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Décisions | Chambre administrative de la Cour de justice Cour de droit public

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A/2461/2019

ATA/449/2021 du 27.04.2021 ( FPUBL ) , REJETE

Recours TF déposé le 07.06.2021, rendu le 10.03.2022, REJETE, 8C_424/2021
Descripteurs : DROIT DE LA FONCTION PUBLIQUE;FONCTIONNAIRE;RAPPORTS DE SERVICE DE DROIT PUBLIC;SALAIRE;CLASSE DE TRAITEMENT;ÉGALITÉ DE RÉMUNÉRATION;ÉGALITÉ DE TRAITEMENT;ÉGALITÉ ENTRE HOMME ET FEMME;CAHIER DES CHARGES;ÉVALUATION DE PLACES DE TRAVAIL
Normes : Cst.8.al3; LEg.1; LEg.2; LEg.3; LEg.5; LEg.6; LPAC.2A.al1.letb; REga
Résumé : Recours d'une fonctionnaire contre une décision de son département de tutelle constatant qu'elle ne fait pas l'objet d'une discrimination salariale en raison du sexe. Bien que la rémunération de ses collègues masculins apparaisse supérieure à la sienne, sa fonction et le traitement y relatif ont été évalués sur la base des cahiers des charges des différents postes ainsi que de critères tels que la mission, les responsabilités ou encore le nombre de personnes sous gestion. Une inégalité de traitement fondée sur le genre n'a en conséquence pas été rendue vraisemblable. Le recours doit être rejeté.
En fait
En droit
RÉPUBLIQUE ET CANTON DE GENÈVE

 

POUVOIR JUDICIAIRE

A/2461/2019-FPUBL ATA/449/2021

COUR DE JUSTICE

Chambre administrative

Arrêt du 27 avril 2021

 

dans la cause

 

Mme A______
représentée par Me Giuseppe Donatiello, avocat

contre

DÉPARTEMENT DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE, DE LA FORMATION ET DE LA JEUNESSE

 



EN FAIT

1) Mme A______ a été engagée dès le ______ 1997 par le département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse (ci-après : DIP ou le département) en qualité d'employée non-permanente au poste de collaboratrice socio-professionnelle au sein de l'B______(ci-après : B______).

2) Dès le 1er juillet 1998, elle a été promue au poste de responsable C______ – structure qui a notamment pour mission de promouvoir les stages et les apprentissages auprès des entreprises, de prospecter de nouvelles offres de places, de coordonner les stages organisés par les institutions du canton de Genève et de placer les candidats à l'emploi en stage – en qualité d'employée permanente en classe maximale 19 de l'échelle des traitements de l'État de Genève, dans un premier temps à 50 % puis, dès le 1er juin 1999 à 100 %.

En 2001, la rémunération liée à ce poste a été réévaluée avec effet rétroactif au 1er janvier 2000 et a été positionnée en classe maximale 20.

Le traitement de Mme A______ a été porté dès cette date en classe 18, annuité 3, dès lors qu'elle n'avait pas encore été nommée fonctionnaire.

3) Sa nomination étant intervenue le 1er mars 2000, son traitement a été porté en classe 20, annuité 2 dès cette date, puis en classe 20, annuité 3 dès le 1er juillet 2000 et en classe 20, annuité 4 dès le 1er juillet 2001.

4) À la suite d'une réévaluation de sa fonction de responsable C______, Mme A______ est devenue cheffe de groupe et son traitement a été porté en classe 21 dès le 1er novembre 2010.

À la tête d'une petite équipe, elle était chargée de transmettre et appliquer sur le terrain les volontés politiques et stratégiques de l'B______ et de l'S______(ci-après : S______) en matière de besoins en places de stage et d'apprentissage. L'objectif de la structure était de prospecter et créer des liens avec les entreprises et milieux économiques pour augmenter les places de formation pour les jeunes et accroître de 10 % les places d'apprentissage par année, ainsi que de promouvoir de nouveaux métiers auprès des entreprises et des écoles. Elle n'était toutefois pas habilitée à prendre des décisions liées à l'application de la législation et la réglementation spécifiques au domaine, ni de décisions relatives aux engagements financiers, et son autonomie était restreinte par la définition de la politique de l'B______ et de l'S______. Dans le cadre de son mandat, ses partenaires étaient notamment les représentants patronaux et syndicaux, chefs du personnel, responsables de secteurs professionnels du canton, ainsi que la Confédération et en particulier le secrétariat d'État à la formation, à la recherche et à l'innovation (ci-après : SEFRI).

5) Dès le 1er avril 2013, Mme A______ s'est vue confier la responsabilité de la T______, tout en conservant ses responsabilités liées à C______.

La T______ était une structure destinée aux particuliers et aux entreprises consistant en un espace d'information et de conseil pour l'orientation, la formation professionnelle et continue, le financement de la formation et l'emploi. Dans le cadre de sa nouvelle fonction, elle avait notamment pour mission de promouvoir et développer les prestations de la T______ ; assurer la communication de cette structure et des centres associés ; transmettre et appliquer sur le terrain les volontés politiques et stratégiques de l'B______ et l'S______ en matière de besoins de places de stage et de formation et définir précisément les missions et objectifs visés d'C______ ; concevoir et faire évoluer ce dispositif permettant de coordonner les besoins de places de stage et apprentissage avec les offres ; mettre en place des stratégies de communication ; développer des stratégies pour promouvoir la formation et les stages en entreprise à large échelle ; développer et entretenir la collaboration avec les partenaires sociaux.

6) Dans ce contexte et dès lors que le poste nouvellement créé reprenait les cahiers des charges de deux fonctions jusqu'alors distinctes, un nouveau cahier des charges a été établi et la fonction de Mme A______ devait faire l'objet d'une nouvelle évaluation.

7) Le 9 septembre 2013, la direction des ressources humaines du DIP a demandé l'évaluation du poste précité à l'office du personnel de l'État (ci-après : OPE). Un projet d'organigramme de l'B______ a été joint à cette demande, faisant état des cinq services alors rattachés au directeur général, à savoir le F______, le G______, le H______, le I______ et le J______.

8) Le 28 novembre 2013, le service des ressources humaines de l'OPE
(ci-après : SRH-OPE) a classé ce poste dans la fonction de chef de groupe en classe 22.

9) Le 8 janvier 2014, Mme A______ a signé son nouveau cahier des charges.

10) À la même date, l'ancien directeur général de l'B______ a formé auprès de la direction des ressources humaines du DIP une demande de reconsidération afin que le poste de cheffe de groupe de Mme A______ soit évalué en classe 23. Cette demande a été transmise au SRH-OPE avec le soutien de la directrice des ressources humaines, accompagnée d'un cahier des charges modifié en ce sens que l'expérience professionnelle requise était un minimum de cinq ans dans le domaine des relations extérieures et du marketing, ainsi que dans l'organisation et la mise sur pied d'évènements et d'expositions ponctuelles ou permanentes.

11) Le 14 février 2014, le SRH-OPE a informé la direction des ressources humaines du DIP avoir reconsidéré sa position en colloquant le poste dans la classe de fonction 23.

12) Le DIP ayant donné son accord quant à l'évaluation du SRH-OPE, celle-ci est devenue une décision notifiée à Mme A______ le 25 février 2014. Cette dernière n'a pas formé opposition auprès de la commission de réexamen en matière d'évaluation des fonctions (ci-après : CREMEF) contre cette décision, entrée en vigueur le 1er mars 2014.

13) Le 19 mars 2014, l'ancien directeur général de l'B______ a informé Mme A______ avoir décidé de modifier la dénomination de son poste, laquelle devenait « directrice T______ ». Cette nouvelle dénomination n'entraînait pas de changement de sa classe de fonction, ni de son cahier des charges. Elle était par ailleurs invitée à participer aux séances du conseil de direction restreint, alors composé des directeurs des services de l'B______.

14) Le 27 mars 2018, Mme A______ a informé la directrice générale de l'office cantonal de l'inspection et des relations du travail (ci-après : OCIRT) avoir constaté une différence de traitement importante entre sa rémunération et celle de ses collègues de sexe masculin.

15) L'OCIRT lui a répondu le 19 avril 2018 que, lorsqu'une salariée s'estimait être victime de discrimination salariale, elle pouvait saisir la justice s'il n'était pas possible de régler la situation avec son employeur.

16) Le 16 mai 2018, Mme A______ s'est adressée au directeur général de l'OPE, lui indiquant qu'elle s'estimait victime d'une inégalité de traitement en raison de son genre et demandant que l'OPE renonce à invoquer l'exception de prescription.

17) Le 20 juin 2018, le directeur général de l'OPE lui a répondu qu'après un examen approfondi de sa situation professionnelle, il considérait que son poste était équitablement rémunéré en regard des responsabilités qui lui incombaient et également de celles des autres postes de la structure dans laquelle elle s'inscrivait. De plus, l'OPE n'était pas favorable à renoncer à invoquer l'exception de prescription, étant précisé que cette déclaration relevait formellement de la compétence du DIP.

18) Le 23 juillet 2018, la directrice des ressources humaines du DIP a confirmé que le département refusait de renoncer à invoquer l'exception de prescription. Elle a par ailleurs rappelé à Mme A______ que le titre de « directrice T______ » restait une dénomination d'usage.

19) Le 27 août 2018, le nouveau directeur général de l'B______, entré en fonction le 1er février 2018, a fait part à Mme A______ de la nécessité de simplifier la structure des H______ et F______, ainsi que de ses prestations en lien avec C______ et la T______.

20) Le 20 septembre 2018, une séance s'est tenue en présence de Mme A______, des directeurs de services de l'B______, ainsi que du directeur général adjoint, visant à clarifier les rôles et responsabilités des services de l'B______ en se fondant sur les principes de lisibilité, simplification, responsabilisation et efficience. Dans ce contexte, les quatre collaborateurs d'C______ allaient être rattachés au H______ qui se trouvait en lien direct avec les milieux professionnels. Ce rattachement a été annoncé en comité de direction le 24 septembre 2018.

21) Le 27 septembre 2018, Mme A______, estimant faire l'objet d'une discrimination salariale liée au sexe et se fondant sur l'art. 5 al. 1 de la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes du 24 mars 1995 (LEg - RS 151.1), a demandé à la Conseillère d'État en charge du DIP de prononcer des mesures provisionnelles, le cas échéant urgentes, afin qu'aucune modification organisationnelle au sein de l'B______ ne soit mise en œuvre. Elle a également demandé à bénéficier de la classe de traitement 25, avec effet rétroactif dès la date à laquelle son poste avait été colloqué en classe 23.

Ce courrier a été transmis à la directrice des ressources humaines du DIP, pour raison de compétence.

22) Le même jour, elle a confirmé au directeur général de l'B______ qu'elle s'estimait victime d'une discrimination salariale quant au sexe. En sa qualité de directrice et participant à ce titre aux séances de direction de l'B______, sa rémunération était inférieure à celle de ses collègues masculins avec le même statut. Lorsqu'elle avait accepté que son poste soit porté en classe 23, elle ne connaissait pas la classe de traitement des précités. Par ailleurs, elle sollicitait le prononcé de mesures provisionnelles pour empêcher que des modifications organisationnelles au sein de l'B______, qui visaient à la rétrograder, ne soient mises en œuvre, ce jusqu'à droit jugé sur la question de la discrimination salariale dénoncée. S'agissant des changements envisagés, il était en particulier question d'un rattachement de la T______ à la responsabilité du directeur F______.

23) Le 10 octobre 2018, Mme A______ a demandé à la responsable de secteur RH du DIP de prévenir le directeur général de l'B______ qu'aucune mesure organisationnelle ne devait intervenir, dans la mesure où il était question de remaniements et de fusion avec un autre service dirigé par un autre directeur.

24) Le 17 octobre 2018, elle a demandé à la Conseillère d'État en charge du département de se déterminer sur sa requête de mesures provisionnelles urgentes.

25) Le 18 octobre 2018, Mme A______ a informé le directeur général de l'B______ qu'elle ne participerait pas à la prochaine séance de réorganisation du F______ et de la T______, compte tenu de ses démarches en cours.

26) Le 21 novembre 2018, la directrice des ressources humaines du DIP a répondu aux courriers que Mme A______ avait adressés tant au directeur général de l'B______ qu'à la Conseillère d'État en charge du département. Vu le contexte dans lequel s'inscrivait la réorganisation des différents services de l'B______, en particulier s'agissant des dispositifs C______ et T______, qui avait été évoquée dès le mois d'août 2018, ces mesures de gestion étaient nécessaires au bon fonctionnement de l'administration. Dès lors, il était attendu de Mme A______ qu'elle participe aux séances concernant la réorganisation. Au demeurant, le comité de direction était composé de douze personnes dont les postes avaient été évalués conformément à la méthodologie d'évaluation de l'État de Genève, selon la fiche MIOPE 02.01.01, soit indépendamment des personnes qui les occupaient et donc de leur genre.

27) Le 17 décembre 2018, Mme A______ a indiqué à la Conseillère d'État en charge du département, d'une part, n'avoir pas été contactée afin de participer à une réunion avec les parties concernées et, d'autre part, contester le contenu du courrier 21 novembre 2018 et demander qu'une décision soit rendue.

28) Le 29 janvier 2019, une séance s'est tenue en présence de Mme A______ accompagnée de son avocat, ainsi que de la cheffe de service aux ressources humaines de l'OPE, d'une juriste de l'OPE et de la responsable de secteur RH du DIP.

Lors de cette séance, l'organigramme de l'B______ au 1er janvier 2019 a été présenté à Mme A______, indiquant les intitulés de fonction des membres du comité de direction ainsi que les dénominations d'usage, le nombre de personnes sous gestion et les critères inhérents à chaque fonction. Les classifications des fonctions occupées par les autres membres du comité de direction ont été mentionnées. Des explications ont été données sur plusieurs points en lien avec les revendications de Mme A______. La principale distinction entre l'évaluation de la fonction de l'intéressée et celles de ses collègues résidait dans le critère de la responsabilité. Les dispositifs qu'elle dirigeait n'étaient que des supports à une prestation de politique publique. Lorsque le SRH-OPE procédait à une évaluation de fonction, il ne tenait pas compte de la personne titulaire de la fonction, mais du poste et des activités décrites, indépendamment du genre de la personne occupant la fonction. Une autre différence résidait dans le nombre et l'hétérogénéité des fonctions subordonnées. Mme A______ comptait au maximum onze personnes sous gestion, dont certaines sous contrat à durée déterminée, occupant des fonctions essentiellement administratives comprises entre les classes 11 et 16, tandis que les autres membres du comité de direction géraient entre dix-neuf et septante-neuf personnes. Par ailleurs, le niveau de responsabilité de son poste était inférieur à ceux de ses collègues, dès lors que certains d'entre eux avaient pour tâche de suppléer le directeur général dans la prise en charge de ses dossiers.

29) Le 20 février 2019, Mme A______ a informé le directeur général de l'B______ qu'elle ne se présenterait pas à la séance du 26 février 2019 portant sur la réorganisation de son service et de celui de l'information scolaire et professionnelle.

30) Mme A______ a transmis ses observations relatives au procès-verbal de l'entretien du 29 janvier 2019, lesquelles ont été annexées audit procès-verbal qui n'a pas été modifié.

Elle a demandé qu'une modification de forme soit apportée quant aux propos qu'elle aurait alors tenus. Les services dont elle était responsable ne pouvaient pas être qualifiés de services « de support ». Son poste impliquait des prises de décisions rapides pour la gestion des urgences, notamment la gestion des usagers instables, violents ou menaçants. Il avait été sous-évalué par rapport au niveau de responsabilité équivalent de ses collègues masculins. La réorganisation de l'B______ s'avérait discriminatoire et attentatoire à sa personnalité. La cotation pour l'expérience professionnelle attribuée à son poste était erronée, seule la cotation « E » pouvant entrer en considération. Elle était prête à accepter un traitement en classe 24, dès lors que les autres directeurs bénéficiaient de cette classe. Une décision devait être rendue.

31) Le 27 mars 2019, le directeur général de l'B______ a rappelé à Mme A______ ses devoirs de service, notamment quant à la nécessité de sa présence aux séances de réorganisation touchant son service.

32) Le 5 avril 2019, Mme A______ a transmis le procès-verbal de l'entretien du 29 janvier 2019 signé à la directrice des ressources humaines du DIP.

33) Le même jour, Mme A______ confirmé au directeur général de l'B______ que le but de la réorganisation de son service relevait d'un comportement de représailles en lien avec la doléance de discrimination salariale quant au sexe qu'elle avait émise. Ce processus visait à modifier l'organigramme de l'B______ pour pouvoir affirmer qu'elle n'était prétendument pas directrice.

34) Par décision du 27 mai 2019, la Conseillère d'État en charge du département a constaté qu'il n'existait aucune discrimination salariale quant au sexe dans la collocation du poste occupé par Mme A______. Cette décision était exécutoire nonobstant recours et l'intéressée était priée de bien vouloir participer aux séances de réorganisation des services nécessaires au bon fonctionnement de l'B______.

Les mesures provisionnelles sollicitées par Mme A______, consistant à faire interdiction à l'B______ de prendre des mesures de réorganisation relatives aux dispositifs C______ et T______, étaient sans objet, dès lors que le grief de discrimination n'était pas fondé.

L'B______ comptait à ce jour quatre services, placés chacun sous la responsabilité d'une directrice ou d'un directeur, soit le F______, le G______, le H______ et le I______. Jusqu'à la fin de la précédente législature, le J______ était également rattaché à l'B______. L'organigramme de ce dernier actait cette organisation. Ces cinq services avaient pour mission première d'appliquer le cadre légal tel que défini au niveau fédéral par les lois et les ordonnances fédérales applicables en matière de formation professionnelle et continue, ainsi qu'au niveau cantonal par les lois et règlements applicables dans chacun des cinq domaines concernés et définissant la politique cantonale en la matière. Sous l'autorité du directeur général de l'B______ et ainsi que l'indiquaient leurs cahiers des charges, il appartenait aux directeurs de ces services d'exécuter et de faire respecter les législations fédérale et cantonale.

Les structures C______ et T______ n'avaient pas pour mission de faire appliquer une loi cantonale. Leur mission était d'apporter des supports transversaux aux différents services chargés du respect et de l'application du cadre légal.

Le directeur du H______ était le responsable hiérarchique de quarante-neuf personnes, celui du I______ de vingt-deux personnes, celui du G______ de septante-neuf personnes et celui du F______ de dix-neuf personnes. Mme A______ était pour sa part à la tête d'une équipe pouvant atteindre onze personnes en incluant des contrats à durée déterminée, étant précisé que le nombre de personnes disposant d'un contrat à durée indéterminée avait oscillé, depuis son entrée en fonction en tant que cheffe de groupe, entre quatre et sept.

L'autre poste de chef de groupe existant, soit celui relatif à la structure K______, occupé jusqu'à récemment par un homme, était colloqué, au même titre que celui de Mme A______, en classe 23.

Le fait que Mme A______ pouvait être amenée à gérer des urgences ou prendre des décisions rapides ne démontrait pas qu'elle était responsable de l'application et du respect d'une loi cantonale et de son règlement ou d'une politique publique ou stratégique. En revanche, cette tâche correspondait effectivement à ce qui était attendu d'elle en tant que cadre supérieur dont le poste était colloqué en classe 23.

Son poste ne pouvait pas bénéficier de la cotation « E » car « la mise au courant, la collaboration et la spécialisation » qui étaient nécessaires, ainsi que « les connaissances de domaines connexes » qui permettaient d'accomplir les tâches liées à ce poste, avaient été estimée par le SRH-OPE comme correspondant à une cotation « D », soit trois à cinq ans d'expériences professionnelles après l'obtention du diplôme requis. De surcroît, les postes de directeurs à la formation continue, à l'information scolaire et professionnelle, ainsi qu'à l'orientation scolaire et professionnelle avaient également été évalués en cotation « D » pour ce critère, alors qu'ils détenaient des responsabilités supérieures aux siennes.

Dans de telles circonstances, des motifs objectifs existaient et justifiaient une différence de traitement entre son poste et ceux des autres cadres du comité de direction. Le poste de Mme A______ avait été évalué par le SPE indépendamment de la personne qui l'occupait, comme il était d'usage dans la fonction publique. Dans la mesure où elle n'avait pas contesté la collocation de son poste en classe 23 dans le délai prévu à cet effet, sa démarche semblait vouée à contourner la prescription de son droit d'opposition auprès de la CREMEF.

35) Le 28 juin 2019, Mme A______ a recouru auprès de la chambre administrative de la Cour de justice (ci-après : la chambre administrative) contre la décision précitée. Elle concluait préalablement à ce qu'il soit, par décision sur mesures provisionnelles, le cas échéant urgentes, fait interdiction au département, respectivement l'B______, de mettre en œuvre des modifications de son cahier des charges et des modifications organisationnelles concernant C______ et la T______, notamment l'incorporation de cette dernière sous la responsabilité du directeur de l'information scolaire et professionnelle, jusqu'à droit jugé au fond. Elle demandait également la production des dossiers des membres du conseil de direction de l'B______ qui étaient en poste au moment de la fixation de sa rémunération, à savoir MM. L______, M______, N______, O______, P______ et Q______. Elle sollicitait la transmission du dossier au Tribunal administratif de première instance (ci-après : TAPI) afin de tenter la conciliation en matière d'égalité. Elle demandait, cela fait, l'ouverture des enquêtes, la comparution personnelle des parties et une expertise aux fins d'analyser l'évaluation de la classe de traitement appliquée par le DIP à ses tâches et responsabilités en comparaison de ses collègues masculins précités, membres du conseil de direction restreint. Elle concluait principalement à ce qu'il soit constaté que la décision du 27 mai 2019 était contraire au droit, à ce que sa classe salariale soit réévaluée en position 24 dès le 1er avril 2013, à ce que le département soit condamné à lui verser la différence due en conséquence pour la période du 1er avril 2013 au 28 juin 2019 et à ce que le DIP soit condamné à la remettre dans ses fonctions à la tête d'C______.

Il avait été annoncé au mois d'octobre 2018 que Mme A______ ne serait plus responsable d'C______, alors qu'elle assumait cette fonction depuis 1998. Il était également prévu de lui retirer la responsabilité de la T______. Il s'agissait d'une rétrogradation de fait, puisqu'il avait été décidé que ses principales responsabilités lui seraient ôtées. Ces mesures, considérées comme des représailles, visaient à modifier l'organigramme de l'B______ pour pouvoir affirmer qu'elle n'avait pas le statut de directrice et justifier une différence de traitement inéquitable. Le fait que le département l'avait enjointe à participer aux séances de réorganisation des services de l'B______ indiquait que ces démarches allaient se poursuivre. Dans ces circonstances, compte tenu des droits liés à sa personnalité, du respect de son cahier des charges et de l'interdiction de discriminer, l'interdiction de modifier son cahier des charges et l'organisation de l'B______ devait être prononcée.

En janvier 2014 déjà, le directeur général de l'B______, se fondant sur le cahier des charges de la recourante, avait conclu à l'établissement d'un profil pour la fonction « MEKAK » correspondant à la classe de traitement 25. S'agissant en particulier du critère de la responsabilité, il avait souligné que cette fonction impliquait la gestion et la direction parallèle de deux équipes (C______ et T______), le développement d'un centre de compétence cantonal et transfrontalier, ainsi qu'une coordination inter institutionnelle, une représentation au sein du réseau international et le développement de projets européens. Mme A______ avait alors accepté l'attribution de la classe 23 qui lui était proposée par sa direction, car elle ne se doutait pas qu'elle serait ainsi discriminée par rapport à ses collègues masculins. Or, en 2014 ceux-ci étaient au bénéfice de profils pour leur fonction correspondant à la classe 24, soit « MELAJ » ou « MDKAK », voire à la classe 25 avec un profil de fonction « MELAK ». À cette époque, seule la directrice de R______, une femme, était colloquée en classe 23 avec le profil « MDKAJ » pour sa fonction. Pourtant, au regard de leurs fonctions et de leurs responsabilités, ces différences de traitement ne se justifiaient pas.

Au moment de la fixation de la classe de traitement de la nouvelle fonction créée et occupée par la recourante, certains critères pour l'établissement de son profil de fonction avaient été sous-évalués, en particulier ceux de l'expérience et de la responsabilité. Contrairement à ce que soutenait le département, les services dirigés par Mme A______ visaient, comme les autres services de l'B______, à exécuter et faire appliquer des lois cantonales et leurs règlements. Il ressortait expressément de son cahier des charges que la T______ répondait aux dispositions applicables en matière d'information et d'orientation scolaires et professionnelles et à leur mise en œuvre. Les services qu'elle dirigeait étaient notamment chargés de développer des prestations en matière d'information et d'orientation professionnelles, ainsi que des stratégies pour promouvoir la formation et les stages en entreprise à large échelle. Ils ne pouvaient pas être considérés comme services de support, dès lors qu'ils offraient principalement des prestations étatiques aux particuliers et entreprises.

La recourante exerçait bien la fonction de directrice et était mentionnée comme telle dans l'organigramme. Ce statut lui avait été notifié par le directeur général de l'B______ à plusieurs reprises. Elle faisait en outre partie de la direction générale de l'B______ et était membre du conseil de direction restreint. Son cahier des charges avait été développé en 2015 pour y intégrer des responsabilités en matière de management et de contrôle interne. Son certificat de travail intermédiaire du 12 juillet 2017 confirmait son statut de directrice, qu'il mentionnait expressément. Même à considérer que sa fonction était celle de cheffe de service, cela n'apparaissait pas être un critère suffisant pour justifier un traitement en classe 23 au lieu de la classe 24. Enfin, s'agissant du critère de l'homogénéité des fonctions subordonnées, son cahier des charges la prévoyait à la tête d'une équipe de quinze personnes dans des fonctions variées. La recourante devait dès lors se voir reconnaître la même pondération du critère de responsabilité que ses collègues masculins. Le critère de l'expérience avait également été sous-évalué dans le cadre de son profil, dès lors que son cahier des charges indiquait qu'une expérience professionnelle d'au minimum cinq ans dans le domaine des relations extérieures et du marketing était nécessaire. Ainsi, seule la cotation « E », décrite dans l'évaluation des fonctions comme représentant une expérience professionnelle nécessaire de cinq à huit ans, pouvait entrer en considération.

La recourante avait subi, dès sa collocation en classe 23, une discrimination quant au sexe par rapport à ses collègues masculins membres du conseil de direction, qui ne se justifiait ni par des responsabilités plus importantes ni par une expérience supérieure, et ce même à considérer que telle n'ait pas été l'intention de son employeur. Elle ne tentait pas de contourner les règles en lien avec la contestation de la collocation de sa fonction ; elle était fondée en tout temps à exiger le redressement de la situation légale afin que l'égalité quant au sexe soit respectée, soit en se voyant reconnaître la classe salariale 24 dès le 1er avril 2013.

36) Par décision du 1er juillet 2019, la chambre administrative a refusé d'ordonner des mesures superprovisionnelles et imparti des délais au DIP pour se déterminer sur les conclusions sur mesures provisionnelles et produire son dossier, respectivement pour formuler ses observations sur les conclusions afférentes à l'instruction, y compris la demande de conciliation, ainsi qu'au fond.

37) Le 12 août 2019, le DIP a conclu au rejet des mesures provisoires requises par la recourante, à l'irrecevabilité de la conclusion visant à ce que celle-ci soit remise dans ses fonctions à la tête d'C______ et au rejet du recours.

Ont été notamment produits à l'appui de cette écriture les cahiers des charges relatifs aux fonctions de directeur du F______, directeur du G______, et directeur de la formation continue, toutes trois colloquées en classe 24.

La recourante ne démontrait pas en quoi la production, sur mesures provisoires, de données personnelles d'autres collaborateurs serait nécessaire au maintien de l'état de fait, ni l'existence d'un intérêt privé et encore moins une situation d'urgence. Sa conclusion devait en conséquence être rejetée, ce d'autant que les cahiers des charges des membres du conseil de direction colloqués en classe 24 étaient produits.

Il n'apparaissait pas possible de concilier sur la demande de la recourante, dès lors que seul le Conseil d'État pouvait fixer la rémunération de chaque membre du personnel et que les fonctions étaient évaluées, sur sa délégation, par l'OPE, qui ne tenait pas compte de la personne occupant le poste. De plus, la recourante avait estimé que sa fonction valait une classe 25, avant de se raviser et réclamer une classe 24 ; or, la rémunération des fonctionnaires ne se faisait pas « à la carte ».

La demande d'expertise de la recourante devait être rejetée car elle n'était pas motivée et le DIP avait produit tous les documents permettant de constater que l'évaluation de la classe de fonction qu'elle occupait avait été correctement effectuée par l'OPE et que la différence entre sa classe de fonction et celle des autres fonctions colloquées en classe 24 était fondée sur des éléments objectifs.

La conclusion de la recourante visant à ce qu'elle soit remise à la tête d'C______ devait être déclarée irrecevable car la réorganisation de l'B______, notamment le rattachement de la structure précitée au H______, était une mesure interne de l'administration, non sujette à recours, et ne faisait au demeurant pas l'objet de la décision attaquée.

Enfin, le poste occupé par la recourante avait été correctement évalué et ne souffrait pas de discrimination salariale quant au sexe. Les critères d'évaluation de son poste lui avaient été largement détaillés lors de la séance du 29 janvier 2019, pièces à l'appui. L'OPE avait évalué le poste objectivement et sans tenir compte de la personne l'occupant, en fonction de sa configuration au sein de l'B______, mais aussi de ses activités, de son niveau de responsabilité et des impacts sur l'B______ et sur le département. Il lui avait également été expliqué que la différence de collocation entre son poste et ceux des directeurs de service s'expliquait par le nombre de collaborateurs directement subordonnés auxdites fonctions. La décision querellée ne pouvait ainsi que constater l'absence de discrimination salariale quant au sexe.

Par ailleurs, au vu de l'historique du poste occupé par la recourante reprenant deux postes colloqués en classe 20 et 21, et de la création de la structure C______ et son développement, c'était à juste titre que le poste qu'elle occupait actuellement avait été évalué en classe 23. Une comparaison des cahiers des charges, notamment ceux des trois directeurs de service en classe 24 permettait en outre de comprendre que les responsabilités et la mission n'étaient pas les mêmes. Il s'agissait pour ces fonctions de gérer des services dont la mission était de concevoir et développer l'ensemble des prestations en lien avec une politique publique. Le poste de la recourante ne revêtait pas cette dimension. Il était notamment mentionné dans le cahier des charges du directeur du F______ que l'une de ses missions consistait à organiser l'accueil et la réception du public pour tous les services de l'B______ ainsi que pour la T______, soit la structure dont la recourante était en charge et qui constituait un appui au service précité. Le champ décisionnel des trois directeurs était également plus large que celui de la recourante, dont le degré d'autonomie était restreint. La fonction de directeur impliquait en outre que ceux-ci président ou participent, en tant que représentants de l'B______ voire de l'État, à des commissions cantonales, intercantonales ou fédérales.

38) Le 30 août 2019, Mme A______ a transmis ses observations sur mesures provisionnelles, persistant dans les conclusions de son recours et dans sa précédente argumentation.

Il ressortait du dossier que la décision de modifier ses responsabilités ne reposait sur aucun événement antérieur au 27 mars 2018, soit au moment où elle avait fait valoir des prétentions en lien avec une violation de la LEg. Les pièces transmises par l'intimé ne permettaient pas non plus de discerner les motifs de cette décision. Alors qu'elle avait toujours travaillé à satisfaction de sa hiérarchie, son poste allait être démantelé suite à ses démarches, afin de justifier a posteriori une différence de traitement en violation de l'égalité quant au sexe. Le processus de représailles qui avait été initié à son encontre devait être interrompu.

Les trois cahiers des charges sélectionnés par l'employeur et produits par l'autorité intimée ne permettaient pas d'examiner la situation de la recourante dans une comparaison concrète avec celle de tous les autres directeurs masculins membres du conseil de direction restreint. Elle persistait ainsi à demander la production de leurs dossiers, non plus dans le cadre de mesures provisionnelles mais dans celui de l'instruction du recours.

39) Le 13 septembre 2019, Mme A______ a persisté dans ses conclusions au fond.

Elle n'était toutefois pas en mesure de se déterminer précisément sur les allégués et développements au fond de l'autorité intimée, dès lors que plusieurs des pièces qu'elle avait sollicitées n'avaient pas encore été produites, en particulier les dossiers de tous ses collègues masculins membres du conseil de direction restreint. Or, l'examen judiciaire d'une prétention à raison du sexe présupposait nécessairement une comparaison concrète avec des collègues de sexe masculin dont le profil était similaire. En ne produisant que trois cahiers des charges, le DIP ne fournissait pas d'informations sur ses autres collègues directeurs, également membres du conseil de direction restreint.

40) Par décision présidentielle du 2 octobre 2019, la chambre administrative a refusé d'ordonner des mesures provisionnelles dans le cadre du recours de Mme A______.

41) Par ordonnance du même jour, le juge délégué a transmis le dossier au TAPI pour conciliation en matière d'égalité.

42) Le TAPI a constaté l'échec de la tentative de conciliation le 28 octobre 2019 et retourné le dossier à la chambre de céans.

43) Le 14 mai 2020, le DIP a persisté dans ses conclusions et argumentation ressortant de son écriture du 12 août 2019.

S'agissant de la demande de production des dossiers de l'ensemble des membres du comité de direction de l'B______, il semblait inutile de comparer la fonction occupée par la recourante à des fonctions n'ayant aucun point commun avec son poste et se trouvant donc dans des classifications supérieures à celle à laquelle elle prétendait erronément. Par ailleurs, ce n'étaient pas les personnes qui étaient évaluées, mais bien leurs fonctions, de sorte que les cahiers des charges et organigrammes produits étaient les seuls éléments pertinents pour évaluer chaque fonction. Les dossiers des collaborateurs étaient en outre constitués de données personnelles et sensibles.

La recourante ne pouvait pas prétendre à la réévaluation de sa classe salariale dès le 1er avril 2013 et au paiement de la différence de rémunération entre les classes 23 et 24 du 1er avril 2013 au 28 juin 2019, dès lors que ses prétentions étaient en partie prescrites.

44) Le 18 juin 2020, Mme A______ a persisté dans ses conclusions au fond.

La production de pièces complémentaires, tout comme l'expertise, étaient nécessaires à l'établissement complet des faits pertinents.

Dans la mesure où elle avait fait valoir ses prétentions dès le 27 mai 2018, celles-ci n'étaient pas prescrites.

45) Une audience de comparution de comparution personnelle s'est tenue le 18 août 2020 devant la chambre de céans.

a. Mme A______ a confirmé toujours occuper son poste à 100 % au sein du département. Sa dénomination officielle, qui n'avait pas changé, était cheffe de groupe, mais elle était autorisée à utiliser le titre de directrice, dans la mesure où elle intervenait beaucoup publiquement. Ce dernier terme figurait dans son cahier des charges signé en 2014.

Lors de l'évaluation de son poste en 2014, elle n'avait pas fait opposition auprès de la CREMEF car elle avait confiance en son employeur. C'était par la suite, lorsqu'elle avait dû demander à siéger au comité de direction car elle représentait tous les services de l'B______ à la T______, qu'elle s'était rendue compte que sa rémunération se trouvait dans une, voire plusieurs classes inférieures à celles des autres directeurs qui siégeaient avec elle environ une fois par semaine. Elle avait appris que certains de ses collègues étaient colloqués en classe 24, 25 et peut-être 27. Elle avait aussi découvert que les directeurs entre eux ignoraient leurs classes de traitement, faute de transparence à ce sujet. À l'époque, elle n'avait pas pris connaissance du cahier des charges de ses collègues, mais elle se représentait bien quelles étaient leurs missions et responsabilités, qui étaient similaires aux siennes, vu les nombreuses séances et discussions qu'ils avaient dans le cadre du comité de direction. Ils travaillaient vraiment ensemble. Elle connaissait en revanche la différence du nombre de personnes placées sous la responsabilité hiérarchique des différents directeurs. Elle organisait une fois par trimestre un comité de pilotage traitant de questions sur la T______, réunissant tous les directeurs des services de l'B______ ainsi que des représentants de deux autres départements.

Elle était responsable du pilotage et de la coordination de la T______, qui était ouverte toute l'année, en plus de la manifestation dédiée. Elle s'assurait que les prestations étaient bien délivrées au public et était la personne à contacter en cas de problème. Elle intervenait pour des problèmes en moyenne trois fois par semaine. La structure accueillait entre vingt-huit mille et trente mille personnes par année. Elle collaborait avec une centaine de permanents issus d'autres services ou départements, qui assuraient une présence sur les espaces de la T______ ouverts au public, dont elle n'était pas responsable hiérarchiquement, mais auprès desquels il lui appartenait d'intervenir en premier lieu en cas de problème. Elle représentait la T______ auprès du réseau international comptant trente-deux structures similaires dans le monde. Dans ce contexte, elle voyageait environ trois fois par an.

b. Les représentantes du département, respectivement juriste et responsable RH, ont notamment précisé que le point de départ de la réévaluation du poste de la recourante en 2014 était la requête formée le 6 janvier 2014 par le directeur de l'B______. Elles se sont également prononcées, confirmant la position du département, quant au cahier des charges de la recourante et la dénomination de sa fonction. Elles considéraient que l'on ne pouvait pas parler d'opacité, puisque les offres d'emploi de l'État de Genève étaient toutes publiées et mentionnaient la classe salariale du poste. Elles ont admis qu'il était exact de parler de coopération, d'entraide ou d'interface entre les différents services d'un même département. En l'occurrence, la coopération et l'entraide au sein du DIP fonctionnaient sans problème. S'agissant de la cotation de l'expérience professionnelle dans l'évaluation du poste de la recourante, il appartenait à l'OPE de quantifier les différents critères et de définir le sigle de cinq lettres conduisant à la détermination de la classe salariale ; c'était ce qui avait été fait en 2014, lorsque la DRH du département avait soumis à l'OPE une demande pour réévaluer la fonction de la recourante. Si cette dernière estimait que la pondération de son expérience professionnelle n'était pas correcte, il lui appartenait de s'y opposer à l'époque lors de l'établissement de son cahier des charges.

c. À l'issue de l'audience, un délai a été imparti au département pour produire les cahiers des charges ainsi que les évaluations de l'OPE pour toutes les fonctions du comité de direction et du directeur général. À réception de ces pièces, les parties disposeraient d'un délai pour produire leurs déterminations.

46) Le 3 septembre 2020, le service des ressources humaines du département de la cohésion sociale (ci-après : DCS) a transmis copie des cahiers des charges de la fonction de directeur du J______, respectivement mis à jour en décembre 2012 et octobre 2019.

47) Le 28 septembre 2020, le directeur de l'OPE a précisé que la fonction de directeur du J______ se nommait auparavant directeur du service des allocations d'études et d'apprentissage. Celle-ci avait été réévaluée en 2000. L'analyse avait abouti à un profil « LEKAJ » en classe 23, ainsi que cela ressortait des documents annexés au courrier, et n'avait pas été revue depuis lors.

48) Le 2 octobre 2020, le DIP a transmis un bordereau de pièces complémentaires relatif aux évaluations des différentes fonctions mentionnées dans l'organigramme de l'B______, ainsi que leurs cahiers des charges.

Le contenu de ces pièces sera repris en tant que de besoin dans la partie en droit du présent arrêt.

49) Le 2 décembre 2020, Mme A______ a transmis ses observations finales, persistant dans ses conclusions au fond.

C'était à l'issue du processus d'évaluation de sa nouvelle fonction, occupée depuis avril 2013, qu'elle avait été colloquée en classe 23. L'autorité intimée avait toujours soutenu que l'évaluation de sa classe salariale n'était pas liée à sa personne ou son sexe et reposait sur une analyse objective de l'OPE. Toutefois, le DIP ayant spécifiquement demandé à l'OPE d'évaluer le poste « occupé par Mme A______ » le 9 septembre 2013, précisant que l'B______ réclamait « un rangement de ce poste dans la fonction de cheffe de groupe, classe max. 23 », il fallait considérer que la démarche n'était pas dépersonnalisée et limitait d'emblée la classe maximale à lui attribuer. Elle ne s'y était alors pas opposée car elle n'avait ni raisons ni doutes pour ne pas accepter la collocation de sa fonction. Elle avait ensuite découvert peu à peu les classes de traitement de ses collègues directeurs. C'était ainsi dans un contexte inaccessible en raison des informations lacunaires dont elle disposait qu'elle avait entamé des démarches formelles visant à obtenir une égalité de traitement.

Les enquêtes et les pièces produites notamment par le DIP établissaient l'existence d'une inégalité salariale quant au sexe. Il convenait de comparer sa situation avec celle des autres directeurs de sexe masculin au sein de l'B______ au moment où sa nouvelle fonction avait été définie, à la suite de la jonction des deux postes de responsable C______ et de directrice de la T______. Les précités étaient tous colloqués au minimum en classe 24 : le directeur de la formation professionnelle était en classe 25, le directeur du service de l'information en classe 24, le directeur du service de l'orientation en classe 24, le directeur à la direction générale en classe 26, le directeur du I______ en classe 24 et le directeur du J______ en classe 24. La comparaison avec ce dernier permettait de démontrer que, sur la base d'une évaluation similaire de l'OPE, un directeur de sexe masculin s'était vu placer dans une classe équivalente aux autres directeurs de sexe masculin, tandis qu'elle-même avait été placée dans une classe inférieure. Le poste de directeur du service des bourses avait été évalué dès le 1er janvier 2001 au profil « LEKAJ », classe maximum 23. Il ressortait toutefois de son cahier des charges qu'il avait finalement été placé en classe 24, soit la classe minimale des directeurs au sein de l'B______. Ainsi, contrairement à ce qu'avait toujours soutenu le département, la classe de traitement ne dépendait pas uniquement de l'OPE. L'autorité intimée ne pouvait dès lors pas se réfugier derrière cette analyse pour justifier l'inégalité de traitement, ce d'autant moins que le poste de la recourante avait été évalué à un profil « MDKAJ » pour 214 points et se trouvait en classe 23, alors que celui de directeur du service des bourses à un profil « LEKAJ » pour 209 points et se situait en classe 24. La discrimination étant démontrée, même si la vraisemblance était suffisante, il convenait de la placer dans une position égalitaire avec ses collègues de sexe masculin en lui reconnaissant la classe salariale 24.

Même à retenir une évaluation objective de la fonction de la recourante, elle ne pouvait pas justifier une inégalité de traitement. Son poste n'avait pas été évalué conformément à la grille d'analyse établie par l'OPE. L'évaluation initiale de sa fonction, notamment s'agissant du critère de l'expérience, reposait sur un cahier des charges du 27 juillet 2013, lequel avait été ensuite modifié pour être en adéquation avec la réalité en relevant l'exigence d'une expérience professionnelle minimum de trois à cinq ans. Malgré ce changement, l'OPE n'avait pas procédé à une nouvelle évaluation de la fonction, dans laquelle la lettre « E » devait être retenue pour ce critère. Ainsi, une analyse objective de la fonction de la recourante devait conduire à retenir un profil « MEKAJ » pour 219 points, impliquant une classe 24, et non un profil « MDKAJ ». Pour cette raison également, il convenait de la placer dans une position égalitaire avec ses collègues de sexe masculin en lui reconnaissant la classe salariale 24.

Dès lors qu'elle avait effectivement fait l'objet d'une discrimination salariale liée au sexe et que les mesures organisationnelles intervenues au sein de l'B______ lui retirant des responsabilités depuis qu'elle avait soulevé cette question visaient uniquement à asseoir cette inégalité, il se justifiait de condamner le DIP à la remettre dans ses fonctions à la tête d'C______.

Enfin, dans la mesure où elle avait valablement fait valoir ses prétentions dès le 27 mars 2018, soit moins de cinq ans après le 1er avril 2013, la différence de traitement dès cette date n'était pas prescrite. En tout état de cause, une éventuelle prescription d'une partie de ses créances ne pouvait conduire à l'irrecevabilité de l'entier de ses conclusions.

50) Le même jour, le DIP a également transmis ses observations finales et persisté dans ses conclusions.

Il ne pouvait pas être considéré que la recourante avait interrompu la prescription de sa prétendue créance par son courrier du 27 mars 2018 à la directrice générale de l'OCIRT, ce d'autant plus que le DIP avait clairement indiqué dans son courrier du 23 juillet 2018 qu'il n'entendait pas renoncer à invoquer l'exception de prescription.

Le cahier des charges signé par la recourante le 17 juillet 2013 avait effectivement été modifié par la suite, faisant passer l'exigence d'expérience professionnelle de trois à cinq ans. Cet élément n'avait toutefois pas eu d'incidence sur la grille de cotation, dès lors que l'OPE n'avait finalement pas retenu qu'une expérience de cinq ans était nécessaire pour occuper le poste avec une efficacité optimale. L'OPE ne s'en tenait pas uniquement à ce qui était mentionné dans le cahier des charges transmis par le département mais examinait, selon ses propres critères, la formation et les années d'expériences nécessaires pour le poste évalué. En l'occurrence, il avait estimé qu'une expérience de trois à cinq ans était suffisante.

Sur la base de ce qui précédait, ainsi que compte tenu de l'organigramme de l'B______ dans sa version au 9 septembre 2013, l'OPE avait évalué le poste en proposant les nouveaux profil, pondération et classification suivants : MDKAJ – 214 points – classe maximum 23.

Le poste de directeur du J______ avait été réévalué en 2000. L'analyse de cette fonction avait abouti à un profil « LEKAJ » en classe 23. Selon le cahier des charges créé le 1er février 2011 et modifié le 4 décembre 2012, ce poste avait été colloqué en classe 24. En effet, depuis le 1er mars 2006, il avait été occupé par une personne au bénéfice d'un statut d'agent spécialisé rémunérée en classe 24. Cette dernière avait été stabilisée sous le statut d'employée le 1er janvier 2008 avec maintien de la classification « par octroi d'un code 7 » conformément à l'art. 11 al. 3 règlement d’application de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l’État et des établissements hospitaliers du 17 octobre 1979 (RTrait - B 5 15.01), ce jusqu'à son départ en 2011. Il s'agissait d'une femme. Dès le 1er mai 2010, la fonction avait été assimilée à une fonction de directeur en classe 24. Au vu du cahier des charges inhérent à ce poste, la recourante ne pouvait pas se prévaloir de ce que le poste qu'elle occupait était de même envergure.

La recourante alléguait ne pas avoir eu connaissance des autres classes de fonction de ses collègues, alors que leurs postes avaient été évalués plus de vingt à quarante ans plus tôt et qu'ils étaient, pour les cinq postes de directeurs de service, les piliers de l'B______ depuis des années, répondant en première ligne aux exigences légales, réglementaires et politiques tant au niveau cantonal que fédéral.

Un examen détaillé des pièces produites le 2 octobre 2020 laissait apparaître que l'évaluation du poste de la recourante était cohérente au regard des autres postes évalués dans la même classe de fonction ainsi que des charges et responsabilités inhérentes aux postes des directeurs des services de l'B______, et qu'il n'existait pas de discrimination fondée sur le genre.

Enfin, la réorganisation globale de l'B______, mesure de gestion interne, ne faisait pas l'objet de la décision querellée.

51) Sur quoi, les parties ont été informées que la cause était gardée à juger.

EN DROIT

1) Interjeté en temps utile devant la juridiction compétente, le recours est recevable (art. 132 de la loi sur l'organisation judiciaire du 26 septembre 2010 - LOJ - E 2 05 ; art. 62 al. 1 let. a de la loi sur la procédure administrative du 12 septembre 1985 - LPA - E 5 10).

2) Dans le cadre de la présente procédure, la chambre de céans a statué sur les mesures superprovisionnelles et provisionnelles sollicitées par la recourante, transmis le dossier au TAPI pour une tentative de conciliation, tenu une audience de comparution personnelle et obtenu de l'autorité intimée la transmission des pièces permettant d'apprécier l'analyse ayant conduit à la classification des postes des membres du comité de direction de l'B______. Par ailleurs, au stade de ses observations finales, la recourante ne conclut plus à l'ordonnance d'une expertise visant à analyser l'évaluation de sa classe de traitement en comparaison de celle de ses collègues masculins.

Compte tenu de ce qui précède, il ne sera pas revenu sur les conclusions préalables de la recourante.

3) Selon l'autorité intimée, les prétentions de la recourante seraient, à tout le moins en partie, prescrites.

a. La chambre administrative a eu récemment l'occasion de confirmer sa jurisprudence sur la question de la prescription des créances salariales en droit de la fonction publique (ATA/89/2019 du 29 janvier 2019).

Le principe de la prescription des créances de droit public vaut même en l'absence de base légale expresse, en tant qu'institution générale du droit. En l'absence de dispositions légales pertinentes, le délai de prescription sera déterminé en se référant aux délais prévus dans la même loi s'ils apparaissent applicables ou, à défaut, à des règles légales régissant des cas analogues (Thierry TANQUEREL, Manuel de droit administratif, 2018, p. 261 n. 740 et p. 262 n. 742 et la jurisprudence citée). En l'absence d'une règlementation de droit public à laquelle se référer, des règles pertinentes du droit privé sont appliquées (Piermarco ZEN-RUFFINEN, Droit administratif, Partie générale et éléments de procédure, 2ème éd., 2013, p. 28 n. 122 et la jurisprudence citée).

Concernant la législation applicable au personnel de la fonction publique, la chambre de céans a déjà retenu que les actions des travailleurs, pour leurs services, se prescrivent par cinq ans (ATA/198/2014 du 1er avril 2014 consid. 15).

b. La prescription est notamment interrompue lorsque le créancier fait valoir ses droits par une action devant un tribunal (art. 135 ch. 2 de la loi fédérale du
30 mars 1911, complétant le Code civil suisse (CO, Code des obligations -
RS 220). Les conditions d'interruption de la prescription sont plus souples en droit public que celles prévues par l'art. 135 CO. Il s'agit de tout acte propre à faire admettre la prétention en question, visant à l'avancement de la procédure et accompli dans une forme adéquate. L'administré interrompt la prescription par toute intervention auprès de l'autorité compétente tendant à faire reconnaître ses droits. Pour l'autorité, le délai est interrompu en particulier dès lors qu'elle déclare son intention d'ouvrir une procédure et par tout acte qu'elle prend pendant
celle-ci : par exemple par l'envoi au contribuable d'une formule de déclaration fiscale et, par la suite, par les actes qui, jusqu'à la décision, visent à établir la créance puis, ensuite, à la recouvrer. En revanche, des actes préparatoires tels que des mesures d'instruction ne suffisent pas. Le débiteur doit avoir reçu connaissance du fait interruptif (Pierre MOOR/Étienne POLTIER, Droit administratif, vol. 2, 3ème éd., 2011, p. 100 et la jurisprudence citée).

c. En l'occurrence, la question de l'éventuelle prescription des prétentions de la recourante pourra souffrir de demeurer indécise, compte tenu de ce qui suit.

4) La recourante estime faire l'objet d'une discrimination salariale à raison du sexe. Elle considère que la décision du DIP du 27 mai 2019 serait contraire au droit et que sa classe salariale devrait être réévaluée rétroactivement au 1er avril 2013 pour lui reconnaître la classe 24 au lieu de la classe 23.

Le présent litige porte donc sur la question de savoir si la recourante a subi, dans le cadre de l'évaluation de son traitement, une discrimination liée à son genre.

5) a. Conformément au principe constitutionnel de l'égalité salariale entre l'homme et la femme (art. 8 al. 3, dernière phrase de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999 - Cst. - RS 101), la travailleuse a droit à un salaire égal à celui que touche le travailleur s'ils accomplissent tous deux, dans des conditions égales, des tâches semblables ou des travaux, certes de nature différente, mais ayant une valeur identique (arrêt du Tribunal fédéral 4A_12/2007 du 3 juillet 2007, destiné à publication, consid. 4.3; ATF 130 III 145
consid. 3.1.2).

b. La loi sur l'égalité a pour but de promouvoir dans les faits l’égalité entre femmes et hommes (art. 1 LEg). Les dispositions en matière d'égalité dans les rapports de travail s’appliquent aux rapports de travail régis par le droit privé et par le droit public fédéral, cantonal ou communal (art. 2 LEg).

À teneur de l'art. 3 LEg, il est interdit de discriminer les travailleurs à raison du sexe, soit directement, soit indirectement, notamment en se fondant sur leur état civil ou leur situation familiale ou, s’agissant de femmes, leur grossesse (al. 1). L’interdiction de toute discrimination s’applique notamment à l’embauche, à l’attribution des tâches, à l’aménagement des conditions de travail, à la rémunération, à la formation et à la formation continue, à la promotion et à la résiliation des rapports de travail (al. 2).

Selon l'art. 5 al. 1 LEg, quiconque subit ou risque de subir une discrimination au sens des dispositions précitées peut requérir le tribunal ou l’autorité administrative : d’interdire la discrimination ou, d’y renoncer, si elle est imminente (let. a) ; de faire cesser la discrimination, si elle persiste (let. b) ; de constater l’existence de la discrimination, si le trouble qu’elle a créé subsiste
(let. c) ; d’ordonner le paiement du salaire dû (let. d).

Aux termes de l’article 6 LEg, l’existence d'une discrimination est présumée pour autant que la personne qui s'en prévaut la rende vraisemblable. Cette disposition allège le fardeau de la preuve d'une discrimination à raison du sexe, en ce sens qu'il suffit à la partie demanderesse de rendre vraisemblable l'existence d'une telle discrimination. Si celle-ci y parvient, le fardeau de la preuve est renversé; il appartient alors à l'employeur d'établir l'inexistence de la discrimination (Message du Conseil fédéral concernant la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes, du 24 février 1993, in : FF 1993 I 1215/1216 ; S. STEIGER-SACKMANN, in : Kommentar zum Gleichstellungsgesetz, Bâle 1997, n. 57, 58 et 64 ad art. 6 LEg ; ATF 127 III 207 consid. 3b). Cette disposition s’applique à l’attribution des tâches, à l’aménagement des conditions de travail, à la rémunération, à la formation et à la formation continue, à la promotion et à la résiliation des rapports de travail (art. 6 LEg).

c. L’existence d'une différence de salaire entre n'importe quels travailleurs ne fait pas apparaître comme probable une discrimination à raison du sexe. En revanche, lorsque des travailleurs de sexe opposé ont une position semblable dans l’entreprise avec des cahiers des charges comparables, il est présumé, s'il y a une différence de rémunération entre eux, que celle-ci est de nature sexiste, l'employeur devant apporter la preuve de la non-discrimination (ATF 125 III 368 consid. 4 ; 125 II 541 consid. 6a/6b ; 125 I 71 consid. 4a qui renvoie à
l'ATF 118 Ia 35 où était déduit directement de l'art. 4 al. 2 aCst. le devoir d'examen minimal auquel le juge doit procéder en la matière). Si l'employeur ne réussit pas à rapporter cette preuve, l'action de la partie demanderesse doit être accueillie, sans que doive encore être établie l'existence dans l'entreprise d'une politique du personnel sexiste (ATF 127 III 207 consid. 3b).

d. Une discrimination à raison du sexe peut intervenir dans la classification générale de diverses fonctions au sein d'une échelle de traitement, ou bien dans la fixation de la rémunération d'une personne déterminée lorsqu'on la compare avec celle d'autres personnes du sexe opposé (ATF 125 III 368 consid. 3 et les arrêts cités). Dans les deux cas, elle peut résulter de l'évaluation des prestations de travail selon des critères directement ou indirectement discriminatoires ou du fait que des critères d'évaluation neutres, objectivement admissibles en eux-mêmes, sont appliqués de façon inconséquente au détriment d'un sexe, soit que le critère invoqué à l'appui d'une différence de traitement ne soit pas du tout réalisé concrètement, soit qu'il ne joue aucun rôle pour l'exercice de l'activité en cause (ATF 117 Ia 270 consid. 4a) soit encore qu'il n'exerce une influence sur l'évaluation des prestations de travail que dans des cas isolés (127 III 207 consid. 3b ; ATF 125 III 368 consid. 3).

e. La jurisprudence considère comme non discriminatoires les différences de salaire qui reposent sur des motifs objectifs. Parmi ceux-ci figurent d'abord les motifs qui peuvent influencer la valeur même du travail, comme la formation, l'ancienneté, la qualification, l’expérience, le domaine concret d'activité, les prestations et les risques encourus (ATF 125 III 368 consid. 5 ; 124 II 409 consid. 9c, 436 consid. 7a et les références citées). En outre, des différences de salaire peuvent se justifier pour des motifs qui ne se rapportent pas immédiatement à l'activité de la travailleuse ou du travailleur, mais qui découlent de préoccupations sociales, comme les charges familiales ou l'âge (ATF 125 III 368 consid. 5 ; 118 Ia 35 consid. 2c ; 117 Ia 270 consid. 4a). En règle générale, des motifs objectifs ne peuvent légitimer une différence de rémunération que s'ils jouent un rôle véritablement important en regard de la prestation de travail et s'ils influent par conséquent sur les salaires versés par le même employeur
(ATF 125 III 368 consid. 5 p. 374).

6) a. À Genève, l'administration cantonale doit veiller à réaliser l’égalité entre femmes et hommes dans les faits (art. 2A al. 1 let. b de la loi générale relative au personnel de l’administration cantonale, du pouvoir judiciaire et des établissements publics médicaux du 4 décembre 1997 (LPAC - B 5 05).

b. En application de cette disposition, il est veillé au respect de l'égalité des chances, de l'égalité de traitement et à la réalisation de l'égalité dans les faits
(art. 1 al. 1 du règlement pour l'égalité et la prévention des discriminations en raison du sexe, de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre du 13 septembre 2017 - REgal - B 5 05.11). Ce règlement est applicable notamment à tous les membres du personnel de l'administration cantonale soumis à la LPAC (art. 1
al. 2 REgal). Toute forme de discrimination, directe et indirecte, en raison du sexe, de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre est interdite dans l'ensemble de l'administration cantonale. Des mesures de prévention et d'information sont développées à cet effet (art. 1 al. 3 REgal). Est constitutive d'une discrimination en raison du sexe, de l'orientation sexuelle et de l'identité de genre une différence de traitement entre deux personnes, qui se fonde uniquement sur le sexe, l'orientation sexuelle ou l'identité de genre (art. 2 al. 1 REgal).

7) a. À teneur de l'art. 4 de la loi concernant le traitement et les diverses prestations alloués aux membres du personnel de l'État, du pouvoir judiciaire et des établissements hospitaliers du 21 décembre 1973 (LTrait - B 5 15), le Conseil d’État établit et tient à jour le règlement et le tableau de classement des fonctions permettant de fixer la rémunération de chaque membre du personnel en conformité de l’échelle des traitements (al. 1). Dans ce classement il doit être tenu compte du rang hiérarchique et des caractéristiques de chaque fonction en prenant en considération notamment l’étendue qualitative et quantitative des attributions dévolues et des obligations à assumer, les connaissances professionnelles et aptitudes requises, l’autonomie et les responsabilités, les exigences, inconvénients, difficultés et dangers que comporte l’exercice de la fonction (al. 2).

b. Le règlement instituant une commission de réexamen en matière d’évaluation des fonctions du 7 avril 1982 (RComEF - B 5 15.04) prévoit qu'une commission de réexamen est instituée pour permettre aux membres du personnel de l’État et des établissements publics médicaux de demander le réexamen des décisions relatives à l’évaluation des fonctions (rangement, cotation, classification) (art. 1 al. 1). Sont susceptibles d’opposition toutes les décisions relatives à l’évaluation des fonctions mentionnées à l’art. 1 à l’exclusion des décisions prises lors de l’engagement (art. 4). Peuvent faire opposition, dans un délai de trente jours dès réception de l'opposition, les membres du personnel de l'État et des établissements publics médicaux intéressés à titre individuel ou collectif pour la fonction qui les concerne ainsi que le département, l'établissement concerné ou le Grand Conseil, ce dernier étant représenté par son bureau (art. 5
et 6).

8) En l'espèce, la recourante a occupé son poste sous la dénomination de cheffe de groupe au sein de l'B______, responsable des deux structures C______ et T______, depuis le 1er avril 2013, date à partir de laquelle, à la suite d'une demande d'évaluation de la fonction soumise à l'OPE, celle-ci a été colloquée en classe 23.

La recourante n'a pas contesté cette évaluation lorsque la décision lui a été notifiée et ce n'est qu'en 2018 qu'elle a remis en cause son traitement en fondant ses prétentions sur une discrimination salariale liée au sexe.

Elle allègue avoir constaté au fil du temps, après avoir côtoyé les directeurs de services de l'B______ dans le cadre des séances du comité de direction restreint et s'être fait une idée du contenu de leurs cahiers des charges respectifs, que ses collègues masculins étaient rémunérés dans une à deux classes salariales supérieures à la sienne, alors que, selon elle, leurs missions, tâches et responsabilités étaient similaires.

Il ressort toutefois d'un examen approfondi des cahiers des charges et documents relatifs à l'évaluation des fonctions tant de la recourante que de ses collègues directeurs de services que plusieurs critères ont été pris en considération, en particulier la mission, les tâches, le niveau de responsabilités, le nombre d'années d'expérience professionnelle requis ainsi que le nombre de personnes sous gestion de la personne occupant le poste.

Il apparaît en l'occurrence que la mission d'C______ et de la T______ consiste à apporter aux différents services de l'B______, chargés du respect et de l'application du cadre légal en matière de formation, des supports transversaux adéquats. La personne occupant le poste de responsable de ces structures, in casu la recourante, a pour tâche notamment la transmission et l'application sur le terrain des volontés politique et stratégique de l'B______ et de l'S______ en matière de besoins en places de stage et d'apprentissage ; la prospection et la création de liens avec les entreprises et les milieux économiques ; la promotion de nouveaux métiers auprès des entreprises et des écoles ; la collaboration et communication avec différents partenaires (représentants syndicaux et patronaux, chefs du personnel et responsables de secteurs professionnels) ; la promotion et le développement des prestations délivrées aux professionnels et aux particuliers ; le suivi de l'évolution des dispositifs pour coordonner les besoins en places de stage et apprentissage avec les offres ou encore le développement des stratégies pour promouvoir la formation et les stages en entreprise à large échelle. L'autonomie de la personne titulaire de la fonction apparaît en revanche limitée en ce sens qu'elle n'est pas habilitée à prendre des décisions liées à l'application de la législation ou aux engagements financiers.

Les cinq services de l'B______ ont quant à eux pour mission première d'appliquer le cadre légal tel que défini au niveau fédéral par les lois et l'ordonnances fédérales applicables en matière de formation professionnelle et continue, ainsi qu'au niveau cantonal par les lois et règlements applicables dans chacun des cinq domaines concernés et définissant la politique cantonale en la matière. Sous l'autorité du directeur général de l'B______, il appartient aux directeurs de ces services d'exécuter et de faire respecter les législations fédérale et cantonale, ce qui n'est pas le cas de la personne en charge des structures C______ et T______.

Par ailleurs, le directeur du H______ a sous sa responsabilité hiérarchique quarante-neuf personnes, celui du I______ vingt-deux personnes, celui du G______ septante-neuf personnes et celui du F______ dix-neuf personnes. La recourante est pour sa part susceptible d'être à la tête d'une équipe de onze personnes, étant précisé que dans les faits ce nombre a oscillé, depuis son entrée en fonction en tant que cheffe de groupe, entre quatre et sept.

Au vu des éléments qui précèdent, l'évaluation de la fonction de cheffe de groupe de la recourante en 2013 a conduit à retenir un profil « MDKAJ » pour 214 points, classe maximum 23.

À titre de comparaison, les postes de directeurs des services de l'information scolaire et professionnelle, de l'orientation scolaire et professionnelle et de la formation continue ont été évalués respectivement en 1998, 1999 et 2007 avec un profil « MDKAK » pour 224 points, classe maximum 24. Le poste de directeur du H______ a été évalué en 1976 et les profils « MELAJ » ou « MELAK » correspondant à une classe maximum 25 ou 26 ont été proposés ; le cahier des charges adopté en 2011 a conduit à retenir la classe 25 pour cette fonction. En outre, le poste de directeur du J______ avait été évalué en 2000 avec un profil « LEKAJ » correspondant à une classe maximum 23. Le traitement en classe 24 dont a bénéficié la précédente titulaire de ce poste, en fonction de 2006 à 2011, était justifié par l'attribution d'un code complémentaire 7, soit une rémunération dans une classe supérieure à celle prévue en raison de l'exercice, en plus des tâches relatives à sa fonction, de manière significative et durable, d'activités d'un niveau supérieur ou connexe (art. 11 al. 3 RTtrait) Cette particularité n'est toutefois pas susceptible d'influer sur le sort du présent litige. Enfin, la fonction de directeur général de l'B______ a été évaluée en 1999 avec un profil « MELAK » pour 238 points, classe maximum 26.

Il découle de ce qui précède qu'à tout le moins en termes de mission, de tâches, de niveau de responsabilités et de nombre de personnes sous gestion, la recourante ne peut pas se fonder sur des similitudes entre sa fonction et celles de ses collègues directeurs des services de l'B______, qu'ils soient de sexe masculin ou féminin d'ailleurs, pour se prévaloir d'une inégalité de traitement ou d'une éventuelle discrimination au motif qu'elle est une femme. Il apparaît au contraire que l'évaluation de sa fonction repose sur des éléments objectifs et tient compte des différences réelles et concrètes existant entre son cahier des charges et ceux de ses collègues. Le fait qu'elle siège en comité de direction restreint et qu'elle soit autorisée à utiliser, par commodité, le titre de directrice de la T______ ne permet pas de remettre en cause ce qui précède.

Dès lors, ni l'analyse des pièces du dossier, ni les enquêtes auxquelles il a été procédé ne permettent de retenir un ou des indices conduisant à rendre vraisemblable l'existence d'une discrimination salariale fondée sur le sexe, car aucun élément ne laisse à penser que sa fonction, bien qu'elle n'ait été occupée que par elle jusqu'à présent, aurait été évaluée différemment si elle avait été un homme.

Au surplus, dans la mesure où la recourante n'a pas formé opposition en temps utile à la décision notifiée le 25 février 2014 s'agissant de l'évaluation de son poste en classe 23, elle n'est pas fondée à se prévaloir, dans le cadre de la présente procédure, de ce que sa fonction aurait été sous-évaluée ou évaluée de manière incorrecte.

Dans ces circonstances, la recourante ne peut pas prétendre au paiement d'un montant représentant une différence entre les classes 23 et 24.

Enfin, dès lors que sa conclusion tendant à être replacée dans ses fonctions à la tête de la structure C______ est exorbitante à l'objet du litige et de la décision attaquée, et que la réorganisation de l'B______ constitue une mesure interne de l'administration, elle est irrecevable.

Compte tenu de ce qui précède, le recours sera rejeté, dans la mesure de sa recevabilité.

9) La procédure étant gratuite, il ne sera pas perçu d’émolument (art. 13
al. 5 LEg et 8 de la loi d'application de la loi fédérale sur l'égalité entre femmes et hommes du 28 mai 1998 – LaLEg - A 2 50). Au vu de l'issue du litige, aucune indemnité de procédure ne sera allouée.

* * * * *

PAR CES MOTIFS
LA CHAMBRE ADMINISTRATIVE

rejette, dans la mesure de sa recevabilité, le recours interjeté le 28 juin 2019 par Mme A______ contre la décision du département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse du 27 mai 2019 ;

dit qu'il n'est pas perçu d'émolument, ni alloué d'indemnité de procédure ;

dit que, conformément aux art. 82 ss de la loi fédérale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 2005 (LTF - RS 173.110), le présent arrêt peut être porté dans les trente jours qui suivent sa notification par-devant le Tribunal fédéral ;

- par la voie du recours en matière de droit public, s'il porte sur les rapports de travail entre les parties et que la valeur litigieuse n'est pas inférieure à CHF 15'000.- ;

- par la voie du recours en matière de droit public, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- et que la contestation porte sur une question juridique de principe ;

- par la voie du recours constitutionnel subsidiaire, aux conditions posées par les art. 113 ss LTF, si la valeur litigieuse est inférieure à CHF 15'000.- ;

le mémoire de recours doit indiquer les conclusions, motifs et moyens de preuve et porter la signature du recourant ou de son mandataire ; il doit être adressé au Tribunal fédéral, Schweizerhofquai 6, 6004 Lucerne, par voie postale ou par voie électronique aux conditions de l'art. 42 LTF. Le présent arrêt et les pièces en possession du recourant, invoquées comme moyens de preuve, doivent être joints à l'envoi ;

communique le présent arrêt à Me Giuseppe Donatiello, avocat de la recourante, ainsi qu'au département de l'instruction publique, de la formation et de la jeunesse.

Siégeant : M. Mascotto, président, Mmes Krauskopf, Payot Zen-Ruffinen, Lauber et Tombesi, juges.

Au nom de la chambre administrative :

la greffière-juriste :

 

 

F. Cichocki

 

 

le président siégeant :

 

 

C. Mascotto

 

Copie conforme de cet arrêt a été communiquée aux parties.

 

Genève, le 

 

 

 

 

 

 

la greffière :