25 août 2008, le Procureur général a informé le conseil de M. U______ que la procédure pénale ouverte à l’encontre de ce dernier (cause P/9976/2008) du chef de voies de faits, injures, violences ou menaces contre les autorités et les fonctionnaires, voire opposition aux actes de l’autorité, avait été classée.

9. Le 15 septembre 2008, le juge délégué a requis du Parquet, la production de cette procédure pénale.

Celle-ci comporte les plaintes de MM. M______, B______, et F______, ainsi que les déclarations de MM. S______ et U______ et le rapport de police du 15 juin 2008. Outre le procès-verbal d’interrogatoire du commissaire de police, se trouvent le mandat d’amener, l’interdiction de pénétrer dans une région déterminée et un formulaire, signé par M. U______ le 15 juin 2008 également, intitulé "Information concernant la procédure lors du prélèvement d’un frottis de la muqueuse jugale afin d’établir un profil d’ADN et d’enregistrer ledit profil dans le système d’information".

La procédure P/9976/2008 a été classée le 18 juin 2008 par le Parquet "vu l’interpellation, la garde à vue et l’interdiction d’entrée prononcée, sauf faits nouveaux".

10. Dans le délai qui lui avait été fixé, le département a produit son dossier. L’officier de police a déposé sa réponse le 15 octobre 2008, en concluant à l’irrecevabilité du recours faute d’intérêt actuel, la mesure ayant été exécutée. Si le Tribunal administratif devait entrer en matière, il devrait constater que les conditions d’application de l’art. 24b LMSI étaient remplies, de même que celles de l’art. 21a let h OMSI. Enfin, le tribunal de céans était incompétent pour connaître de l’inscription du recourant dans le fichier Hoogan.

11. Les parties ont été entendues lors d’une audience de comparution personnelle le 7 novembre 2008, à l’exception du département, excusé.

a. A cette occasion, M. U______ a déclaré que son recours n’avait pas d’objet « si ce n’est que l’inscription dans le système Hoogan en découle ». Il n’avait pas entrepris de démarches auprès d’un office fédéral afin d’obtenir l’annulation de l’inscription de ses données personnelles dans le système Hoogan, pas plus que celles des données relatives à l’ADN. Il a persisté à nier avoir frappé quiconque. En raison de l’inscription dans ce registre, il redoutait de se voir refuser l’accès à des stades ou l’octroi d’accréditations en Suisse ou à l’étranger, alors que son métier consistait à filmer des manifestations sportives. Depuis ces faits, il n’avait cependant jamais travaillé à l’étranger et n’avait pas fait l’objet d’une mesure d’interdiction de stade ou de refus d’accréditation en Suisse.

b. La représentante de l’officier de police a maintenu que le recours était irrecevable pour défaut d’intérêt actuel d’une part, et pour incompétence du tribunal de céans, d’autre part, s’agissant des conséquences de la décision de l’interdiction, soit de l’inscription dans le fichier, laquelle était de la compétence des autorités fédérales. Si le Tribunal administratif entrait en matière sur le fond, il devrait considérer que M. U______ avait commis une infraction ou une tentative d’infraction à l’art. 285 CP en s’opposant par la force aux gendarmes.

12. Au terme de l’audience, le juge délégué a décidé de convoquer les plaignants et le témoin pour une audience d’enquêtes.

13. Le 12 décembre 2008 ont ainsi été entendus en qualité de témoins après avoir été déliés de leur secret de fonction, l’appointé B______, Monsieur F______, Monsieur S______ puis le 28 janvier 2009, le sous-brigadier C______. M. M______ s’est excusé, étant parti à l’étranger pour un long séjour ; il n’a pas été auditionné.

a. Il résulte de la déposition des agents que ceux-ci ont été appelés par un responsable de la sécurité qui les avait priés d’éloigner le recourant. Ils avaient vu ce dernier vider le contenu d’une bouteille contre un agent de sécurité. Les gendarmes ignoraient pour quelle raison M. U______ était en colère. Ils l’avaient prié de se calmer mais celui-ci les avait insultés. Ils lui avaient mis des "serre-flex", soit des bandes en plastique, qui n’étaient pas des menottes. M. U______ les avait traités de "connards, de salauds" etc., ce que l’intéressé a contesté. Selon les déclarations concordantes des agents que ceux-ci avaient pour les raisons sus-exposées, prié M. U______ de se calmer mais qu’il les avaient insultés. Ils n’avaient pas vu la carte de presse que l’intéressé a dit avoir brandie. Les agents ont nié avoir fait une prise de cou à M. U______. En revanche, ce dernier avait tenté de donner un coup de genou au sous-brigadier C______, celui-ci ne se souvenant pas s’il s’agissait d’un coup de genou ou d’un coup de pied ; c’est ensuite que le sous-brigadier avait "mis M. U______ au sol".

b. Ce dernier a reconnu avoir donné un coup de genou à M. C______ dans le but de se dégager car celui-ci lui avait mis les deux mains sur le cou et ne desserrait pas son étreinte, l’empêchant de respirer et l’étranglant, ce que M. C______ a contesté. D’ailleurs, selon M. C______, M. U______ ne s’était pas plaint d’avoir des marques sur le cou et n’avait pas demandé à voir un médecin. De manière générale, M. U______ a contesté la position des agents par rapport à l’endroit où il se trouvait lui-même et tous les gendarmes ont confirmé que l’intéressé était menaçant et qu’il les avait insultés, sans qu’il soit possible de discuter avec lui.

14. Au terme de l’audience, le juge délégué a informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Le recours a été interjeté en temps utile devant la juridiction compétente (art. 56A de la loi sur l’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. l let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10 ; art. 2 RMVMS).

Pour qu’un recours soit recevable il faut que le destinataire de la décision soit touché directement par celle-ci et qu'il ait un intérêt digne de protection à ce qu'elle soit annulée et modifiée (art. 60 litt b LPA). Un tel intérêt suppose un intérêt actuel à obtenir l'annulation de la décision attaquée (ATF 131 II 361 consid. 1.2 p. 365).

Il est toutefois renoncé à l’exigence d’un intérêt actuel lorsque cette condition de recours fait obstacle au contrôle de légalité d’un acte qui pourrait se reproduire en tout temps, dans des circonstances semblables, et qui, en raison de sa brève durée ou de ses effets limités dans le temps, échapperait ainsi toujours à la censure de l’autorité de recours (ATF 131 II 361 consid. 1.2 p. 365 ; 129 I 113 consid. 1.7 p. 119 ; 128 II 34 consid. 1b p. 36 ; 127 I 164 consid. 1a p. 166 ; Arrêt du Tribunal fédéral 2P.69/2006 du 5 juillet 2006 et les arrêts cités ; ATA/266/2007 du 22 mai 2007 consid. 2). Cela étant, l’obligation d’entrer en matière sur un recours, dans certaines circonstances, nonobstant l’absence d’un intérêt actuel, ne saurait avoir pour effet de créer une voie de recours non prévue par le droit cantonal (ATF 127 I 115 consid. 3c p.118 ; ATA/146/2009 du 24 mars 2009).

En l’espèce, la décision d’interdiction de pénétrer dans un périmètre donné, prononcée pour une durée de quinze jours a été entièrement exécutée, de sorte que sur ce point le recours a perdu tout objet.

Cependant, il n'est pas exclu que le recourant se trouve à nouveau dans une telle situation, puisqu'il travaille comme cameraman, essentiellement à l'occasion de manifestations sportives, et que la LMSI est toujours en vigueur. En conséquence, il sera renoncé à l'exigence d'un intérêt actuel au recours.

Le recours contre l'interdiction de pénétrer dans un périmètre déterminé est ainsi recevable.

3. A teneur de l'art. 24b LMSI, une telle interdiction peut être prononcée à l'encontre de "toute personne qui, à l'occasion de manifestations sportives, a pris part de façon avérée à des actes de violence dirigés contre des personnes" et l'autorité compétente est principalement celle du canton dans lequel l'acte de violence a été commis, comme en l’espèce, subsidiairement celle du canton de domicile de l'auteur.

Deux questions préalables doivent être tranchées  :

a. Les actes commis par M. U______ l'ont-ils été à l'occasion d'une manifestation sportive ?

L'intéressé ne se trouvait pas dans l'enceinte du stade où se déroulait le match mais dans un espace abritant un écran géant de TV retransmettant en direct ledit match. Le Conseil d'Etat avait pris le 17 mars 2008 un arrêté relatif à l'accueil de l'UEFA EURO 2008 à Genève, dit "Eurolex", applicable pendant la durée de ce championnat, soit du 5 au 30 juin 2008 et valable, selon son art. 13, notamment pour les retransmissions dans la «FanZone» de Plainpalais (www.geneve.ch/euro2008/infos_en.asp).

Dans cette mesure, cette retransmission effectuée dans ledit périmètre peut être assimilée à une manifestation sportive.

b. Les actes commis par le recourant constituent-ils des actes de violence au sens de l'art. 21a OMSI ?

Selon cette disposition, "il y a notamment comportement violent et actes de violence lorsqu'une personne a commis ou incité à commettre les infractions suivantes :

a. les infractions contre la vie et l’intégrité corporelle visées aux art. 111 à 113, 117, 122, 123, 125, al. 2, 129, 133 et 134 du code pénal (CP) ;

b. les dommages à la propriété visés à l’art. 144 CP ;

c. la contrainte visée à l’art. 181 CP ;

d. l’incendie intentionnel visé à l’art. 221 CP ;

e. l’explosion visée à l’art. 223 CP ;

f. la provocation publique au crime ou à la violence visée à l’art. 259 CP ;

g. l’émeute visée à l’art. 260 CP ;

h. la violence ou la menace contre les autorités et les fonctionnaires visée à l’art. 285 CP.

Est aussi considéré comme comportement violent le fait de menacer la sécurité publique en transportant ou en utilisant des armes, des explosifs, de la poudre de guerre ou des engins pyrotechniques dans les stades ou les salles de sport."

A teneur de l'art. 21a al. 1 let h OMSI, un coup de pied ou de genou - ou la tentative d'un tel acte - à l'encontre du sous-brigadier C______ constituent un acte de violence ou menace contre les autorités et les fonctionnaires, visé à l'art. 285 CP, pour autant qu'il s'agisse d'un acte intentionnel, que la victime ait ou non déposé plainte. Ce délit étant poursuivable d'office, peu importe qu'en l'espèce, la procédure pénale ait été classée.

4. Les preuves d'un tel comportement peuvent consister en des dénonciations policières et des témoignages crédibles, écrits et signés (art. 21b al. 1 litt b et al. 2 OMSI).

Les plaintes et les déclarations recueillies dans le cadre de l'enquête de police ainsi que les auditions auxquelles le juge délégué a procédé - ayant fait l'objet de procès-verbaux signés - établissent que M. U______ a donné ou tenté de donner un coup - de pied ou de genou - au sous-brigadier C______, ce que le recourant n'a jamais contesté d'ailleurs.

5. Toutefois, si l'on se réfère au Message du Conseil fédéral relatif à la modification de la LMSI (Mesures contre la propagande incitant à la violence et contre la violence lors de manifestations sportives) du 17 août 2005 - FF 2005 p. 5285 ss, notamment p. 5300, concernant plus particulièrement l'art. 24a instituant un fichier électronique, "par afficher un comportement violent, on entend aussi bien le comportement violent d'une seule personne que la violence émanant de plusieurs personnes. Il s'agit essentiellement des actes de violence organisés et de ceux commis par des groupes". Le but des mesures préventives est d'empêcher les personnes connues des autorités pour leur comportement violent de commettre des actes de violence en les tenant à l'écart des événements sportifs (id., p. 5298).

Il résulte de ce Message que de telles dispositions n'ont pas été adoptées pour réprimer un acte d'humeur, malheureux certes, d'un journaliste professionnel qui s'est énervé, mais bien pour prévenir des débordements de bandes de supporters susceptibles d'être violents et de provoquer des dégâts à l'occasion de manifestations sportives, afin que ceux-là puissent être identifiés et empêchés de nuire.

Aussi, le tribunal de céans admettra que l'acte isolé, reproché à M. U______, ne tombe pas sous le coup de la LMSI ou de l'OMSI, de sorte qu'une interdiction de périmètre ne pouvait être prononcée.

6. En conséquence, le recours sera admis.

Le présent arrêt sera communiqué à l'office fédéral de la police afin qu'il efface les données relatives à M. U______, enregistrées dans le fichier Hoogan selon son courrier à l'intéressé du 20 juin 2008, le tribunal de céans n'étant pas compétent pour connaître de ce grief (art. 56B al. l LJO, art. 24a al. 10 LMSI renvoyant à la loi fédérale sur la protection des données du 19 juin 1992 - LPD - RS 235.1, instituant des voies de droit régies par les dispositions générales de la procédure fédérale).

Malgré l'issue du litige, il ne sera pas perçu d'émolument compte tenu d’absence de jurisprudence dans ce domaine. Il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure au recourant, faute de conclusion en ce sens (art. 87 LPA).

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté par Monsieur U______ le 8 septembre 2008 contre la décision du département des institutions du 7 août 2008 ;

au fond :

l’admet ;

annule la décision du département des institutions du 7 août 2008 et celle prise le 15 juin 2008 par l’officier de police ;

dit qu’il n’est pas perçu d’émolument ni alloué d’indemnité ;

dit que, conformément aux art. 82 et ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Thomas Barth, avocat du recourant, à l’officier de police, au département des institutions, et pour information, à l’office fédéral de la police.

 

 

Siégeants : M. Thélin, président, Mmes Bovy, Hurni et Junod, M. Dumartheray, juges

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste :

 

 

C. Del Gaudio-Siegrist

 

le vice-président :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :