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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/17/2018

ATA/911/2019 du 21.05.2019 ( DIV ) , REJETE

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/17/2018-DIV ATA/911/2019

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 21 mai 2019

 

dans la cause

 

M. A______

contre

DIRECTION DES FINANCES DE LA POLICE - DFP



EN FAIT

1) Par décision (facture) du 27 novembre 2017, la direction des finances de la police (ci-après : DFP) a facturé à M. A______ un montant de CHF 190.- correspondant à une « facture médecin / B______ », en raison de l'intervention d'un médecin au poste de police de C______ le 6 juin 2017 à 1h45 sur demande de la police.

2) Par acte expédié le 3 janvier 2018 au greffe de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : chambre administrative), M. A______ a fait « opposition » à cette facture.

La police était intervenue au domicile de son amie le soir du 5 juin 2017 car celle-ci et lui-même avaient eu « une altercation un peu trop violente », ayant « fait trop de bruit » et dérangé les voisins, sans qu'il y ait toutefois eu de « dégâts » physiques ou matériels. Lorsque la police était arrivée, l'altercation était terminée depuis plus d'une demi-heure et son amie dormait tranquillement, ce qui montrait qu'il n'y avait rien de grave. D'ailleurs, ni son amie ni lui-même n'avaient déposé plainte l'un contre l'autre.

À la suite de cette intervention, son amie et lui-même avaient été emmenés au poste de police où ils avaient passé la nuit dans des cellules différentes.

Le recourant ne doutait pas que les agents de police avaient fait leur travail correctement et il n'avait rien à redire à ce sujet. Cependant, il n'avait pas demandé à être emmené au poste ni à ce qu'un médecin soit appelé. Concernant ce dernier point, il avait eu un grave accident de travail survenu cinq ans auparavant qui lui avait laissé un handicap à la jambe droite et de terribles douleurs qui l'obligeaient à prendre des médicaments.

Vu que toutes les initiatives avaient été prises par la police, il ne voyait pas pourquoi on lui demandait de payer la facture litigieuse.

3) Dans sa réponse du 20 février 2018, la DFP a conclu au rejet du recours.

À teneur des inscriptions des 5 et 6 juin 2017 au journal de la police intitulées « violence conjugale / domestique - époux / concubins », celle-ci était intervenue à la suite de cris de la compagne de M. A______ entendus par le voisinage. Selon les explications de celle-ci, après avoir été traitée de « morue » par M. A______, elle avait saisi son bras en lui disant d'arrêter de la traiter de la sorte ; c'était alors que celui-ci l'aurait saisie à la gorge et lui aurait mis la main sur la bouche pour l'empêcher de crier. La femme avait de légères marques rouges au niveau de la gorge et l'homme deux traces de morsures sur le biceps droit ainsi que des griffures sur l'avant-bras droit. Le recourant et sa compagne avaient, toujours le soir du 5 juin 2017, été acheminés au poste de police pour la suite de la procédure, et, le 6 juin 2017, avaient été auditionnés en tant que prévenus. Ils avaient été libérés sur ordre du commissaire de service.

Selon la DFP, alors qu'il se trouvait au poste de police, M. A______ avait déclaré prendre des médicaments pour son dos, de sorte que les policiers avaient fait appel à B______. Le médecin qui était intervenu avait autorisé la prise de médicaments après avoir examiné l'intéressé. Les policiers avaient délivré à ce médecin, le même 6 juin 2017, un « bon pour l'intervention d'un médecin » correspondant à son intervention conformément à la pratique habituelle, de CHF 190.-. B______ avait, le 13 juin 2017, adressé à la DFP une note d'honoraires pour le même montant.

4) M. A______ n'ayant pas exercé son droit à la réplique dans le délai imparti au 12 avril 2018 par la chambre administrative, celle-ci a, par pli du
23 avril 2018, informé les parties que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a et 63 al. 1 let. c de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) En vertu de l'art. 61 LPA, le recours peut être formé pour violation du droit y compris l'excès et l'abus du pouvoir d'appréciation (let. a), ou pour constatation inexacte ou incomplète des faits pertinents (let. b ; al. 1). Les juridictions administratives n'ont pas compétence pour apprécier l'opportunité de la décision attaquée, sauf exception prévue par la loi (al. 2).

3) a. Aux termes de l'art. 59 de la loi sur la police du 9 septembre 2014 (LPol - F 1 05), entrée en vigueur le 1er mai 2016, intitulé « frais d'intervention », lorsqu'un administré, par son comportement contraire au droit, a justifié l'intervention de la police, celle-ci lui en facture les frais (al. 1) ; lorsque l'intervention résulte de circonstances qui la rendent nécessaire ou d'une demande particulière, la police peut en facturer les frais (al. 2) ; les frais d'intervention de la police font l'objet d'un tarif établi par le Conseil d'État (al. 3).

Conformément à l'art. 64 LPol, le Conseil d'État édicte les règlements nécessaires à l'application de ladite loi, ainsi que les tarifs relatifs aux émoluments et frais découlant de l'intervention des services de police.

b. Selon l'art. 1 du règlement sur les émoluments et frais des services de police du 24 août 2016 (REmPol - F 1 05.15), entré en vigueur le 1er janvier 2017, en conformité avec les art. 1 à 6 du règlement sur les émoluments de l'administration cantonale du 15 septembre 1975 (REmAC - B 4 10.03), la police, soit pour elle la direction des finances, peut percevoir pour l'exercice de ses activités le remboursement des frais et les émoluments prévus dans le présent règlement, sous réserve des dispositions spéciales découlant notamment de l'application du droit fédéral ou concordataire (al. 1). Les frais et émoluments liés aux interventions et prestations des services de police peuvent être mis à la charge des personnes qui les ont provoquées ou sollicitées (al. 2).

L'art. 2 al. 1 REmPol, ayant pour titre « intervention d'une entreprise tierce », prévoit qu'en cas d'intervention ou de prestations, sur ordre de la police, d'une entreprise tierce, celle-ci adresse directement sa facture aux personnes qui les ont provoquées ou qui en bénéficient, ou aux représentants de celles-ci selon l'art. 1 al. 3 REmPol.

En vertu de l'art. 3 REmPol, intitulé « frais au profit d'un tiers », les frais réglés par la police au profit d'un tiers sont facturés à celui-ci, sauf circonstances particulières (al. 1). Les frais réglés par la police à raison de dégâts causés de manière fautive par un tiers sont facturés à celui-ci, sauf circonstances particulières (al. 2).

4) En l'espèce, le recourant a échangé des coups ayant occasionné des blessures légères avec son amie le soir du 5 juin 2017 et a donc adopté un comportement contraire au droit, que ce soit par des lésions corporelles simples (art. 123 du Code pénal suisse du 21 décembre 1937 - CP - RS 311.0) ou des voies de fait (art. 126 CP), ayant justifié l'intervention de la police, au sens de l'art. 59 al. 1 LPol.

Il ne conteste pas la licéité et la justification des actes accomplis les 5 et
6 juin 2017 par la police à son égard, y compris l'appel fait au médecin, et il ne ressort pas du dossier que ces actes seraient contraires au droit. En particulier, l'intervention du médecin se justifiait par le besoin de médicaments de l'intéressé.

Le fait que son acheminement au poste de police et l'intervention du médecin n'aient pas fait suite à la propre initiative de l'intéressé n'exclut aucunement la perception de frais liés à l'intervention de la police. C'est son comportement puis son besoin de médicaments qui ont provoqué l'intervention de la police et celle du médecin, selon l'art. 1 al. 2 REmPol.

Dans ces circonstances, au regard du cas particulier et sur la base de l'art. 3 al. 1 REmPol, l'autorité intimée n'a pas violé le droit en mettant à la charge du recourant la facture de B______ liée à l'intervention du médecin et à une nécessaire prise de médicaments (ATA/494/2018 du 22 mai 2018 consid. 4), le recourant ne contestant au demeurant pas la quotité de ladite facture.

5) Il s'ensuit que le recours sera rejeté.

6) Vu l'issue du litige, un émolument de CHF 250.- sera mis à la charge du recourant (art. 87 al. 1 LPA), et aucune indemnité de procédure ne sera allouée (art. 87 al. 2 LPA).

 

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 3 janvier 2018 par M. A______ contre la décision de la direction des finances de la police du 27 novembre 2017 ;

au fond :

le rejette ;

met un émolument de CHF 250.- à la charge de M. A______ ;

dit qu'il n'est pas alloué d'indemnité de procédure ;

dit que conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à M. A______, ainsi qu'à la direction des finances de la police - DFP.

Siégeant : Mme Payot Zen-Ruffinen, présidente, M. Thélin, Mme Krauskopf,
MM. Pagan et Verniory, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

S. Hüsler Enz

 

 

la présidente siégeant :

 

 

F. Payot Zen-Ruffinen

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :