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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/4568/2010

ATA/818/2012 du 04.12.2012 sur JTAPI/215/2012 ( ICC ) , ADMIS

En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/4568/2010-ICC ATA/818/2012

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 4 décembre 2012

1ère section

 

dans la cause

 

Madame X______
représentée par Berney & Associés S.A., mandataire

contre

ADMINISTRATION FISCALE CANTONALE

 

_________


Recours contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 8 février 2012 (JTAPI/215/2012)


EN FAIT

1. Le litige concerne les impôts cantonaux et communaux (ci-après : ICC) relatifs à l'exercice fiscal 2006.

2. Madame X______, née le ______ 1959, est domiciliée en Ville de Genève depuis 1999, et était donc contribuable à Genève en 2006.

3. Le 13 octobre 2008, l'administration fiscale cantonale (ci-après : AFC) a fait parvenir à Mme X______ son bordereau ICC 2006.

Le revenu imposable retenu était de CHF 133'919.- au taux de CHF 177'517.-, et la fortune imposable de CHF 8'507'184.- au taux de CHF 9'142'123.-. Ses impôts cantonaux s'élevaient à CHF 84'314,90 (dont CHF 19'949,45 d'impôts sur le revenu et CHF 64'365,45 d'impôts sur la fortune), et ses impôts communaux à CHF 23'633,25, auxquels venaient s'ajouter CHF 25.- de taxe personnelle et CHF 11'308,80 d'impôt immobilier complémentaire.

4. Le 6 novembre 2008, par le biais de sa fiduciaire, Mme X______ a élevé réclamation contre le bordereau précité, demandant d'une part que la valeur locative du bien immobilier situé à Y______ (Espagne) soit estimée à EUR 1'070,85 et non à CHF 73'455.-, et d'autre part que la valeur des actions Z______ S.A. (ci-après : Z______) soit estimée à CHF 2'974'357.- et non à CHF 5'700'000.-.

5. Le 17 novembre 2008, Mme X______ a adressé à l'AFC un complément de motivation à sa réclamation.

Son revenu était essentiellement constitué de rendements d'immeubles loués à Genève (pour CHF 177'517.-) et de la valeur locative - contestée - d'un immeuble sis à Y______. Sa fortune était principalement composée des valeurs brutes desdits immeubles situés à Genève (pour CHF 11'283'777.-), dont les valeurs fiscales augmentaient chaque année en fonction des taux de capitalisation établis par l'AFC, d'une maison à Y______ pour CHF 1'501'744.- après abattement, et d'une fortune mobilière pour CHF 6'850'606.-, composée notamment d'actions des sociétés A______ S.A. et Z______.

En éliminant la valeur locative contestée du bien sis en Espagne, le ratio de l'ICC par rapport aux revenus imposables s'élèverait à 108,47 %. Sa fortune étant composée de valeurs immobilisées et illiquides, la décision entreprise la forçait à vendre ses immeubles ou ses actions pour payer ses impôts, ce qui faisait revêtir à ceux-ci un caractère confiscatoire.

L’impôt fédéral direct (ci-après : IFD) 2006, qui représentait CHF 7'026,45, n'était pas contesté.

6. Le 27 janvier 2010, l'AFC a fait parvenir à Mme X______ son bordereau ICC relatif à l'exercice fiscal 2007.

Le revenu imposable était de CHF 14'938.- au taux de CHF 0.-, et sa fortune imposable de CHF 8'507'184.- au taux de CHF 9'142'123.-.

Ce bordereau, qui ne concerne pas la présente cause, a fait l'objet d'une réclamation puis d'un recours actuellement pendant au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) sous numéro de cause A/2610/2011.

7. Le 29 novembre 2010, l'AFC a, à titre de décision sur réclamation, fait parvenir à Mme X______ un bordereau rectificatif 2006 tenant compte de ses remarques, étant précisé néanmoins que les 100 actions Z______ restaient évaluées à CHF 5'700'000.-.

Son revenu imposable passait à CHF 130'036.- au taux de CHF 111'379.-, et sa fortune imposable restait inchangée à CHF 8'507'184.- au taux de CHF 9'142'123.-. Ses impôts cantonaux s'élevaient désormais à CHF 79'730,60 (dont CHF 15'365,15 d'impôts sur le revenu et CHF 64'365,45 d'impôts sur la fortune), et ses impôts communaux à CHF 22'038,60, auxquels venaient s'ajouter CHF 25.- de taxe personnelle et CHF 11'283,80 d'impôt immobilier complémentaire.

8. Le 28 décembre 2010, Mme X______ a interjeté recours auprès du TAPI contre la décision sur réclamation précitée, concluant à son annulation et à la limitation de l'ICC selon le principe du bouclier fiscal.

L’ICC 2006, sans compter l'impôt immobilier complémentaire, s'élevait à CHF 101'786.-, ce qui représentait 91,39 % de son revenu imposable. Une telle charge fiscale revêtait un caractère confiscatoire, l'obligeant à prélever une partie de sa fortune pour payer ses impôts et vivre. N'ayant pas de base de calcul pour estimer le seuil de l'impôt non confiscatoire, mais considérant qu'à partir du 1er janvier 2011 le canton de Genève devait introduire un bouclier fiscal pour l'ICC limitant le montant total d'imposition à 60 % des revenus nets, elle sollicitait l’application de ce dernier pourcentage.

9. Le 28 janvier 2011, l'AFC a notifié à Mme X______ son bordereau ICC 2008.

Le revenu imposable retenu était de CHF 0.- au taux de CHF 0.-, et sa fortune imposable de CHF 12'265'015.- au taux de CHF 12'921'875.-.

Ce bordereau, qui ne concerne pas la présente cause, a fait l'objet d'une réclamation puis d'un recours actuellement pendant au TAPI sous numéro de cause A/4619/2011.

10. Par jugement du 8 février 2012, le TAPI a rejeté le recours du 28 décembre 2010 relatif à l’année fiscale 2006.

Le PL 10'199, qui mettait en place le bouclier fiscal n'entrerait pas en vigueur avant le 1er janvier 2011. L'ICC litigieux représentait 86,96 % du revenu imposable, comme dans une décision récente où il avait été retenu un taux d'imposition confiscatoire. Toutefois, la fortune de la contribuable avait crû sensiblement au cours des années 2007 et 2008, quelles qu'en aient été les causes, gagnant près de CHF 4'000'000.- entre 2006 et 2008. Il ne pouvait dès lors pas être retenu que la charge fiscale avait provoqué une atteinte spécialement grave à la fortune de la contribuable, empêchant sa reconstitution au sens de la jurisprudence fédérale. L'existence d'un impôt confiscatoire ne pouvait dès lors être admise.

11. Par acte posté le 26 mars 2012, Mme X______ a interjeté recours auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre le jugement précité, concluant à son annulation, à la limitation de l'ICC 2006 selon le principe du bouclier fiscal et à l'octroi d'une équitable indemnité de procédure.

Le taux d'imposition se montait à 86,96 % de son revenu imposable 2006, ne lui laissant, après paiement de l'intégralité du bordereau, que CHF 16'958.- pour vivre toute l'année. Le critère de la durée était aussi rempli, des recours ayant été déposés pour les années 2007 et 2008, avec une charge fiscale supérieure à 100 %, et un scénario identique était prévu pour les taxations 2009 et 2010, non taxées. L'impôt était dès lors confiscatoire.

Sa fortune fiscale avait certes augmenté entre 2006 et 2008, mais de manière artificielle. Une grande part de la fortune imposable était constituée d'immeubles locatifs sis à Genève. Entre 2006 et 2008, le taux de capitalisation, qui servait de base de calcul pour la valeur fiscale, était passé de 6,99 % à 6,54 % les états locatifs ayant aussi évolué. De ce fait, sa fortune avait augmenté de CHF 895'295.- pour les immeubles en nom et de CHF 2'756'000.- pour les actions de la société Z______. Elle avait en outre 2 dettes en euros, l'une envers la société B______ Corp et l'autre envers la Banca C______ S.A. L'écart de change négatif de 0,13015 entre le 31 décembre 2006 et le 31 décembre 2008 diminuait ainsi le montant de ce poste et augmentait artificiellement sa fortune de CHF 228'258.-.

Il n'était pas demandé l'application du bouclier fiscal, mais simplement de s'inspirer de son mode de calcul, ce qui ramènerait l'ICC 2006 à CHF 66'827.-.

12. Le 27 avril 2012, l'AFC a conclu au rejet du recours.

La taxation 2006 n’occasionnait pas une atteinte spécialement grave à la fortune de la recourante. Cette fortune n’avait pas été épuisée. Au contraire, celle-ci avait augmenté au cours des années postérieures à celle en litige. On ne pouvait donc admettre être en présence d'un impôt confiscatoire.

13. Le 2 mai 2012, le juge délégué a fixé aux parties un délai au 1er juin 2012 pour formuler toutes requêtes ou observations complémentaires, après quoi la cause serait gardée à juger.

14. Aucune des parties n'a répondu à cette invite.

EN DROIT

1. Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2. Au 1er janvier 2011, un nouvel art. 60 de la loi sur l'imposition des personnes physiques du 27 septembre 2009 (LIPP - D 3 08) est entré en vigueur, prévoyant une limite fixe de taxation en pourcents. Le texte de son premier alinéa est le suivant :

« Pour les contribuables domiciliés en Suisse, les impôts sur la fortune et sur le revenu - centimes additionnels cantonaux et communaux compris - ne peuvent excéder au total 60 % du revenu net imposable. Toutefois, pour ce calcul, le rendement net de la fortune est fixé au moins à 1 % de la fortune nette ».

Enfin, eu égard au principe constitutionnel de non-rétroactivité des lois, consacré notamment à l’art. 1 al. 1 titre final du Code civil suisse du 10 décembre l907 (CC - RS 210), et de la jurisprudence du Tribunal fédéral (notamment l’ATF 119 Ia 254, consid. 3b), l’application rétroactive d’une loi n’est admissible que si elle est expressément prévue, est limitée dans le temps, ne conduit pas à des inégalités choquantes et se justifie par de justes motifs.

3. L’art. 26 al. 1 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 (Cst. - RS 101) consacre le principe de la garantie de la propriété. Selon la doctrine, la garantie de la propriété assurée par l’ancien art. 22ter aCst., aujourd’hui repris par l’art. 26 al. 2 Cst., vise à sauvegarder la propriété en tant qu’institution de notre ordre juridique. Le législateur ne doit pas adopter une norme qui supprime cette institution juridique, la rend vaine, la vide de sa substance ou porte atteinte à son noyau intangible (J.-M. RIVIER, Droit fiscal suisse, L’imposition du revenu et de la fortune, 1998, p. 89).

La garantie de la propriété ne va, en matière fiscale, pas au-delà de l’interdiction d’une imposition confiscatoire, cette dernière portant atteinte à l'institution même de la propriété privée (ATAF 2007/23 consid. 7.4.1 ; U. HÄFELIN/G. MÜLLER/F. UHLMANN, Allgemeines Verwaltungsrecht, 6e éd., 2010, n. 2043 ; K. VALLENDER, in B. EHRENZELLER et al. [éd.], Die schweizerische Bundesverfassung - Kommentar, vol. I, 2e éd., 2008, n. 34 ss ad art. 26 Cst. ; J.P. MÜLLER/M. SCHEFER, Grundrechte in der Schweiz, 4e éd., 2008, p. 1041).

Ainsi, selon la jurisprudence, une prétention fiscale ne doit-elle pas porter atteinte au noyau essentiel de la propriété privée. Pour juger si une imposition a un effet confiscatoire, il faut examiner la charge que représente l’imposition sur une assez longue période, en faisant abstraction des circonstances extraordinaires ; à cette fin, il y a lieu de prendre en considération l’ensemble des circonstances concrètes, la durée et la gravité de l’atteinte, ainsi que le cumul d’autres taxes ou contributions, et la possibilité de reporter l’impôt sur d’autres personnes (ATF 122 I 305 consid. 7a ; 128 II 112 consid. 10b.bb, et les références citées ; Arrêt du Tribunal fédéral 2C_579/2009 du 26 juin 2010).

Le Tribunal fédéral a notamment admis que le noyau essentiel de la propriété privée n’est pas touché si, pendant une courte période, le revenu à disposition ne suffit pas à s’acquitter de la charge fiscale sans entamer la fortune (ATF 106 Ia 342, consid. 6c, p. 353 ; Arrêts du Tribunal fédéral 2P.139/2004 du 30 novembre 2004, consid. 4.1 ; 2C_277/2008 du 26 septembre 2008).

