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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2234/2018

ATA/1222/2019 du 13.08.2019 ( FPUBL ) , REJETE

Descripteurs : DROIT D'ÊTRE ENTENDU;DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;FONCTIONNAIRE;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;EMPLOI(TRAVAIL);MOTIF;RÉINTÉGRATION PROFESSIONNELLE;SÉPARATION DES POUVOIRS;INTERDICTION DE L'ARBITRAIRE;ÉGALITÉ DE TRAITEMENT;SALAIRE
Normes : Cst.29.al2; LPAC.12.al1; lpac.12.al2; Cst.9; LTrait.2.al5; ltrait.12
Résumé : Rejet du recours d'un fonctionnaire suite à la procédure d'évaluation des fonctions de la direction générale des systèmes d'informations et du numérique (DGSIN). Fonctionnaire déclassé pour les besoins du service mais gardant son traitement antérieur. Le projet SCORE n'empêche pas une réévaluation sectorielle nécessaire compte tenu du retard du projet et pour assurer le bon fonctionnement du service. Aucune inégalité de traitement due à l'âge entre les collaborateurs, une partie d'entre eux, y compris certains plus âgés, étant reclassée en classe supérieure. Pas de violation de l'art. 12 al. 2 LPAC suite à la perte du statut de cadre. Pas de droits acquis.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2234/2018-FPUBL ATA/1222/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 13 août 2019

 

dans la cause

 

Monsieur A______
représenté par Me Éric Maugué, avocat

contre

DÉPARTEMENT DES INFRASTRUCTURES
représenté par Me Pierre Martin-Achard, avocat

 



EN FAIT

1) Dès le 1er janvier 2003, Monsieur A______ a été engagé en qualité de concepteur informatique affecté au B______, dépendant de la chancellerie d'État. Son traitement initial était fixé en classe 22 position 0.

2) Par arrêté du 15 février 2006, M. A______ a été nommé fonctionnaire, toujours en qualité de concepteur informatique. Son traitement a été alors fixé en classe 23 position 1, dès le 1er janvier 2006.

3) Le 1er août 2014, M. A______ a été transféré du « secteur C______ » au « secteur D______ ». Sa classe de traitement, sa fonction et son salaire sont restés identiques.

4) Par courrier électronique du 24 janvier 2017, Monsieur E______, chef de service « F______» a informé l'ensemble de ses collaborateurs d'une réorganisation de son service dont il détaillait les tenants et les aboutissants. Dès le 1er février 2017, le service serait ainsi organisé en deux secteurs. M. A______ serait le chef de secteur pour le DETA.

5) Le 7 février 2018, le Conseil d'État a décidé que, dans le cadre de l'évaluation des nouvelles fonctions de la direction générale des systèmes d'informations, devenue depuis lors direction générale des systèmes d'informations et du numérique (ci-après : DGSIN) réalisée par le service des ressources humaines de l'office du personnel, qui avait été ratifiée par le Conseil d'État le 22 novembre 2017, environ soixante membres du personnel verraient leur traitement baisser. Leur traitement actuel, hors indemnités, était garanti mais la progression de l'annuité serait suspendue pour les membres du personnel bénéficiant d'une classification supérieure à celle prévue pour leur fonction.

6) Par courrier électronique du 22 février 2018, Madame G______, nouvelle supérieure hiérarchique de M. A______, l'a convoqué à un entretien afin de l'informer que, dans le cadre de la mise en oeuvre du nouveau référentiel des fonctions génériques informatiques de la DGSIN, sa nouvelle fonction serait celle de « H______ », évaluée en classe 21. La description de la nouvelle fonction était disponible et les motifs du choix lui seraient exposés.

Cet entretien a eu lieu le 28 février 2018, M. A______ étant accompagné de son conseil.

La démarche effectuée, ainsi que la nouvelle fonction envisagée, ont été décrites, de même que les impacts de ce choix sur la rémunération de l'intéressé. Ce dernier disposait de quatorze jours pour faire part de ses observations avant qu'une décision formelle ne soit rendue.

7) Le 5 mars 2018, M. A______ a contesté tant la procédure suivie que la légalité du processus ayant conduit à sa collocation dans une nouvelle fonction, entraînant pour lui un déclassement.

8) Le 10 avril 2018, M. A______ a fait valoir ses observations. Le compte-rendu d'entretien qui lui avait été transmis ne reflétait pas les propos qui avaient été tenus lors de cette séance.

M. A______ occupait actuellement la fonction de chef de secteur, et le poste qu'il occupait ne pouvait être supprimé au vu des assurances qui avaient été données antérieurement.

Le processus de nouvelle collocation avait consacré une inégalité de traitement à l'endroit des collaborateurs âgés de plus de 50 ans, qui était particulièrement choquante dès lors que les personnes en question approchaient de l'âge de la retraite. Le processus n'avait pas de base légale.

9) Le 20 avril 2018, un entretien d'évaluation et de développement du personnel (ci-après : EEDP) a été réalisé, portant sur la période allant des mois de janvier 2015 au mois de novembre 2017, soit avant le début de « la transition vers la restructuration du service ».

10) Par courrier du 28 mai 2018, le conseiller d'État en charge du département concerné a décidé de changer l'affectation de M. A______, avec changement de classe.

M. A______ avait endossé un rôle de chef de secteur sans qu'il n'y ait eu de processus de recrutement formel, et il avait à l'époque continué à exercer son activité principale de H______. Les changements organisationnels décidés le 1er novembre 2017 avaient induit la disparition du secteur dont il avait la charge. Lorsque le secrétaire général du département avait indiqué que la mise en oeuvre des nouvelles fonctions ne conduirait à aucune suppression de postes, il indiquait qu'aucun contrat de travail ne serait résilié, ce qui était exact puisque M. A______ restait membre de la DGSIN. Il n'y avait pas eu de discrimination par âge, genre ou ancienneté. Le changement d'affectation était fondé sur une base légale. La réforme de l'ensemble des fonctions de la DGSIN s'inscrivait dans le cadre légal aussi puisqu'elle avait été décidée par le Conseil d'État dans un contexte spécifique. Dès le 1er juin 2018, M. A______ serait H______, en classe 21, son traitement annuel brut serait celui de la classe 23 position 11, qui ne subirait plus de modification.

11) Par acte du 29 juin 2018, M. A______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée.

Cette dernière ne respectait ni le principe de la bonne foi ni celui de la séparation des pouvoirs. La modification de la grille des fonctions de l'État de Genève faisait l'objet d'un processus, qui avait amené le Conseil d'État à refuser la réévaluation des fonctions avant l'entrée en vigueur du projet SCORE. Les réévaluations aussi bien collectives que sectorielles avaient été bloquées pendant la durée des travaux de ce projet, par décision du Conseil d'État du 7 décembre 2010. Dans ce cadre, un processus de réévaluation des fonctions de la DGSIN ne respectait pas le principe de la bonne foi.

De plus, celui de l'égalité de traitement n'était pas respecté, dès lors que le processus de création des nouvelles fonctions avait conduit à une discrimination massive à l'égard des collaborateurs âgés de plus de 50 ans, lesquels avaient été principalement touchés par des diminutions de salaire.

La décision litigieuse violait encore le principe de la légalité et celui de l'interdiction de l'arbitraire dès lors que l'autorité procédait à un amalgame entre la procédure menant à la création de nouvelles classes de fonction et celle régissant le changement d'affectation, lequel ne répondait pas à un réel besoin de l'administration.

12) Le 30 août 2018, le département des infrastructures (ci-après : le département), auquel la DGSIN a été rattachée à compter du 31 mai 2018, a conclu au rejet du recours.

Selon les statistiques qu'il produisait, 22 % des collaborateurs ayant entre 51 et 60 ans avaient été colloqués dans une classe supérieure, 53 % avaient vu leur classe ne pas être modifiée alors que 25 % avaient été colloqués dans une classe inférieure.

Les fonctionnaires ne disposaient pas d'un droit acquis au maintien des conditions d'engagement. Le changement d'affectation avait respecté le cadre légal dès lors qu'une réévaluation des fonctions informatiques s'imposait pour permettre une gestion saine et efficace de cette direction et des services publics, les fonctions existantes, datant de 1974, étant obsolètes.

Les collaborateurs ont été classés dans la fonction qu'ils exerçaient réellement selon la description du cahier des charges. Le fait que le projet SCORE soit en cours n'interdisait pas une réévaluation sectorielle, au vu du retard pris par le projet SCORE et de l'obsolescence du système en place à la DGSIN.

La perte de la qualité de chef de secteur était justifiée par la réorganisation du service. L'intéressé n'avait assumé cette responsabilité que temporairement, sans que sa fonction ni son traitement ne soient adaptés.

Après la restructuration du 1er novembre 2017, le service clients DETA ne comptait plus que six collaborateurs, ce qui ne nécessitait pas une division en secteur. La situation avait été différente pour la personne qui avait assumé le poste de chef de secteur du DALE, cette fonction ayant été maintenue.

Si le nombre de chefs de secteur avait augmenté après la réorganisation, cela n'était dû qu'au fait que cette fonction ne pouvait officiellement pas être utilisée avant, même pour les collaborateurs qui l'occupaient concrètement.

Le fait qu'ultérieurement des postes de chef de secteur aient été ouverts n'était d'aucun secours pour le recourant, dès lors que les postes en question demandaient des compétences dont l'intéressé ne disposait pas.

Le traitement de M. A______ respectait le cadre légal, dès lors qu'il était maintenu, même si les autres avantages liés au statut de cadre supérieur qu'il avait antérieurement (six semaines de vacances, exemption du timbrage notamment) étaient supprimés.

De plus, les statistiques produites démontraient qu'il n'y avait pas eu d'inégalités créées entre les classes d'âge des collaborateurs.

13) Exerçant son droit à la réplique, M. A______ a maintenu ses conclusions, le 31 octobre 2018.

Lorsqu'il avait été nommé chef de secteur, il y avait eu un appel interne à candidatures, et une personne intéressée n'avait pas été retenue. La division en secteur n'avait jamais été annoncée comme étant temporaire. Les fonctionnaires occupaient des fonctions, et non des rôles. Depuis qu'il avait été nommé chef de secteur, il recevait des communications en tant que tel. Son salaire n'avait pas à être ajusté, dès lors que la classe de traitement était restée identique.

Des EEDP avaient eu lieu à cinq reprises entre 2015 et 2017, lesquels avaient été signés par le supérieur hiérarchique direct de l'intéressé, mais pas par la direction. L'EEDP de mars 2018 portait la mention de « chef de secteur/concepteur-chef de secteur », laquelle avait disparu dans la version produite par l'autorité intimée.

La tranche d'âge entre 50 et 60 ans avait été quatre fois plus impactée que la tranche d'âge entre 20 et 34 ans ou entre 34 et 49 ans, dès lors que 39 % des collaborateurs concernés par une diminution de classe de fonction avaient entre 20 et 50 ans et que 61 % avaient entre 50 et 65 ans.

Au surplus, M. A______ maintenait ses griefs concernant tant la création de nouvelles fonctions que la procédure de réaffectation. Dans l'hypothèse où son poste de chef de secteur avait été supprimé, il appartenait à l'État de lui en accorder un correspondant à ses capacités. Le fait de le reclasser dans une nouvelle classe n'avait pas suivi le processus de reclassement, applicable en cas d'insuffisance de prestations.

14) Sur quoi, la cause a été gardée à juger, ce dont les parties ont été informées le 5 décembre 2018.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Le recourant a sollicité l'audition de ses collègues (sans formellement les nommer) et du chef de secteur DALE à titre préalable.

Tel qu'il est garanti par l'art. 29 al. 2 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), le droit d'être entendu comprend notamment pour le justiciable le droit de faire administrer des preuves portant sur des faits pertinents. Ce droit n'empêche pas l'autorité de mettre un terme à l'instruction lorsque les preuves administrées lui ont permis de former sa conviction et que, procédant d'une manière non arbitraire à une appréciation anticipée des preuves qui lui sont encore proposées, elle a la certitude qu'elles ne pourraient l'amener à modifier son opinion (ATF 143 III 65 consid. 3.2 ; 143 V 71 consid. 4.1 ; 140 I 285 consid. 6.3.1).

En l'espèce, il ne sera pas fait droit aux demandes d'actes d'instruction complémentaires. En effet, l'audition de témoins, en particulier l'audition de collègues du recourant ainsi que du chef de secteur DALE n'est pas de nature à modifier l'issue du litige. La chambre de céans est suffisamment renseignée sur les faits pertinents pour trancher le litige. Il n'y a donc pas lieu de procéder à des actes d'instruction complémentaires.

3) À teneur de l'art. 61 al. 1 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a) ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (art. 61 al. 2 LPA), non réalisée en l'espèce.

4) Le recourant estime qu'au vu de la réforme complète de la loi générale sur le traitement dans la fonction publique (LTrait - B 5 15) actuellement en cours, le Conseil d'État ne pouvait pas de bonne foi initier un processus de réévaluation des fonctions de la DGSIN. Il s'agissait d'un comportement contraire au principe de la bonne foi et de la séparation des pouvoirs.

a. Le principe de la bonne foi entre administration et administré, exprimé aux art. 9 et 5 al. 3 Cst. exige que l'une et l'autre se comportent réciproquement de manière loyale. L'exigence de loyauté contenue dans le principe de la bonne foi interdit tant à l'autorité qu'à l'administré d'adopter un comportement contradictoire (ATF 136 I 254 consid. 5.2 ; 134 V 306 consid. 4.2 ; Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, p. 197 n. 580).

b. Au niveau fédéral, le principe de la séparation des pouvoirs, implicitement contenu dans la Cst., est un droit constitutionnel dont peut se prévaloir le citoyen (ATF 130 I 1 consid. 3.1). Le principe de la séparation des pouvoirs interdit à un organe de l'État d'empiéter sur les compétences d'un autre organe ; en particulier, il interdit au pouvoir exécutif d'édicter des règles de droit, si ce n'est dans le cadre d'une délégation valablement conférée par le législateur (ATF 134 I 322
consid. 2.2 ; 119 Ia 28 consid. 3 ; 118 Ia 305 consid. 1a).

c. Dans le canton de Genève, l'art. 2 de la Constitution de la République et canton de Genève du 14 octobre 2012 (Cst-GE A 2 00) consacre expressément le principe de la séparation des pouvoirs. Le pouvoir législatif incombe au Grand Conseil (art. 80 Cst-GE). Le Conseil d'État est chargé de l'exécution des lois et adopte à cet effet les règlements et arrêtés nécessaires (art. 109 al. 4 Cst-GE). Il est habilité, en vertu de l'art. 109 al. 3 Cst-GE, à adopter des règles d'exécution. À moins d'une délégation expresse, le Conseil d'État ne peut pas poser de nouvelles règles qui restreindraient les droits des administrés ou leur imposeraient des obligations, même si ces règles étaient conformes au but de la loi (ATF 133 II 331 consid. 7.2.2 ; 130 I 140 consid. 5.1 ; 114 Ia 286 consid. 5a ; ACST/19/2018 du 15 août 2018 consid. 7b ; ATA/168/2008 du 8 avril 2008 consid. 3a ; 
Andreas AUER/Giorgio MALINVERNI/Michel HOTTELIER, op. cit., n. 323).

d. En l'espèce, le grief de violation du principe de la bonne foi et de la séparation des pouvoirs ne résiste pas à l'examen. En effet, la réévaluation des fonctions informatiques de la DGSIN était dictée par la nécessité d'adapter tant la dénomination que les fonctions informatiques à leur évolution, concrétisée par le référentiel swissICT. Cette réévaluation se distingue ainsi du projet SCORE et ne poursuit pas le même but. Ce projet vise à revoir l'échelle des traitements et / ou la méthode d'évaluation actuellement appliqués à l'ensemble des membres du personnel de l'État. Les membres du personnel de la DGSIN seront, de la même manière, touchés par le projet SCORE. En outre, aucune assurance particulière n'a été donnée au recourant par l'État. Le projet SCORE n'empêche pas la réévaluation des fonctions informatiques de la DGSIN, comme la chambre de céans l'a déjà constaté (ATA/1146/2019 du 19 juillet 2019; ATA/2011/2017 du 21 février 2017). Il n'y a aucune violation du principe de la bonne foi et de la séparation des pouvoirs.

5) Dans un second grief, le recourant estime que le principe de l'égalité de traitement a été violé car le processus de création de nouvelles fonctions a conduit à une discrimination à l'égard des collaborateurs de la DGSIN âgés de 50 ans et plus.

a. Une décision viole le principe de l'égalité de traitement garanti par
l'art. 8 Cst. lorsqu'elle établit des distinctions juridiques qui ne se justifient par aucun motif raisonnable au regard de la situation de fait à réglementer ou lorsqu'elle omet de faire des distinctions qui s'imposent au vu des circonstances. L'inégalité de traitement apparaît comme une forme particulière d'arbitraire, consistant à traiter de manière inégale ce qui devrait l'être de manière semblable ou inversement (ATF 142 I 195 consid. 6.1 ; 137 I 167 consid. 3.5 ; 129 I 346 consid. 6). Cela suppose que le traitement différent ou semblable injustifié se rapporte à une situation de fait importante. La question de savoir si une distinction juridique repose sur un motif raisonnable peut recevoir une réponse différente selon les époques et suivant les conceptions, idéologies et situations du moment (ATF 142 I 195 consid. 6.1 ; arrêt du Tribunal fédéral 8C_310/2017 du 14 mai 2018 consid. 6.2).

Dans les limites de l'interdiction de l'arbitraire, les autorités disposent d'une large marge d'appréciation, particulièrement en ce qui concerne les questions d'organisation et de rémunération. La juridiction saisie doit ainsi observer une retenue particulière lorsqu'il s'agit de comparer deux catégories d'ayants droits mais de juger tout un système de rémunération (ATF 143 I 65 consid. 5.2).

b. S'il est exact que les collaborateurs dans la tranche d'âge du recourant
(51-60 ans) semblent de prime abord avoir été plus touchés par le processus de réévaluation des fonctions informatiques de la DGSIN selon les statistiques produites, cela ne permet pas encore de retenir une violation du principe de l'égalité de traitement, ce que le recourant ne prouve d'ailleurs pas. En effet, au sein même de la catégorie du recourant, 25 % d'entre eux ont certes été colloqués dans une classe inférieure mais 22 % des collaborateurs ont été colloqués dans une classe supérieure, les 53 % ne subissant aucun changement. Le même schéma est reproduit dans les autres tranches d'âge. On constate en outre que sur le total des collaborateurs, les statistiques fournies ne permettent pas de déceler une inégalité de traitement d'une tranche d'âge qui serait évidente et choquante.

Même si l'argumentaire de l'autorité intimée sur ce point n'est guère fourni ni détaillé, on constate que toutes les classes d'âges ont été touchées par la répartition des nouvelles fonctions, qu'il s'agisse de collaborateurs âgés de plus de 50 ans ou non. Le recourant se contente de citer le cas d'autres collègues de son âge dont la fonction aurait été colloquée en classe inférieure. Or, à la lecture des statistiques, 22 % des collaborateurs dans la tranche d'âge du recourant ont pourtant été colloqués en classe supérieure. Le recourant ne prouve ainsi pas à satisfaction de droit que sa catégorie d'âge aurait été traitée de manière significativement différente des catégories plus jeunes.

Le grief d'inégalité de traitement est donc mal fondé.

6) Selon le recourant, les principes de la légalité et de l'interdiction de l'arbitraire ont été violés dès lors que le changement d'affectation ne répondait pas à un besoin de l'administration. Il avait perdu sa qualité de chef de secteur de manière parfaitement arbitraire. L'art. 12 al. 2 de la loi générale relative au personnel de l'administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05) n'avait pas été respecté. Le changement d'affectation au sens de l'art. 12 LPAC était un prétexte déguisé pour justifier son déclassement.

a. Une décision est arbitraire au sens de l'art. 9 Cst. lorsqu'elle est manifestement insoutenable, qu'elle se trouve en contradiction claire avec la situation de fait, qu'elle viole gravement une norme ou un principe juridique indiscuté ou encore lorsqu'elle heurte de manière choquante le sentiment de la justice et de l'équité. L'arbitraire ne résulte pas du seul fait qu'une autre solution pourrait entrer en considération ou même qu'elle serait préférable
(ATF 142 V 512 consid. 4.2 ; 141 I 49 consid. 3.4 ; arrêt du Tribunal fédéral 2C_897/2017 du 31 janvier 2018 consid. 2.1). En l'espèce, le grief se confond avec celui de la mauvaise application du droit.

b. Aux termes de l'art. 12 al. 1 LPAC, l'affectation d'un membre du personnel dépend des besoins de l'administration ou de l'établissement et peut être modifiée en tout temps. Un changement d'affectation ne peut entraîner de diminution de salaire (art. 12 al. 2 LPAC).

Les collaborateurs de l'État n'ont pas de droit acquis, ni la garantie d'immuabilité de leur cahier des charges. L'État est libre de revoir en tout temps sa politique en matière de salaire et d'emploi, et les personnes qui entrent à son service doivent compter avec le fait que les dispositions réglant leur statut puissent faire l'objet ultérieurement de modifications. Des droits acquis ne naissent dès lors en faveur des agents de la fonction publique que si la loi fixe une fois pour toutes les situations particulières et les soustrait aux effets des modifications légales ou lorsque des assurances précises ont été données à l'occasion d'un engagement individuel (ATF 143 I 65 consid. 6.2 et les références citées).

Les prétentions pécuniaires des agents de la fonction publique, qu'il s'agisse de prétentions salariales ou celles relatives aux pensions, n'ont en règle générale pas le caractère de droits acquis (ATF 134 I 23 consid. 7.5 ; 129 I 161 consid. 4.2 ; arrêts du Tribunal fédéral 2C_158/2012 du 20 avril 2012 consid. 3.4 ; 8C_903/2010 du 21 juin 2011 consid. 7.2).

c. Selon l'art. 2 al. 5 LTrait, les annuités supplémentaires ne sont pas accordées aux membres du personnel bénéficiant d'une classification supérieure à celle prévue normalement pour leur fonction ; ces derniers peuvent toutefois demander par la voie de service à réintégrer la classe de traitement prévue normalement pour leur fonction et bénéficier ainsi des annuités supplémentaires.

En l'espèce, le recourant n'a jamais reçu des assurances quant à la conservation de sa classe de traitement, ni au moment de son engagement ni par la suite, lorsqu'il a assumé la fonction de chef de secteur à compter du 1er février 2017. L'art. 12 LTRait ne soustrait pas le droit aux annuités aux effets de modifications légales. Le recourant ne peut pas se prévaloir de droits acquis.

La fonction effective du recourant est celle de H______. Elle a été colloquée en classe 21 à la suite de la réévaluation des fonctions des membres du personnel de la DGSIN exerçant une fonction informatique. Dès lors, sa fonction étant colloquée en classe 21, c'est conformément aux dispositions réglementaires qui s'imposaient à lui que son statut de cadre supérieur a été supprimé. La question de savoir s'il exerçait de manière permanente ou temporaire la fonction de chef de secteur n'est ainsi pas déterminante en l'espèce, aucune assurance n'ayant par ailleurs été donnée à ce sujet.

Contrairement à ce qu'il allègue, ce changement d'affectation était justifié par les besoins du service, dès lors que cela correspondait à la fonction qu'il exerçait de manière effective, soit celle de H______, et à son cahier des charges. Si le recourant a exercé en parallèle la fonction de chef de secteur, il a continué à exercer à titre principal la fonction de H______. Des changements organisationnels ont induit la disparition du secteur dont il avait la charge. Compte tenu des besoins de la DGSIN, la fonction qui lui a été appliquée était la sienne d'après les activités dont il avait la charge. Ainsi, en appliquant au recourant la classe de traitement correspondant à sa fonction et aux besoins de l'autorité intimée, celle-ci n'a pas violé le droit ni agi de manière arbitraire.

d. Enfin, s'agissant des privilèges liés au statut de cadre, la fiche 04.02.06 du mémento des instructions de l'office du personnel de l'État (ci-après : MIOPE) précise que dans ce cas de figure, le cadre supérieur pourra voir son niveau de salaire maintenu, mais en aucun cas les droits liés au statut de cadre supérieur, en particulier les six semaines de vacances, l'exemption de l'enregistrement mécanique des temps de travail (timbrage) ainsi que l'indemnité liée aux heures supplémentaires (2 % et 3 %).

Ce grief sera par conséquent également écarté.

En tous points infondé, le recours sera rejeté et la décision querellée confirmée.

7) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 1'000.- sera mis à charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA) et il ne sera pas alloué d'indemnité de procédure (art. 87 al. 2 LPA). 

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 29 juin 2018 par Monsieur A______ contre la décision du département des infrastructures du 28 mai 2018 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge de Monsieur A______ un émolument de CHF 1'000.- ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Éric Maugué, avocat du recourant, ainsi qu'à Me Pierre Martin-Achard, avocat du département des infrastructures.

Siégeant : Mme Krauskopf, présidente, M. Thélin, Mme Payot Zen-Ruffinen, M. Martin et Mme Cuendet, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

D. Werffeli Bastianelli

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Krauskopf

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :