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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/1181/2008

ATA/18/2009 du 13.01.2009 ( LCR ) , REJETE

Recours TF déposé le 26.02.2009, rendu le 11.08.2009, REJETE, 1C_87/2009
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/1181/2008-LCR ATA/18/2009

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 13 janvier 2009

2ème section

dans la cause

 

Monsieur C______
représenté par Me Roland Bugnon, avocat

contre

OFFICE CANTONAL DES AUTOMOBILES ET DE LA NAVIGATION


 


EN FAIT

Monsieur C______, né en 1963, domicilié dans le canton de Genève, est titulaire d'un permis de conduire des motocycles de cylindrée supérieure à 125 cm3.

Selon le dossier remis par le service des automobiles et de la navigation (ci-après : SAN), devenu depuis lors le service cantonal des automobiles et de la navigation (ci-après : OCAN), ce conducteur n'a pas d'antécédents connus en matière de circulation routière.

Le 3 septembre 2007 à 22h54, l'intéressé circulait sur la route du Pas-de- l'Echelle, en direction de la frontière franco-suisse, au guidon d'un motocycle, à une vitesse de 68 km/h, marge de sécurité déduite, sur un tronçon où la vitesse maximale autorisée était de 50 km/h.

Le 11 décembre 2007 à 18h09, M. C______ circulait sur un tronçon rectiligne de la route de Frontenex, en direction de la route de Vandoeuvres, au guidon d'un motocycle. Il pleuvait et la chaussée était mouillée. A la hauteur du numéro 76 de la route de Frontenex, il n'avait pas vu à temps un piéton qui traversait sur un passage de sécurité. Il avait alors effectué un freinage d'urgence, qui avait entraîné la chute de sa moto. Lors de cette chute, le piéton avait été heurté et était également tombé. M. C______ avait eu la clavicule droite fracturée tandis que le piéton avait des contusions à l'épaule droite. Ce dernier avait déclaré à la gendarmerie que le motocycliste circulait à une vitesse "normale". M. C______ avait indiqué pour sa part qu'il roulait doucement et n'avait pas vu "assez vite" le piéton, habillé en noir.

Le 25 février 2008, en raison tant du dépassement de vitesse du 3 septembre que de l'accident du 11 décembre 2007, l’OCAN a retiré le permis de conduire de M. C______ pour une durée de trois mois. L'autorité avait fixé la mesure en prenant en compte la plus grave des infractions retenues, à savoir le dépassement de la vitesse autorisée en localité de 18 km/h, d'une part, et inattention et refus de priorité à un piéton engagé sur un passage de sécurité, d'autre part. La seconde était constitutive d'infraction grave aux règles de la circulation routière, entraînant un retrait d'une durée de trois mois au moins, minimum dont il n'y avait pas lieu de s'écarter au vu de l'ensemble des circonstances et en particulier de l'absence d'antécédents de l'intéressé.

Le 28 février 2008, répondant tardivement à l'invitation de l’OCAN de formuler ses observations sur les faits qui lui étaient reprochés, M. C______ a indiqué qu'il s'était trouvé subitement en présence d'un piéton vêtu de noir qui s'était élancé sans précaution sur le passage.

Par acte du 7 avril 2008, M. C______ a recouru auprès du Tribunal administratif contre la décision susmentionnée, concluant à son annulation et à ce que l'infraction commise le 11 décembre 2007 soit qualifiée de moyennement grave et qu'en conséquence la durée du retrait de permis soit réduite à un mois.

Au moment des faits, sa vitesse était modérée, les conditions de circulation étaient "assez" défavorables - pluie et nuit - et la circulation était importante. Il n'avait pas aperçu le piéton engagé sur le passage de sécurité. Tout au plus pouvait-on lui reprocher une inattention moyenne.

Le 18 avril 2008, le Tribunal administratif a suspendu l'instruction de la procédure administrative dans l'attente du résultat de la procédure pénale pendante suite à l'accident du 11 décembre 2007.

Le 7 octobre 2008, l’OCAN a transmis au tribunal de céans copie de l'ordonnance de condamnation du Procureur général, rendue le 18 février 2008 et notifiée le 28 suivant, reconnaissant M. C______ coupable de violation simple des règles de la circulation routière pour les faits du 11 décembre 2007 et le condamnant à une peine pécuniaire de 10 jours amende avec sursis pendant trois ans, étant précisé qu'une autre infraction à la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01) ne faisant pas l'objet de la présente procédure était également visée dans la décision pénale.

Le 29 octobre 2008, le juge rapporteur a repris l'instruction de la procédure administrative et demandé à M. C______ s'il entendait maintenir son recours.

Le 10 novembre 2008, l'intéressé a indiqué maintenir son recours.

Le 12 novembre 2008, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Le 28 septembre 2008, le Grand Conseil de la République et canton de Genève a modifié la loi d’organisation judiciaire du 22 novembre 1941 (LOJ - E 2 05), notamment en créant une commission de recours administrative compétente pour connaître, en première instance, des décisions prises par l’OCAN en application de la loi fédérale sur la circulation routière du 19 décembre 1958 (LCR - RS 741.01) (art. 56X LOJ) et de l’article 17 de la loi d’application de la législation fédérale sur la circulation routière du 18 décembre 1987 (H - 1 05). Ces dispositions sont entrées en vigueur le 1er janvier 2009. Toutefois, selon la disposition transitoire adoptée par le législateur (art. 163 al. 4 LOJ), le Tribunal administratif reste compétent pour trancher les recours dont il a été saisi avant le 1er janvier 2009.

Dès lors, interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 63 al. 1 let. a LPA).

2. a. Chacun doit respecter les signaux et les marques et, en particulier, les signaux fixant une vitesse maximale (art. 27 al. 1 LCR ; art. 16 et 22 de l’ordonnance sur la signalisation routière du 5 septembre 1979 – OSR - RS 741.21 ; ATF 108 IV 62).

b. A l’intérieur des localités, la vitesse maximale générale des véhicules peut atteindre 50 km/h, lorsque les conditions de la route, de la circulation et de visibilité sont favorables selon l’article 4a alinéa 1 lettre a de l’ordonnance sur les règles de la circulation routière du 13 novembre 1962 (OCR - RS 741.11 ; ATF 121 II 127, JdT 1995 I 664).

c. Selon la jurisprudence du Tribunal fédéral en matière d’excès de vitesse à l’intérieur d’une localité, un dépassement de la vitesse maximale autorisée de l5 à 20 km/h constitue un cas de peu de gravité qui justifie un simple avertissement au sens de l’article 16a alinéa 3 LCR (ATF 122 II 37, JdT 1997 I 733, consid. 1e, p. 737), sous réserve de circonstances particulières (ATF 123 II 106, JdT 1997 I 725, consid. 2b, pp. 728-729 et réf. cit.).

En l’espèce, le dépassement de vitesse, au demeurant admis, a été de 18 km/h, marge de sécurité déduite. Il constitue donc une infraction de peu gravité.

3. Le recourant conteste avoir commis une infraction grave aux règles de la circulation routière le 11 décembre 2007.

Lorsque la qualification de l'acte ou la culpabilité sont douteuses, il convient de statuer sur le retrait du permis de conduire seulement après que la procédure pénale se soit achevée par un jugement entré en force ; fondamentalement, en effet, il appartient au juge pénal de se prononcer sur la réalisation d'une infraction. Le juge administratif ne peut alors s'écarter du jugement pénal que s'il est en mesure de fonder sa décision sur des constatations de faits inconnus du juge pénal ou que celui-ci n'a pas pris en considération, s'il existe des preuves nouvelles dont l'appréciation conduit à un autre résultat, si l'appréciation à laquelle s'est livrée le juge pénal se heurte clairement aux faits constatés, ou si le juge pénal n'a pas élucidé toutes les questions de droit, en particulier celles qui touchent à la violation des règles de la circulation. En effet, il convient d'éviter le plus possible que la sécurité du droit ne soit mise en péril par des jugements opposés fondés sur les mêmes faits (ATF 109 Ib 203 et jurisprudence citée; ATA/458/2008 du 2 septembre 2008).

L'ordonnance de condamnation du Procureur général n'a pas été rendue au terme d'une enquête approfondie, et dans le cadre d'une procédure qui n'est pas publique de surcroît, raisons pour lesquelles le tribunal de céans peut s'écarter des conclusions du juge pénal.

4. A teneur de l’article 33 alinéa 1 LCR, le conducteur d’un véhicule automobile doit faciliter aux piétons la traversée de la chaussée et circuler avec une prudence particulière avant les passages réservés à ces derniers. Au besoin, il doit s’arrêter pour leur laisser la priorité, lorsqu’ils s’y trouvent déjà ou s’y engagent (art. 33 al. 2 LCR).

Quant aux piétons eux-mêmes, en application de l’article 49 alinéa 2 LCR, ils bénéficient de la priorité sur les passages de sécurité,  mais ne doivent pas s’y lancer à l’improviste.

Il ressort des faits de la cause que le piéton heurté était déjà engagé sur le passage au moment de l'accident, de telle sorte qu’on ne saurait lui reprocher de s’y être lancé à l’improviste, contrairement à ce que le recourant a prétendu tardivement, sans aucun élément pour étayer cette allégation. Lui-même ne circulait pas à une vitesse excessive. Toutefois, malgré le fait que la route était rectiligne, il n'a pas été en mesure de voir suffisamment tôt le piéton pour ralentir et s'arrêter normalement afin de lui accorder la priorité. Il a dû effectuer un freinage d'urgence qui, la chaussée étant mouillée, a entraîné la chute de la moto et son heurt avec le piéton. Le recourant n'était donc pas suffisamment attentif, compte tenu des mauvaises conditions de circulation au moment des faits, pour pouvoir réagir en temps utile et éviter un accident, un piéton vêtu de sombre, en hiver, par temps de pluie et traversant, à la nuit tombée, en milieu urbain, une chaussée mouillée sur un passage protégé, n'étant notoirement pas un événement inhabituel. Il a ainsi violé son devoir particulier de prudence qui lui incombe en application de l’article 33 LCR, ce qui constitue une faute grave au sens de l’article 16c alinéa 1 lettres a LCR, pour laquelle les autorités pénales auraient pu retenir une violation aggravée des règles de la circulation routière (ATA/248/2008 du 20 mai 2008).

5. Après une infraction grave, le permis de conduire est retiré pour une durée minimale de trois mois (art. 16c al. 2 let. a LCR). Cette durée ne peut être réduite (art. 16 al. 3 LCR).

Compte tenu du fait que la décision querellée sanctionne également un dépassement de vitesse en localité de peu de gravité, et qu'il y a donc concours d'infractions susceptible d'entraîner une aggravation de la sanction (art. 49 al. 1 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0), le tribunal de céans retient que l’OCAN a usé avec modération de son pouvoir d'appréciation en prononçant une mesure correspondant au minimum prévu pour la faute la plus grave.

6. Le recours sera rejeté. Son auteur, qui succombe, sera condamné aux frais de la procédure, arrêtés en l'espèce à CHF 400.-, en application de l'article 87 alinéa 1 LPA. Il n’a en outre pas droit à une indemnité de procédure.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 7 avril 2008 par Monsieur C______ contre la décision de l’office cantonal des automobiles et de la navigation du 25 février 2008 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 400.- ;

dit qu’il n’est pas alloué d’indemnité de procédure au recourant ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Me Roland Bugnon, avocat du recourant ainsi qu'à l’office cantonal des automobiles et de la navigation et à l'office fédéral des routes à Berne.

Siégeants : M. Bovy, présidente, Mme Junod, M. Dumartheray, juges.

 

 

 

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste  adj. :

 

 

M. Tonossi

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

la greffière :