Le Tribunal fédéral fait montre d’une grande retenue dans l’admission du caractère confiscatoire d’une imposition. Il n’en a en effet constaté qu’à une seule reprise, dans le cadre d’une rente viagère constituée par disposition pour cause de mort, et relativement à laquelle l’impôt sur les successions et l’impôt sur le revenu, combinés, représentaient 55 % du montant des rentes d’une personne ayant une capacité contributive réduite (D. YERSIN, Les protections constitutionnelles et légales contre les impositions confiscatoires, in Publications de l’Institut suisse de droit comparé, vol. 12, 1990, p. 278 ; X. OBERSON, Droit fiscal suisse, 4ème éd., 2012, p. 44).

4. Au plan cantonal, le Tribunal administratif zurichois a admis qu'un taux d'imposition sur le revenu de 88 %, et à plus forte raison de 97,5 %, obligeait le contribuable à entamer la substance de son patrimoine pour payer ses impôts, et s'avérait confiscatoire si cet état de choses perdurait (Arrêt du Tribunal administratif du canton de Zurich du 2 février 2011, in StE 2011 A 22 n° 3).

La chambre de céans a jugé confiscatoire une imposition totale sur le revenu et la fortune représentant 98,5 % du revenu imposable des recourants, dont la situation sur ce point était durable (ATA/771/2011 du 20 décembre 2011).

5. Selon la doctrine, la Cour constitutionnelle allemande a donné un élément de réponse quant à la manière de déterminer le seuil d’imposition compte tenu de l’ensemble des circonstances et des contributions publiques applicables, au-delà duquel l’imposition devient confiscatoire. Cette dernière a tenté de définir selon des critères actuels quelle est la « portion de son bien » que chaque citoyen doit donner à l’Etat dans un système d’économie privée. Elle a considéré, en relation avec l’imposition de la fortune, que le rendement de celle-ci constituait la limite supérieure de l’imposition. La charge fiscale constituée par l’impôt sur le revenu et l’impôt sur la fortune ne doit pas porter atteinte au patrimoine qui représente la source du revenu. Ce patrimoine bénéficie de la garantie de la propriété, ce qui interdit de frapper de l’impôt un rendement théorique ; seul le rendement effectif peut être soumis à une imposition. Ainsi, l’impôt sur la fortune, dans la mesure où il frappe un patrimoine qui, par nature, ne produit pas un revenu, comme une collection de tableaux, atteint la substance de la propriété. Au surplus, le principe de la proportionnalité de l’impôt aux facultés contributives veut que l’impôt sur la fortune saisisse non pas le capital lui-même, mais le revenu qu’il produit. La Cour constitutionnelle allemande a estimé que la charge fiscale de l’impôt sur le revenu et de l’impôt sur la fortune ne pouvait dépasser 50 % (BVerfGE 115, 97, 108 s. ; 93, 121, 136 s.), les biens affectés à l’usage courant devant faire l’objet d’un traitement plus favorable, de manière à permettre au contribuable d’organiser sa vie courante comme il l’entend (J.-M. RIVIER, op. cit., p. 90-91).

6. En l’espèce, Mme X______ fait l’objet d’une taxation totale, fédérale, cantonale et communale, de CHF 120'104.- pour la période fiscale 2006 - étant précisé que si l'IFD n'est pas contesté dans le cadre du présent litige, il participe néanmoins à la charge fiscale totale en matière d'impôt sur le revenu. Le revenu brut pour cette même période s’est monté à CHF 177'517.- et le revenu imposable ICC à CHF 130'036.-. Sa fortune nette était de CHF 9'142'123.- et sa fortune imposable (ICC) de CHF 8'507'184.-.

Ainsi, l’imposition totale, tant sur le revenu que sur la fortune, équivalait à 92,36 % du revenu imposable ICC de la contribuable. Le pourcentage que représente cette imposition porte une atteinte grave à la propriété de la recourante dans la mesure où elle est contrainte, une fois ses impôts acquittés, de vivre en entamant sa fortune, puisqu'il ne lui reste dans ce cas qu'un peu moins de CHF 10'000.- de revenus disponibles sur l'ensemble de l'exercice. L’imposition épuise donc la substance de l’objet imposable et empêche sa reconstitution.

7. L'atteinte à la substance de l'objet imposable doit également, selon les conditions précitées, s'inscrire dans la durée.

L'instance précédente, ainsi que l'AFC, soutiennent que tel n'est pas le cas, les taxations 2007 et 2008 de la recourante - par ailleurs également contestées - montrant une augmentation de la fortune imposable.

Cette augmentation ne peut toutefois être suivie. En effet, si les 2 taxations en cause - les seules postérieures à l'année 2006 à avoir été notifiées - retiennent, quelles qu'en soient les causes, un accroissement de la fortune imposable, elles fixent également le revenu imposable à CHF 0.-. Dès lors, le problème d'atteinte à la substance de la fortune pour le paiement des impôts courants perdure, voire va s'accentuant, lors des exercices postérieurs.

L’AFC n’a au demeurant pas soutenu - et rien dans le dossier ne le démontre - que Mme X______ aurait, en 2006, réduit son revenu pour bénéficier d’un bouclier fiscal.

8. Le caractère confiscatoire de l’ICC 2006 sera ainsi reconnu, et le recours admis. En conséquence, le jugement du TAPI sera annulé, de même que la décision sur réclamation et le bordereau de taxation ICC 2006 y afférent.

9. S’agissant de la détermination du pourcentage de la charge fiscale admissible, il n’apparaît pas arbitraire, à défaut de jurisprudence établie en la matière, de s’inspirer du nouvel art. 60 LIPP. Dans l'ATA/771/2011 précité, la chambre de céans - sur la base des conclusions des recourants - avait jugé que l’imposition totale de ceux-ci, correspondant à l’ICC sur le revenu, l’imposition sur la fortune ainsi que l’impôt immobilier complémentaire, ne devait pas excéder 70 % de leur revenu imposable. Ce taux peut être retenu également dans la présente espèce, dans la mesure où, d'une part, l'art. 60 LIPP n'est pas directement applicable à la cause, et où, d'autre part, une telle solution permet de respecter le principe de proportionnalité tout en restant en-deçà du seuil - élevé - posé par la jurisprudence fédérale pour reconnaître le caractère confiscatoire de l'impôt.

L’imposition finale ICC 2006 ne pourra excéder au total 70 % du revenu net imposable, étant précisé que pour ce calcul, le rendement net de la fortune sera fixé au moins à 1 % de la fortune nette, ceci dans l’esprit de la volonté du législateur lors de l’adoption de l’art. 60 LIPP.

10. Eu égard à ce qui précède, le bordereau de taxation ICC 2006 du 29 novembre 2010 sera annulé et le dossier renvoyé à l’AFC, afin qu’elle en notifie un nouveau, conforme aux considérants ci-dessus.

11. Vu la teneur de l’art. 87 al. 1 2ème phr. LPA, aucun émolument ne sera mis à la charge de l’AFC, quand bien même elle succombe. Une indemnité de procédure de CHF 1'500.- sera allouée à Mme X______, à charge de l’Etat de Genève (art. 87 al. 2 LPA).

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

à la forme :

déclare recevable le recours interjeté le 26 mars 2012 par Madame X______ contre le jugement du Tribunal administratif de première instance du 8 février 2012 ;

au fond :

l'admet ;

annule le jugement du Tribunal administratif de première instance du 8 février 2012 ;

annule le bordereau de taxation ICC 2006 et la décision sur réclamation du 29 novembre 2010 ;

renvoie la cause à l'administration fiscale cantonale pour nouvelle taxation ICC 2006 dans le sens des considérants ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument ;

alloue à Madame X______ une indemnité de procédure de CHF 1'500.-, à charge de l'Etat de Genève ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral, par la voie du recours en matière de droit public ; le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, 1000 Lausanne 14, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l’art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l’envoi ;

communique le présent arrêt à Madame X______, représentée par Berney & Associés S.A., mandataire, à l'administration fiscale cantonale ainsi qu'au Tribunal administratif de première instance.

Siégeants : M. Thélin, président, Mme Hurni, M. Verniory, juges.

 

Au nom de la chambre administrative :

la greffière de juridiction a.i. :

 

 

C. Sudre

 

le président siégeant :

 

 

Ph. Thélin

 

 

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :