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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/3733/2006

ATA/100/2007 du 06.03.2007 ( DT ) , REJETE

Descripteurs : DÉTENTION D'ANIMAUX; CHIEN; AUTORISATION OU APPROBATION(EN GÉNÉRAL); PROPORTIONNALITÉ
Normes : Cst.36; LChiens.13
Résumé : Animaux. La liste des chiens appartenant à des races dites d'attaque, établie par le Conseil d'Etat, a le caractère d'une suite d'exemples et non celui d'une énumération exhaustive. Par ailleurs, les chiens relevant de la race dite « Bullmastiff » constitue une sous-classe des « Mastiffs » et leur détention est soumise à autorisation.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

POUVOIR JUDICIAIRE

A/3733/2006-DT ATA/100/2007

ARRÊT

DU TRIBUNAL ADMINISTRATIF

du 6 mars 2007

dans la cause

 

Monsieur E______

contre

OFFICE VÉTÉRINAIRE CANTONAL


 


EN FAIT

1. Domicilié dans le canton de Genève, Monsieur E______ a fait enregistrer, le 27 août 2005, un chien de race « Bullmastiff », né le 19 mai 1998.

Le 10 octobre 2006, l’office vétérinaire cantonal (ci-après : l’OVC), faisant fond sur le règlement transitoire concernant l’élevage, l’acquisition et la détention de chiens dangereux ou potentiellement dangereux du 5 avril 2006 (le règlement - M 3 45.03) a rappelé à M. E______ qu’il devait requérir une autorisation de détenir un chien potentiellement dangereux. Cette démarche aurait dû être accomplie dans un délai de trois mois dès l’entrée en vigueur du règlement, soit entre le 20 avril et le 20 juillet 2006.

2. Le 16 octobre 2006, M. E______ a déposé un acte de recours contre la décision précitée. La mesure entreprise manquait de base légale, car l’article 17 du règlement d’application de la loi sur les conditions d’élevage, d’éducation et de détention des chiens du 6 décembre 2004 (le règlement d’application - M 3 45.01) ne comptait pas, en son article 17 alinéa 2, la race désignée comme « Bullmastiff ». Si en vertu de l’alinéa 3, la liste pouvait être modifiée par l’OVC, cela ne signifiait pas que le vétérinaire cantonal pouvait « ajouter de son propre gré d’autres races qui n’étaient pas mentionnées ».

Le « Bullmastiff » était une race indépendante de celle du « Mastiff », mentionnée à l’article 17 alinéa 2 lettre f du règlement d’application et l’OVC confondait dès lors deux races.

M. E______ conclut à ce que le tribunal constate qu’il n’avait pas l’obligation de demander une autorisation de détention.

3. Le 31 octobre 2006, l’OVC a conclu au rejet du recours. Si le « Bullmastiff » ne figurait pas expressément dans la liste contenue à l’article 17 alinéa 2 du règlement d’application, il ressortait cependant clairement de la doctrine qu’un tel animal, issu du croisement du Bouledogue anglais et du « Mastiff », appartenait à la « classe des races de type molossoïde ».

Compte tenu de la faible présence de ce type dans le canton de Genève et de l’inexistence de dossier d’agressions canines impliquant un « Bullmastiff » depuis ces dix dernières années et considérant enfin l'âge du chien du recourant, l’OVC renonçait à l’obligation de castration ainsi qu’à celle de porter une muselière.

4. Le 17 novembre 2006, les parties ont été entendues en audience de comparution personnelle :

a. M. E______ comprenait que le litige était désormais circonscrit à la seule obligation d’annoncer son chien ; il s’y refusait toutefois au motif que l’animal était un « Bullmastiff » pure race, reconnu par les fédérations cynologiques internationales et suisse. Cette race était reconnue depuis 1924 et elle ne faisait pas partie de celles potentiellement dangereuses. Il persistait dès lors dans les termes de son recours.

b. Le vétérinaire cantonal a expliqué que la notion de race n’avait guère de portée d’un point de vue vétérinaire. Ce qui importait était de s’assurer que les animaux d’une certaine masse et d’une certaine force soient détenus par des maîtres compétents et qu’ils soient constamment éduqués. Le « Bullmastiff » faisant partie d’une sous-catégorie de celles des « Mastiffs », l’OVC persistait dans l’obligation d’enregistrement. La seule contrainte qui en résultait pour le recourant était de se soumettre à un test annuel chez un éducateur canin agréé.

5. Le 23 février 2007, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 56A de la loi sur l'organisation judiciaire du 22 novembre 1941 - LOJ - E 2 05 ; art. 63 al. 1 litt. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Le recourant considère que son animal relève de la race « Bullmastiff » et que cette espèce n’est pas comprise dans celle qualifiée de dangereuse en droit genevois.

a. Selon l’article 13 de la loi sur les conditions d’élevage, d’éducation et de détention des chiens du 1er octobre 2003 (LChiens - M 3 45), le Conseil d’Etat dresse une liste des chiens appartenant à des races dites d’attaque, ce qui a pour conséquence que sont considérés comme dangereux, non seulement les chiens appartenant auxdites races, mais également ceux issus de croisement de ces races.

b. Quant au règlement d’application, en son article 17, il inscrit au nombre des races dites dangereuses celles désignées sous le vocable de « Mastiff ».

Il résulte du texte même de l’article 17 alinéa 2 du règlement d’application, que celui-ci ne contient qu’une liste exemplative, que les autorités compétentes peuvent étendre lorsque cela est nécessaire. En effet, ledit alinéa commence par les termes « en font partie les chiens tels que  ». Le recours au vocable « tels » signifie clairement la volonté du Conseil d’Etat que la liste ait le caractère d’une suite d’exemples et non celui d’une énumération exhaustive. Pour ce premier motif déjà, le recours doit être rejeté. En outre, il ressort des explications fournies par l’OVC tant par écrit que lors de l’audience de comparution personnelle des parties, que les chiens relevant de la race dite « Bullmastiff » constitue une sous-classe des « Mastiffs ». Pour ce second motif, qui constitue également à lui seul une raison de rejeter le recours, il y a lieu de confirmer la décision de l’OVC de soumettre les « Bullmastifs » à l’obligation de requérir une autorisation de détention, telle qu’elle est prévue par l’article 6 du règlement.

3. Le principe de la proportionnalité selon l’article 36 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101), gouverne toute action étatique.

Selon l’article 8 lettre d du règlement, le détenteur d’un chien dangereux doit le castrer dès que celui-ci a atteint l’âge de sept mois. En application de l’article 16 alinéa 2 du même règlement, le département peut déroger à l’obligation de castrer un chien potentiellement dangereux. De surcroît, selon le règlement concernant le port de la muselière du 16 septembre 2006 (M 3 45.04), le port de la muselière est obligatoire pour tous les chiens dangereux (art. 2).

En l’espèce, en renonçant à l’obligation de castration et à celle de port d’une muselière, l’OVC a parfaitement appliqué ce principe au cas d’espèce. Sa décision ne donne donc lieu à aucune critique. Au demeurant, le tribunal ne peut aggraver le sort du recourant, la reformatio in peius étant aggravée par l’article 69 alinéa 2 LPA.

4. Mal fondé, le recours doit être rejeté. Son auteur, qui succombe, sera condamné aux frais de la procédure arrêtés en l’espèce à CHF 800.-.

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LE TRIBUNAL ADMINISTRATIF

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 16 octobre 2006 par Monsieur E______ contre la décision de l'office vétérinaire cantonal du 10 octobre 2006 ;

au fond :

le rejette ;

met à la charge du recourant un émolument de CHF 800.- ;

dit que, conformément aux articles 82 et suivants de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'article 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Monsieur E______ ainsi à l'office vétérinaire cantonal ainsi qu’à l’office vétérinaire fédéral.

Siégeants : Mme Bovy, présidente, M. Paychère, Mme Hurni, M. Thélin, Mme Junod, juges.

Au nom du Tribunal administratif :

la greffière-juriste adj. a.i.:

 

 

P. Pensa

 

la présidente :

 

 

L. Bovy

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :